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mardi 5 juillet 2022

Compétence du maître d'ouvrage et caractère apparent du désordre

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 29 juin 2022




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 544 F-D

Pourvoi n° E 21-18.304





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 29 JUIN 2022

La société Clesence, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société La Maison du Cil, a formé le pourvoi n° E 21-18.304 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2021 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [O] [L], domicilié [Adresse 2],

2°/ à la société Mutuelle architectes Français (MAF), société d'assurances mutuelles, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ à la Société mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), société d'assurance mutuelle, dont le siège est [Adresse 7],

4°/ à la société Apave Nord-Ouest, société par actions simplifiée à associé unique, dont le siège est [Adresse 6], ayant un établissement secondaire situé [Adresse 10],

5°/ à la société Thelem assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 9],

6°/ à la société Grave-Randoux, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], prise en qualité de liquidateur de la société CIPS,

7°/ à la société Holding NJ, société par actions simplifiée à associé unique, dont le siège est [Adresse 5], anciennement dénommée [Adresse 8],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brun, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la société Clesence, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [L] et de la société Mutuelle architectes français, de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la société Apave Nord-Ouest, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Thelem assurances, après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Brun, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 6 avril 2021), la société La Maison du Cil, aux droits de laquelle vient la société Clesence (le maître de l'ouvrage), a confié la maîtrise d'oeuvre de la construction de logements à M. [L], assuré auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), les lots gros oeuvre et plâtrerie à la société de Gryse, devenue Jeannot de Gryse, assurée par la SMABTP, constructeur qui a sous-traité à la société CIPS, assurée auprès de la société Thelem assurances, le lot plâtrerie cloisons intérieures. Une mission de contrôle technique a été confiée à la société Apave nord ouest.


2. La réception a été faite avec réserves le 22 novembre 2006.

3. Le maître de l'ouvrage, se plaignant de manquements aux règles d'accessibilité et d'adaptabilité des logements aux personnes à mobilité réduite, non repris dans le procès-verbal de réception, a, après expertise, assigné les intervenants à l'acte de construire et leurs assureurs en indemnisation de ses préjudices.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le maître de l'ouvrage fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnisation, alors :

« 1°/ qu'un désordre non réservé n'est couvert par la réception que dans l'hypothèse où le maître de l'ouvrage peut être présumé l'avoir accepté et donc s'il a été placé en situation, au moment des opérations de réception, de voir le défaut de conformité et de mesurer sa réalité et l'ampleur de ses conséquences ; qu'en l'espèce, l'exposante dénonçait notamment des non-conformités tenant dans une insuffisance de 1 à 2 cm de la largeur de circulation dans certains logements et faisait valoir que ces défauts de conformité n'avaient pas été relevés par l'Apave dans son rapport de contrôle, n'avaient pas été vus par l'architecte présent lors de la réception des travaux et n'avaient été caractérisés qu'après plusieurs réunions d'expertise ; qu'en affirmant pourtant que les défauts de conformité étaient apparents, sans constater que l'exposante était en mesure de percevoir ceux tenant dans une différence de quelques centimètres et d'en connaître les conséquences réglementaires lors de la réception, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 et 1792, al.6, du code civil ;

2°/ qu'en tout état de cause, engage sa responsabilité contractuelle le maître d'oeuvre chargé d'assister le maître de l'ouvrage lors de la réception des travaux et qui n'attire pas son attention sur des désordres apparents ; qu'en l'espèce, l'exposante démontrait que M. [L], architecte, avait pour mission de l'assister lors des opérations de réception des travaux et qu'il avait établi et signé le procès-verbal de réception ; qu'en affirmant que le caractère apparent des défauts de conformité dénoncés interdisait à l'exposante toute recherche de responsabilité contractuelle de l'architecte, la cour d'appel a violé l'article 1231-1 du code civil ;

