Affichage des articles dont le libellé est droit au logement. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est droit au logement. Afficher tous les articles

mercredi 19 avril 2023

QPC et droit au logement

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

COUR DE CASSATION



SG


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 30 mars 2023




RENVOI


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 330 FS-B

Pourvoi n° K 22-21.763







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 MARS 2023

Par mémoire spécial présenté le 30 janvier 2023, M. [U] [T] [R] [W] et Mme [J] [D] [A] [E], épouse [T] [R] [W], domiciliés [Adresse 2], ont formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° K 22-21.763 qu'ils ont formé contre l'arrêt rendu le 21 juin 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 4), dans une instance les opposant :

1°/ à Mme [O] [H],

2°/ à M. [X] [M] [N] [K],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grall, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme [T] [R] [W], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [H] et de M. [M] [N] [K], et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grall, conseiller rapporteur, Mme Andrich, faisant fonction de doyen, MM. Echappé, David, Jobert, Mme Grandjean, M. Bosse-Platière, conseillers, M. Jariel, Mmes Schmitt, Aldigé, M. Baraké, Mmes Gallet, Davoine, M. Pons, conseillers référendaires, M. Sturlèse, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,

La troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Propriétaires d'un logement donné à bail en 2012 à M. [M] [N] [K] et Mme [H] (les locataires), M. et Mme [T] [R] [W] (les bailleurs) leur ont délivré, le 20 décembre 2017, un congé aux fins de reprise pour habiter, sans leur proposer un logement correspondant à leurs besoins et à leurs possibilités, dans les limites géographiques déterminées à l'article 13 bis de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948.

2. Les bailleurs ont assigné les locataires en validation de ce congé et en expulsion.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

3. A l'occasion du pourvoi qu'ils ont formé contre l'arrêt rendu le 21 juin 2022 par la cour d'appel de Paris, les bailleurs ont, par mémoire distinct et motivé, demandé le renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité suivante :

« L'article 15, III, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, en ce qu'il impose au
bailleur personne physique qui justifie d'un motif légitime de reprendre son bien pour l'habiter, de proposer à son locataire âgé de plus de 65 ans et ne disposant que de faibles revenus, un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités dans des limites géographiques déterminées, porte-t-il au droit de propriété consacré à l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi, compte tenu de l'impossibilité pour le bailleur, lorsque le bail est ancien et que le logement se situe dans une zone où les loyers sont excessivement élevés, de proposer un tel logement, faute qu'il s'en trouve sur le marché locatif privé ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

4. La disposition contestée est applicable au litige qui porte sur la validité d'un congé.

5. En ce qu'elle détermine les limites géographiques de l'offre de relogement, elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

6. La question présente un caractère sérieux.

7. En premier lieu, la disposition contestée en ce qu'elle impose au bailleur, qui entend s'opposer au renouvellement du bail, en délivrant congé à un locataire âgé de plus de soixante-cinq ans et dont les ressources annuelles sont inférieures à un plafond, de lui proposer un relogement correspondant à ses besoins et à ses possibilités, dans un périmètre géographique strictement défini, porte atteinte aux conditions d'exercice du droit de propriété du bailleur.

8. En second lieu, cette atteinte pourrait être considérée comme disproportionnée, dès lors que l'état du marché locatif dans le secteur concerné est susceptible de rendre impossible la soumission par le bailleur, personne privée, d'une offre de relogement correspondant aux possibilités de locataires dont les ressources sont inférieures au plafond pour l'attribution de logements locatifs conventionnés.

9. En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

mardi 4 février 2020

Réhabilitation des friches urbaines en logements

15ème législature

Question N° 846
de M. Jean-Luc Lagleize (Mouvement Démocrate et apparentés - Haute-Garonne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Ville et logement
 
Rubrique > aménagement du territoire
Titre > Réhabilitation des friches urbaines en logements
Question publiée au JO le : 03/12/2019
Réponse publiée au JO le : 11/12/2019 page : 11924
Date de changement d'attribution: 10/12/2019

Texte de la question

M. Jean-Luc Lagleize attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la réhabilitation des friches. M. le député a remis le 6 novembre 2019 un rapport au Premier ministre portant sur la maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction. Un des grands objectifs de ce rapport est d'optimiser le foncier disponible, notamment en requalifiant et en valorisant les friches en zones tendues. Parmi les préconisations figurent le recensement des friches et l'accélération de leur dépollution. M. le député sait que cet enjeu est une priorité du Gouvernement, qui l'a mis à l'ordre du jour du troisième Conseil de défense écologique qui s'est réuni le 7 novembre 2019. Qu'elles soient industrielles, commerciales, administratives, urbaines ou militaires, la réhabilitation de ces friches est un combat fondamental, notamment pour lutter contre l'artificialisation des sols. Car optimiser des friches, c'est réutiliser du foncier déjà artificialisé plutôt que d'utiliser de nouvelles terres. C'est créer des logements et de l'activité économique sans utiliser d'espaces nouveaux. Mme la ministre a d'ailleurs annoncé à la sortie de ce Conseil de défense écologique un projet concret de réhabilitation de la friche de l'ex-CEAT Guillaumet et de l'ancienne école d'ingénieur de l'Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace (ISAE) à Toulouse. Le Centre d'essais aéronautiques de Toulouse appartient au ministère des armées depuis 1940 et a conservé une activité dans le domaine de l'aérodynamique jusqu'en 2001, avant de se délocaliser vers des installations plus modernes à l'est de Toulouse. Ce site s'étend sur un espace total de plus de 16 hectares, à proximité de la rocade, à un kilomètre de la gare de Toulouse-Matabiau et il est desservi par deux stations de métro : Roseraie et Jolimont. Depuis près de vingt ans, les collectivités territoriales souhaitent valoriser cette manne foncière considérable pour y réaliser un projet d'aménagement urbain conjuguant logements, commerces, bureaux et équipements de quartier. Pourtant, plus de 18 ans après la cessation des activités militaires, et malgré de nombreuses délibérations de Toulouse Métropole, de réunions, d'ateliers publics et de phases de concertation, aucun logement n'a encore vu le jour. Dans ce contexte, il l'interroge sur les intentions du Gouvernement pour faire aboutir ce projet toulousain dans les meilleurs délais, et plus généralement pour prendre à bras-le-corps l'enjeu de la transformation des friches urbaines en logements.

