Affichage des articles dont le libellé est vente à terme. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est vente à terme. Afficher tous les articles

mardi 24 mai 2022

Il appartient à celui qui prétend engager la responsabilité de son cocontractant de rapporter la preuve du manquement imputé et du préjudice en résultant directement.

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 mai 2022




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 415 F-D

Pourvoi n° J 21-12.926




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2022

Mme [Y] [B], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° J 21-12.926 contre l'arrêt rendu le 1er décembre 2020 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [O] [F],

2°/ à Mme [L] [P], épouse [F],

tous deux domiciliés [Adresse 4],

3°/ à M. [X] [J], domicilié [Adresse 1],

4°/ à la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) Auvergne-Rhône-Alpes, venant aux droits de la SAFER Rhône-Alpes, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grandjean, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de Mme [B], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [J], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la SAFER Auvergne-Rhône-Alpes, après débats en l'audience publique du 5 avril 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grandjean, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Guiguet-Pauthe, avocat général et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à Mme [B] du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme [F].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 1er décembre 2020), par acte authentique dressé par M. [J], notaire, le 29 août 2014, M. et Mme [F] ont vendu une propriété agricole au prix de 295 000 euros à Mme [B] (l'acquéreur), substituant la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Auvergne Rhône-Alpes (la SAFER), titulaire d'une promesse unilatérale de vente au même prix.

3. Faisant valoir que la SAFER et le notaire avaient failli à leur obligation d'information sur la valeur réelle du bien et l'avaient ainsi privée d'une chance d'acquérir à moindre prix, l'acquéreur les a assignés en indemnisation du préjudice subi.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ que dans le cadre d'une action indemnitaire fondée sur la perte de chance d'avoir pu acquérir le bien litigieux à un prix moindre, il suffit pour le requérant d'établir qu'il aurait pu, sans la faute commise par ses adversaires, acquérir ce bien à un prix inférieur à celui qui a été payé ; qu'en exigeant en l'espèce de Mme [B] qu'elle rapporte la preuve d'une « surévaluation manifeste » du bien litigieux, cependant qu'il lui incombait seulement d'établir qu'elle aurait pu acquérir le bien à un prix moindre, la cour d'appel a violé les articles 1231-1 et 1231-2 du code civil ;

2°/ que dès lors qu'elle intervient à l'acte de vente en contrepartie d'une rémunération pour sa prestation de service, la SAFER engage sa responsabilité contractuelle vis-à-vis de l'acquéreur ; qu'en exonérant en l'espèce la SAFER de toute responsabilité, au motif que celle-ci, agissant en qualité de « mandataire des époux [F], n'est pas intervenue dans la fixation du prix de vente », cependant qu'elle constatait que « la SAFER Rhône-Alpes est intervenue à l'acte et en contrepartie de sa mission a perçu la somme de 2 950 euros des vendeurs et la somme de 26 550 euros de [Y] [B] », ce dont il résultait nécessairement que la SAFER engageait sa responsabilité en matière de fixation du prix vis-à-vis de Mme [B], la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 1231-1 et 1231-2 du code civil ;

3°/ que dans le cadre d'une action indemnitaire fondée sur la perte de chance d'avoir pu acquérir le bien litigieux à un prix moindre, il suffit pour le requérant d'établir qu'il aurait pu, sans la faute commise par ses adversaires, acquérir ce bien à un prix inférieur à celui qui a été payé ; qu'en déboutant Mme [B] de toutes ses demandes à l'égard de la SAFER et de Maître [J], au motif qu'il résultait des pièces versés aux débats que le bien acquis était en mauvais état lors de l'achat et que Mme [B] avait pu se rendre compte de cette situation, cependant que la seule question qui se trouvait posée en l'espèce était de savoir si, compte tenu de l'état du bien au jour de la vente, Mme [B] n'aurait pas pu en obtenir un prix moindre si la SAFER et Maître [J] avaient satisfait à leurs obligations, la cour d'appel s'est déterminée par des considérations inopérantes et a privé sa décision de base légale au regard des articles 1231-1 et 1231-2 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. Il appartient à celui qui prétend engager la responsabilité de son cocontractant de rapporter la preuve du manquement imputé et du préjudice en résultant directement.

6. Après avoir relevé que l'acquéreur reprochait à la SAFER et au notaire de ne pas l'avoir informé du caractère excessif du prix proposé, la cour d'appel a souverainement considéré que l'avis de valeur du 23 novembre 2015, bref et dépourvu de toute référence, n'avait aucune force probante et que l'avis du cabinet d'expertise daté du 28 décembre 2015, établi sur les indications non vérifiées de l'acquéreur, ne constituait pas davantage la preuve d'une surévaluation du prix.

