Affichage des articles dont le libellé est ambiguïté. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est ambiguïté. Afficher tous les articles

mardi 9 janvier 2024

Vente immobilière : le vendeur est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige. Tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 décembre 2023




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 845 F-D

Pourvoi n° U 22-21.518







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 DÉCEMBRE 2023

Mme [R] [N], veuve [T], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 22-21.518 contre l'arrêt rendu le 25 août 2022 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [L] [U], épouse [F], domiciliée [Adresse 2],

2°/ à la société L'Immobilière Guignard, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Rat, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme [N], de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [U], après débats en l'audience publique du 14 novembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Rat, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 25 août 2022) et les productions, par acte authentique du 8 juin 2017, Mme [N] (l'acquéreur) a acquis de Mme [U] (la venderesse) une maison d'habitation par l'intermédiaire de la société L'Immobilière Guignard (l'agent immobilier).

2. La venderesse avait hérité de l'immeuble à la suite du décès de sa mère, survenu le 17 mai 2016.

3. Soutenant avoir découvert des fissures et des lézardes après avoir détapissé les murs, l'acquéreur a, après expertise, assigné la venderesse et l'agent immobilier aux fins d'annulation de la vente sur le fondement du dol et, subsidiairement, de résolution de la vente pour défaut de délivrance conforme et en garantie des vices cachés.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

4. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en résolution de la vente formée sur le fondement de la garantie vices cachés, alors :

« 1°/ qu'il est interdit de dénaturer les éléments produits aux débats ; qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'expertise judiciaire que la "présence d'une lézarde au droit d'un passage de noeud de canalisation, situé dans la cave sous le mur de refend du RDC" était pour Mme [N] "non décelable, car la chaufferie est sans éclairage zénithal (absence de fenêtre) " alors que concernant "le caractère d'ignorance de la part de la venderesse" l'expert judiciaire a au contraire précisé qu'elle était "sans caractère d'ignorance"; qu'il résulte ainsi des termes clairs et précis du rapport d'expertise judiciaire que la venderesse, Mme [F], n'ignorait aucunement la présence d'une lézarde au droit d'un passage de noeud de canalisation, situé dans la cave sous le mur de refend du rez-de-chaussée; qu'en énonçant néanmoins que "s'il ressort du rapport d'expertise que le désordre d'ordre structurel est grave [...] il en ressort également [...] que Mme [F] ne disposait pas plus d'informations qu'elle (Mme [N]) à cet égard" de sorte que "la clause d'exonération de la garantie des vices cachés stipulée par les parties doit recevoir application", la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise judiciaire et méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de la cause ;

2°/ que tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; que le vendeur qui, ayant connaissance d'un vice lors de la conclusion du contrat, stipule qu'il ne le garantira pas, est tenu à garantie, nonobstant cette clause; qu'en l'espèce, les juges du fond ont à juste titre constaté que les vices déplorés par Mme [N] existaient avant la vente, qu'ils n'étaient pas visibles dans toute leur ampleur lors de celle-ci et que le désordre structurel est grave pour exiger dans un bref délai des travaux de réfection jusqu'à la réalisation desquels le grenier doit rester inexploité ; qu'en déboutant néanmoins Mme [N] de sa demande de résolution de la vente pour vices cachés au motif que "la clause d'exonération de la garantie des vices cachés stipulée par les parties doit recevoir application", sans répondre aux moyens pertinents de l'exposante qui faisait valoir que si Mme [F] n'avait jamais habité la maison, il résulte néanmoins des pièces versées aux débats qu'elle connaissait la maison, qu'elle avait hérité de sa mère, depuis de nombreuses années et notamment avant les travaux litigieux de 2010, que l'existence d' "une grande fissure" était connue même des voisins dès 2010 et que la venderesse n'avait supprimé la mention du mandat de vendre, importante pour l'acquéreur, visant "un potentiel de 90 m2 aménageable" qu'au moment de la signature de l'acte de vente faisant ainsi état de sa volonté de dissimuler le caractère inexploitable du grenier en raison des vices l'affectant, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a, d'abord, rappelé que l'acte de vente stipulait une clause d'exonération de la garantie des vices cachés, à laquelle il ne pouvait être fait obstacle que par la preuve de la connaissance, par la venderesse, avant la vente, de l'existence des désordres révélés par l'expert.

