Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 24-10.216
- ECLI:FR:CCASS:2025:CO00357
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle sans renvoi
Audience publique du mercredi 25 juin 2025
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 08 novembre 2023- Président
- M. Vigneau (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
MB
COUR DE CASSATION
______________________
Arrêt du 25 juin 2025
Cassation
partielle sans renvoi rectification d'erreur matérielle de l'arrêt attaqué
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 357 F-D
Pourvoi n° A 24-10.216
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 JUIN 2025
1°/ La société Teleco, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ la société Teleco SpA, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 5] (ra) (Italie),
ont formé le pourvoi n° A 24-10.216 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige les opposant :
1°/ à la société DMS Electronics, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Archibald, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de Mme [N] [Z], prise en qualité de liquidateur de la société DMS Electronics,
3°/ à la société SR Mecatronic S.r.l, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 4] (Italie),
défenderesses à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sabotier, conseiller, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, Lassalle-Byhet, avocat des sociétés Teleco SAS et Teleco SpA, de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société SR Mecatronic S.r.l, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Sabotier, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte aux sociétés Teleco SAS et Teleco SpA (les sociétés Teleco) du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Archibald, en qualité de liquidateur de la société DMS Electronics, et contre la société DMS Electronics.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 novembre 2023), rendu sur renvoi après cassation (Com., 19 octobre 2022, pourvoi n° 21-10.973), la société Teleco SAS est le distributeur exclusif, en France, d'antennes pour véhicules de loisirs conçues, fabriquées et commercialisées par sa société mère, la société Teleco SpA.
3. La société DMS Electronics (la société DMS) est le distributeur exclusif, en France, depuis février 2012, de produits de même nature fabriqués par la société SR Mecatronic (la société Mecatronic).
4. Reprochant aux sociétés Mecatronic et DMS de commercialiser, en France, des antennes similaires aux siennes dans leur architecture ainsi que dans leurs caractéristiques techniques, d'utiliser les termes « Flat Sat » et « Flat Sat Skew », qu'elle emploie, et de diffuser des publicités trompeuses portant atteinte à son image et créant des risques de confusion et d'association, la société Teleco SAS a assigné les sociétés Mecatronic et DMS pour obtenir réparation des actes de concurrence déloyale, de concurrence parasitaire et de publicité trompeuse invoqués. La société Teleco SpA est intervenue volontairement à l'instance.
5. Le 17 décembre 2019, la société DMS a été placée en liquidation judiciaire, la société Archibald étant désignée en qualité de liquidateur en la personne de Mme [Z].
Examen des moyens
Sur le second moyen
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. Les sociétés Teleco font grief à l'arrêt de dire irrecevables leurs demandes qui tendaient à l'infirmation du jugement en ce qu'il les avait déboutées de l'ensemble de leurs demandes, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et de confirmer, dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation, le jugement entrepris en toutes ses dispositions, alors « que la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation, les parties étant remises dans l'état où elles se trouvaient avant la décision censurée et l'affaire étant à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation ; qu'en retenant, pour limiter l'étendue de sa saisine aux demandes indemnitaires et de publications judiciaires fondées sur une pratique commerciale déloyale et trompeuse en 2016, tenant à la référence au tuner DVB-S2 Full HD, que les autres allégations, divisibles et non soumises à la Cour de cassation qui a d'ailleurs cassé l'arrêt exclusivement pour une pratique de 2016 envisagée au singulier, ne peuvent plus aujourd'hui être discutées, qu'elles aient été publiées en 2014 ou en 2016", dès lors que la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire", cependant que l'arrêt de cassation partielle a censuré l'arrêt du 4 novembre 2020 en ce que, confirmant le jugement, il rejette la demande en réparation fondée sur une pratique commerciale trompeuse au titre de l'année 2016", de sorte qu'elle était saisie de toutes les allégations tenues en 2016 susceptibles de caractériser une pratique commerciale trompeuse des sociétés défenderesses, et non seulement de la référence au tuner DVB-S2 Full HD, la cour d'appel a violé les articles 623, 624, 625 et 638 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. Il résulte de l'article 624 du code de procédure civile que la portée d'un arrêt de cassation est déterminée par son dispositif qui peut, même si la décision attaquée ne comporte pas de chef spécifique à la décision annulée, limiter sa censure à celle-ci. Il s'ensuit que la juridiction de renvoi n'est investie que de cette disposition annulée, dans tous ses éléments de fait et de droit.
