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vendredi 1 décembre 2023

Le risque sanitaire encouru par les occupants d’un immeuble peut, par sa gravité, caractériser l'impropriété de l'ouvrage à sa destination

 Lu dans la lettre de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation :

Le risque sanitaire encouru par les occupants d’un immeuble peut, par sa gravité, caractériser l'impropriété de l'ouvrage à sa destination

3E CIV., 14 SEPTEMBRE 2023, N° 22-13.858, PUBLIÉ AU BULLETIN

Dans l’affaire commentée, un syndicat de copropriétaires se plaignait, après réception de l’ouvrage, d’un défaut du système de puisage de l’eau chaude sanitaire, l’eau arrivant dans les logements en un temps anormalement long.

Il a assigné les vendeurs en l’état futur d’achèvement et les locateurs d’ouvrage, aux fins d’indemnisation, sur le fondement de la garantie décennale.

Les expertises judiciaires ont révélé un défaut de conformité aux normes sanitaires tenant à la longueur des tuyauteries d’eau chaude sanitaire entre les gaines palières et les points de puisage, qui augmentait la quantité d’eau contenue dans ces tuyauteries et favorisait le risque de développement de légionelles, entraînant un risque de légionellose pour les habitants de l’immeuble.

Pour autant, aucun cas de cette maladie ne s’était déclaré parmi les habitants de l’immeuble, durant le délai d’épreuve de la garantie décennale.

Ce risque sanitaire dû à un défaut de conformité aux normes sanitaires rend-il impropre l’ouvrage à sa destination, alors qu’il ne s’est pas réalisé dans le délai décennal ?

C’est la question à laquelle la Cour de cassation a répondu positivement dans son arrêt du 14 septembre 2023.

A l’instar de précédentes décisions relatives au défaut de conformité aux règles parasismiques (3e Civ., 7 oct. 2009, n° 08-17.620, Bull. N° 212 ; 3e Civ., 11 mai 2011, n° 10-11.713, Bull. III, n°70 ; 3e Civ., 19 sept. 2019, n° 18-16.986) ou aux règlements de sécurité exposant l’ouvrage à un risque d’incendie (3e Civ., 30 juin 1998, n° 96-20.789) et dans le prolongement de deux arrêts rendus en matière de risque sanitaire (3e Civ., 17 sept. 2020, n° 19-13.314 ; 3e Civ., 11 mai 2022, n° 21-15.608, publié), la Cour de cassation réaffirme que le risque sanitaire encouru par les occupants d'un ouvrage peut, par sa gravité, caractériser à lui seul l'impropriété de l'ouvrage à sa destination, même s'il ne s'est pas réalisé dans le délai d'épreuve.

Dès lors, la cour d’appel justifie sa décision en retenant que le risque de contamination à la légionellose auquel ont été exposés les résidents de l’ouvrage durant le délai d’épreuve, rend celui-ci impropre à sa destination, sans avoir à rechercher si ce risque s’est réalisé dans ce délai.

La Cour de cassation entend ainsi, comme en matière de normes parasismiques ou de sécurité incendie, assurer la sécurité de tout un chacun, cette fois sanitaire.    

mardi 25 octobre 2022

II incombait au fournisseur de s'informer du projet pour lequel les matériaux étaient commandés et de vérifier l'adéquation des produits vendus avec les contraintes de la construction des immeubles

  Note A. Caston, GP 2023-2, p. 66.

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 octobre 2022




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 715 F-D

Pourvoi n° S 21-17.349




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 OCTOBRE 2022

La société VDS Aluminium, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 58], a formé le pourvoi n° S 21-17.349 contre l'arrêt rendu le 23 février 2021 par la cour d'appel d'Amiens, dans le litige l'opposant :

1°/ au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 33], société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 28],