6. Elle a, ensuite, par motifs propres et adoptés, constaté que le rapport d'expertise indiquait que la venderesse « pouvait ignorer le désordre d'ordre structurel concernant le mur intérieur porteur » et que celle-ci, profane en matière de construction, n'avait jamais habité les lieux et n'avait hérité de la maison que six mois avant la signature du mandat de vente.

7. Elle a pu en déduire, par une appréciation souveraine des pièces qui lui étaient soumises, exclusive de dénaturation, et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, qu'il n'était pas établi que la venderesse avait eu connaissance de l'existence des désordres relevés par l'expert judiciaire.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

9. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir dire que l'agent immobilier avait manqué à son obligation d'information à son égard, ainsi que ses demandes en résolution de la vente et en paiement, par ce dernier, de diverses sommes, alors :

« 1°/ que le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion; que commet une faute l'agent immobilier qui omet d'attirer l'attention des acquéreurs sur l'origine très vraisemblable des fissures apparentes et sur leur gravité potentielle pouvant affecter la structure de l'immeuble ; qu'en l'espèce, il est constant que l'agence L'Immobilière Guignard, contrairement à Mme [N], avait connaissance de l'existence de la lézarde affectant le mur porteur intérieur au sous-sol ; que comme l'a fait valoir l'exposante "l'agent immobilier, même s'il n'est pas un professionnel de la construction, [...] se doit de conseiller le potentiel acquéreur, en cas de doute, sur la nécessité de réaliser une contre visite avec un professionnel du bâtiment. [...] la lézarde située au droit du mur de refend en sous-sol [...] aurait dû conduire l'agence immobilière à conseiller à l'acquéreur de s'entourer des conseils d'un maçon et d'un BET structures. La Sarl L'Immobilière Guignard avait l'obligation [...] de se renseigner davantage (et d') alerter l'acquéreur sur la nécessité de procéder à des vérifications complémentaires" ; qu'en déboutant Mme [N] de sa demande formée à l'encontre de la société L'Immobilière Guignard au seul motif qu' "il n'est pas établi que la présence d'une telle (lézarde), affectant un immeuble construit en 1979, aurait permis à la société L'Immobilière Guignard d'envisager l'existence d'un désordre général d'ordre structurel", bien qu'il importait peu de savoir si l'agence avait elle-même compris qu'il s'agissait d'un désordre général d'ordre structurel puisqu'en tant que profane en matière de construction il lui appartenait simplement d'alerter Mme [N] pour lui permettre d'obtenir l'avis d'un professionnel, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation de l'article 1992 du code civil ;

2°/ qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire qu'il convient de distinguer entre la connaissance qu'une partie peut avoir de l'existence des plis du papier peint et la compréhension de la signification de ces plis concernant l'existence d'éventuelles fissures ; que selon l'expert en effet, pour Mme [N] les "plis (étaient) décelables" mais que les "fissurations (étaient) non décelables sans retirer expressément le revêtement mural", tandis que l'agence immobilière était "sans caractère d'ignorance de l'état de revêtement mural" et "sans caractère d'ignorance relativement à la présence potentielle" de fissurations localisées ; en déboutant néanmoins Mme [N] de sa demande formée contre l'agent immobilier au motif qu'"il résulte du procès-verbal de constat et de l'expertise judiciaire que les fissures et lézardes affectant l'intérieur de la maison d'habitation pouvaient être décelées en raison des nombreux plis affectant le revêtement mural les recouvrant" et que "Mme [N] a pu constater au cours de ses deux visites des lieux en date des 7 et 10 janvier 2017", sans rechercher si Mme [N] avait les connaissances et l'expérience suffisante pour comprendre la signification des plis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1992 du code civil. »

Réponse de la Cour

10. La cour d'appel a, d'abord, retenu qu'il résultait du procès-verbal de constat et du rapport d'expertise que les fissures et lézardes affectant l'intérieur de la maison pouvaient être décelées en raison des nombreux plis affectant le revêtement mural les recouvrant, que l'acquéreur avait pu elle-même constater au cours des deux visites réalisées avant la vente.