Texte de la réponse

RÉHABILITATION DES FRICHES URBAINES EN LOGEMENTS

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour exposer sa question, n°  846, relative à la réhabilitation des friches urbaines en logements.

M. Jean-Luc Lagleize. Monsieur le ministre, j'ai remis le mois dernier un rapport portant sur la maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction. Un des grands objectifs de ce rapport est d'optimiser le foncier disponible, notamment en requalifiant et en valorisant les friches en zones tendues.

Parmi mes préconisations figurent le recensement des friches et l'accélération de leur dépollution. Je sais que cet enjeu est une priorité du Gouvernement, qui l'a mis à l'ordre du jour du troisième conseil de défense écologique, lequel s'est réuni le 7 novembre dernier.

La réhabilitation des friches, qu'elles soient industrielles, commerciales, administratives, urbaines ou militaires, est un combat fondamental, notamment pour lutter contre l'artificialisation des sols, car optimiser des friches, c'est réutiliser du foncier déjà artificialisé plutôt que d'utiliser de nouvelles terres, et c'est créer des logements et de l'activité économique sans utiliser d'espaces nouveaux.

À la sortie du conseil de défense écologique, Mme Borne a annoncé un projet concret de réhabilitation de la friche Guillaumet – ex-CEAT, centre d'essais aéronautiques de Toulouse – et de l'ancienne école d'ingénieurs de l'ISAE, l'institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace, à Toulouse.

Le CEAT appartient au ministère des armées depuis 1940 et il a conservé une activité dans le domaine de l'aérodynamique jusqu'en 2001, avant de se délocaliser vers des installations plus modernes à l'est de Toulouse. Ce site s'étend sur un espace total de plus de 16 hectares, à proximité du périphérique, à 1 kilomètre de la gare de Toulouse-Matabiau et il est desservi par deux stations de métro : Roseraie et Jolimont.

Depuis près de vingt ans, les collectivités territoriales souhaitent valoriser ce foncier considérable pour y réaliser un projet d'aménagement urbain conjuguant logements, commerces, bureaux et équipements de quartier.

Pourtant, plus de dix-huit ans après la cessation des activités militaires, et malgré de nombreuses délibérations de Toulouse Métropole, de réunions, d'ateliers publics et de phases de concertation, aucun logement n'a encore vu le jour.

Dans ce contexte, je souhaiterais connaître les intentions du Gouvernement pour faire aboutir ce projet toulousain dans les meilleurs délais, et plus généralement pour prendre à bras-le-corps l'enjeu majeur de la transformation des friches urbaines en logements.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre chargé de la ville et du logement.

M. Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement. Monsieur le député, vous avez mille fois raison de mettre en avant la question des friches, dont nous en avons parlé plusieurs fois, durant ces derniers mois. Ce n'est même pas le ministre du logement qui parle, mais l'ingénieur des eaux et forêts. On sait aujourd'hui que les friches sont un vecteur d'artificialisation des sols et que leur responsabilité est massive dans les drames que notre pays a connus, notamment ces dernières semaines, quand des écoulements d'eau ont provoqué des inondations.

Il faut absolument changer, et même changer de paradigme sur certaines questions d'aménagement du territoire. Au minimum, nous avons la responsabilité d'éviter que des friches qui, aujourd'hui, ne servent plus, n'aient un effet dévastateur sur le reste du territoire, du fait d'un écoulement des eaux sur des sols devenus imperméables.

J'ajoute que ces friches sont porteuses de désagréments écologiques massifs lorsqu'elles sont polluées. Nous avons évoqué ensemble, il y a quelques jours, ce problème que vous connaissez fort bien.

Enfin, elles constituent un défi en termes d'aménagement. J'ai demandé aux établissements publics d'aménagement de me présenter des propositions, pour savoir comment nous pourrions utiliser ces friches ou les parkings qui leur sont associés afin de transformer ces zones désertiques, aux effets néfastes bien connus, en zones utiles.

Je vous réponds donc mille fois oui, et soutiens mille fois l'action que vous menez, avec vos collègues, sur ce sujet. Je vous remercie enfin pour la qualité de votre rapport et pour la proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l’offre de logements accessibles aux Français, qui a été adoptée à une immense majorité, il y a quelques jours, dans cet hémicycle.

En second lieu, vous avez évoqué plus particulièrement le site de Toulouse, qui a fait l'objet d'une annonce, de la part de ma collègue Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire, à l'issue du dernier conseil de défense écologique, pendant lequel le Président de la République lui-même a souhaité que la question des friches soit mise à l'ordre du jour.

Concernant l'ancien site militaire de Toulouse, je puis confirmer plusieurs points.