2°/ à M. [LD] [ET],

3°/ à Mme [GG] [BI], épouse [ET],

tous deux domiciliés [Adresse 21],

4°/ à M. [RI] [PZ],

5°/ à Mme [FW] [PZ],

tous deux domiciliés [Adresse 33],

6°/ à M. [OV] [IC],

7°/ à Mme [LW] [AN],

tous deux domiciliés [Adresse 27],

8°/ à M. [SB] [CA],

9°/ à Mme [WZ] [CA],

tous deux domiciliés [Adresse 49]),

10°/ à M. [IN] [EA],

11°/ à Mme [OM] [G],

tous deux domiciliés [Adresse 5]),

12°/ à Mme [YC] [GH], épouse [L], domiciliée [Adresse 54],

13°/ à M. [D] [AK],

14°/ à Mme [M] [AK],

tous deux domiciliés [Adresse 59],

15°/ à M. [BP] [YB],

16°/ à Mme [WZ] [FM],

tous deux domiciliés [Adresse 48],

17°/ à M. [VW] [RT], domicilié [Adresse 2],

18°/ à M. [MO] [NT],

19°/ à Mme [AS] [D],

tous deux domiciliés [Adresse 25],

20°/ à M. [LL] [SV],

21°/ à Mme [U] [HK],

tous deux domiciliés [Adresse 14],

22°/ à M. [BZ] [KI],

23°/ à Mme [YC] [KI],

tous deux domiciliés [Adresse 47],

24°/ à M. [ZO] [YK],

25°/ à Mme [SW] [VV], épouse [YK],

tous deux domiciliés [Adresse 34],

26°/ à Mme [J] [AJ], domiciliée [Adresse 60],

27°/ à M. [ZE] [PG],

28°/ à Mme [MP] [TO], épouse [PG],

tous deux domiciliés [Adresse 45],

29°/ à M. [IX] [OD],

30°/ à Mme [S] [PP], épouse [OD],

tous deux domiciliés [Adresse 53],

31°/ à M. [JP] [IW],

32°/ à Mme [BO] [EU], épouse [IW],

tous deux domiciliés [Adresse 12],

33°/ à Mme [BD] [UH], domiciliée [Adresse 29],

34°/ à M. [SB] [KT],

35°/ à Mme [WZ] [KT],

tous deux domiciliés [Adresse 61],

36°/ à M. [TY] [MZ],

37°/ à Mme [KK] [LC], épouse [MZ],

tous deux domiciliés [Adresse 26],

38°/ à Mme [NI] [EB], domiciliée [Adresse 3],

39°/ à M. [K] [FE],

40°/ à Mme [BJ] [CS], épouse [FE],

tous deux domiciliés [Adresse 20],

41°/ à M. [ZO] [WN],

42°/ à Mme [BW] [LX], épouse [WN],

tous deux domiciliés [Adresse 4],

43°/ à M. [GR] [YV],

44°/ à Mme [CE] [YV],

tous deux domiciliés [Adresse 23],

45°/ à M. [FD] [NJ],

46°/ à Mme [Y] [CM],

tous deux domiciliés [Adresse 62],

47°/ à M. [XI] [SC],

48°/ à Mme [A] [SC],

tous deux domiciliés [Adresse 41],

49°/ à M. [K] [F],

50°/ à Mme [N] [O],

tous deux domiciliés [Adresse 17],

51°/ à M. [WO] [TE], domicilié [Adresse 36],

52°/ à Mme [OL] [BR], domiciliée [Adresse 16],

53°/ à M. [B] [Z],

54°/ à Mme [HJ] [RJ], épouse [Z],

tous deux domiciliés [Adresse 19],

55°/ à Mme [PF] [WY], épouse [ZF],

56°/ à M. [PF] [ZF],

tous deux domiciliés [Adresse 39],

57°/ à M. [T] [HT],

58°/ à Mme [BW] [I], épouse [HT],

tous deux domiciliés [Adresse 13],

59°/ à M. [PF] [EJ], domicilié [Adresse 22],

60°/ à M. [YL] [KA],

61°/ à Mme [VK] [BU], épouse [KA],

tous deux domiciliés [Adresse 55],

62°/ à M. [X] [AM],

63°/ à Mme [PF] [R], épouse [AM],

tous deux domiciliés [Adresse 18],

64°/ à M. [US] [XS],

65°/ à Mme [VL] [EV], épouse [XS],

tous deux domiciliés [Adresse 8],

66°/ à M. [JP] [SM] [BK],

67°/ à Mme [XH] [TF], épouse [BK],

tous deux domiciliés [Adresse 33],

68°/ à M. [EA] [OC],

69°/ à Mme [KK] [OC],

tous deux domiciliés [Adresse 6],

70°/ à M. [AT] [JR], domicilié [Adresse 43],

71°/ à M. [SB] [KJ],

72°/ à Mme [PO] [H],

tous deux domiciliés [Adresse 38],

73°/ à M. [UT] [C],

74°/ à Mme [JZ] [HU], épouse [C],

tous deux domiciliés [Adresse 63],

75°/ à M. [IM] [BF],

76°/ à Mme [OW] [AX], épouse [BF],

tous deux domiciliés [Adresse 44],

77°/ à M. [PF] [MG], domicilié [Adresse 1],

78°/ à Mme [JZ] [VB], domiciliée [Adresse 40],

79°/ à M. [ZE] [W],

80°/ à Mme [LM] [W],

tous deux domiciliés [Adresse 56],

81°/ à M. [ZE] [NA], domicilié [Adresse 50],

82°/ à la société Hochede, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 9],

83°/ au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 33], dont le siège est [Adresse 32], représenté par son syndic la société Cotteau, dont le siège [Adresse 31],

84°/ à M. [ZO] [UI], domicilié [Adresse 57], exerçant sous l'enseigne [UI] promotion,

85°/ à la société Anodall Extruions Stradonne Roncoleva, dont le siège est [Adresse 64] (Italie),

86°/ à la société Barré, société anonyme, dont le siège est [Adresse 42],

87°/ à la SMABTP, société d'assurance mutuelle, dont le siège est [Adresse 52], prise en qualité d'assureur de la société Barre,

88°/ à la société MAF conseil, société anonyme, dont le siège est [Adresse 15],

89°/ à M. [FX] [TP],

90°/ à Mme [MF] [E], épouse [TP],

tous deux domiciliés [Adresse 24],

91°/ à Mme [JF] [BW] [RS], domiciliée [Adresse 30],

92°/ à M. [TZ] [HA], domicilié [Adresse 7],

93°/ à M. [FN] [JG], domicilié [Adresse 10],

94°/ à Mme [KK] [ZY], domiciliée [Adresse 10],

95°/ à M. [ZO] [SL],

96°/ à Mme [GP] [ZN],

tous deux domiciliés [Adresse 46],

97°/ à la société The Shingle, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 35],

