Affichage des articles dont le libellé est juge du fond. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est juge du fond. Afficher tous les articles

mardi 9 janvier 2024

Irrecevabilité d'une demande d'expertise présentée devant le juge du fond sans aucune prétention de fond

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 décembre 2023




Rejet


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 1272 F-D

Pourvoi n° M 21-17.597

Aide juridictionnnelle totale en défense
pour Mme [Z].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 janvier 2022.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 DÉCEMBRE 2023

M. [H] [X], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 21-17.597 contre l'arrêt rendu le 5 mars 2021 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile TI), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [B] [V] [W], domiciliée [Adresse 4],

2°/ à Mme [B] [Y] [G], domiciliée [Adresse 2],

3°/ à Mme [F] [Z], domiciliée [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [X], de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de Mme [Z], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [W], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 5 mars 2021), en décembre 2016, M. [X] a assigné devant un tribunal d'instance M. [A], depuis décédé, et Mme [W], Mme [G] et Mme [Z], propriétaires des parcelles contiguës à la sienne, aux fins de bornage.

2. Par jugement avant dire droit du 24 avril 2017, le tribunal a ordonné une expertise. L'expert a déposé ses rapports les 17 mai et 8 juin 2018.

3. Le tribunal a ensuite statué sur les limites divisoires des parcelles, par jugement du 3 décembre 2018 dont M. [X] a interjeté appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [X] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande d'expertise, d'adopter les dernières conclusions du rapport d'expertise et de dire que les limites divisoires entre, d'une part, les parcelles cadastrées section EP [Cadastre 10] et EP [Cadastre 7] (propriété de M. [X]) et, d'autre part, les parcelles contiguës cadastrées section EP [Cadastre 5] et EP [Cadastre 6] (propriété de Mme [W]), EP [Cadastre 8] (propriété de Mme [G]) et EP [Cadastre 9] (propriété de Mme [Z]), situées sur la commune de Saint Pierre, passent par les lignes telles que figurées en annexe n° 16 du rapport d'expertise et aux endroits qui y sont indiqués par les points X, B', C' et Y, soit la ligne XB' entre les parcelles EP [Cadastre 11] et EP [Cadastre 9], la ligne B'C' entre les parcelles EP [Cadastre 11] et EP [Cadastre 8], la ligne C'Y entre les parcelles EP [Cadastre 11] et EP [Cadastre 5]-[Cadastre 6], alors « que pour déclarer irrecevable la demande d'expertise et confirmer le jugement, la cour d'appel a retenu que n'étant saisie d'aucune prétention de fond hormis une demande d'infirmation, il convenait de confirmer le jugement entrepris ; qu'en statuant ainsi cependant que la demande d'expertise était formulée par M. [X] afin que le bornage pour lequel il avait saisi le tribunal d'instance puisse être établi sur des bases autres que celles retenues par le premier expert dont il invoquait le caractère incomplet et négligent des investigations, de sorte que cette demande d'expertise contenait implicitement mais nécessairement une demande au fond tendant au bornage des propriétés contiguës des parties, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Ayant constaté qu'en l'état de ses dernières conclusions, M. [X] ne demandait que d'infirmer, en toutes ses dispositions, le jugement entrepris et statuant à nouveau, d'ordonner une nouvelle expertise et fait ainsi ressortir que ces conclusions ne contenaient pas une prétention tendant au bornage formulée expressément, c'est sans méconnaître les termes du litige que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait.

6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

7. M. [X] fait le même grief à l'arrêt alors :

« 2°/ que pour déclarer irrecevable la demande d'expertise, la cour d'appel a retenu que cette demande se substituait à celle développée devant le premier juge, laquelle consistait uniquement, à la lecture du jugement entrepris, à " se référer au dire qu'il avait adressé à l'expert le 23 mai 2018 " ; qu'en ne recherchant pas, au besoin d'office, si cette demande d'expertise présentée en appel n'était pas recevable en tant qu'elle constituait l'accessoire, la conséquence ou le complément des prétentions formulées par M. [X] devant le tribunal d'instance qui tendaient à voir adopter un bornage distinct de celui retenu par le premier rapport d'expertise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 564 du code de procédure civile ;