11. Elle a, ensuite, relevé que le désordre structurel affectant l'immeuble n'avait été révélé que par l'expert judiciaire, et n'avait été décelé ni par les diagnostiqueurs immobiliers, ni par le bureau d'étude mandaté par l'acquéreur.

12. Elle a pu en déduire que, même si la présence d'une lézarde affectant le mur porteur intérieur au sous-sol avait pu être constatée par l'agent immobilier, il n'était pas établi, celui-ci n'étant pas un professionnel de la construction, que cela lui aurait permis d'envisager l'existence d'un désordre général d'ordre structurel, ce dont il ressortait que l'acquéreur n'avait été privé d'aucune information dont elle ne disposait pas elle-même.

13. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

14. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à voir dire que la venderesse a manqué à son obligation de délivrance, à prononcer la résolution de la vente et à la condamner à lui verser diverses sommes, alors « que tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur qui est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige ; qu'en l'espèce, en décidant que la seule mention, dans le compromis de vente du 14 février 2017 et dans l'acte authentique de vente du 8 juin 2017 de l'existence d'un grenier n'impliquait pas "que le caractère exploitable ou aménageable du grenier serait rentré dans le champ contractuel", sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme [F], en vendant un bien doté d'un grenier sans faire mention de son caractère inexploitable, n'avait pas omis d'expliquer clairement ce à quoi elle s'obligeait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1602 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1602 du code civil :

15. Aux termes de ce texte, le vendeur est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige. Tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur.

16. Pour rejeter la demande en résolution de la vente pour défaut de conformité, l'arrêt retient, après avoir rappelé que, selon l'acte authentique de vente, l'immeuble à usage d'habitation comprenait un grenier, que l'expert judiciaire considérait comme inutilisable, dès lors qu'il n'était pas possible d'en charger le solivage, qu'il ne résulte d'aucun des documents contractuels que le caractère exploitable ou aménageable du grenier était entré dans le champ contractuel.

17. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la mention de l'existence d'un grenier dans l'acte de vente, n'impliquait pas qu'il soit nécessairement utilisable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette les demandes formées par Mme [N], à l'encontre de Mme [U], sur le fondement du dol et de la garantie des vices cachés, l'arrêt rendu le 25 août 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne Mme [U] et la société L'Immobilière Guignard aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C300845

mardi 23 mai 2023

Portée du principe de réparation intégrale du préjudice

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 mai 2023




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 326 F-D

Pourvoi n° G 22-10.353




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2023

1°/ M. [G] [Y], domicilié [Adresse 2],

2°/ Mme [A] [T], domiciliée [Adresse 4],

3°/ Mme [I] [L], domiciliée [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° G 22-10.353 contre l'arrêt rendu le 10 juin 2021 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société MAAF assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5],

2°/ à M. [E] [X], domicilié [Adresse 1],

3°/ à la société [X], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], représentée par la société FBH, en la personne de M. [Z] [C], prise en sa qualité de mandataire judiciaire ad hoc,

4°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [Y] et de Mmes [T] et [L], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [X] représentée par la société FBH, ès qualités, et de la société Axa France IARD, après débats en l'audience publique du 21 mars 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 10 juin 2021), M. et Mme [Y] ont confié la construction de leur maison d'habitation à la société Résidence plus, qui a sous-traité les travaux de gros oeuvre à la société [X], assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) et les travaux de charpente-couverture à M. [N], assuré auprès de la société MAAF assurances (la MAAF).

2. M. et Mme [Y] ont, ensuite, fait donation de la nue-propriété de leur immeuble à leurs filles, Mmes [L] et [T], se réservant l'usufruit à titre viager.