98°/ à M. [FN] [EK],

99°/ à Mme [ID] [V],

tous deux domiciliés [Adresse 11],

100°/ à M. [SB] [IE],

101°/ à Mme [GZ] [WE],

tous deux domiciliés [Adresse 51],

102°/ à M. [CX] [VC],

103°/ à Mme [WF] [KU],

tous deux domiciliés [Adresse 37],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Bech, conseiller, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de la société VDS Aluminium, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société MAF conseils, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Barré et de la SMABTP, de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 33], de M. et Mme [ET], de M. et Mme [PZ], de M. [IC], de Mme [AN], de M. et Mme [CA], de M. [EA], de Mmes [G], [L], de M. et Mme [AK], de M. [YB], de Mme [FM], de M. [RT], de M. [NT], de Mme [D], de M. [SV], de Mme [HK], de M. et Mme [KI], de M. et Mme [YK], de Mme [AJ], de M. et Mme [PG], de M. et Mme [OD], de M. et Mme [IW], de Mme [UH], de M. et Mme [KT], de M. et Mme [MZ], de Mme [EB], de M. et Mme [FE], de M. et Mme [WN], de M. et Mme [YV], de M. [NJ], de Mme [CM], de M. et Mme [SC], de M. [F], de Mme [O], de M. [TE], de Mme [BR], de M. et Mme [Z], de M. et Mme [ZF], de M. et Mme [HT], de M. [EJ], de M. et Mme [KA], de M. et Mme [AM], de M. et Mme [XS], de M. et Mme [BK], de M. et Mme [OC], de MM. [JR], [KJ], de Mme [H], de M. et Mme [C], de M. et Mme [BF], de M. [MG], de Mme [VB], de M. et Mme [W], de M. [NA], de la SCI Hochede, de M. et Mme [TP], de Mme [RS], de MM. [HA], [JG], de Mme [ZY], de M. [SL], de Mme [ZN], de la société The Shingle, de M. [EK], de Mme [V], de M. [IE], de Mme [WE], de M. [VC] et de Mme [KU], après débats en l'audience publique du 6 septembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Bech, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société VDS aluminium (la société VDS) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Anodall Extruions Stradonne Roncoleva.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 23 février 2021), la société civile immobilière Le Sémaphore (la SCI) a fait édifier trois bâtiments divisés en appartements.

3. Parmi les différents intervenants aux opérations de construction, la société Barré, assurée auprès de la SMABTP, était chargée de la pose des menuiseries extérieures. Elle a acheté les profilés en aluminium utilisés pour la confection des garde-corps à la société VDS.

4. Ayant constaté des désordres dans les parties communes et privatives, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 33] (le syndicat des copropriétaires) et plusieurs copropriétaires ont, après expertise, assigné différents constructeurs et leurs assureurs, dont la société Barré et la SMABTP, en indemnisation de leurs préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La société VDS fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec la SMABTP et d'autres locateurs d'ouvrage, à payer au syndicat des copropriétaires ainsi qu'aux copropriétaires une certaine somme au titre des désordres affectant les garde-corps et de dire que, dans les rapports entre coobligés, la charge du paiement de cette somme sera supportée à hauteur de 30 % par la société Barré et son assureur et de 70 % par la société VDS,
alors :

« 1°/ que l'obligation de conseil du vendeur à l'égard de l'acheteur professionnel n'existe que dans la mesure où la compétence de ce dernier ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des produits qui lui sont livrés ; qu'en constatant que la société Barré était un « professionnel de l'aluminium, qu'elle connaissait la localisation de la construction à proximité de la mer » et « se devait de vérifier elle-même les normes devant être respectées » mais en condamnant la société VDS Aluminum au titre de la méconnaissance de son obligation de conseil, la cour d'ppel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1604 et 1615 du code civil, ensemble son article 1147 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ que le devoir du vendeur professionnel de matériaux de s'informer du projet pour lequel les matériaux lui sont commandés et de vérifier l'adéquation des produits vendus avec les contraintes qui s'y rapportent étant un corollaire de son obligation de renseignement et de conseil, un tel devoir n'existe que dans la mesure où la compétence de l'acheteur ne lui donne pas les moyens d'apprécier par lui-même la portée exacte des caractéristiques techniques des biens qui lui sont livrés ; qu'en affirmant que la société VDS, « quand bien même elle contractait avec la société Barré qui est un professionnel de l'aluminium, n'en était pas moins tenue à un devoir de conseil envers la première et qu'il lui appartenait de s'informer du projet pour lequel des matériaux lui étaient commandés et de vérifier l'adéquation des produits vendus avec les contraintes de toute nature qui s' rapportaient» la cour d'appel a violé les articles 1604 et 1615 du code civil, ensemble son article 1147 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ que le devoir du vendeur professionnel de matériaux de s'informer du projet pour lequel les matériaux lui sont commandés et de vérifier l'adéquation des produits vendus avec les contraintes qui s'y rapportent étant un corollaire de son obligation de renseignement et de conseil, un tel devoir n'existe que dans la mesure où la compétence de l'acheteur ne lui donne pas les moyens d'apprécier par lui-même la portée exacte des caractéristiques techniques des biens qui lui sont livrés ; qu'en statuant ainsi, sans relever que l'acquéreur, professionnel de l'aluminium, n'aurait pas eu la compétence nécessaire pour apprécier lui-même la portée exacte des caractéristiques techniques des produits qui lui étaient livrés et leur absence


d'adaptation à la localisation d'une construction proche de la mer, la cour d'appel a violé les articles 1604 et 1615 du code civil, ensemble son article 1147 dans sa réaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