Tout d'abord, l'État cédera avant la fin de l'année le site de l'ancien centre d'essais aéronautiques à la métropole de Toulouse, qui a décidé d'y aménager un nouveau quartier conjuguant sur plus de 13 hectares logements, commerces, bureaux et équipements dans la nouvelle cité administrative de l'État.

D'autre part, comme celui-ci s'y était engagé en 2014, puis en 2017, en raison de la construction de logements sociaux dans ce programme mixte, la vente du terrain à la métropole bénéficiera d'une décote de quelque 12 millions, soit 45 % des 27 millions de la valeur vénale domaniale estimée par les services locaux du domaine. Vous le voyez : je suis capable de vous citer les chiffres, signe que le processus est engagé.

Le soutien de l'État au projet, en particulier celui du ministère des armées, qui supporte la décote, et celui de la politique d'aménagement de l'ancienne friche, permettra d'accompagner la métropole et d'implanter, côté État, la cité administrative que j'ai évoquée.

Enfin, dans l'intervalle – je parle sous votre contrôle –, la métropole a mis au point le projet avec l'aménageur, qu'elle a sélectionné et qui conduit actuellement les concertations pour concrétiser le plus rapidement possible le transfert de propriété de l'État à la collectivité.

Voilà ce que je tenais à vous dire sur ce sujet.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Lagleize.

M. Jean-Luc Lagleize. Effectivement, si l'échéance du 31 décembre était respectée, ce serait une très bonne nouvelle pour Toulouse et pour le quartier concerné. Ces quelque 1 200 logements en centre-ville sont attendus. Ils constitueraient une vraie manne, et apporteraient une bouffée d'air frais, dans un contexte d'inflation galopante des prix de l'immobilier toulousain.