9. Il n'est pas interdit à une cour d'appel d'interpréter la décision de la Cour de cassation sur les suites de laquelle elle est appelée à se prononcer.
10. L'arrêt constate que le dispositif de l'arrêt de la chambre commerciale du 19 octobre 2022 ne casse le premier arrêt d'appel qu'en ce que, « confirmant le jugement, il rejette la demande en réparation fondée sur une pratique commerciale trompeuse au titre de l'année 2016 » et relève que l'emploi du singulier confirme que la cassation ne porte que sur les allégations reprochées à la société Mecatronic portant sur la promotion commerciale, en 2016, du tuner DVB-S2 Full HD.
11. De ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit que les demandes des sociétés Teleco formées au titre de la concurrence déloyale n'étaient recevables qu'en tant qu'elles portaient sur ladite promotion commerciale.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur ce moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
13. Les sociétés Teleco font grief à l'arrêt de dire irrecevables leurs demandes qui tendaient à l'infirmation du jugement en ce qu'il les avait déboutées de l'ensemble de leurs demandes, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et de confirmer, dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation, le jugement entrepris en toutes ses dispositions, alors « que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en indiquant, dans le dispositif de son arrêt, qu'elle n'est saisie que des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel", après avoir pourtant retenu, dans ses motifs, qu'elle était saisie des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance, en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée", la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, en violation de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
14. La contradiction entre les motifs et le dispositif de l'arrêt, invoquée par le moyen, procède d'une erreur purement matérielle dont la rectification sera ci-après ordonnée.
15. Le moyen ne peut donc être accueilli.
Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
16. Les sociétés Teleco font le même grief à l'arrêt, alors « qu'en retenant, pour limiter l'étendue de sa saisine aux prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel, hors l'inclusion des frais d'expertise et de traduction, que, alors que la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, chef de dispositif qui, seul, intègre celles relatives à ces frais spécifiques, le pourvoi ne les critiquait pas devant la Cour de cassation, à qui ils n'étaient de ce fait pas soumis, n'a pu prononcer sur ce point de cassation" et que sa référence aux dépens et aux frais irrépétibles ne concerne dans cette logique que ceux engagés en appel et en première instance, hors cette inclusion", cependant que l'arrêt de cassation partielle a censuré l'arrêt du 4 novembre 2020 en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile", de sorte que la cassation partielle prononcée par l'arrêt de la Cour de cassation du 19 octobre 2022 remettait bien en cause le chef du jugement ayant condamné la SAS Teleco aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise et de traduction", la cour d'appel a violé les articles 623, 624, 625, 638 et 639 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
17. La société Mecatronic conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est nouveau et mélangé de fait et de droit.
18. Cependant, ce moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations de l'arrêt, est de pur droit.
19. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 623, 624, 625, 638 et 639 du code de procédure civile :
20. Selon le deuxième de ces textes, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
21. Selon le cinquième, la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond y compris sur ceux afférents à la décision cassée.
22. Pour dire irrecevables les prétentions des sociétés Teleco au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée, l'arrêt énonce que « la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ». Il ajoute que la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, intégrant ces frais, chef de dispositif que le pourvoi ne critiquait pas et la Cour de cassation, à qui ils n'étaient de ce fait pas soumis, n'a pu prononcer sur ce point de cassation, de sorte qu'il importe peu que les frais de traduction et d'expertise privée, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ne relèvent effectivement pas des dépens, faute d'être des frais afférents à l'instance au sens de l'article 695 du code de procédure civile, mais des frais irrépétibles non visés à l'article 639 du code de procédure civile.