3. Les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 3 septembre 2003.

4. Se plaignant de l'apparition de fissures sur les façades puis de leur aggravation, M. [Y], Mmes [L] et [T] (les consorts [Y]) ont, après expertise, assigné M. [X], la société [X], la société Axa et la MAAF en indemnisation de leurs préjudices matériel et immatériel.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Les consorts [Y] font grief à l'arrêt de condamner la MAAF, en sa qualité d'assureur de l'entreprise [N], à leur payer seulement la somme de 24 779 euros au titre des travaux de charpente et de couverture, alors :

« 1°/ qu'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant que le premier expert, M. [H], n'explicitait pas la somme de 59 949,54 euros (en vérité 56 949,54 euros) dont il faisait état à la fin de son rapport alors même qu'il estimait, page 22 de son rapport, les travaux de reprise concernant la charpente à la somme de 26 824,54 euros HT, selon devis Vangeneberg du 4 avril 2013, quand ledit expert avait également relevé dans son rapport plusieurs autres postes de réparation des conséquences du désordre affectant la charpente (estimation reprise faîtage bains, angle extérieur de la terrasse fermée au RdC, décollement d'enduit sur poutre cintrée, réfection plafonds hall et séjour, reprises salle-de-bains, rez-de-chaussée et réfection solin couverture sur bains), permettant d'aboutir à la somme totale de 56 949,54 euros au titre des « désordres affectant la charpente et la couverture », la cour d'appel, qui a dénaturé ledit rapport, a violé le principe susvisé ;

2°/ que le principe de la réparation intégrale impose au juge d'allouer à la victime une indemnité à hauteur de son préjudice ; qu'en limitant à la somme de 24 779 euros, correspondant au « coût des travaux de reprise de la charpente et de la couverture », la réparation des « désordres affectant la charpente et la couverture », quand il ressortait de ses propres constatations que, du fait du non respect des prescriptions de pose, la charpente avait subi des déformations importantes en 2003 qui avaient affecté la structure ainsi que le faux plafond intérieur du séjour, ce dont il se déduisait que M. [Y] et Mmes [T] et [L] avaient subi un préjudice excédant celui lié à la simple reprise de la charpente elle-même, résidant dans les conséquences du désordre affectant la charpente sur le reste de la maison, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce code, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

6. Ayant relevé, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des termes du rapport d'expertise rendait nécessaire, que le premier expert n'explicitait pas la somme dont il faisait état à la fin de son rapport, alors qu'il avait estimé le montant des travaux de reprise de la charpente à une somme moindre selon un devis du 4 avril 2013, la cour d'appel a souverainement retenu que le coût des travaux de réparation de la charpente et de la couverture devait être fixé à la somme totale de 24 779 euros.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. Les consorts [Y] font grief à l'arrêt de rejeter la demande tendant à la réparation du préjudice de jouissance, alors :

« 1°/ que le juge ne peut refuser de réparer le dommage dont il a constaté l'existence en son principe ; qu'en rejetant la demande d'indemnisation du préjudice de jouissance présentée par M. [Y] et Mmes [T] et [L], quand il ressortait de ses propres constatations que des désordres affectaient également la partie habitable de la maison et en particulier le faux plafond intérieur du séjour du fait du désordre affectant la charpente, ce dont se déduisait l'existence d'un préjudice de jouissance, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce code, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

2°/ qu' en application du principe de réparation intégrale du préjudice, les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu'en l'espèce, M. [Y] et Mmes [T] et [L] sollicitaient, sur la base du rapport d'expertise remis le 14 mars 2020, l'indemnisation de leur préjudice de jouissance résultant des divers désordres constatés ; que pour écarter leur demande, les juges d'appel ont relevé que les désordres étaient localisés « principalement » à la jonction entre le garage et la partie maison et que M. [Y] et Mmes [L] et [T] ne justifiaient pas d'une privation de jouissance depuis 2003 de la partie habitable de la maison ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, dès lors que le préjudice réparable s'étendait à l'ensemble du bien, y compris à la partie non habitable de la maison, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce code, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

3°/ que le préjudice lié à perte de loyer, de nature économique, est distinct du préjudice de jouissance, de nature morale ; qu'en l'espèce, M. [Y] et Mmes [T] et [L] sollicitaient, sur la base du rapport d'expertise remis le 14 mars 2020, l'indemnisation de leur préjudice de jouissance résultant des divers désordres constatés, évalué par l'expert à 51 000 euros sur la base de la dépréciation de la valeur locative de la maison, sans réclamer l'indemnisation d'une quelconque perte de loyer ; que pour écarter leur demande, les juges d'appel ont relevé qu'aucun élément n'établissait que les consorts [Y]-[L]-[T] avaient loué ou tenté de louer la maison s'agissant de leur résidence principale depuis 2003 ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, dès lors que n'était pas demandée la réparation d'un préjudice lié à la perte de loyer mais l'indemnisation d'un préjudice de jouissance, de nature morale, et que ce préjudice s'étendait à l'ensemble du bien, y compris à la partie non habitable de la maison, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 de ce code, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