3°/ qu'en tout état de cause, engage sa responsabilité contractuelle le contrôleur technique dont le rapport induit le maître de l'ouvrage en erreur et le conduit à tort à signer sans réserve le procès-verbal de réception ; qu'en l'espèce, l'exposante démontrait que l'Apave avait effectué une mission de contrôle technique globale, comprenant notamment l'accessibilité des constructions aux personnes handicapées et que son rapport n'indiquant aucun défaut de conformité des logements aux exigences de la réglementation en matière d'accessibilité, l'avait conduite à tort à signer le procès-verbal de réception des travaux sans réserve sur ce point ; qu'en affirmant que le caractère apparent des défauts de conformité dénoncés interdisait à l'exposante toute recherche de responsabilité contractuelle de l'Apave, la cour d'appel a derechef violé l'article 1231-1 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a constaté que le maître de l'ouvrage admettait être un professionnel de la conception d'opérations immobilières et relevé qu'il était particulièrement averti quant aux prescriptions légales et réglementaires et au suivi des opérations de construction, en dépit du recours à des maîtres d'oeuvre et bureaux de contrôle, de sorte que le défaut de conformité à la réglementation relative à l'accès des personnes handicapées, tenant à des dimensions insuffisantes, étaient visibles par lui lors de la réception, étant d'ordre dimensionnel et pouvant ainsi être vu par une simple mesure des largeurs des couloirs et portes lors de la réception.

6. Elle a ainsi pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche sur la visibilité d'une erreur dimensionnelle d'un ou deux centimètres que ses constatations rendaient inopérante, que la réception sans réserve sur ce point par le maître de l'ouvrage averti, qui était seul à même de voir les défauts de conformité apparents, sans avoir besoin d'en être alerté par le maître d'oeuvre et le contrôleur technique, a eu pour effet de purger ces défauts, lui interdisant toute recherche de responsabilité des intervenants à l'acte de construire, au titre de manquements contractuels ou en application de la responsabilité décennale.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Clesence aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.

mardi 21 janvier 2020

Les obstacles à l'habitat partagé

15ème législature

Question N° 909
de M. Dominique Potier (Nouvelle Gauche - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Personnes handicapées
 
Rubrique > personnes handicapées
Titre > Les obstacles à l'habitat partagé également a
Question publiée au JO le : 05/09/2017 page : 4276
Réponse publiée au JO le : 13/02/2018 page : 1202
Date de changement d'attribution: 19/09/2017

Texte de la question

M. Dominique Potier attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les obstacles, financiers et juridiques, au développement de « l'habitat partagé », également appelé habitat inclusif, pour les personnes en situation de handicap. Les besoins de compensation individuelle du handicap (PCH) pour toutes les personnes qui ont une certaine autonomie dans la réalisation d'actes essentiels mais une grande difficulté à gouverner leurs comportements, restent encore sous-évalués. Autres obstacles financiers : l'absence de base juridique pour la dotation forfaitaire complémentaire, la mauvaise prise en compte des coûts d'entretien et de ménage et l'inadaptation du calcul des surfaces éligibles aux prêts aidés et aux exonérations qui y sont liées, les inconvénients du choix de l'habitat partagé sur le domicile de secours. Les freins à l'habitat partagé sont aussi juridiques. Plutôt qu'un mécanisme de « versement à compte de tiers » pour la PCH, il serait plus utile de centraliser les versements de PCH directement à l'intervenant commun qui assure les prestations aux niveaux individuellement requis. Autres pistes de réformes à engager : remédier à la complexité et l'inadaptation de certaines normes liées à l'habitat (normes de construction, classements ERP) et clarifier le statut des personnes qui partagent l'habitat tout en rendant des services assimilables au travail salarié. Afin de favoriser une société plus inclusive et de répondre aux attentes des personnes en situation de handicap et leurs familles, très attachées au projet de « vie partagée », et aux difficultés rencontrées par les associations et les personnels d'accompagnement, il lui demande quelles mesures peuvent être engagées dans les prochains mois pour y remédier.