mardi 28 janvier 2020

PROPOSITION DE LOI tendant à rendre effectif le droit au logement

N° 2601
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUINZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 janvier 2020.
PROPOSITION DE LOI
tendant à rendre effectif le droit au logement,
(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Jean-Luc MÉLENCHON, Éric COQUEREL, Clémentine AUTAIN, Ugo BERNALICIS, Alexis CORBIÈRE, Caroline FIAT, Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Danièle OBONO, Mathilde PANOT, Loïc PRUD’HOMME, Adrien QUATENNENS, Jean-Hugues RATENON, Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, François RUFFIN, Bénédicte TAURINE,
Député.es.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le droit d’avoir un logement de qualité est constitutif de la dignité de la personne humaine. Il conditionne l’accès à d’autres droits fondamentaux comme le droit au travail, à la santé ou à l’éducation. Il est fondamental puisque sans toit sur la tête, il est impossible de construire une existence stable et épanouie, de fonder une famille, de trouver un emploi ou de se consacrer à son éducation ou à celle de ses enfants. La déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 proclame ce droit à son article 25. Le préambule de la constitution de 1946, intégré à notre bloc constitutionnel stipule quant à lui que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à son développement. Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». Sur la base de ce texte, le Conseil constitutionnel a considéré dans sa décision du 19 janvier 1995 que la possibilité de disposer d’un logement décent était un objectif de valeur constitutionnelle. Enfin, la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable a institué que « le droit à un logement décent et indépendant est garanti par l’État à toute personne qui n’est pas en mesure d’y accéder par ses propres moyens ou de s’y maintenir ».
Pourtant, aujourd’hui encore, la République est encore largement défaillante pour rendre effectif ce droit maintes fois proclamé. De nombreuses personnes vivent l’enfer d’une vie sans logement, une vie à la rue. L’Insee n’a pas comptabilisé le nombre de sans-domicile fixe depuis 2012. Il y a sept ans, donc, ils étaient 143 000. Ce chiffre était en augmentation de 50 % depuis 2001. Depuis, il n’y a plus de statistique officielle mais l’augmentation de la population de sans-abris est une certitude. Les associations de l’hébergement et de la solidarité estiment qu’il s’agit maintenant de 200 000 personnes. Une étude réalisée à partir des données du centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès évalue à 2 000 le nombre de personnes qui meurent chaque année dans la rue. Mais il serait en réalité plus exact de dire qu’elles meurent de la rue. Le 20 novembre 2019, une dizaine d’associations lançaient une alerte sur les enfants qui dorment à la rue. À Paris, chaque nuit, le 115 est incapable de fournir un hébergement à au moins 700 enfants. 700 mineurs qui dorment dans les rues, les gares, les parcs ou sous les ponts de la capitale. En 2019, 8 sont morts d’après le décompte du collectif des morts de la rue. Parmi eux, il y avait un bébé d’un mois, décédé à Saint-Denis le 25 mars 2019 et un nouveau-né, décédé le 4 novembre 2019.
Au-delà de ces situations où la vie est à chaque instant engagée, il y a bien d’autres formes de privation du droit au logement. Par exemple, le phénomène du surpeuplement des logements. D’après les normes de l’Insee d’occupation normale d’un logement, 7,6 millions de personnes sont dans cette situation. 936 000 sont même en surpeuplement accentué, ce qui concrètement signifie par exemple cinq personnes vivant dans un appartement de 30 m2. Le mal-logement comprend aussi la crise de de l’habitat indigne et insalubre. Le 5 novembre 2018, deux immeubles se sont effondrés rue d’Aubagne, dans le centre-ville de Marseille. Huit personnes sont mortes dans cet accident causé par la vétusté du bâti. Ce drame a permis de se rendre compte de l’ampleur du problème dans la cité phocéenne : selon la Fondation Abbé Pierre, ce sont 100 000 marseillais qui vivent dans des logements indignes ou insalubres. Dans les semaines qui ont suivies l’effondrement de la rue d’Aubagne, près de 3 000 personnes ont été évacuées de leur logement dans cette ville parce que leur état représentait une menace vitale. Mais il ne faut pas croire que les conditions indignes de logement se limitent à la deuxième ville de France. Le phénomène est massif et répandu sur tout le territoire, comme le montrent par exemple plusieurs accidents survenus en Seine-Saint-Denis. Toujours selon la Fondation Abbé Pierre, plus d’un million de personnes vivent dans des logements de très mauvaise qualité.
Toutes ces mauvaises conditions d’habitat ont des conséquences lourdes sur tous les aspects de la vie des personnes. Vivre dans un mauvais logement rend malade. Une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques a montré que les individus qui vivent dans un logement insalubre ou trop petit se déclarent en mauvaise santé 40 % plus que la moyenne. L’humidité et la mauvaise isolation thermique augmentent considérablement le risque de pathologies respiratoire et dermatologiques. Des conditions indécentes de logement engendrent aussi des troubles du sommeil. Cela affecte la santé mentale en favorisant le stress, la nervosité et l’angoisse. Pour les jeunes enfants, le manque de sommeil et d’espace ont des conséquences sur le développement nerveux et de la mémoire. Lorsqu’ils grandissent, leur parcours scolaire est plus difficile que pour les autres. Comment réviser un examen lorsqu’on partage une chambre à trois, quatre ou cinq ? Ou bien que l’on grelotte de froid chez soi ?
La crise sociale du logement est causée par l’augmentation de la pauvreté et de la précarité, la progression des logiques de spéculation et finalement l’écart croissant entre les revenus des ménages et les prix. Dans les grandes agglomérations, les prix d’acquisition et les loyers ont flambé sans aucun rapport ni avec leur valeur réelle ni avec les salaires. À Paris, le prix de l’immobilier a augmenté de 350 % depuis 1996. Et au niveau national, cette augmentation dépasse de cinq fois celle des revenus des ménages. La construction de logements sociaux HLM n’a pas été à la hauteur de cette financiarisation du logement. Preuve en est des deux millions de familles aujourd’hui inscrites sur les listes d’attente pour obtenir un HLM. Cette pénurie est d’abord le fait des quartiers et des communes les plus riches. Elles ont organisé leur sécession du reste du pays en refusant de construire des logements pour les classes populaires et les classes moyennes, y compris au mépris de la loi. Sur les 1 152 communes assujetties à des obligations de construction de logements sociaux par la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain du 13 décembre 2000, plus de la moitié ne les respectent pas. La ville de Neuilly-sur-Seine, qui compte 6 % de logements sociaux n’a par exemple jamais respecté ses objectifs de rattrapage pourtant obligatoires. Le manque de logements publics et sociaux a des effets sur les conditions générales de logement. De nombreuses familles repoussées dans le marché privé par le manque de logements sociaux n’ont d’autre choix que d’accepter des appartements indignes du fait du niveau de leurs revenus. Dans son rapport paru le 21 novembre 2019, le haut comité au logement des personnes défavorisées a fait le lien entre l’insuffisance de construction de logements sociaux et la crise humanitaire due aux logements indignes.