4°/ que l'acquéreur, à plus forte raison lorsqu'il est un professionnel de même spécialité que le vendeur, ne saurait se prévaloir d'n manquement du vendeur à son devoir de conseil sur l'adéquation des matériaux commandés aux contraintes liées à la localisation de l'ouvrage dès lors qu'il ne lui a pas précisé cette localisation lors de la commande ; qu'en affirmant que la société VDS, « quand bien même elle contractait avec la société Barré, qui est un professionnel de l'aluminium, n'en était pas moins tenue à un devoir de conseil envers la première et qu'il lui appartenait de s'informer du projet pour lequel des matériaux lui étaient commandés et de vérifier l'adéquation des produits vendus avec les contraintes de toute nature qui s'y rapportaient », après avoir pourtant constaté qu'il n'apparaissait pas, «au vu des bons de commande, que l'attention du fournisseur ait été attirée, en 2006, sur la localisation de la construction près de la mer », ce dont elle aurait dû déduire que les désordres liés au non-respect de la norme « Qualimarine» ne résultaient pas d'un manquement du vendeur à son obligation de conseil, la cour d'appel a violé les articles 1604 et 1615 du code civil, ensemble l'article 1147 du même code dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a retenu que, même si elle contractait avec la société Barré qui est un professionnel de l'aluminium, la société VDS n'en était pas moins tenue à un devoir de conseil envers sa cliente et qu'il lui incombait de s'informer du projet pour lequel les matériaux étaient commandés et de vérifier l'adéquation des produits vendus avec les contraintes de toute nature qui se rapportaient à la construction des immeubles, et qu'elle ne soutenait pas l'avoir fait ni n'établissait que, préalablement à la conclusion du contrat, elle aurait respecté son devoir de conseil.

8. Elle en a exactement déduit que la société VDS, qui ne soutenait pas que la compétence de la société Barré lui donnait les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des biens vendus, avait ainsi engagé sa responsabilité envers la société Barré en raison de la perte de chance qui en était résultée pour cette société de mettre en oeuvre un produit répondant à la norme assurant la stabilité dans le temps des profilés d'aluminium, ce qui était en lien direct avec le préjudice qu'elle subissait par suite de sa condamnation.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.



PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société VDS Aluminium aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

mardi 7 juillet 2020

Colliers de canalisations : notion d'ouvrage et responsabilité décennale

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 25 juin 2020
N° de pourvoi: 19-16.905
Non publié au bulletinRejet

M. Chauvin (président), président
SCP L. Poulet-Odent, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)



Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 3

JT



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 juin 2020




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 361 F-D

Pourvoi n° T 19-16.905




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 JUIN 2020

Le syndicat des copropriétaires Le Clos de Socorro, dont le siège est [...] , représenté par son syndic la société Cabinet Barthes, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° T 19-16.905 contre l'arrêt rendu le 7 mars 2019 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société SMA, société anonyme, dont le siège est [...] , anciennement dénommé Sagena,

2°/ à la société Case Obedia, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , en liquidation amiable, représentée par son liquidateur amiable et mandataire ad hoc,

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat du syndicat des copropriétaires Le Clos de Socorro, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société SMA, après débats en l'audience publique du 12 mai 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 mars 2019), la société Moulin de la mer, qui a fait construire un ensemble de plusieurs villas réparties en îlots, a confié le lot plomberie-sanitaires à la société Case Obedia, assurée en responsabilité décennale auprès de la société SMA, anciennement dénommée Sagena.

2. Se plaignant de fuites dans les vides sanitaires du réseau d'alimentation en eau potable de certains îlots, le syndicat des copropriétaires Le Clos de Socorro (le syndicat des copropriétaires) a assigné, après expertise, T... X..., en sa qualité de liquidateur amiable de la société Case Obedia, et son assureur décennal en réparation sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Recevabilité du pourvoi examinée d'office, après avis délivré aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile

Vu les articles 117 et 125 du code de procédure civile :

3. Il y a lieu de déclarer irrecevable le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Case Obedia, dépourvue de représentant légal à la suite du décès de T... X..., liquidateur amiable, survenu le 22 juin 2016, et en l'absence de désignation d'un mandataire ad hoc aux fins de la représenter à l'instance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de dire que les désordres ne relèvent pas de la garantie décennale des constructeurs et de rejeter ses demandes formées à l'encontre de la société SMA, alors :

« 1°/ qu'en énonçant que le devis du 5 décembre 2012 de la société Rouan émanerait d'une société qui ne serait jamais intervenue sur site pour la recherche des fuites d'eau que ce soit avant ou après le passage de l'expert et qu'il serait imprécis quant aux vides-sanitaires concernés puisqu'il vise « certains vides-sanitaires » et ne permettrait pas de dire que les vides-sanitaires des îlots [...] ne sont pas accessibles sans détérioration de l'ouvrage, quand il résulte des termes clairs et précis de ce devis selon lesquels « d'autre part, il sera nécessaire de faire dégager l'accès de l'entrée des vides sanitaires inaccessibles (comme nous l'avons constaté le jour de l'expertise) par une entreprise de maçonnerie », que cette société est bien intervenue sur le site et ce le jour de l'expertise, qu'elle a constaté l'inaccessibilité des vides-sanitaires objets des désordres soumis à l'expert et non pas seulement de « certains vides-sanitaires », et la nécessité de faire appel à une entreprise de maçonnerie pour procéder aux réparations, la Cour d'appel a dénaturé ce devis en violation du principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