Texte de la réponse

Un nombre croissant de personnes handicapées et de personnes âgées souhaite choisir son habitat et les personnes avec qui le partager. Elles expriment une forte demande d'aide, d'accompagnement et de services associés au logement, dans un environnement adapté et sécurisé qui garantisse conjointement inclusion sociale et vie autonome au domicile. Pour satisfaire cette demande croissante, une diversité d'offres d'habitat inclusif s'est développée en France dans le cadre de partenariats impliquant des bailleurs sociaux, des collectivités locales, des associations, des mutuelles ou encore des gestionnaires d'établissements et de services médico-sociaux. A distance de l'accueil en établissement spécialisé comme du logement en milieu ordinaire, autonome ou dans la famille, cette offre fait partie des éléments permettant d'élargir la palette des choix offerts aux personnes en perte d'autonomie liée à l'âge ou au handicap. La réponse en termes de logement constitue en outre, avec l'emploi, une réponse essentielle aux besoins d'insertion sociale des personnes. Pour accompagner le développement de cette offre, plusieurs mesures ont d'ores et déjà été prises dans le cadre de la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement, avec la création d'un statut de résidence-service locative, au côté de la rénovation du statut des résidences-services de copropriétaires, et la possibilité offerte au Préfet de département de délivrer une autorisation pour la construction de programmes de logements spécifiquement adaptés aux besoins des personnes âgées et des personnes handicapées. Pour aller plus loin, et constatant l'intérêt de ces dispositifs, le Gouvernement s'est engagé, dans le cadre de la communication relative au "handicap priorité du quinquennat", le 7 juin 2017, à « favoriser le développement des habitats inclusifs en levant les obstacles administratifs ». Il s'agit de développer des formules d'habitat, au cœur de la cité, associant un projet urbain et social et des services partagés adaptés aux besoins des personnes en situation de handicap ou dépendantes. A cette fin, le Gouvernement travaille, en coopération avec le secteur associatif, sur les trois axes suivants : impulser une démarche nationale en faveur de l'habitat inclusif pour les personnes en situation de handicap ; sécuriser économiquement les modèles d'habitat inclusif ; lever les obstacles juridiques au montage de projets d'habitat inclusif. Des premières mesures concrètes d'encouragement ont été mises en place : ainsi, une aide spécifique forfaitaire d'un montant de 60 000 euros sera versée par chaque ARS à une structure d'habitat inclusif identifiée dans sa région. Cette somme est destinée à couvrir les frais liés à l'animation du « vivre ensemble » (coordination, gestion administrative, régulation de la vie collective) et est financée, en 2017, à partir des crédits dédiés aux actions innovantes de la section V de la CNSA. Le suivi de ces projets permettra d'évaluer la pertinence et l'efficacité de ce mode de financement. Par ailleurs, les possibilités d'ores et déjà ouvertes de mise en commun par les personnes handicapées de leur prime compensatoire du handicap (PCH) permettent de financer de façon pragmatique certains accompagnements et services correspondant à leur besoin. L'Observatoire de l'habitat inclusif, qui est le lieu de référence en matière d'habitat inclusif pour les personnes âgées et les personnes handicapées a été installé le 10 mai 2017. Co-présidé par la direction générale de la cohésion sociale, la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, il associe les acteurs associatifs, les acteurs institutionnels et les collectivités locales. A l'occasion de la première journée de l'habitat inclusif, le 30 novembre 2017, l'Observatoire a publié un guide d'aide au montage de projets qui montre la diversité de l'offre, dresse un état des lieux, à droit constant, des dynamiques partenariales utiles pour conduire à bien un projet et identifie les leviers juridiques et les pistes de financement adéquates. En s'appuyant sur les projets en cours, sur leurs réussites comme sur leurs difficultés, une réflexion est actuellement menée sur les freins à lever et les conditions propices au développement de nouveaux projets pour les personnes handicapées comme pour les peronnes âgées. Cette réflexion s'articulera avec la politique de transformation de l'offre médico-sociale engagée par le gouvernement, qui vise à ce que les personnes handicapées puissent être accompagnées selon leurs besoins et leurs attentes, plus seulement dans les établissements médico-sociaux mais également sur leur lieu de vie, quel qu'il soit. Les obstacles juridiques au développement de ces formes d'habitat quis seront éventuellement identifiés pourront être levés en utilisant si nécessaire la voie législative et réglementaire.

mardi 24 décembre 2019

Accessibilité des logements collectifs aux personnes en situation de handicap


15ème législature



Question N° 6389
de Mme Bénédicte Taurine (La France insoumise - Ariège )
Question écrite
Ministère interrogé > Cohésion des territoires
Ministère attributaire > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales
 
Rubrique > personnes handicapées
Titre > Accessibilité des logements collectifs aux pe

Question publiée au JO le : 13/03/2018 page : 2011
Réponse publiée au JO le : 24/12/2019 page : 11374
Date de changement d'attribution: 16/10/2018