Après bientôt trois années de quinquennat du Président Emmanuel Macron, la situation est pire que jamais. Les baisses successives des APL, systématiques depuis 2017, ont plongé dans la pauvreté beaucoup de locataires. Pour la seule année 2018, 400 000 personnes de plus sont passées sous le seuil de pauvreté. 36 000 personnes ont été expulsées de leur logement avec le concours de la force publique ce qui constitue un record absolu. Pour obtenir le chiffre réel des personnes expulsées, il faut multiplier ce chiffre par deux ou trois. La politique sociale du logement a subi une baisse de 17 % de son budget. Les premiers touchés par cette austérité sont les organismes HLM qui ont déjà dû réduire leur production et leurs programmes de rénovation thermique, indispensables pour la baisse des charges des locataires et la lutte contre le changement climatique.
La présente proposition de loi vise à rendre effectif le droit au logement. Elle le fait par les méthodes de la solidarité et de la régulation. Elle tire son inspiration de plusieurs sources. D’abord, le programme de la France insoumise pour l’élection présidentielle de 2017, l’Avenir en Commun. Ensuite, les contributions nombreuses et de très grande qualité au débat public sur le logement des associations de défense des mal-logés ou des locataires comme Droit Au logement (DAL), la Fondation Abbé Pierre, la Confédération nationale du logement (CNL) ou la Confédération syndicale des familles. Enfin, elle reprend plusieurs articles du travail d’un atelier des lois sur le logement indigne tenu à Marseille le 7 février 2019.
Les deux premiers articles visent à tarir le flux des expulsions en créant une véritable sécurité sociale du logement. L’article 1 interdit d’ordonner une expulsion s’il n’y a pas de proposition de relogement acceptable. C’est la conséquence directe de l’application du droit au logement. L’article 2 crée une garantie universelle des loyers. Cette assurance universelle, obligatoire et publique sur les impayés de loyers permettrait d’indemniser les propriétaires lorsque leur locataire se retrouve dans la difficulté. Elle est donc la contrepartie normale de l’interdiction des expulsions. Par ailleurs, son corollaire est la suppression des cautions privées demandées comme condition de location, prévue à l’article 3, ce qui permettrait à beaucoup de gens d’accéder plus facilement à un logement. Selon les estimations du Commissariat Général à l’Environnement et au développement durable (CGEDD), une cotisation comprise entre 2 et 2,5 % des revenus locatifs pourrait permettre de financer cette caisse.
Les articles suivants visent à briser les logiques de spéculation :
L’article 4 met en place un encadrement des loyers. Il aura pour objectif de faire baisser les loyers dans les zones où la crise du logement est la plus aigüe et de les stabiliser à leur niveau actuel dans le reste du pays.
L’article 5 rend obligatoire l’acquisition d’un permis de louer pour les bailleurs, permettant de s’assurer à l’échelle nationale que tout logement mis à la location répond à des critères essentiels (en termes par exemple de surface, de plomb, d’isolation...) afin de lutter contre l’habitat insalubre et les marchands de sommeil.
Les deux articles suivants renforcent les obligations en matière de construction de logements sociaux. L’article 6 rehausse à 30 % au lieu de 25 % l’objectif de la part de logements sociaux dans les communes des grandes agglomérations. L’article 7 rend automatique le transfert de la compétence de délivrance des autorisations d’urbanisme, dont les permis de construire, aux préfets pour les communes qui ne respectent pas la loi.
L’article 8 s’attache à financer les actions de lutte contre l’habitat indigne. Il créé une taxe sur les transactions immobilières supérieures à un million d’euros dont le produit est affecté à l’agence nationale de l’habitat qui finance partout en France des programmes de réhabilitation des logements insalubres. Le barème de cette taxe est progressif. Elle permet de mettre le secteur de l’immobilier de luxe à contribution dans la lutte contre les logements indignes.
L’article 9 précise que la garantie universelle des loyers est financée par une taxe sur les revenus locatifs et que la mise en place des observatoires locaux des loyers par les collectivités territoriales sera financée par une hausse de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Après l’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution, il est inséré un article L. 412-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 412-6-1. - Aucun concours de la force publique ne peut être accordé lorsque la personne qui est visée par la procédure d’expulsion locative mentionnée aux articles L. 412-1 à L. 412-6, L. 611-1, L. 621-4, L. 631-6 et L. 641-8 et qui ne serait pas en mesure d’accéder à un logement par ses propres moyens, ou de s’y maintenir, n’a pas obtenu de proposition de relogement adapté à ses besoins et à ses capacités. »
Article 2
Après l’article 24-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un article 24-1-1 ainsi rédigé :
« Art. 24-1-1. – I. – Il est créé, sous la forme d’un établissement public administratif de l’État, une caisse nationale unique de garantie des loyers. Elle jouit de la personnalité juridique et de l’autonomie financière. Elle est soumise au contrôle des autorités compétentes de l’État.
« Sa mission est d’indemniser les propriétaires dont les locataires sont défaillants pour le paiement de leur loyer, de façon à permettre le maintien dans les lieux.
« Elle concerne les locaux d’habitation loués à usage de résidence principale.
« II. – La caisse nationale unique de garantie des loyers est dotée d’un conseil d’administration. Il est composé de trois collèges représentant respectivement les propriétaires, les locataires et les collectivités publiques.
« Les membres des collèges de propriétaires et de locataires sont élus dans des élections nationales au scrutin de liste proportionnel au plus fort reste à un tour.
« Les modalités de l’élection sont déterminées par un décret en Conseil d’État.
« III. – Les produits affectés à la caisse nationale unique de garantie des loyers sont constitués par une taxe sur les loyers perçus au titre de logements. Son taux, fixe, est proposé chaque année par le conseil d’administration de la caisse nationale unique de garantie des loyers. Pour les personnes physiques, la taxe est établie, contrôlée et recouvrée comme en matière d’impôt sur le revenu et sous les mêmes garanties et sanctions. Le seuil de mise en recouvrement mentionné au 1 bis de l’article 1657 du code général des impôts s’applique à la somme de la taxe et de la cotisation initiale d’impôt sur le revenu. »
Article 3
L’article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :
« Art. 22-1. – Aucun cautionnement ne peut être demandé par un bailleur pour la location d’un local à usage d’habitation, sous peine de nullité. »
Article 4
La loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifiée :
1° L’article 16 est ainsi rédigé :
« Art. 16. – Les observatoires locaux des loyers créés par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové sont généralisés à l’ensemble du territoire. Lorsque dans un territoire, après un délai d’un an après la publication de la loi n°      du       tendant à rendre effectif le droit au logement, aucune collectivité territoriale ou aucun établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière d’habitat n’a manifesté sa volonté de créer un observatoire local des loyers, l’État en prend l’initiative. »
2° L’article 17 est ainsi rédigé :
« Art. 17. – Le représentant de l’État dans le département fixe chaque année, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logement et par secteur géographique.
« Dans les communes où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social, et dont la liste est fixée par décret, le représentant de l’État dans le département fixe chaque année, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logement et par secteur géographique. Le loyer de référence est inférieur au loyer médian observé par les observatoires locaux de l’habitat et au minimum égal à 80% de sa valeur. Le loyer de référence majoré est égal à un montant supérieur de 20 % au loyer de référence. Le loyer de référence minoré est égal au loyer de référence diminué de 30 %.
« Dans les autres communes, l’État fixe, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logement et par secteur géographique. Le loyer de référence est égal au loyer médian observé par les observatoires locaux des loyers. Le loyer de référence majoré est égal à un montant supérieur de 20 % au loyer de référence. Le loyer de référence minoré est égal au loyer de référence diminué de 30 %. Le loyer de base des logements mis en location est fixé librement entre les parties lors de la conclusion du contrat de bail, dans la limite du loyer de référence majoré. »
Article 5
L’article L. 635-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Dans chaque département, le représentant de l’État dans le département détermine les zones les plus touchées par l’habitat dégradé dans lesquelles la mise en place de l’autorisation préalable de mise en location est obligatoire par les communes concernées. »
Article 6 :
Après le II de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – Dans les communes où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social, le nombre total de logements locatifs sociaux doit représenter au moins 30 % des résidences principales. Au moins un quart de ces logements doivent avoir des niveaux de loyer et des plafonds de revenu équivalent aux logements financés avec des prêts locatifs aidés d’intégration. Un décret fixe, au moins au début de chacune des périodes triennales, les communes concernées. »
Article 7
Lorsque dans une commune soumise aux obligations définies aux I et II de l’article L. 302-5 du code de la construction et concernée par un arrêté de carence pour la période triennale précédente, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser en application du I de l’article L. 302-8 du même code n’a pas été atteint ou lorsque la typologie de financement définie au III du même article L. 302-8 n’a pas été respectée, le représentant de l’État dans le département informe le maire de la commune de son intention d’engager la procédure de constat de carence. Il lui précise les faits qui motivent l’engagement de la procédure et l’invite à présenter ses observations dans un délai au plus de deux mois.
Le représentant de l’État dans le département prononce la carence de la commune, par un arrêté motivé pris après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement et, le cas échéant, après avis de la commission mentionnée aux II et III de l’article L. 302-9-1-1 dudit code. Cet arrêté prévoit, pendant toute sa durée d’application, le transfert à l’État des droits de réservation mentionnés à l’article L. 441-1du même code, dont dispose la commune sur des logements sociaux existants ou à livrer, et la suspension ou modification des conventions de réservation passées par elle avec les bailleurs gestionnaires, ainsi que l’obligation pour la commune de communiquer au représentant de l’État dans le département la liste des bailleurs et des logements concernés. Cet arrêté prévoit aussi obligatoirement les secteurs dans lesquels le représentant de l’État dans le département est compétent pour délivrer les autorisations d’utilisation et d’occupation du sol pour des catégories de constructions ou d’aménagements à usage de logements listées dans l’arrêté. Les dispositions prévues dans le cadre d’un arrêté de carence s’appliquent ici de manière identique.
Article 8
I. – À compter du 1er janvier 2021, il est institué une taxe sur l’acquisition à titre onéreux d’un logement dont le prix est supérieur à un million d’euros, ou dont la valeur vénale réelle estimée au moment de la mutation est supérieure à un million d’euros dans le cas de l’acquisition simultanée de plusieurs biens immobiliers.
II. – La taxe est due par l’acquéreur, sauf s’il s’agit :
« 1° De l’État, d’une ou plusieurs collectivités territoriales, d’un ou plusieurs organismes ou établissements publics ;
« 2° D’un organisme d’habitations à loyer modéré, d’une société d’économie mixte gérant des logements sociaux, de l’association mentionnée à l’article L. 313-34 du code de la construction et de l’habitation, d’une société civile immobilière dont cette association détient la majorité des parts pour les logements visés au 4° de l’article L. 351-2 du même code ou d’un organisme bénéficiant de l’agrément relatif à la maîtrise d’ouvrage prévu à l’article L. 365-2 dudit code, dans la mesure où cette acquisition vise à transformer le bien en logements sociaux.
III. – La taxe est liquidée sur le prix de vente ou la valeur vénale réelle du logement. Son taux est fixé comme suit :
« 1° De 1 million d’euros à 2 millions d’euros : 1 % ;
« 2° De 2 millions d’euros à 3 millions d’euros : 2 % ;
« 3° De 3 millions d’euros à 4 millions d’euros : 3 % ;
« 4° De 4 millions d’euros à 5 millions d’euros : 4 % ;
« 5° De 5 millions d’euros à 6 millions d’euros : 5 % ;
« 6° De 6 millions d’euros à 7 millions d’euros : 6 % ;
« 7° De 7 millions d’euros à 8 millions d’euros : 7 % ;
« 8° De 8 millions d’euros à 9 millions d’euros : 8 % ;
« 9° De 9 missions d’euros à 10 millions d’euros : 9 % ;
« 10° Supérieur à 10 millions d’euros : 10 %.
IV. - Le produit de cette taxe est affecté à l’Agence nationale de l’habitat afin de contribuer à la résorption de l’habitat indigne.
Article 9 :
I. – La charge qui pourrait résulter pour l’État et l’établissement public mentionné au I de l’article 24-1-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 de l’application de la présente loi est compensée à due concurrence par la création de la taxe mentionnée au III du même article, dans sa rédaction résultant de la présente loi.
II. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