2°/ que la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage qui font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert ; qu'un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage ; qu'en écartant la garantie décennale, après avoir constaté que le schéma de principe réseau AEP dans vide-sanitaire ilot H annexé au rapport d'expertise fait apparaître que le vide-sanitaire et sa trappe d'accès se trouvent sous la chaussée et qu'il est donc nécessaire de dégager l'accès en surface en enlevant de la matière sur la chaussée, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard de l'article 1792-2 du code civil qu'elle a violé ;

3°/ que l'entrepreneur de construction, qui n'apporte pas la preuve d'un cas de force majeure ou d'une cause étrangère, doit être déclaré responsable des désordres portant atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination sur le fondement décennal, la mise en jeu de la garantie décennale d'un constructeur n'exigeant pas la recherche de la cause des désordres ; que l'expert précise que le coup de bélier est un phénomène de surpression qui arrive au moment de la variation brusque de la vitesse d'un liquide par suite de la fermeture/ouverture rapide d'une vanne ou d'un robinet, et que la pression peut entraîner la rupture de la conduite surtout au niveau des joints du fait de la quantité d'eau en mouvement, ce problème pouvant être résolu avec la mise en place d'un anti bélier ; qu'en se fondant, pour écarter l'application de la garantie décennale, sur la circonstance que l'expert avait attribué la fuite au droit des colliers à une surpression accidentelle, un coup de bélier par exemple, et que rien ne permettrait d'affirmer que les fuites ne se seraient pas produites dans de pareilles circonstances avec des colliers conformes, la Cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'existence d'une cause étrangère ou d'une force majeure à l'origine des fuites d'eau, a violé l'article 1792 du code civil ;

4°/ qu'en se bornant à exclure la preuve d'une perte de débit ou de coupures de distribution d'eau, sans rechercher comme elle y était invitée, si la présence de fuites affectant des canalisations d'alimentation d'eau et entraînant un important surcoût pour les habitants des villas, n'affecte pas la solidité de cet élément d'équipement et ne le rend pas impropre à sa destination, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 et 1792-2 du code civil ;

5°/ que les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ; qu'en énonçant qu'il n'est pas prétendu ni démontré, au-delà des désagréments de ruptures et fuites d'eau, l'impossibilité d'obtenir une eau adaptée aux besoins qu'elle est censée satisfaire, notamment pour l'alimentation et la toilette des résidents, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée si des fuites d'eau inondant les sous-sols et entraînant l'humidité du carrelage en rez-de-chaussée des villas et un surcoût important sur les factures d'eau potable, ne rendent pas les villas impropres à leur destination, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. D'une part, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté que les canalisations dont les colliers de raccordement étaient fuyards dans certains îlots étaient posées à même le sol des vides sanitaires, lesquels étaient accessibles par des trappes d'accès sous la chaussée, et que des remplacements de colliers défectueux avaient été effectués sans détérioration de l'ouvrage, les factures d'interventions précédentes ou postérieures au dépôt du rapport de l'expert judiciaire ne comportant aucun poste de maçonnerie.

6. Elle a relevé, sans dénaturation, que le devis produit par le syndicat des copropriétaires, évoquant la nécessité de faire dégager l'accès de certains vides sanitaires, ne désignait pas les îlots concernés alors que ni l'expert ni son sapiteur n'avaient mentionné une quelconque difficulté pour accéder aux vides sanitaires des îlots en litige.

7. Elle a ainsi pu retenir que les canalisations en cause ne constituaient pas un élément indissociable de l'ouvrage.

8. D'autre part, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à de simples allégations dépourvues de toute offre de preuve sur l'humidité des carrelages en rez-de-chaussée et devant laquelle il n'était pas soutenu que le surcoût des factures d'eau imputé aux fuites rendait les villas impropres à leur destination, a retenu que le syndicat des copropriétaires n'établissait pas que les désordres constatés eussent provoqué une perte de débit ou des coupures de distribution d'eau de nature à affecter l'alimentation des villas.

9. Elle en a exactement déduit que la garantie décennale n'était pas applicable.

10. La cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à d'autres recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a, par ces seuls motifs, abstraction faite d'un motif surabondant critiqué par la troisième branche, légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société [...], prise en la personne de son liquidateur amiable et mandataire ad hoc ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le syndicat des copropriétaires Le Clos de Socorro aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

mercredi 8 juin 2016

Besoins du maître de l'ouvrage et devoir de conseil du maître d'oeuvre

Cet arrêt est commenté par :

- Mme Parmentier, Gaz. Pal., 2016, n° 28, p. 68.