Texte de la question

Mme Bénédicte Taurine attire l'attention de M. le ministre de la cohésion des territoires sur la question de l'accessibilité des logements collectifs aux personnes en situation de handicap. Selon le code de la construction et de l'habitat, les constructeurs ont l'obligation d'installer des ascenseurs dans les immeubles comptant quatre étages et plus. Or, dans le cadre de la politique de construction à taille humaine et durable, hors grandes métropoles, les immeubles construits n'excèdent pas trois étages au-dessus du rez-de-chaussée et sont donc dispensés de cette obligation. Cette situation génère une importante discrimination de fait pour les personnes en situation de handicap moteur et utilisant des fauteuils roulants ainsi que pour les personnes à mobilité réduite. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances inscrit dans les lois françaises l'objectif d'un accès au droit commun pour les personnes administrativement « reconnues handicapées » et le cas échéant un droit à la compensation afin de favoriser leur accès à l'autonomie. Le critère d'édifice d'au moins 4 étages contredit ces deux principes en excluant les citoyens à mobilité réduite. Un amendement au code de la construction et de l'habitat permettrait d'imposer l'installation d'ascenseurs dans les immeubles comptant trois étages ou plus. C'est d'ailleurs une revendication importante de l'Association nationale pour l'intégration des personnes handicapées moteurs. Selon la Fédération des ascenseurs, l'ascenseur est le sésame pour vivre chez soi en autonomie en cas de situation de handicap ou de vieillesse. À travers une enquête Ipsos en décembre 2017, elle relève que 74 % des Français considèrent nécessaire d'installer un ascenseur dans les immeubles de moins de 4 étages (contrairement à la norme actuellement) tandis que pour 48% des Français la présence d'un ascenseur est un élément décisif pour choisir un logement. Dans l'avant-projet de loi sur le logement (ELAN) du Gouvernement, il n'est aucunement fait mention d'une mesure en faveur de la mobilité verticale pour les personnes qui, dans ce cas, sont confrontées à une situation de handicap insurmontable. Pire, la proposition de l'article 17 visant à remplacer la notion d'accessibilité par celle de « logement évolutif » conduit à un recul considérable sur l'importante législation en termes d'accessibilité (arrêté du 24 décembre 1980, loi du 11 février 2005, ordonnance du 26 septembre 2014). Cette dernière serait supprimée pour 90 % des appartements en rez-de-chaussée ou desservis par ascenseur. Le choix du Gouvernement consiste à réinstaurer le principe des quotas des années 1960 qui a été abandonné par le législateur de la loi du 30 juin 1975 en raison de son incapacité dûment constatée à répondre aux besoins exprimés. Elle lui demande quelle mesure elle compte mettre en place afin de garantir l'accès des personnes à mobilité réduite dans les immeubles de trois étages.

Texte de la réponse

La loi pour l'Évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) dans sa disposition relative au logement évolutif (article 64), vise à répondre à toutes les formes de handicaps survenant à tous les stades de l'existence, notamment à l'occasion de la perte d'autonomie et du vieillissement. Cette mesure a ainsi vocation à élargir la problématique de l'accessibilité du cadre bâti à tous les publics, qu'ils soient handicapés ou potentiellement handicapés. Elle répond par ailleurs aux souhaits du public non impacté par le handicap d'adapter leur logement à leur condition, tout en garantissant une réversibilité de l'aménagement intérieur, à moindre coût. En s'assurant que les aménagements réalisés sont modifiables par le biais de travaux simples, l'intérieur du logement pourra évoluer vers une configuration totalement accessible. Les personnes en situation de handicap conserveront ainsi le libre choix de leur logement. De plus, les besoins variant en fonction du handicap, l'évolutivité du logement permettra de répondre au mieux aux différentes attentes spécifiques, ce que la réglementation actuelle ne prévoyait pas. Le logement évolutif permettra par ailleurs de répondre aux besoins exprimés par une partie des acquéreurs ne souhaitant pas l'accessibilité lors de leur achat tout en garantissant son adaptation en cas d'accident de la vie de son occupant ou de revente à une personne présentant un handicap. Concernant la réglementation relative aux ascenseurs, l'obligation d'installer un ascenseur a enfin été étendue aux immeubles de trois étages et plus au lieu de quatre étages et plus auparavant. Cette disposition, rendue effective via le décret no 2019-305 du 11 avril 2019 et entrée en vigueur le 1er octobre 2019 augmente ainsi le nombre de logements directement accessibles ou évolutifs mis sur le marché.