mardi 21 janvier 2020

Les obstacles à l'habitat partagé

15ème législature

Question N° 909
de M. Dominique Potier (Nouvelle Gauche - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Personnes handicapées
 
Rubrique > personnes handicapées
Titre > Les obstacles à l'habitat partagé également a
Question publiée au JO le : 05/09/2017 page : 4276
Réponse publiée au JO le : 13/02/2018 page : 1202
Date de changement d'attribution: 19/09/2017

Texte de la question

M. Dominique Potier attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les obstacles, financiers et juridiques, au développement de « l'habitat partagé », également appelé habitat inclusif, pour les personnes en situation de handicap. Les besoins de compensation individuelle du handicap (PCH) pour toutes les personnes qui ont une certaine autonomie dans la réalisation d'actes essentiels mais une grande difficulté à gouverner leurs comportements, restent encore sous-évalués. Autres obstacles financiers : l'absence de base juridique pour la dotation forfaitaire complémentaire, la mauvaise prise en compte des coûts d'entretien et de ménage et l'inadaptation du calcul des surfaces éligibles aux prêts aidés et aux exonérations qui y sont liées, les inconvénients du choix de l'habitat partagé sur le domicile de secours. Les freins à l'habitat partagé sont aussi juridiques. Plutôt qu'un mécanisme de « versement à compte de tiers » pour la PCH, il serait plus utile de centraliser les versements de PCH directement à l'intervenant commun qui assure les prestations aux niveaux individuellement requis. Autres pistes de réformes à engager : remédier à la complexité et l'inadaptation de certaines normes liées à l'habitat (normes de construction, classements ERP) et clarifier le statut des personnes qui partagent l'habitat tout en rendant des services assimilables au travail salarié. Afin de favoriser une société plus inclusive et de répondre aux attentes des personnes en situation de handicap et leurs familles, très attachées au projet de « vie partagée », et aux difficultés rencontrées par les associations et les personnels d'accompagnement, il lui demande quelles mesures peuvent être engagées dans les prochains mois pour y remédier.

Texte de la réponse

Un nombre croissant de personnes handicapées et de personnes âgées souhaite choisir son habitat et les personnes avec qui le partager. Elles expriment une forte demande d'aide, d'accompagnement et de services associés au logement, dans un environnement adapté et sécurisé qui garantisse conjointement inclusion sociale et vie autonome au domicile. Pour satisfaire cette demande croissante, une diversité d'offres d'habitat inclusif s'est développée en France dans le cadre de partenariats impliquant des bailleurs sociaux, des collectivités locales, des associations, des mutuelles ou encore des gestionnaires d'établissements et de services médico-sociaux. A distance de l'accueil en établissement spécialisé comme du logement en milieu ordinaire, autonome ou dans la famille, cette offre fait partie des éléments permettant d'élargir la palette des choix offerts aux personnes en perte d'autonomie liée à l'âge ou au handicap. La réponse en termes de logement constitue en outre, avec l'emploi, une réponse essentielle aux besoins d'insertion sociale des personnes. Pour accompagner le développement de cette offre, plusieurs mesures ont d'ores et déjà été prises dans le cadre de la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement, avec la création d'un statut de résidence-service locative, au côté de la rénovation du statut des résidences-services de copropriétaires, et la possibilité offerte au Préfet de département de délivrer une autorisation pour la construction de programmes de logements spécifiquement adaptés aux besoins des personnes âgées et des personnes handicapées. Pour aller plus loin, et constatant l'intérêt de ces dispositifs, le Gouvernement s'est engagé, dans le cadre de la communication relative au "handicap priorité du quinquennat", le 7 juin 2017, à « favoriser le développement des habitats inclusifs en levant les obstacles administratifs ». Il s'agit de développer des formules d'habitat, au cœur de la cité, associant un projet urbain et social et des services partagés adaptés aux besoins des personnes en situation de handicap ou dépendantes. A cette fin, le Gouvernement travaille, en coopération avec le secteur associatif, sur les trois axes suivants : impulser une démarche nationale en faveur de l'habitat inclusif pour les personnes en situation de handicap ; sécuriser économiquement les modèles d'habitat inclusif ; lever les obstacles juridiques au montage de projets d'habitat inclusif. Des premières mesures concrètes d'encouragement ont été mises en place : ainsi, une aide spécifique forfaitaire d'un montant de 60 000 euros sera versée par chaque ARS à une structure d'habitat inclusif identifiée dans sa région. Cette somme est destinée à couvrir les frais liés à l'animation du « vivre ensemble » (coordination, gestion administrative, régulation de la vie collective) et est financée, en 2017, à partir des crédits dédiés aux actions innovantes de la section V de la CNSA. Le suivi de ces projets permettra d'évaluer la pertinence et l'efficacité de ce mode de financement. Par ailleurs, les possibilités d'ores et déjà ouvertes de mise en commun par les personnes handicapées de leur prime compensatoire du handicap (PCH) permettent de financer de façon pragmatique certains accompagnements et services correspondant à leur besoin. L'Observatoire de l'habitat inclusif, qui est le lieu de référence en matière d'habitat inclusif pour les personnes âgées et les personnes handicapées a été installé le 10 mai 2017. Co-présidé par la direction générale de la cohésion sociale, la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, il associe les acteurs associatifs, les acteurs institutionnels et les collectivités locales. A l'occasion de la première journée de l'habitat inclusif, le 30 novembre 2017, l'Observatoire a publié un guide d'aide au montage de projets qui montre la diversité de l'offre, dresse un état des lieux, à droit constant, des dynamiques partenariales utiles pour conduire à bien un projet et identifie les leviers juridiques et les pistes de financement adéquates. En s'appuyant sur les projets en cours, sur leurs réussites comme sur leurs difficultés, une réflexion est actuellement menée sur les freins à lever et les conditions propices au développement de nouveaux projets pour les personnes handicapées comme pour les peronnes âgées. Cette réflexion s'articulera avec la politique de transformation de l'offre médico-sociale engagée par le gouvernement, qui vise à ce que les personnes handicapées puissent être accompagnées selon leurs besoins et leurs attentes, plus seulement dans les établissements médico-sociaux mais également sur leur lieu de vie, quel qu'il soit. Les obstacles juridiques au développement de ces formes d'habitat quis seront éventuellement identifiés pourront être levés en utilisant si nécessaire la voie législative et réglementaire.

Taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux opérations de construction et de réhabilitation de logement social

15ème législature

Question N° 4572
de M. Hervé Saulignac (Nouvelle Gauche - Ardèche )
Question écrite
Ministère interrogé > Cohésion des territoires
Ministère attributaire > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales
 
Rubrique > taxe sur la valeur ajoutée
Titre > Taux de TVA applicable aux opérations de cons
Question publiée au JO le : 16/01/2018 page : 263
Réponse publiée au JO le : 03/12/2019 page : 10528
Date de changement d'attribution: 16/10/2018
Date de signalement: 10/09/2019

Texte de la question

M. Hervé Saulignac alerte M. le ministre de la cohésion des territoires sur le relèvement du taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux opérations de construction et de réhabilitation de logement social. En effet, l'article 12 de la loi de finances modifie le régime du taux de TVA concernant les opérations de logements locatifs sociaux en l'élevant de 5,5 % à 10 % pour les constructions neuves et les réhabilitations achevées à compter du 1er janvier 2018, quand bien même celles-ci auraient été agréées et financées antérieurement à cette date. En prévoyant que cette mesure s'applique aux opérations déjà engagées ou en cours de réalisation, c'est l'équilibre financier qui avait été calculé et obtenu sur la base d'une TVA à 5,5 %, toujours dans une recherche d'économies et sans dépenses superflues, qui est mis en péril. Les agréments ont été accordés par l'État et les prêts ont été octroyés par la caisse des dépôts et consignations à partir de cet équilibre. Pour ces opérations, la hausse de la TVA sera donc portée uniquement par les fonds propres des organismes HLM, dégradant de manière substantielle la situation financière des bailleurs sociaux, alors même que leur capacité financière se trouve largement compromise par d'autres mesures de la loi de finances et tout particulièrement par la réduction de loyer de solidarité (RLS). Au-delà du retard sur la livraison des chantiers ou l'abandon de certaines opérations déjà agréées que peut engendrer un tel changement de règle en cours de route, cette augmentation du taux de TVA applicable aux opérations engagées va conséquemment grever de plusieurs millions d'euros les budgets de chaque organisme et pénaliser tout particulièrement les bailleurs HLM qui se sont engagés dans un programme ambitieux d'investissement. En conséquence, il lui demande quelles sont les mesures envisagées pour remédier à cette situation.

Texte de la réponse

Le Gouvernement a initié une réforme ambitieuse du secteur du logement social afin de le consolider et de le renforcer par des réformes structurelles. Cette réforme est fondée sur quatre piliers : l'évolution du mode de financement du secteur, la réorganisation du tissu des opérateurs de logement social, la mise en place de mesures en faveur de l'accession sociale à la propriété et la définition progressive d'une nouvelle politique des loyers. La loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 prévoyait la mise en place d'une réduction de loyer de solidarité (RLS) couplée à une hausse du taux réduit de la TVA applicable aux opérations de logements locatifs sociaux de 5,5 % à 10 %, suite aux discussions menées et aux accords trouvés entre le Gouvernement et les représentants du secteur. Attentif à la situation financière des organismes et au maintien d'un haut niveau d'investissement, le Gouvernement avait accédé à la demande des bailleurs sociaux d'organiser un travail dit de "clause de revoyure" à partir de la fin d'année 2018. Des discussions ont eu lieu entre l'État et des représentants des bailleurs sociaux à partir de novembre 2018, afin de dresser un bilan de la mise en œuvre de la RLS et stabiliser l'environnement des prochaines années. Un pacte constructif a ainsi été négocié et signé par le Gouvernement le 25 avril 2019 avec les représentants des bailleurs, Action Logement et la Caisse des Dépôts. Ce pacte gagnant-gagnant couvre la période 2020-2022 et comporte trois parties : – des objectifs ambitieux d'investissement, en termes de production neuve (110 000 logements annuels) et de rénovation énergétique (125 000 par an, impliquant au moins un saut d'étiquette, et une accélération du nombre de « passoires thermiques » éradiquées) ; – des mesures financières très substantielles, qui engagent l'État (la cible de réduction de loyer de solidarité a été diminuée et la TVA a été de nouveau réduite sur certains types d'opérations), Action Logement (contribution de 900 M€ au FNAP) et la Caisse des Dépôts (CDC). – des outils de contrôle et de suivi des engagements. Ainsi, l'État s'est engagé à une stabilisation de la RLS à 1,3 Md€, au lieu des 1,5 Md€ inscrits dans la trajectoire des finances publiques à compter de 2020, un retour de la TVA à 5,5% pour les prêt locatif aidé d'intégration (PLAI), les acquisitions améliorations de prêt locatif à usage social (PLUS) et les opérations menées dans le cadre du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) ainsi que, par ailleurs, à des mesures favorables à l'accompagnement social. Le projet de loi de finances 2020 présenté par le Gouvernement intégre ces mesures et en particulier les mesures de réduction de TVA à 5,5 % pour les bailleurs sociaux. Pendant cette période de réforme visant à consolider le modèle du logement social français au profit de l'ensemble de nos concitoyens, l'État se tient aux côtés des organismes de logement social, aussi bien via le dispositif de péréquation créé au sein de la Caisse de garantie du logement locatif social pour aider les organismes les plus fragiles et faciliter la restructuration du secteur, qu'à travers les discussions qui seront menées au niveau local par les préfets de région et de départements, pour qu'aucun territoire ne soit délaissé.