- Mme Pagès-de-Varenne, Construction - Urbanisme n° 7-8, Juillet 2016, p. 28.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 2 juin 2016
N° de pourvoi: 15-16.981
Publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Boulloche, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Odent et Poulet, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 janvier 2015), que la Société d'exploitation du parc des expositions de la ville de Marseille (la société SAFIM), qui a entrepris la construction d'un nouveau hall d'exposition, a confié une mission de maîtrise d'oeuvre concernant notamment la conception architecturale à M. X..., architecte, assuré auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), et une mission d'études techniques et de direction des travaux, au bureau d'études EPHTA, aux droits duquel se trouve la société SLH Ingénierie, assuré auprès de la SMABTP ; que la société SAFIM a souscrit un contrat d'assurance dommages ouvrage auprès de la société SAGENA, devenue la société SMA ; que les travaux ont été réceptionnés avec réserves les 3 et 4 novembre 2003 ; qu'en 2005, la société SAFIM a déclaré deux sinistres, le premier concernant la couverture des caniveaux techniques du hall, en raison de l'insuffisance de résistance des dalles en bois recouvrant ces caniveaux à l'occasion du passage d'engins notamment de levage, le second relatif à la résistance de la dalle bétonnée de ce hall ; que l'assureur dommages ouvrage a dénié sa garantie au motif que l'utilisation qui avait été faite de ce hall d'exposition n'était pas conforme aux pièces écrites des marchés ; que la société SAFIM a assigné la SAGENA, M. X... et la société SLH ingénierie ainsi que leurs assureurs en indemnisation de ses préjudices ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :

Attendu que M. X..., la MAF, la société SLH ingénierie et la SMABTP font grief à l'arrêt de les condamner, in solidum, à payer à la société SAFIM la somme de 1 100 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que l'obligation de conseil du maître d'oeuvre ne porte pas sur des faits connus ou devant l'être par son cocontractant ; qu'il en va ainsi spécialement si le maître d'ouvrage est un professionnel et si le conseil est fondé sur des éléments qui n'ont pas été portés à la connaissance de l'architecte ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations mêmes de l'arrêt attaqué que la société SAFIM, professionnelle de locaux destinés à divers événements, a demandé au maître d'oeuvre de réaliser un ouvrage permettant une surcharge au sol supérieure à 500 kg/m², correspondant à la seule norme applicable, que le maître d'ouvrage n'a pas défini un ouvrage à construire devant permettre de faire circuler des charges roulantes lourdes à l'intérieur du hall, qu'il n'a pas informé les concepteurs de son souhait de faire circuler de telles charges et que les désordres sont dus à l'utilisation inadaptée de l'ouvrage par le maître d'ouvrage qui a fait circuler des engins dont le poids excédait ce que l'ouvrage pouvait supporter ; qu'en reprochant néanmoins à l'architecte de n'avoir pas donné au maître d'ouvrage des conseils adaptés portant notamment sur la circulation d'engins à l'intérieur du hall et le déplacement de charges lourdes, bien qu'il n'ait pas été informé que de tels engins devaient circuler, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant retenu que, si le maître de l'ouvrage ne justifiait pas avoir informé les concepteurs de son souhait de faire circuler des charges lourdes à l'intérieur du hall, l'architecte et le bureau d'études auraient dû se préoccuper du mode d'exploitation de l'ouvrage situé dans un parc des expositions, et de la question des charges roulantes, compte tenu notamment de la surface importante de ce hall d'exposition, de la taille et du nombre des portes permettant à des poids lourds d'y accéder, des systèmes d'accrochage en plafond prévus pour supporter une charge d'une tonne avec chariots élévateurs et de l'exposition d'objets lourds à envisager, et qu'il n'était pas établi que les charges dynamiques résultant de la circulation d'engins à l'intérieur du hall pour permettre son exploitation, avaient fait l'objet de préconisations, observations, remarques ou conseils de la part de l'architecte ou du bureau d'études, en dépit des missions qui leur étaient confiées, la cour d'appel a pu décider que l'architecte et le bureau d'études avaient manqué à leur obligation de conseil ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal :

Attendu que M. X... et la MAF font grief à l'arrêt de juger que, dans leurs rapports entre eux, M. X... et la MAF d'une part, et la société SLH ingénierie, d'autre part, supporteront chacun la moitié des condamnations, alors, selon le moyen, que, dans leurs conclusions d'appel, M. X... et la Mutuelle des architectes français ont fait valoir que seul le BET, maître d'oeuvre d'exécution, avait la charge de la conception des sols, au stade de laquelle l'épaisseur des dalles avait été modifiée ; qu'en décidant que l'architecte devait, au niveau de la contribution à la dette, supporter une part de responsabilité, sans répondre au moyen invoquant la faute du bureau d'études tenant à la modification de l'épaisseur des dalles, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu, répondant aux conclusions, que l'architecte avait commis une faute en n'informant pas le bureau d'études sur l'utilisation concrète du bâtiment à édifier notamment lors des opérations de montage et de démontage des expositions ou autres manifestations, précisions qui lui auraient permis de rédiger un CCTP mieux adapté et de procéder aux calculs appropriés, et que, de même, le bureau d'études était fautif pour ne pas avoir attiré l'attention de l'architecte sur le problème des charges roulantes, alors même que les conventions signées par ces deux professionnels leur imposaient un devoir de collaboration dans l'intérêt même de l'opération à réaliser pour le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a pu décider que, compte tenu de leurs fautes respectives, dans leurs rapports, chaque constructeur supportera la moitié des condamnations ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. X..., la MAF, la société SMA, la société SLH ingénierie et la SMABTP aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. X..., la MAF, la société SMA, la société SLH ingénierie et la SMABTP et les condamne à payer à la société SAFIM la somme globale de 3 000 euros ;


Besoins du maître de l'ouvrage et devoir de conseil du maître d'oeuvre

Cet arrêt est commenté par :

- Mme Parmentier, Gaz. Pal., 2016, n° 28, p. 68.