mercredi 18 décembre 2019

Deux décrets modifiant le dispositif Ad’AP sont publiés aujourd’hui au Journal Officiel

Deux décrets modifiant le dispositif Ad’AP sont publiés aujourd’hui au Journal Officiel :
  • le décret n°2019-1376 du 16 décembre 2019 relatif à l'agenda d'accessibilité programmée pour la mise en accessibilité des ERP et des IOP
  • le décret n°2019-1377 du 16 décembre 2019 relatif au suivi d'un agenda d'accessibilité programmée approuvé
Quelles sont les principales mesures prévues ?
·         Possible révision des dérogations
Toute dérogation, quel que soit son motif, est pérenne et cessible. Cependant, dès lors qu'une autorisation de travaux ou un permis de construire est déposé(e) sur un aménagement ou un équipement qui faisait l’objet d’une dérogation, le pétitionnaire doit la redemander afin de pouvoir continuer à en bénéficier. Cette disposition permet de tenir compte de l’évolution de l’environnement de l’ERP (réfection de la voirie par exemple), du changement de gestionnaires et/ou d’activité. C’est une mesure équilibrée qui garantit le maintien et le caractère transmissible des dérogations tant qu’aucuns travaux ne sont concrètement réalisés.
·         Transmission d’une attestation d’accessibilité pour tous les ERP conformes
Tous les ERP conformes qui ne se sont toujours pas toujours déclarés peuvent le faire et sont largement invités, pour cela, à utiliser la plateforme de déclaration en ligne, démarches-simplifiees.fr, en fonction de la catégorie de l’ERP concerné :

·         Possibilité de modifier un Ad’AP approuvé en cours de mise en œuvre
Il est dorénavant possible de modifier un Ad’AP approuvé afin de modifier son périmètre en y intégrant de nouveaux ERP et/ou de modifier la durée initiale approuvée dès lors que le nombre d’années maximal légal n’avait pas déjà été octroyé. Pour cela, le formulaire Cerfa n°15058*01 est disponible sur le lien suivant : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/ladap-agenda-daccessibilite-programmee#e3
·         Précision des objectifs d’une attestation d’achèvement des travaux
Une attestation d’achèvement des travaux doit être réalisée pour chaque ERP et correspond à une attestation de conformité. Elle peut être réalisée sur l’honneur pour tous les ERP de 5e catégorie, qu’ils fassent partie d’un patrimoine ou non. Pour les Ad’AP de longue durée, ces attestations sont transmises au préfet ayant approuvé l’Ad’AP à l’occasion du bilan à mi-parcours et du bilan de fin d’agenda
Ces deux décrets sont appuyés par un arrêté mettant à jour les Cerfa en vigueur et en introduisant le nouveau formulaire de demande de modification d’Ad’AP.


mardi 3 juillet 2018

Notion de préjudice réparable en responsabilité décennale

Note Ajaccio, Bull. assurances EL août 2018, p. 5.
Note Mekki, D. 2019, p. 292.


Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 21 juin 2018
N° de pourvoi: 17-15.897
Publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
Me Le Prado, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur les premier et second moyens, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 janvier 2017), que M. et Mme X... ont fait construire un immeuble comprenant au rez-de-chaussée un local commercial sous la maîtrise d'oeuvre complète de la société CJC ingénierie, assurée par la société Les Souscripteurs du Lloyd's de Londres et la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics ; que la mission de gros oeuvre a été confiée à M. Z..., assuré par la société Axa France IARD ; que, l'ouvrage réceptionné ne respectant pas les normes d'accessibilité aux personnes handicapées en raison de la présence d'un seuil de vingt centimètres au niveau de l'entrée principale du local commercial, M. et Mme X... et la société Nana Kfé, à laquelle ce local avait été donné à bail, ont, après expertise, assigné la société CJC ingénierie, M. Z... et leurs assureurs en démolition et reconstruction totale de l'immeuble ;