23. En statuant ainsi, alors que le dispositif de l'arrêt du 19 octobre 2022 cassait l'arrêt du 4 novembre 2020 « en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile » et que, saisie sur renvoi après cassation, il lui appartenait de se prononcer sur l'ensemble des frais et dépens exposés devant les juges du fond, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
24. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
25. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
26. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 24, 25 et 27 du présent arrêt qu'il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a inclus dans les dépens mis à la charge de la société Teleco SAS les frais d'expertise privée et de traduction avancés par la société Mecatronic, et de condamner la société Teleco SAS à payer à la société Mecatronic la somme de 44 108 euros correspondant aux frais d'expertise privée et de traduction, à titre d'indemnité de procédure complémentaire en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Réparant l'erreur matérielle affectant l'arrêt attaqué, remplace dans son dispositif :
« Déclare irrecevables comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée les demandes des sociétés Teleco et Teleco SpA qui tendent à l'infirmation du jugement en ce qu'il les a déboutées de l'ensemble de leurs demandes ainsi qu'au prononcé d'une injonction de cesser l'emploi de diverses allégations tenues en 2014 et en 2016, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et dit que la cour d'appel de renvoi n'est saisie que des demandes indemnitaires et de publications judiciaires fondées sur une pratique commerciale déloyale et trompeuse en 2016 tenant à la référence au tuner DVB-S2 Full HD et des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel ; »
par
« Déclare irrecevables comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée les demandes des sociétés Teleco et Teleco SpA qui tendent à l'infirmation du jugement en ce qu'il les a déboutées de l'ensemble de leurs demandes ainsi qu'au prononcé d'une injonction de cesser l'emploi de diverses allégations tenues en 2014 et en 2016, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et dit que la cour d'appel de renvoi n'est saisie que des demandes indemnitaires et de publications judiciaires fondées sur une pratique commerciale déloyale et trompeuse en 2016 tenant à la référence au tuner DVB-S2 Full HD et des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée ; »
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la cour de renvoi n'est saisie que des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée, l'arrêt rendu le 8 novembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi de ce chef ;
Infirme le jugement du 24 janvier 2017 en ce qu'il a inclus dans les dépens mis à la charge de la société Teleco SAS les frais d'expertise privée et de traduction avancés par la société SR Mecatronic S.r.l et condamne la société Teleco SAS à payer à la société SR Mecatronic S.r.l la somme de 44 108 euros correspondant aux frais d'expertise privée et de traduction, à titre d'indemnité de procédure complémentaire en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
En application de l'article 629 du code de procédure civile, condamne la société Teleco SAS aux dépens, y compris ceux exposés devant la cour d'appel de renvoi ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé publiquement le vingt-cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:CO00357
COMM.
MB
COUR DE CASSATION
______________________
Arrêt du 25 juin 2025
Cassation
partielle sans renvoi rectification d'erreur matérielle de l'arrêt attaqué
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 357 F-D
Pourvoi n° A 24-10.216
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 JUIN 2025
1°/ La société Teleco, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ la société Teleco SpA, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 5] (ra) (Italie),
ont formé le pourvoi n° A 24-10.216 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige les opposant :
1°/ à la société DMS Electronics, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Archibald, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de Mme [N] [Z], prise en qualité de liquidateur de la société DMS Electronics,
3°/ à la société SR Mecatronic S.r.l, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 4] (Italie),
défenderesses à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sabotier, conseiller, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, Lassalle-Byhet, avocat des sociétés Teleco SAS et Teleco SpA, de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société SR Mecatronic S.r.l, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Sabotier, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte aux sociétés Teleco SAS et Teleco SpA (les sociétés Teleco) du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Archibald, en qualité de liquidateur de la société DMS Electronics, et contre la société DMS Electronics.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 novembre 2023), rendu sur renvoi après cassation (Com., 19 octobre 2022, pourvoi n° 21-10.973), la société Teleco SAS est le distributeur exclusif, en France, d'antennes pour véhicules de loisirs conçues, fabriquées et commercialisées par sa société mère, la société Teleco SpA.
3. La société DMS Electronics (la société DMS) est le distributeur exclusif, en France, depuis février 2012, de produits de même nature fabriqués par la société SR Mecatronic (la société Mecatronic).
4. Reprochant aux sociétés Mecatronic et DMS de commercialiser, en France, des antennes similaires aux siennes dans leur architecture ainsi que dans leurs caractéristiques techniques, d'utiliser les termes « Flat Sat » et « Flat Sat Skew », qu'elle emploie, et de diffuser des publicités trompeuses portant atteinte à son image et créant des risques de confusion et d'association, la société Teleco SAS a assigné les sociétés Mecatronic et DMS pour obtenir réparation des actes de concurrence déloyale, de concurrence parasitaire et de publicité trompeuse invoqués. La société Teleco SpA est intervenue volontairement à l'instance.