- Mme Pagès-de-Varenne, Construction - Urbanisme n° 7-8, Juillet 2016, p. 28.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 2 juin 2016
N° de pourvoi: 15-16.981
Publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Boulloche, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Odent et Poulet, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 janvier 2015), que la Société d'exploitation du parc des expositions de la ville de Marseille (la société SAFIM), qui a entrepris la construction d'un nouveau hall d'exposition, a confié une mission de maîtrise d'oeuvre concernant notamment la conception architecturale à M. X..., architecte, assuré auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), et une mission d'études techniques et de direction des travaux, au bureau d'études EPHTA, aux droits duquel se trouve la société SLH Ingénierie, assuré auprès de la SMABTP ; que la société SAFIM a souscrit un contrat d'assurance dommages ouvrage auprès de la société SAGENA, devenue la société SMA ; que les travaux ont été réceptionnés avec réserves les 3 et 4 novembre 2003 ; qu'en 2005, la société SAFIM a déclaré deux sinistres, le premier concernant la couverture des caniveaux techniques du hall, en raison de l'insuffisance de résistance des dalles en bois recouvrant ces caniveaux à l'occasion du passage d'engins notamment de levage, le second relatif à la résistance de la dalle bétonnée de ce hall ; que l'assureur dommages ouvrage a dénié sa garantie au motif que l'utilisation qui avait été faite de ce hall d'exposition n'était pas conforme aux pièces écrites des marchés ; que la société SAFIM a assigné la SAGENA, M. X... et la société SLH ingénierie ainsi que leurs assureurs en indemnisation de ses préjudices ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :

Attendu que M. X..., la MAF, la société SLH ingénierie et la SMABTP font grief à l'arrêt de les condamner, in solidum, à payer à la société SAFIM la somme de 1 100 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que l'obligation de conseil du maître d'oeuvre ne porte pas sur des faits connus ou devant l'être par son cocontractant ; qu'il en va ainsi spécialement si le maître d'ouvrage est un professionnel et si le conseil est fondé sur des éléments qui n'ont pas été portés à la connaissance de l'architecte ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations mêmes de l'arrêt attaqué que la société SAFIM, professionnelle de locaux destinés à divers événements, a demandé au maître d'oeuvre de réaliser un ouvrage permettant une surcharge au sol supérieure à 500 kg/m², correspondant à la seule norme applicable, que le maître d'ouvrage n'a pas défini un ouvrage à construire devant permettre de faire circuler des charges roulantes lourdes à l'intérieur du hall, qu'il n'a pas informé les concepteurs de son souhait de faire circuler de telles charges et que les désordres sont dus à l'utilisation inadaptée de l'ouvrage par le maître d'ouvrage qui a fait circuler des engins dont le poids excédait ce que l'ouvrage pouvait supporter ; qu'en reprochant néanmoins à l'architecte de n'avoir pas donné au maître d'ouvrage des conseils adaptés portant notamment sur la circulation d'engins à l'intérieur du hall et le déplacement de charges lourdes, bien qu'il n'ait pas été informé que de tels engins devaient circuler, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant retenu que, si le maître de l'ouvrage ne justifiait pas avoir informé les concepteurs de son souhait de faire circuler des charges lourdes à l'intérieur du hall, l'architecte et le bureau d'études auraient dû se préoccuper du mode d'exploitation de l'ouvrage situé dans un parc des expositions, et de la question des charges roulantes, compte tenu notamment de la surface importante de ce hall d'exposition, de la taille et du nombre des portes permettant à des poids lourds d'y accéder, des systèmes d'accrochage en plafond prévus pour supporter une charge d'une tonne avec chariots élévateurs et de l'exposition d'objets lourds à envisager, et qu'il n'était pas établi que les charges dynamiques résultant de la circulation d'engins à l'intérieur du hall pour permettre son exploitation, avaient fait l'objet de préconisations, observations, remarques ou conseils de la part de l'architecte ou du bureau d'études, en dépit des missions qui leur étaient confiées, la cour d'appel a pu décider que l'architecte et le bureau d'études avaient manqué à leur obligation de conseil ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal :

Attendu que M. X... et la MAF font grief à l'arrêt de juger que, dans leurs rapports entre eux, M. X... et la MAF d'une part, et la société SLH ingénierie, d'autre part, supporteront chacun la moitié des condamnations, alors, selon le moyen, que, dans leurs conclusions d'appel, M. X... et la Mutuelle des architectes français ont fait valoir que seul le BET, maître d'oeuvre d'exécution, avait la charge de la conception des sols, au stade de laquelle l'épaisseur des dalles avait été modifiée ; qu'en décidant que l'architecte devait, au niveau de la contribution à la dette, supporter une part de responsabilité, sans répondre au moyen invoquant la faute du bureau d'études tenant à la modification de l'épaisseur des dalles, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu, répondant aux conclusions, que l'architecte avait commis une faute en n'informant pas le bureau d'études sur l'utilisation concrète du bâtiment à édifier notamment lors des opérations de montage et de démontage des expositions ou autres manifestations, précisions qui lui auraient permis de rédiger un CCTP mieux adapté et de procéder aux calculs appropriés, et que, de même, le bureau d'études était fautif pour ne pas avoir attiré l'attention de l'architecte sur le problème des charges roulantes, alors même que les conventions signées par ces deux professionnels leur imposaient un devoir de collaboration dans l'intérêt même de l'opération à réaliser pour le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a pu décider que, compte tenu de leurs fautes respectives, dans leurs rapports, chaque constructeur supportera la moitié des condamnations ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. X..., la MAF, la société SMA, la société SLH ingénierie et la SMABTP aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. X..., la MAF, la société SMA, la société SLH ingénierie et la SMABTP et les condamne à payer à la société SAFIM la somme globale de 3 000 euros ;