7. La cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a également retenu que l'acquéreur, par ses visites du bien et par son information sur les travaux à réaliser en urgence et la liste non exhaustive d'autres travaux à prévoir résultant de documents transmis plus de deux mois avant la régularisation de l'acte de vente, avait en toute connaissance de cause mené à terme son projet d'acquisition.

8. Abstraction faite de motifs surabondants sur la nature du préjudice allégué, elle en a exactement déduit que les fautes invoquées n'étaient pas démontrées et que le comportement de la SAFER et du notaire n'avait pas eu d'influence sur le prix accepté par l'acquéreur.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [B] et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Auvergne Rhône-Alpes et la somme de 3 000 euros à M. [J] ;

jeudi 24 octobre 2019

Vente en l'état futur d'achèvement : rien n'impose que l'achèvement soit constaté par une personne qualifiée

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 10 octobre 2019
N° de pourvoi: 18-21.268
Non publié au bulletin Cassation partielle

Mme Batut (président), président
Me Bertrand, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat(s)





Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le premier moyen :

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble l'article R. 261-2 du code de la construction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte sous seing privé du 15 novembre 2010, Mme J... (l'acquéreur) a réservé un logement meublé en l'état futur d'achèvement ; que, suivant acte authentique reçu le 6 juillet 2011 par M. G..., notaire associé de la société civile professionnelle X...-V...-R...-F...-Z...-N...-G...- K..., devenue la SCP V...-R...-F...-Z...-N...-G...- K..., titulaire d'un office notarial (la SCP), la société foncière Beaulieu patrimoine, aux droits de laquelle se trouve la société B-Patrimoine Investment Management (le vendeur), a vendu à l'acquéreur un lot d'un ensemble immobilier à usage d'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, au prix de 187 733 euros, financé par un prêt d'un montant de 179 437 euros, souscrit par l'acquéreur auprès de la Caisse d'épargne et de prévoyance Nord France Europe, devenue Caisse d'épargne et de prévoyance Hauts de France, (la banque) ; que, les travaux n'étant pas achevés ni les loyers payés, l'acquéreur a assigné le vendeur, la SCP et la banque en nullité de l'acte de vente et en indemnisation ;

Attendu que, pour condamner la SCP à payer à l'acquéreur la somme de la 173 075 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2011, et à garantir celui-ci du paiement à la banque de la somme de 179 437 euros au titre du remboursement du prêt, ces deux sommes se compensant à hauteur de la plus faible d'entre elles, et pour condamner la SCP à garantir le vendeur de la condamnation prononcée à son encontre au paragraphe II-A, soit à rembourser à l'acquéreur la somme de 187 733 euros correspondant au montant de la vente, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2011, et à lui payer, à titre de dommages-intérêts, la somme de 1 367 euros pour les frais d'acte augmentés des intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2011, en précisant que le montant total de cette garantie sera plafonné à 50 % des sommes, l'arrêt retient que l'acte authentique faisant référence à l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, le notaire n'a pas assuré l'efficacité de son acte et a manqué à son obligation de conseil envers l'acquéreur en se limitant à inclure dans son acte une déclaration du maître d'oeuvre attestant de l'achèvement des travaux, sans que cet achèvement ait été constaté par une personne qualifiée, en application de l'article R. 261-2 du même code ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, dans le cas d'une vente en l'état futur d'achèvement, rien n'impose que l'achèvement soit constaté par une personne qualifiée, l'article R. 261-2 du code de la construction et de l'habitation n'étant applicable que dans l'hypothèse d'une vente à terme, de sorte que l'achèvement des travaux pouvait être constaté par tout professionnel de la construction comme le maître d'oeuvre, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société civile professionnelle V...-R...-F...-Z...-N...-G...- K... à payer à Mme J... la somme de 173 075 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2011, et à garantir celui-ci du paiement à la Caisse d'épargne et de prévoyance Nord France Europe de la somme de 179 437 euros au titre du remboursement du prêt, ces deux sommes se compensant à hauteur de la plus faible d'entre elles, et en ce qu'il la condamne à garantir la société B-Patrimoine Investment Management de la condamnation prononcée à son encontre à rembourser à Mme J... la somme de 187 733 euros correspondant au montant de la vente, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2011 et à lui payer, à titre de dommages-intérêts, la somme de 1 367 euros pour les frais d'acte, augmentés des intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2011, en précisant que le montant total de cette garantie sera plafonné à 50 % des sommes, l'arrêt rendu le 18 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne Mme J... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;