5. Le 17 décembre 2019, la société DMS a été placée en liquidation judiciaire, la société Archibald étant désignée en qualité de liquidateur en la personne de Mme [Z].
Examen des moyens
Sur le second moyen
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. Les sociétés Teleco font grief à l'arrêt de dire irrecevables leurs demandes qui tendaient à l'infirmation du jugement en ce qu'il les avait déboutées de l'ensemble de leurs demandes, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et de confirmer, dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation, le jugement entrepris en toutes ses dispositions, alors « que la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation, les parties étant remises dans l'état où elles se trouvaient avant la décision censurée et l'affaire étant à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation ; qu'en retenant, pour limiter l'étendue de sa saisine aux demandes indemnitaires et de publications judiciaires fondées sur une pratique commerciale déloyale et trompeuse en 2016, tenant à la référence au tuner DVB-S2 Full HD, que les autres allégations, divisibles et non soumises à la Cour de cassation qui a d'ailleurs cassé l'arrêt exclusivement pour une pratique de 2016 envisagée au singulier, ne peuvent plus aujourd'hui être discutées, qu'elles aient été publiées en 2014 ou en 2016", dès lors que la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire", cependant que l'arrêt de cassation partielle a censuré l'arrêt du 4 novembre 2020 en ce que, confirmant le jugement, il rejette la demande en réparation fondée sur une pratique commerciale trompeuse au titre de l'année 2016", de sorte qu'elle était saisie de toutes les allégations tenues en 2016 susceptibles de caractériser une pratique commerciale trompeuse des sociétés défenderesses, et non seulement de la référence au tuner DVB-S2 Full HD, la cour d'appel a violé les articles 623, 624, 625 et 638 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. Il résulte de l'article 624 du code de procédure civile que la portée d'un arrêt de cassation est déterminée par son dispositif qui peut, même si la décision attaquée ne comporte pas de chef spécifique à la décision annulée, limiter sa censure à celle-ci. Il s'ensuit que la juridiction de renvoi n'est investie que de cette disposition annulée, dans tous ses éléments de fait et de droit.
9. Il n'est pas interdit à une cour d'appel d'interpréter la décision de la Cour de cassation sur les suites de laquelle elle est appelée à se prononcer.
10. L'arrêt constate que le dispositif de l'arrêt de la chambre commerciale du 19 octobre 2022 ne casse le premier arrêt d'appel qu'en ce que, « confirmant le jugement, il rejette la demande en réparation fondée sur une pratique commerciale trompeuse au titre de l'année 2016 » et relève que l'emploi du singulier confirme que la cassation ne porte que sur les allégations reprochées à la société Mecatronic portant sur la promotion commerciale, en 2016, du tuner DVB-S2 Full HD.
11. De ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit que les demandes des sociétés Teleco formées au titre de la concurrence déloyale n'étaient recevables qu'en tant qu'elles portaient sur ladite promotion commerciale.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur ce moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
13. Les sociétés Teleco font grief à l'arrêt de dire irrecevables leurs demandes qui tendaient à l'infirmation du jugement en ce qu'il les avait déboutées de l'ensemble de leurs demandes, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et de confirmer, dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation, le jugement entrepris en toutes ses dispositions, alors « que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en indiquant, dans le dispositif de son arrêt, qu'elle n'est saisie que des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel", après avoir pourtant retenu, dans ses motifs, qu'elle était saisie des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance, en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée", la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, en violation de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
14. La contradiction entre les motifs et le dispositif de l'arrêt, invoquée par le moyen, procède d'une erreur purement matérielle dont la rectification sera ci-après ordonnée.
15. Le moyen ne peut donc être accueilli.
Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
16. Les sociétés Teleco font le même grief à l'arrêt, alors « qu'en retenant, pour limiter l'étendue de sa saisine aux prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel, hors l'inclusion des frais d'expertise et de traduction, que, alors que la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, chef de dispositif qui, seul, intègre celles relatives à ces frais spécifiques, le pourvoi ne les critiquait pas devant la Cour de cassation, à qui ils n'étaient de ce fait pas soumis, n'a pu prononcer sur ce point de cassation" et que sa référence aux dépens et aux frais irrépétibles ne concerne dans cette logique que ceux engagés en appel et en première instance, hors cette inclusion", cependant que l'arrêt de cassation partielle a censuré l'arrêt du 4 novembre 2020 en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile", de sorte que la cassation partielle prononcée par l'arrêt de la Cour de cassation du 19 octobre 2022 remettait bien en cause le chef du jugement ayant condamné la SAS Teleco aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise et de traduction", la cour d'appel a violé les articles 623, 624, 625, 638 et 639 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
17. La société Mecatronic conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est nouveau et mélangé de fait et de droit.