dimanche 5 octobre 2014

Pompe à chaleur immergée : ouvrage dont l'impropriété à destination s'apprécie indépendamment de l'immeuble pris dans son ensemble

Voir notes :

- Dessuet, RGDA 2014, p. 564 : "Travaux sur existants : l'impropriété à la destination s'apprécie indépendamment de l'immeuble pris dans son ensemble".
- Malinvaud, RDI 2014, p. 643.
- Rias, RTDI 2014-4, p 41.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 24 septembre 2014
N° de pourvoi: 13-19.615
Non publié au bulletin Cassation

M. Terrier (président), président
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Odent et Poulet, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Donne acte à la société Maison Malleval du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Axa France IARD ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 mars 2013), que la société Maison Malleval a confié à la société Resurgence la réalisation, dans sa cave, d'un double forage destiné au fonctionnement d'une installation de climatisation; que des dysfonctionnements de l'installation de climatisation étant apparus, la société Maison Malleval a assigné en indemnisation de ses préjudices la société Resurgence, qui a appelé en cause son assureur, la société Axa ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de débouter la société Maison Malleval de sa demande formée sur le fondement de la responsabilité décennale de la société Resurgence :

Vu les articles 1792 et 1792-2 du code civil ;

Attendu que pour débouter la société Maison Malleval de ses demandes formées sur l'article 1792 du code civil, l'arrêt retient que s'agissant d'un ouvrage conçu au sein d'un bâtiment de commerce et bureaux afin de rafraîchir l'air ambiant, il doit être considéré en raison de son importance et de son emprise sur le sous-sol comme constituant un élément d'équipement, que, compte tenu du fait qu'il ne s'agit pas d'un ouvrage autonome mais d'un simple élément d'équipement, l'impropriété à destination ne se conçoit pas au niveau de l'élément d'équipement lui-même mais bien à celui de l'ouvrage desservi dans son ensemble et que la société Maison Malleval ne dit pas en quoi un certain rafraîchissement de l'air ambiant était nécessaire au bon fonctionnement de sa surface de vente en rez-de-chaussée et de ses bureaux ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'installation d'un système de climatisation par pompe à chaleur immergée au fond d'un puits en contact avec la nappe phréatique sur un ouvrage existant constitue un ouvrage dont l'impropriété à destination s'apprécie indépendamment de l'immeuble pris dans son ensemble, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi provoqué, qui est recevable

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la disposition attaquée par le moyen unique du pourvoi principal se rattachant par un lien de dépendance nécessaire au chef critiqué par le moyen unique du pourvoi provoqué, la cassation de l'arrêt sur le moyen unique du pourvoi principal entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de la disposition relative à la mise hors de cause de la société Axa France ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne la société Resurgence et la société Axa France IARD aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


lundi 23 juin 2014

Défaillance de l'élément d'équipement rendant l'ensemble de l'ouvrage impropre à sa destination : responsabilité décennale

Voir note PAGES DE VARENNE, Revue « CONSTRUCTION URBANISME », 2014, n° 9, p. 28.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 11 juin 2014
N° de pourvoi: 13-16.844
Non publié au bulletin Cassation

M. Terrier (président), président
SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte aux époux X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Mele et associés ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1792 et 1792-2 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 28 février 2013), que, par acte du 7 août 2003, les époux Y... ont vendu aux époux X... un immeuble à usage d'habitation, par l'intermédiaire de la société Mélé, agent immobilier, qui avait mentionné sur l'annonce de vente « maison en bon état de 1991 » ; qu'à la suite d'un orage, provoquant un dégât des eaux, les époux X..., prétendant avoir constaté que des désordres affectaient leur toiture dont de nombreux éléments étaient antérieurs à l'année 1991, ont, après expertise, assigné les époux Y... et la société Mélé pour obtenir paiement des travaux de reprise ;

Attendu que pour débouter les époux X... de leur demande l'arrêt retient que le chéneau, seule cause de désordre certain dans le délai de la garantie décennale, constitue un élément d'équipement qui ne forme pas indissociablement corps avec le couvert puisque sa dépose, son démontage ou son remplacement peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage et qu'il en résulte que le chéneau, même s'il est la cause des désordres qu'ils décrivent, fait seulement l'objet d'une garantie de bon fonctionnement d'une durée de deux ans, par application de l'article 1792-3 du code civil et ce, même si l'expert a estimé que les désordres constatés étaient de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la responsabilité de plein droit est mise en oeuvre s'agissant d'un élément d'équipement dès lors que le désordre l'affectant rend l'ouvrage impropre à sa destination, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer aux époux X... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande des époux Y... ;