Attendu que M. et Mme X... et la société Nana Kfé font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'indemnisation du vice affectant le local commercial, du préjudice lié à la perte de revenus locatifs et des préjudices liés à la perte du fonds de commerce, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut refuser d'évaluer le préjudice dont il a constaté l'existence ; qu'ayant constaté que le local commercial construit par M. Z... sous la maîtrise d'oeuvre de la société CJC Ingénierie était impropre à sa destination, la cour d'appel a refusé d'accorder à M. et Mme X... une quelconque indemnisation au titre de ce vice affectant leur construction aux motifs que ces derniers ont exclusivement sollicité la démolition et la reconstruction de l'ouvrage, que cette solution n'est pas envisagée par l'expert et qu'ils ne démontrent pas que les deux solutions retenues par l'expert sont impraticables ; qu'en refusant d'évaluer et de réparer le préjudice de M. et Mme X... dont elle a pourtant constaté l'existence, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;

2°/ que, saisi d'une demande en réparation d'un dommage dont il a constaté l'existence, le juge est tenu de procéder à son évaluation selon la méthode qui lui parait la plus appropriée ; qu'en refusant d'allouer à M. et Mme X... une quelconque indemnisation pour réparer les dommages liés au vice affectant leur local commercial dont elle a pourtant constaté qu'il est impropre à sa destination, aux motifs inopérants que leur demande de démolition et de reconstruction n'est pas fondée, quand il lui appartenait de procéder à l'évaluation de ces dommages selon la méthode qui lui apparaissait la plus appropriée, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

3°/ que, en refusant d'indemniser M. et Mme X... de leur demande de préjudice lié à leur perte de loyers après avoir pourtant constaté que le local commercial donné à bail à la société Nana Kfé était impropre à sa destination, ce dont il résultait nécessairement une perte de loyers, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;

4°/ que la cour d'appel a constaté que le local commercial loué par la société Nana Kfé était impropre à sa destination puisqu'il était affecté d'un vice lié au fait qu'il ne respectait pas les normes d'accessibilité aux personnes handicapées ; qu'il s'évince de ces constatations que, contrainte de cesser son activité au cours des travaux propres à remédier à ce vice, la société Nana Kfé sollicitait une somme de 200 000 euros en indemnisation de son préjudice ; qu'en se bornant à énoncer qu'il n'y a pas lieu de recevoir la demande d'indemnisation de la société Nana Kfé sans donner aucun motif à sa décision, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que, saisi d'une demande de réparation, il appartient au juge d'évaluer le montant d'un dommage dont il a constaté l'existence en son principe ; que la société Nana Kfé sollicitait l'allocation d'une somme de 200 000 euros en réparation de son préjudice lié à l'obligation de cesser son activité à cause du vice affectant son local commercial ; qu'après avoir constaté que le local commercial loué par la société Nana Kfé était impropre à sa destination, la cour d'appel a néanmoins considéré qu'il n'y avait pas lieu de recevoir sa demande d'indemnisation ; qu'en refusant d'évaluer le préjudice de la société Nana Kfé dont elle a néanmoins constaté l'existence, la cour d'appel a violé les articles 4 et 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, constaté que l'expert avait, pour remédier aux désordres, préconisé non pas la démolition et la reconstruction de l'immeuble dans son entier mais deux solutions alternatives, consistant, la première, dans l'aménagement du trottoir, sous réserve d'obtenir l'autorisation de la commune, et la seconde, dans l'abaissement du plancher du local commercial, et retenu souverainement que M. et Mme X... ne démontraient pas avoir effectué des démarches auprès de la mairie pour obtenir l'autorisation d'aménager le trottoir ni s'être heurtés à un refus de celle-ci et n'établissaient pas plus que l'abaissement du plancher préconisé dans la seconde option aurait rendu impraticables l'accès et l'usage de la pièce située au sous-sol ni que cette modification eût été refusée par les services d'urbanisme, la cour d'appel, qui était tenue par les conclusions des parties et devait statuer dans les limites ainsi fixées et qui, par une décision motivée, a, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des modalités de la réparation des désordres, retenu qu'il n'y avait pas lieu de procéder à la destruction totale de l'immeuble et à sa reconstruction pour réparer le défaut de conformité qui affectait le seul local commercial, en a exactement déduit, sans refuser d'évaluer un dommage dont elle avait constaté l'existence en son principe, que devaient être rejetées les demandes de M. et Mme X... et de la société Nana Kfé qui tendaient exclusivement au paiement du coût des travaux de démolition et de reconstruction de l'immeuble, ainsi que de la perte de revenus locatifs et du fonds de commerce en raison de la cessation complète d'activité pendant la période de réalisation de ces travaux ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne, ensemble, M. et Mme X... et la société Nana Kfé aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;