18. Cependant, ce moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations de l'arrêt, est de pur droit.
19. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 623, 624, 625, 638 et 639 du code de procédure civile :
20. Selon le deuxième de ces textes, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
21. Selon le cinquième, la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond y compris sur ceux afférents à la décision cassée.
22. Pour dire irrecevables les prétentions des sociétés Teleco au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée, l'arrêt énonce que « la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ». Il ajoute que la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, intégrant ces frais, chef de dispositif que le pourvoi ne critiquait pas et la Cour de cassation, à qui ils n'étaient de ce fait pas soumis, n'a pu prononcer sur ce point de cassation, de sorte qu'il importe peu que les frais de traduction et d'expertise privée, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ne relèvent effectivement pas des dépens, faute d'être des frais afférents à l'instance au sens de l'article 695 du code de procédure civile, mais des frais irrépétibles non visés à l'article 639 du code de procédure civile.
23. En statuant ainsi, alors que le dispositif de l'arrêt du 19 octobre 2022 cassait l'arrêt du 4 novembre 2020 « en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile » et que, saisie sur renvoi après cassation, il lui appartenait de se prononcer sur l'ensemble des frais et dépens exposés devant les juges du fond, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
24. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
25. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
26. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 24, 25 et 27 du présent arrêt qu'il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a inclus dans les dépens mis à la charge de la société Teleco SAS les frais d'expertise privée et de traduction avancés par la société Mecatronic, et de condamner la société Teleco SAS à payer à la société Mecatronic la somme de 44 108 euros correspondant aux frais d'expertise privée et de traduction, à titre d'indemnité de procédure complémentaire en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Réparant l'erreur matérielle affectant l'arrêt attaqué, remplace dans son dispositif :
« Déclare irrecevables comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée les demandes des sociétés Teleco et Teleco SpA qui tendent à l'infirmation du jugement en ce qu'il les a déboutées de l'ensemble de leurs demandes ainsi qu'au prononcé d'une injonction de cesser l'emploi de diverses allégations tenues en 2014 et en 2016, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et dit que la cour d'appel de renvoi n'est saisie que des demandes indemnitaires et de publications judiciaires fondées sur une pratique commerciale déloyale et trompeuse en 2016 tenant à la référence au tuner DVB-S2 Full HD et des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel ; »
par
« Déclare irrecevables comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée les demandes des sociétés Teleco et Teleco SpA qui tendent à l'infirmation du jugement en ce qu'il les a déboutées de l'ensemble de leurs demandes ainsi qu'au prononcé d'une injonction de cesser l'emploi de diverses allégations tenues en 2014 et en 2016, à l'exception de celle portant sur l'utilisation du tuner DVB-S2 Full HD publiée en 2016, et dit que la cour d'appel de renvoi n'est saisie que des demandes indemnitaires et de publications judiciaires fondées sur une pratique commerciale déloyale et trompeuse en 2016 tenant à la référence au tuner DVB-S2 Full HD et des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée ; »
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la cour de renvoi n'est saisie que des prétentions au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel et de première instance en tant qu'ils ne portent pas sur les frais de traduction et d'expertise privée, l'arrêt rendu le 8 novembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi de ce chef ;
Infirme le jugement du 24 janvier 2017 en ce qu'il a inclus dans les dépens mis à la charge de la société Teleco SAS les frais d'expertise privée et de traduction avancés par la société SR Mecatronic S.r.l et condamne la société Teleco SAS à payer à la société SR Mecatronic S.r.l la somme de 44 108 euros correspondant aux frais d'expertise privée et de traduction, à titre d'indemnité de procédure complémentaire en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
En application de l'article 629 du code de procédure civile, condamne la société Teleco SAS aux dépens, y compris ceux exposés devant la cour d'appel de renvoi ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé publiquement le vingt-cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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