9. Ayant retenu d'une part, que les consorts [Y] ne justifiaient pas d'une privation de jouissance de leur maison depuis 2003, d'autre part, qu'ils ne démontraient pas avoir subi un préjudice résultant de la dépréciation de la valeur locative de leur bien, la cour d'appel en a souverainement déduit, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, que la preuve de la réalité du préjudice de jouissance n'était pas rapportée.

10. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [Y], Mmes [L] et [T] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

vendredi 14 janvier 2022

Assurance : interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, rendue nécessaire par l'ambiguïté des termes de la clause

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 décembre 2021




Rejet


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1260 F-D

Pourvoi n° G 20-10.460




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 DÉCEMBRE 2021

La société GAN Outremer IARD, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 20-10.460 contre l'arrêt rendu le 3 juin 2019 par la cour d'appel de Nouméa (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [K] [P], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Martin, conseiller, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société GAN Outremer IARD, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [P], et après débats en l'audience publique du 9 novembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Martin, conseiller rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 3 juin 2019), M. [P] a souscrit auprès de la société Gan Outremer Iard (l'assureur), pour sa maison d'habitation, un contrat d'assurance comportant la garantie « inondation ».

2. De fortes précipitations, survenues les 2 et 3 juillet 2013, ont provoqué une inondation du terrain de M. [P], mettant à nu le réseau privé d'assainissement de son habitation et détruisant les conduites d'eaux, le bac à graisse et la fosse septique.

3. L'assureur ayant informé M. [P] de son refus de l'indemniser, celui-ci l'a assigné en paiement de l'indemnité d'assurance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société Gan Outremer Iard fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à M. [P] la somme de 973 350 francs pacifiques au titre de l'indemnisation du sinistre survenu sur sa maison d'habitation sise à [Localité 3] les 2 et 3 juillet 2013, majorée des intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2015 et de dire que les intérêts échus pour une année entière porteront eux-mêmes intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, alors « qu'il résultait du paragraphe B intitulé « Inondation » de la clause 2.16 relative à « la protection des biens : Forces de la nature » situé en page 45 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par M. [P] que la compagnie d'assurance Gan Outremer Iard garantissait « toutes les détériorations accidentelles subies par le bâtiment assuré et le mobilier usuel résultant des effets de la libération d'étendues d'eaux naturelles ou artificielles, de ras-de-marées, du flux des vagues, des crues, de la montée des eaux, des eaux de ruissellement, coulée de boue, avec ou sans intervention des vents ; mascarets, lorsque ces phénomènes ont une intensité telle qu'ils détruisent, brisent ou endommagent dans la commune où se situe les biens sinistrés ou dans les communes avoisinantes un certain nombre de bâtiments de type 1 et constituent un événement d'une ampleur exceptionnelle » ; qu'en jugeant, pour condamner la compagnie d'assurances Gan Outremer Iard à verser à M. [P] la somme de 973 350 francs pacifiques au titre de l'indemnisation du sinistre survenu sur sa maison, que l'expression « qu'ils détruisent, brisent ou endommagent dans la commune où se situent les biens sinistrés ou dans les communes avoisinantes un certain nombre de bâtiments de type 1 et constituent un événement d'une ampleur exceptionnelle » devait être interprétée comme posant des conditions de localisation géographique du phénomène climatique et n'étant que l'énumération d'exemples d'intensité et que l'interprétation de la clause par l'assureur selon laquelle il appartiendrait à l'assuré d'établir qu'un certain nombre de bâtiments de type 1 ont été endommagés était erronée comme rendant impossible pour l'assuré de rapporter une telle preuve, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la police d'assurance dont il résultait que la compagnie Gan Outremer Iard garantissait les détériorations accidentelles subies par le bâtiment assuré et le mobilier usuel qu'à la condition que la preuve soit rapportée que plusieurs bâtiments de type 1 aient été détruits, violant ainsi le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis. »

Réponse de la Cour

5. C'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des termes de la clause rendait nécessaire, que la cour d'appel, pour accueillir la demande de M. [P] au titre de la garantie « inondation », a retenu que l'énumération « qu'ils détruisent, brisent ou endommagent dans la commune où se situent les biens sinistrés ou dans les communes avoisinantes un certain nombre de bâtiments de type 1 et constituent un événement d'une ampleur exceptionnelle » doit être interprétée comme, d'une part, posant une condition tenant à la localisation géographique des dommages causés par les inondations résultant des effets du phénomène naturel survenu, d'autre part, énumérant des exemples de conséquences de ce phénomène pouvant caractériser sa nature d'événement d'une ampleur exceptionnelle.

6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

7. La société Gan Outremer Iard fait le même grief à l'arrêt alors « qu'il résultait du paragraphe B intitulé « Inondation » de la clause 2.16 relative à « la protection des biens : Forces de la nature » situé en page 45 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par M. [P] qu'en cas d'inondation, la compagnie d'assurance Gan Outremer Iard garantissait toutes les détériorations accidentelles subies par le bâtiment assuré et le mobilier usuel, que la notion de bâtiment était définie en page 14 comme « les biens immobiliers définis dans les conditions personnelles et occupés exclusivement à usages d'habitation, ainsi que les murs de soutènement attenant aux bâtiments assurés, les clôtures non végétales et les murs d'enceinte » et que « sont assimilés à ces biens : les aménagements et installations qui ne peuvent être détachés sans être détériorés ou sans détériorer les constructions : - les installations privatives de chauffage ou de climatisation, - les revêtements de sol, de mur ou de plafond, exécutés aux frais du propriétaire des bâtiments assurés ou qui sont devenus la propriété du bailleur, et les sous-sols, garages, caves et greniers à usage non professionnel et situés à la verticale des biens immobiliers à usage d'habitation, y compris ceux des immeubles collectifs » ainsi que les dépendances et les vérandas, tandis que la notion de mobilier usuel était définie comme « les objets usuels, c'est-à-dire tous les objets autres que les objets de valeur, appartenant ou confiés à l'assuré ou à toute autre personne vivant habituellement avec lui ; - les espèces monnayées appartenant à l'assuré ou à toute autre personne vivant habituellement avec lui ; - les aménagements réalisés par l'assuré à ses frais lorsqu'il est locataire des biens assurés ou les aménagements repris par lui avec un bail en cours », étant précisé que « ce mobilier est à usage non professionnel et se trouve à l'intérieur des bâtiments désignés dans les conditions personnelles » ; qu'en retenant que les réseaux individuels d'assainissement, même partiellement extérieurs, constituaient des éléments indissociables du bâtiment principal sans lesquels aucun permis de construire ne se serait accordé et dont le défaut rendait impropre à l'usage d'habitation de sorte qu'ils étaient inclus dans la garantie de l'assureur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la police d'assurance qui ne prévoyait pas que les équipements précités étaient inclus dans la garantie, violant ainsi le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis. »

Réponse de la Cour

8. C'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des termes de la clause rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu que la fosse septique et le réseau d'assainissement, lesquels constituent des éléments indissociables du bâtiment principal dont le défaut le rend impropre à l'usage d'habitation, devaient être considérés comme un bâtiment assuré, au sens des conditions générales du contrat d'assurance.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Gan Outremer Iard aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Gan Outremer Iard et la condamne à payer à M. [P] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour la compagnie d'assurances GAN Outremer IARD

La compagnie d'assurances Gan Outremer Iard fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à verser à M. [K] [P] la somme de 973 350 Francs Pacifiques au titre de l'indemnisation du sinistre survenu sur sa maison d'habitation sise à [Localité 3] les 2 et 3 juillet 2013, majorée des intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2015 et dit que les intérêts échus pour une année entière porteront eux-mêmes intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE sur la garantie due par la compagnie Gan Assurances : sur l'analyse de la clause litigieuse : M. [P] fonde ses demandes sur la clause 2.16 « La protection des biens : Forces de la natrure B. Inondation » énoncée en page 45 des conditions générales ainsi rédigée « nous garantissons toutes les détériorations accidentelles subies par le bâtiment assuré et le mobilier usuel résultant des effets de la libération d'étendues d'eaux naturelles ou artificielles, de ras-de-marées, du flux des vagues, des crues, de la montée des eaux, des eaux de ruissellement, coulée de boue, avec ou sans intervention des vents ; mascarets, lorsque ces phénomènes ont une intensité telle qu'ils détruisent, brisent ou endommagent dans la commune où se situe les biens sinistrés ou dans les communes avoisinantes un certain nombre de bâtiments de type 1 et constituent un évènement d'une ampleur exceptionnelle. » ; que les parties sont en opposition sur l'application de la mise en oeuvre de cette garantie ; que la cour constate que cette clause est ambigüe en ce qu'elle permet de soutenir plusieurs positions ; qu'ainsi : - la présence d'un point-virgule entre « sans intervention de vents » et des « mascarets » peut conduire à soutenir que la condition d'intensité « lorsque ces phénomènes ont une intensité telle » ne vise que le cas du mascaret, - les termes « un certain nombre de bâtiments » laissent incertaine l'application de la garantie en cas d'unicité de bâtiment détruit, - il est permis de s'interroger sur le point de savoir si la constitution d'un « évènement d'une ampleur exceptionnelle » doit être tenue pour une condition qui se cumule avec les énumérations précédentes relatives à l'intensité ; qu'il appartient donc à la cour d'interpréter cette clause ; qu'il convient de rappeler : - que l'on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes (article 1156 du code civil de la Nouvelle-Calédonie), - que lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun (article 1157), - que dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation (article 1162) ; qu'au regard de ces principes la cour considère que l'énumération : « qu'ils détruisent, brisent ou endommagent dans la commune où se situe les biens sinistrés ou dans les communes avoisinantes un certain nombre de bâtiments de type 1 » doit être tenue, pour partie, comme posant des conditions de localisation géographique du phénomène climatique, mais pour le surplus comme n'étant que l'énumération d'exemples d'intensité, et que le fait de constituer « un évènement d'une ampleur exceptionnelle » ne constitue pas une condition cumulative mais constitue la condition telle qu'illustrée auparavant ; que lire la clause comme le fait l'assureur conduit à une totale impossibilité de mise en jeu contrairement à ce qu'il soutient dans ses dernières écritures ; qu'ainsi, comment l'assuré pourrait-il établir la preuve de ce qu'un « certain nombre de bâtiments de type 1 » ont été détruits ou endommagés dans la commune ou « les communes avoisinantes » dès lors que la définition d'un bâtiment de type 1 qui renvoie à la page 64 « Garanties particulières » est propre à l'assureur et que celui-ci ne justifie pas que cette classification correspondrait à une classification officielle en Nouvelle-Calédonie ou à tout le moins partagée par les autres assureurs locaux ; qu'une telle application imposerait donc l'assuré d'aller s'enquérir auprès des autres assureurs – et à condition que ceux-ci acceptent de révéler ce qui peut ressortir de données confidentielles – non seulement de ce qu'ils ont eu des déclarations de sinistres mais surtout que ces sinistres ont touché les bâtiments tels que décrits par la clause susvisée ce qui justifierait, vu les précisions techniques « dont les murs sont constitués pour au moins 75% en maçonnerie » ou « bâtiments dont la couverture est constituée pour au moins 75% en ardoises ou tuiles? » la nécessité de recourir à une expertise [?] ; que sur la nature des biens sinistrés : l'assureur oppose à ce stade que l'indemnisation demandée par l'assuré concerne les réseaux individuels d'assainissement, biens non visés par la garantie souscrite ; que la fosse septique et le réseau d'assainissement, même partiellement extérieurs, constituent des éléments indissociables du bâtiment principal sans lesquels aucun permis de construire ne serait accordé et dont le défaut rend impropre à l'usage d'habitation ; que l'on doit donc retenir qu'il s'agit bien là d'un accessoire indissociable de l'habitation principale qui n'a pas été exclue de la garantie par l'assureur ; que l'obligation de garantie de l'assureur pour l'ensemble « fosse septique et réseau d'assainissement » sera donc confirmée ;

1°) ALORS QU' il résultait du paragraphe B intitulé « Inondation » de la clause 2.16 relative à « la protection des biens : Forces de la nature » situé en page 45 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par M. [P] que la compagnie d'assurance Gan Outremer Iard garantissait « toutes les détériorations accidentelles subies par le bâtiment assuré et le mobilier usuel résultant des effets de la libération d'étendues d'eaux naturelles ou artificielles, de ras-de-marées, du flux des vagues, des crues, de la montée des eaux, des eaux de ruissellement, coulée de boue, avec ou sans intervention des vents ; mascarets, lorsque ces phénomènes ont une intensité telle qu'ils détruisent, brisent ou endommagent dans la commune où se situe les biens sinistrés ou dans les communes avoisinantes un certain nombre de bâtiments de type 1 et constituent un évènement d'une ampleur exceptionnelle » ; qu'en jugeant, pour condamner la compagnie d'assurances Gan Outremer Iard à verser à M. [K] [P] la somme de 973 350 Francs Pacifiques au titre de l'indemnisation du sinistre survenu sur sa maison, que l'expression « qu'ils détruisent, brisent ou endommagent dans la commune où se situe les biens sinistrés ou dans les communes avoisinantes un certain nombre de bâtiments de type 1 et constituent un évènement d'une ampleur exceptionnelle » devait être interprétée comme posant des conditions de localisation géographique du phénomène climatique et n'étant que l'énumération d'exemples d'intensité et que l'interprétation de la clause par l'assureur selon laquelle il appartiendrait à l'assuré d'établir qu'un certain nombre de bâtiments de type 1 ont été endommagés était erronée comme rendant impossible pour l'assuré de rapporter une telle preuve, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la police d'assurance dont il résultait que la compagnie Gan Outremer Iard garantissait les détériorations accidentelles subies par le bâtiment assuré et le mobilier usuel qu'à la condition que la preuve soit rapportée que plusieurs bâtiments de type 1 aient été détruits, violant ainsi le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

2°) ALORS, à titre subsidiaire, QU' il résultait du paragraphe B intitulé « Inondation » de la clause 2.16 relative à « la protection des biens : Forces de la nature » situé en page 45 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par M. [P] qu'en cas d'inondation, la compagnie d'assurance Gan Outremer Iard garantissait toutes les détériorations accidentelles subies par le bâtiment assuré et le mobilier usuel, que la notion de bâtiment était définie en page 14 comme « les biens immobiliers définis dans les conditions personnelles et occupés exclusivement à usages d'habitation, ainsi que les murs de soutènement attenant aux bâtiments assurés, les clôtures non végétales et les murs d'enceinte » et que « sont assimilés à ces biens : les aménagements et installations qui ne peuvent être détachés sans être détériorés ou sans détériorer les constructions : - les installations privatives de chauffage ou de climatisation, - les revêtements de sol, de mur ou de plafond, exécutés aux frais du propriétaire des bâtiments assurés ou qui sont devenus la propriété du bailleur, et les sous-sols, garages, caves et greniers à usage non professionnel et situés à la verticale des biens immobiliers à usage d'habitation, y compris ceux des immeubles collectifs » ainsi que les dépendances et les vérandas, tandis que la notion de mobilier usuel était définie comme « les objets usuels, c'est-à-dire tous les objets autres que les objets de valeur, appartenant ou confiés à l'assuré ou à toute autre personne vivant habituellement avec lui ; - les espèces monnayées appartenant à l'assuré ou à toute autre personne vivant habituellement avec lui ; - les aménagements réalisés par l'assuré à ses frais lorsqu'il est locataire des biens assurés ou les aménagements repris par lui avec un bail en cours », étant précisé que « ce mobilier est à usage non professionnel et se trouve à l'intérieur des bâtiments désignés dans les conditions personnelles » ; qu'en retenant que les réseaux individuels d'assainissement, même partiellement extérieurs, constituaient des éléments indissociables du bâtiment principal sans lesquels aucun permis de construire ne se serait accordé et dont le défaut rendait impropre à l'usage d'habitation de sorte qu'ils étaient inclus dans la garantie de l'assureur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la police d'assurance qui ne prévoyait pas que les équipements précités étaient inclus dans la garantie, violant ainsi le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis.ECLI:FR:CCASS:2021:C201260