3°/ que dans les procédures d'appel comportant une mise en état, une demande d'expertise peut être présentée devant la juridiction de jugement par une partie qui n'en a pas saisi le conseiller de la mise en état ; qu'en considérant, pour déclarer irrecevable la demande d'expertise, qu'elle n'était pas faite avant dire droit et que M. [X] n'avait pas davantage saisi le conseiller de la mise en état aux fins de mesure d'instruction, la cour d'appel a violé les articles 143 et 914 du code de procédure civile ;

4°/ que pour déclarer irrecevable la demande d'expertise, la cour d'appel a encore retenu que cette demande ne proposait pas d'alternative à la ligne divisoire proposée par l'expert judiciaire, quitte à solliciter subsidiairement l'organisation d'une expertise et qu'il n'avait pas sollicité la nullité du rapport d'expertise ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à justifier l'irrecevabilité de la demande, la cour d'appel a violé l'article 143 du code de procédure civile ensemble les articles 122 et 144 du même code. »

Réponse de la Cour

8. Ayant constaté qu'elle n'était saisie d'aucune prétention au fond, les conclusions d'appelant sollicitant une mesure d'instruction en tant qu'unique fin dont la cour d'appel était saisie, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a confirmé le jugement du 3 décembre 2018.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [X] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [X] et le condamne à payer à Mme [W] la somme de 1 500 euros et à la SCP Delamarre et Jéhannin la somme de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C201272

mardi 14 février 2023

Eu égard à la teneur du rapport de l'expert amiable, une expertise judiciaire n'apporterait aucune plus-value à celle réalisée par celui-ci

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 février 2023




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 107 F-D

Pourvoi n° K 21-22.403




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 FÉVRIER 2023

Mme [Y] [N], divorcée [Z], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 21-22.403 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2021 par la cour d'appel de Grenoble (2e chambre), dans le litige l'opposant à Mme [C] [D], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brun, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de Mme [N], de Me Occhipinti, avocat de Mme [D], après débats en l'audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Brun, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 15 juin 2021), rendu en référé, Mme [N] a confié à Mme [D] la rénovation des peintures et plâtreries à l'intérieur de son domicile.

2. Se plaignant de malfaçons constatées dans trois pièces de l'habitation, Mme [N] a, après réalisation d'une expertise amiable, assigné Mme [D] en référé pour obtenir l'organisation d'une expertise judiciaire.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Mme [N] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'expertise, alors :

« 1°/ que l'octroi d'une mesure d'instruction in futurum suppose la preuve
de l'existence d'un potentiel litige futur à la solution duquel elle serait susceptible de contribuer, peu important que les juges du fond puissent être immédiatement saisis et statuer ; que la cour d'appel, pour débouter Mme [N], a relevé que si le rapport amiable avait fait état de désordres susceptibles d'engager la responsabilité de Mme [D] et qu'un litige existait concernant le montant de l'indemnisation due, Mme [N] « pourrait utilement [le] faire trancher au fond sans recourir à une mesure d'expertise judiciaire dont le coût sera très élevé au regard des sommes en jeu dans le cadre de la présente procédure » et que « la mesure d'expertise sollicitée ne permettra aucunement d'améliorer la situation probatoire de Mme [N], le litige portant seulement sur le montant des travaux de reprise, un tel litige pouvant être jugé au fond » ; qu'en statuant ainsi, au motif inopérant que les juges du fond pouvaient statuer sur le litige, quand
Mme [N] justifiait d'un motif légitime à faire intervenir un expert pour évaluer les indemnités dues et que la cour pouvait et devait adapter l'objet de la mesure d'expertise au litige potentiel discerné, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

2°/ que les juges du fond doivent répondre aux conclusions opérantes des parties ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande d'expertise judiciaire, la cour d'appel a considéré qu'une expertise n'apporterait aucune plus-value par rapport à l'expertise amiable ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme [N] faisant valoir que le rapport amiable était parcellaire, dénué d'avis technique et insuffisant en particulier sur les modalités de reprise, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Ayant retenu que, eu égard à la teneur du rapport de l'expert amiable, une expertise judiciaire n'apporterait aucune plus-value à celle réalisée par celui-ci dès lors que, le désaccord de Mme [N] portant sur le montant des travaux de reprise, la mesure sollicitée ne permettrait pas d'améliorer sa situation au regard des exigences de preuve, et que le litige pouvait être tranché en l'état par le juge du fond, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées, a pu en déduire que la demande d'expertise devait être rejetée.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [N] et la condamne à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros ;