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mardi 3 mai 2022

Le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies.

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 avril 2022




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 371 F-D

Pourvoi n° B 21-14.322


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 AVRIL 2022

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Raphaël, dont le siège est [Adresse 3], représenté par son syndic la société Gestion immobilière Bertrand Petit, dont le siège est [Adresse 6], a formé le pourvoi n° B 21-14.322 contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [S] [I], domicilié [Adresse 1],

2°/ à la société Immoda, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], exerçant sous l'enseigne Riviera Horizon,

défendeurs à la cassation.

M. [I] et la société Immoda ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grandjean, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Raphaël à [Localité 5], de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de M. [I] et de la société Immoda, après débats en l'audience publique du 22 mars 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grandjean, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 janvier 2021), M. [I] est propriétaire d'un lot à usage commercial au sein d'un immeuble soumis au statut de la copropriété.

2. L'assemblée générale des copropriétaires a, le 20 septembre 2013, refusé la pose, sur les parties communes, d'une enseigne lumineuse et d'une casquette de protection de la devanture du local commercial appartenant à M. [I], et exploité par la société Immoda dont il est le gérant.

3. M. [I] et la société Immoda ont assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Raphaël à [Localité 5] afin d'être autorisés à installer cette enseigne et cette casquette et d'obtenir sa condamnation à leur payer des dommages et intérêts.

Examen des moyens

Sur les premier et second moyens du pourvoi principal, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

5. M. [I] et la société Immoda font grief à l'arrêt de rejeter la demande de M. [I] en paiement de la somme de 6 415,25 euros en réparation du préjudice matériel subi, alors « que le juge qui constate la réunion des conditions de la responsabilité, et notamment l'existence d'un dommage ne peut priver la victime de réparation, au motif qu'il n'est pas en mesure de chiffrer le montant du préjudice réparable ; que la cour d'appel a retenu qu'il est admis que le local de M. [I] a subi des infiltrations d'eau en provenance de la façade et qu'en suite des rapports d'expertise des experts d'assurances intervenus dans les lieux, la copropriété l'a finalement autorisé à faire poser en façade une casquette de protection ; qu'elle a néanmoins rejeté sa demande indemnitaire aux motifs que le rapport d'expertise amiable de l'assureur en date du 26 avril 2016 ne renseigne aucunement sur la nature et l'ampleur des dommages et que le procès-verbal de constat du 20 mars 2017 ne le fait pas plus ; qu'en rejetant la demande indemnitaire, après avoir pourtant constaté la réunion des conditions de la responsabilité et particulièrement l'existence d'un dommage la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé l'article 4 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code civil :

6. Il résulte de ce texte que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies.

7. Pour rejeter la demande en réparation de son dommage, l'arrêt retient que M. [I] ne justifie que d'un devis, émanant d'une entreprise radiée du registre du commerce et des sociétés un an avant son émission, que l'extrait de compte bancaire de la société Immoda pour la période du 1er au 30 juin 2016 ne porte pas la trace du paiement correspondant, que le rapport d'expertise amiable de l'assureur et que le procès verbal de constat ne renseignent aucunement sur la nature et l'ampleur des dommages.

8. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le local de M. [I] subissait des infiltrations d'eau, la cour d'appel, qui a refusé d'évaluer un préjudice dont elle avait constaté l'existence, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en remboursement de la somme de 6 415,25 euros de M. [I], l'arrêt rendu le 28 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Raphaël à [Localité 5] aux dépens du pourvoi principal et du pourvoi incident ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Raphaël à [Localité 5] et le condamne à payer à M. [I] et la société Immoda la somme globale de 3 000 euros ;

mardi 26 octobre 2021

Le moyen de défense tendant au rejet d'une demande de garantie en raison des fautes du demandeur, tend, le cas échéant, au rejet partiel de la demande en raison des mêmes fautes

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 octobre 2021




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 737 F-D

Pourvoi n° K 20-19.179




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 OCTOBRE 2021

1°/ M. [I] [X], domicilié [Adresse 1], agissant sous l'enseigne Stemokat,

2°/ la société Entreprise [T], dont le siège est [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° K 20-19.179 contre l'arrêt rendu le 25 juin 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-4), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [P] [E],

2°/ à Mme [O] [U], épouse [E],

domiciliés tous deux [Adresse 3],

3°/ à Mme [D] [F], épouse [Y], domiciliée [Adresse 2], 4°/ à la MAAF assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. [X] et de la société Entreprise [T], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. et Mme [E], après débats en l'audience publique du 14 septembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 juin 2020), en 2008, Mme [Y] a vendu une maison à M. et Mme [E].

2. Les parties étaient convenues qu'une partie du prix serait séquestrée dans l'attente de l'achèvement de travaux en cours, portant sur la réfection de la toiture.

3. Ces travaux étaient confiés à M. [X], exerçant sous l'enseigne Stemokat, assuré auprès de la société MAAF assurances.

4. Se plaignant d'infiltrations apparues en 2011, M. et Mme [E] ont assigné Mme [Y] en indemnisation de leurs préjudices. Celle-ci a appelé M. [X] en garantie.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première et quatrième branches, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

6. M. [X] fait grief à l'arrêt de le condamner à garantir Mme [Y] des condamnations prononcées à son encontre au profit des acquéreurs, alors « qu'il faisait valoir que Mme [Y] avait sollicité un devis de travaux portant sur la réfection complète de la toiture, conformément à l'engagement qu'elle avait pris envers ses acquéreurs, qu'elle a refusé ce devis en décidant de limiter les travaux à de menues réparations, ainsi que cela ressort de la facture faisant apparaitre qu'une seule partie du toit a été concernée par les travaux réalisés, plusieurs postes de mission ayant été supprimés, M. [X] s'étant conformé aux exigences de sa cliente ; qu'il invitait la cour d'appel à considérer qu'il ne pouvait dans ces conditions garantir la condamnation éventuelle de Mme [Y], au titre de ses manquements contractuels envers ses acquéreurs auxquels elle a dissimulé la réalité et l'ampleur des travaux réalisés dont le coût s'est élevé à 8 000 euros TTC, laquelle est seule responsable du préjudice subi par les acquéreurs ; qu'ayant relevé que les travaux réellement effectués n'ont consisté qu'en une réparation partielle de la partie basse du versant Nord de la toiture alors qu'[I] [X] a facturé "une réparation complète de la toiture", puis considéré que s'il résulte des pièces produites qu'[D] [F] épouse [Y] n'a pas souhaité faire exécuter l'ensemble des travaux proposés selon devis estimatif du 9 janvier 2008 intitulé "réparation complète de la toiture", [I] [X] avait néanmoins l'obligation, en tant que professionnel, d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur les conséquences liées à la mise en oeuvre de travaux partiels, notamment quant à leur pérennité et à leur efficacité, pour en déduire que Mme [Y] doit être relevée et garantie par [I] [X], étant observé que ce dernier n'a pas conclu à un éventuel partage de responsabilité et n'articule aucun moyen de défense tendant à voir juger qu'il pourrait relever et garantir seulement partiellement le maître d'ouvrage, sans rechercher comme elle y était invitée, si Mme [Y], marchand de biens, n'avait pas en parfaite connaissance de cause décidé de réduire le coût des travaux à 8 000 euros TTC au regard du devis d'un montant de 12 000 euros TTC, et de dissimuler sciemment aux acquéreurs la réalité et l'ampleur des travaux réalisés au regard de ses engagements contractuels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et l'article 4, alinéa 1er, du code de procédure civile :

7. Selon le premier de ces textes, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

8. Il résulte du second que le moyen de défense tendant au rejet d'une demande de garantie en raison des fautes du demandeur, tend, le cas échéant, au rejet partiel de la demande en raison des mêmes fautes.

9. Pour condamner M. [X] à garantir entièrement Mme [Y] des condamnations prononcées au profit des acquéreurs, l'arrêt retient que le constructeur a manqué à son obligation de résultat, qu'il devait attirer l'attention du maître d'ouvrage sur les conséquences liées à la mise en oeuvre de travaux partiels, notamment quant à leur pérennité et leur efficacité et qu'il n'articulait aucun moyen de défense tendant à voir juger qu'il pourrait garantir le maître d'ouvrage seulement partiellement.

10. En se déterminant ainsi, alors qu'elle avait retenu que la venderesse n'avait pas souhaité faire exécuter l'ensemble des travaux proposés selon un devis intitulé « réparation complète de la toiture » et ne pouvait soutenir n'avoir pu imaginer que la toiture ne serait pas refaite ni n'avoir pu imaginer que les travaux réalisés par M. [X] étaient insuffisants, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme il le lui était demandé, si Mme [Y] n'avait pas commandé des travaux insuffisants en connaissance de cause, ce qui pouvait conduire à un partage de responsabilité, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [X] à relever et garantir Mme [Y] des condamnations prononcées contre elle au profit de M. et Mme [E], l'arrêt rendu le 25 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne Mme [Y] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme [Y] à payer à M. [X] la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. [X] et la société Entreprise [T]

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT INFIRMATIF ATTAQUÉ D'AVOIR condamné l'exposant à relever et garantir Madame [Y] des condamnations prononcées à son encontre et au profit des acquéreurs les époux [E] et D'AVOIR rejeté les demandes de l'exposant tendant à être relevé et garanti par son assureur la MAAF,

AUX MOTIFS QUE : Bien fondé de l'action : En vertu de l'article 1792 du code civil : "tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère." ; que selon l'article 1792-1 du même code en son alinéa 2 "est réputé constructeur de l'ouvrage toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire". ; qu'ainsi, le vendeur d'un immeuble, dans lequel il a été procédé à des travaux de rénovation, peut être déclaré responsable sur le fondement de ces dispositions, dès lors que l'importance des travaux réalisés les assimile à des travaux de construction d'un ouvrage ; qu'il est cependant nécessaire que la réception des travaux ait eu lieu ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces communiquées et des écritures des parties:

- que l'acte de vente du 21/01/2008 stipule notamment que le vendeur, [D] [F] épouse [Y], marchand de biens, a acquis la maison, située lieu-dit "[Adresse 5] par acte du 06/12/2007 au prix de 135.000 euros (pages 1 et 16) et que " le vendeur déclare et l'acquéreur reconnaît que divers travaux sont en cours d'exécution savoir : Réfection de la toiture, ces travaux n'étant pas terminés au jour de la vente" (page 3),

- qu'un devis estimatif daté du 09/01/2008 et intitulé "réparation complète de la toiture" a été établi par l'entreprise Stemokat pour un montant total de 12.600 euros TTC comprenant les prestations suivantes :

- démontage du faîtage avec évacuation du frachas,

- démontage de l'ancienne toiture avec évacuation du frachas,

- changement des plombs autour des deux cheminées y compris évacuation du frachas,

- solin en plomb sur l'acrotère sur une longueur de 5 mètres,

- repose de tuiles rondes collées en remplacement des anciennes tuiles,

- construction d'un nouveau faîtage en tuiles rondes similaire existant (enduit sous tuiles avec incorporation d'hydrofuge) (pièce 2 des appelants),

- qu'une facture datée du 19/12/2007 intitulée "réparation de la toiture" a été établie par l'entreprise Stemokat pour un montant total de 6 180 euros TTC comprenant les prestations suivantes :

- démontage d'une partie de la toiture,

- démolition des génoises correspondantes,

- pose et fourniture des éverites, chevrons et collage des tuiles,

- construction d'une génoise sous la partie restaurée,

- reprise des enduits sous la génoise entre la poutre et la tuile,

- rebouchage des trous sur tout le devant de la maison (pièce 3 des appelants),

- que selon l'expert [W]:

- " la couverture litigieuse était défaillante lors de la vente (...) Cet état de fait est validé par les parties",

- Mme [F] épouse [Y] a réglé la somme de 8.000 euros TTC correspondant à une facture datée du 19 janvier 2008 intitulée "réparation complète de la toiture" établie par l'entreprise Stemokat comprenant exactement les prestations détaillées au devis du 9 janvier 2008 susvisé, mais en réalité, ces travaux n'ont pas été réalisés,

- suite à l'inspection complète de la couverture litigieuse, les travaux effectués par Stemokat n'ont pas consisté en une réfection complète de la toiture, mais en une "réparation" partielle de la partie basse du versant Nord,

- la qualité des travaux réellement réalisés par Stemokat est extrêmement médiocre, de sorte que la valeur réelle de ces travaux est nulle,

- en aucun cas, les travaux réalisés par Stemokat n'étaient en mesure de pallier la défaillance initiale de la couverture litigieuse,

- les dommages déclarés par les époux [E] consistent en des infiltrations en provenance de la couverture (les photographies illustrant diverses traces de coulures au droit des poutres et sur les murs), l'expert précisant que le hors d'eau du bâtiment n'est pas convenablement assuré et que seule une réfection complète de la toiture aurait permis d'assurer le "hors d'eau" de l'immeuble de manière pérenne,

- les travaux n'ont pas été réceptionnés,

- que selon Mme [F] épouse [Y] "en acceptant la libération du séquestre, les époux [E] ont procédé à une réception et acceptation des travaux ; ils ne peuvent pas prétendre plus tard qu'ils n'ont pas été réalisés" (page 3 des écritures).

La cour rappelle que la réception des travaux est un acte qui intervient entre le maître d'ouvrage et le constructeur ; qu'en l'espèce, il est constant que Mme [F] épouse [Y], maître d'ouvrage, a commandé et réglé les travaux de réfection de la toiture réalisés par Mr [X] et qu'aucun procès-verbal de réception des travaux n'a été établi entre ces parties ; qu'alors que les appelants n'invoquent pas l'existence d'une réception tacite des travaux, et ne sollicitent pas davantage que la réception judiciaire des travaux soit prononcée, les conditions d'application de la mise en oeuvre de la responsabilité décennale de Mme [F] épouse [Y] ne sont pas réunies, en l'absence de réception des travaux de réfection de la toiture ; qu'en conséquence, seule la responsabilité contractuelle de Mme [F] épouse [Y] peut être recherchée ; qu'en vendant le 21 janvier 2008 aux époux [E] la maison, située lieu-dit "[Adresse 5], qu'elle avait acquis le 06 décembre 2007, en sa qualité de marchand de biens, [D] [F] épouse [Y] s'est notamment engagée, aux termes de l'acte de vente, à terminer "les travaux de réfection de la toiture qui étaient en cours d'exécution au jour de la vente" ; que si le détail de ces travaux n'est pas précisé dans l'acte de vente, l'engagement de la venderesse implique que les travaux de réfection de la toiture remplissent effectivement leur fonction, soit permettre à l'immeuble d'être hors-d'eau et hors d'air ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'expert [W] que les travaux réalisés sous la maîtrise d'ouvrage d'[D] [F] épouse [Y] n'ont pas été effectués dans les règles de l'art et n'ont pas consisté à refaire la totalité de la toiture, les infiltrations dont se plaignent les acquéreurs étant directement liées à la mauvaise exécution des travaux ; que la libération du solde du prix séquestré à la demande des époux [E] fait suite à l'achèvement des travaux de réfection de la toiture, et [D] [F] épouse [Y] ne peut utilement en déduire que les acquéreurs ont manifesté par ce paiement leur satisfaction quant à la qualité des travaux ; qu'elle ne peut davantage soutenir n'avoir pas pu imaginer que la toiture ne serait pas refaite et que les travaux réalisés par M. [X] étaient insuffisants puisqu'elle ne fournit aucune explication sur les raisons pour lesquelles elle n'a pas accepté le devis relatif à la réparation complète de la toiture du 9 janvier 2008 tout en payant la facture du 19 janvier 2008 intitulée "réparation complète de la toiture", comprenant les mêmes prestations que dans le devis susvisé mais pour un montant total de 8.000 euros TTC au lieu de 12.600 euros TTC, après avoir reçu une première facture émise par Stemokat le 19 décembre 2007 correspondant au démontage d'une partie de la toiture pour un montant total de 6.180 euros TTC, et qu'elle n'a pas réceptionné les travaux, alors qu'il lui incombait, en sa qualité de venderesse professionnelle ayant pris l'engagement à l'égard des acquéreurs de refaire la toiture de l'immeuble, de commander des travaux permettant de parvenir à cet objectif et de les accepter, avec ou sans réserve, après leur réalisation ; qu'il s'ensuit qu'[D] [F] épouse [Y], en sa qualité de venderesse, a manqué à son obligation de livrer la maison vendue avec une toiture refaite remplissant sa fonction, et que sa responsabilité contractuelle est engagée ; qu'en conséquence, le jugement déféré doit être ici infirmé ; Sur les appels en garantie : que si les appelants ont intimé la "société Stemokat" et [I] [X], la cour constate qu'il résulte des pièces produites qu'[I] [X] exerce à l'enseigne " Stemokat " et qu'[D] [F] épouse [Y] a appelé M. [X] et son assureur, la MAAF, à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre, de sorte qu'aucune demande n'est formée à l'encontre de la "société Stemokat " ; que contrairement à ce que soutient [I] [X], l'expert a précisé au point 5.2 "causes des infiltrations":

- que d'un point de vue technique, seule une réfection complète de la toiture litigieuse aurait permis d'assurer le "hors d'eau" de l'immeuble de manière pérenne,

- qu'au simple stade de leur définition, les réparations proposées par [X] n'étaient pas en mesure de donner satisfaction,

- que du fait de l'extrême médiocrité des réparations effectuées par Stemokat, une mise hors d'eau pérenne de la villa était impossible à obtenir.

En sa qualité de locateur d'ouvrage professionnel, [I] [X] avait une obligation de résultat à l'égard du maître d'ouvrage consistant à exécuter des travaux exempts de vices ; qu'il résulte des constatations de l'expert d'une part, que les travaux réellement effectués n'ont consisté qu'en une réparation partielle de la partie basse du versant Nord de la toiture alors qu'[I] [X] a facturé "une réparation complète de la toiture" et, d'autre part, que la qualité des travaux exécutés est extrêmement médiocre, comme le montrent de manière évidente les photographies annexées au rapport (pages 15 et 16) ; qu'il s'ensuit qu'[I] [X] a manqué à son obligation de résultat de réaliser des travaux conformément aux règles de l'art et sa responsabilité est engagée ; que s'il résulte des pièces produites qu'[D] [F] épouse [Y] n'a pas souhaité faire exécuter l'ensemble des travaux proposés selon devis estimatif du 09 janvier 2008 intitulé "réparation complète de la toiture", [I] [X] avait néanmoins l'obligation, en tant que professionnel, d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur les conséquences liées à la mise en oeuvre de travaux partiels, notamment quant à leur pérennité et à leur efficacité ; qu'en conséquence, [D] [F] épouse [Y] doit être relevée et garantie par [I] [X], étant observé que ce dernier n'a pas conclu à un éventuel partage de responsabilité et n'articule aucun moyen de défense tendant à voir juger qu'il pourrait relever et garantir seulement partiellement le maître d'ouvrage ; L'assureur: la MAAF: Alors que les travaux réalisés par [I] [X] n'ont pas été réceptionnés, la MAAF fait valoir à juste titre que la garantie décennale souscrite auprès d'elle n'est pas mobilisable ; que la garantie "responsabilité civile professionnelle" souscrite n'est pas davantage mobilisable dès lors que les conditions générales produites, dont il n'est pas contesté qu'elles ont été portées à la connaissance de l'assuré et qu'elles sont applicables, stipulent que sont exclus les dommages matériels ou immatériels résultant de l'inexécution des obligations de faire (article 1142 et suivants du code civil) ou de délivrance (article 1604 et suivants du code civil) de l'assuré et les dommages résultant de la reprise de l'ouvrage réalisé (pages 29 à 31 pièce 3 de l'assureur) ; qu'en conséquence, [I] [X] doit être débouté de son appel en garantie à l'encontre de la MAAF ;

1°) ALORS QUE l'exposant faisait valoir que les travaux qu'il a réalisés sur la demande de Madame [Y] après qu'elle eut supprimé plusieurs postes indiqués au devis, lui ont été payés et qu'ils ont été nécessairement acceptés dès lors que le séquestre a été libéré sur instructions des acquéreurs ; qu'en ne se prononçant pas sur ce moyen par lequel l'exposant faisait ainsi valoir la réception tacite par le maitre de l'ouvrage des travaux effectués, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge est tenu par les termes du litige tel qu'ils ont été déterminés par les parties ; que l'exposant faisait valoir que Madame [Y] avait sollicité un devis de travaux portant sur la réfection complète de la toiture, conformément à l'engagement qu'elle avait pris envers ses acquéreurs, qu'elle l'a refusé en décidant de limiter les travaux à de menues réparations, ainsi que cela ressort de la facture faisant apparaitre qu'une seule partie du toit a été concernée par les travaux réalisés, plusieurs postes de mission ayant été supprimés par le maître de l'ouvrage, l'exposant s'étant conformé aux exigences de sa cliente ; qu'il invitait la cour d'appel à considérer qu'il ne pouvait dans ces conditions garantir la condamnation éventuelle de Madame [Y], au titre de ses manquements contractuels envers ses acquéreurs auxquels elle a dissimulé la réalité et l'ampleur des travaux réalisés dont le coût s'est élevé à 8000 euros TTC, qu'elle est seule responsable du préjudice subi par les acquéreurs ; qu'ayant relevé que les travaux réellement effectués n'ont consisté qu'en une réparation partielle de la partie basse du versant Nord de la toiture alors qu'[I] [X] a facturé « une réparation complète de la toiture », puis considéré que s'il résulte des pièces produites que Madame [Y] n'a pas souhaité faire exécuter l'ensemble des travaux proposés selon devis estimatif du 9 janvier 2008 intitulé « réparation complète de la toiture », [I] [X] avait néanmoins l'obligation, en tant que professionnel, d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur les conséquences liées à la mise en oeuvre de travaux partiels, notamment quant à leur pérennité et à leur efficacité, pour en déduire que Madame [Y] doit être relevée et garantie par [I] [X], étant observé que ce dernier n'a pas conclu à un éventuel partage de responsabilité et n'articule aucun moyen de défense tendant à voir juger qu'il pourrait relever et garantir seulement partiellement le maître d'ouvrage, quand l'exposant faisait valoir un moyen tendant à faire juger que la venderesse était seule à l'origine du préjudice dont ses acquéreurs poursuivaient la réparation, ce qui constituait un moyen de défense pouvant aboutir le cas échéant à un partage de responsabilité, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et partant elle a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE l'exposant faisait valoir que Madame [Y] avait sollicité un devis de travaux portant sur la réfection complète de la toiture, conformément à l'engagement qu'elle avait pris envers ses acquéreurs, qu'elle a refusé ce devis en décidant de limiter les travaux à de menues réparations, ainsi que cela ressort de la facture faisant apparaitre qu'une seule partie du toit a été concernée par les travaux réalisés, plusieurs postes de mission ayant été supprimés, l'exposant s'étant conformé aux exigences de sa cliente ; qu'il invitait la cour d'appel à considérer qu'il ne pouvait dans ces conditions garantir la condamnation éventuelle de Madame [Y], au titre de ses manquements contractuels envers ses acquéreurs auxquels elle a dissimulé la réalité et l'ampleur des travaux réalisés dont le coût s'est élevé à 8000 euros TTC, laquelle est seule responsable du préjudice subi par les acquéreurs ; qu'ayant relevé que les travaux réellement effectués n'ont consisté qu'en une réparation partielle de la partie basse du versant Nord de la toiture alors qu'[I] [X] a facturé « une réparation complète de la toiture », puis considéré que s'il résulte des pièces produites qu'[D] [F] épouse [Y] n'a pas souhaité faire exécuter l'ensemble des travaux proposés selon devis estimatif du 9 janvier 2008 intitulé "réparation complète de la toiture", [I] [X] avait néanmoins l'obligation, en tant que professionnel, d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur les conséquences liées à la mise en oeuvre de travaux partiels, notamment quant à leur pérennité et à leur efficacité, pour en déduire que Madame [Y] doit être relevée et garantie par [I] [X], étant observé que ce dernier n'a pas conclu à un éventuel partage de responsabilité et n'articule aucun moyen de défense tendant à voir juger qu'il pourrait relever et garantir seulement partiellement le maître d'ouvrage, sans rechercher comme elle y était invitée, si Madame [Y], marchand de biens, n'avait pas en parfaite connaissance de cause décidé de réduire le cout des travaux à 8.000 euros TTC au regard du devis d'un montant de 12.000 euros TTC, et de dissimuler sciemment aux acquéreurs la réalité et l'ampleur des travaux réalisés au regard de ses engagements contractuels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce;

4°) ALORS QUE la cassation à intervenir sur la première branche du moyen entrainera par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a jugé que les travaux réalisés par l'exposant n'ayant pas été réceptionnés, la MAAF fait valoir à juste titre que la garantie décennale souscrite auprès d'elle n'est pas mobilisable, ces dispositions étant dans un lien de dépendance nécessaire ;ECLI:FR:CCASS:2021:C300737

vendredi 12 février 2021

Le syndicat des copropriétaires est responsable de plein droit des vices de construction de l'immeuble sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 janvier 2021




Cassation partielle


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 122 F-D

Pourvoi n° D 19-19.261




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 JANVIER 2021

1°/ Mme D..., J... I...,

2°/ Mme D..., W... M..., veuve I...,

domiciliées toutes deux [...],

3°/ M. D..., A... I..., domicilié [...] ,

tous trois pris en leur qualité d'héritiers de D... R... N... I..., décédé le [...],

ont formé le pourvoi n° D 19-19.261 contre l'arrêt rendu le 15 avril 2019 par la cour d'appel de Versailles (4e chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ au syndicat des copropriétaires [...] , dont le siège est [...] , représenté par son syndic la société Habitat Contact - Citya, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société Entreprise A. Maigne, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

3°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [...] ,

4°/ à la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [...] , société d'assurance mutuelle,

5°/ à la société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [...] ,

6°/ à M. X... S..., domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Schmitt, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de Mme D... J... I..., de Mme D... W... M... et de M. D... A... I..., de la SCP Spinosi et Sureau, avocat du syndicat des copropriétaires [...] , après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Schmitt, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement

1.Il est donné acte à Mme D... J... I..., Mme D... W... M... et M. D... A... I..., venant aux droits de D... I..., du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Entreprise A. Maigne, la Compagnie Axa France Iard, la SMABTP, la Mutuelle des Architectes Français et M. S....

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 avril 2019), M. D... I..., propriétaire de lot dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, s'étant plaint d'infiltrations à la suite de travaux d'étanchéité en toiture réalisés sous la maîtrise d'ouvrage du syndicat des copropriétaires (le syndicat), est intervenu à l'instance opposant le syndicat aux constructeurs, à leurs assureurs et à l'assureur dommages-ouvrage, et a demandé au syndicat l'indemnisation d'un préjudice financier né du retard dans la vente de son bien.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Les consorts I... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes à l'encontre du syndicat, alors « que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et qu'en l'absence de toute précision dans les écritures sur le fondement de la demande, les juges du fond doivent examiner les faits sous tous leurs aspects juridiques, conformément aux règles de droit qui leur sont applicables ; que la cour a constaté en l'espèce que si les consorts I... faisaient certes état de carences du syndicat des copropriétaires, ils ne visaient toutefois « aucun fondement juridique à l'appui de leurs demandes de condamnations formées à l'encontre du syndicat des copropriétaires » ; qu'en statuant dès lors de la sorte, motif pris que la responsabilité du syndicat des copropriétaires ne pouvait être engagée qu'en cas de faute, laquelle n'était pas établie en l'espèce, quand il lui appartenait de se prononcer, en application de l'article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, sur la responsabilité de plein droit du syndicat des copropriétaires à raison du vice de construction qu'elle relevait, et tenant au défaut d'étanchéité de la toiture terrasse, la cour a violé l'article 12 du code de procédure civile.»

Réponse de la Cour

Vu l'article 12 du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

6. Pour rejeter les demandes des consorts I... qui soutenaient que les infiltrations à l'origine des préjudices de M. I... trouvaient leur origine dans les travaux exécutés sur les parties communes, l'arrêt retient que les consorts I... ne visent aucun fondement juridique à l'appui de leurs demandes, que la responsabilité du syndicat des copropriétaires ne peut être engagée qu'en cas de preuve d'une faute caractérisée soit par un manquement au règlement de copropriété, soit par un manquement à la loi, et qu'aucune faute du syndicat n'est prouvée.

7. En statuant ainsi, alors que le syndicat des copropriétaires est responsable de plein droit des vices de construction de l'immeuble sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, la cour d'appel, qui, en l'absence de toute précision sur le fondement de la demande, devait examiner les faits sous tous leurs aspects juridiques, conformément aux règles de droit qui leur étaient applicables, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de Mme D... J... I..., de Mme D... W... M... et de M. D... A... I... à l'encontre du syndicat des copropriétaires du [...] , l'arrêt rendu le 15 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne le syndicat des copropriétaires du [...] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le syndicat des copropriétaires du [...] et le condamne à payer à Mme D... J... I..., Mme D... W... M... et M. D... A... I... la somme globale de 3 000 euros ;

mardi 24 novembre 2020

L'entreprise, en tant que professionnelle chargée de l'exécution des ouvrages de gros oeuvre et bien que le cuvelage ne figurât pas dans son descriptif de travaux, avait manqué à son obligation de conseil

  Note A. Caston, GP 2021, n° 19, p. 74

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 novembre 2020




Cassation partielle
sans renvoi


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 911 F-D

Pourvoi n° K 19-20.831



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020

1°/ M. C... U...,

2°/ Mme Y... U...,

tous deux domiciliés [...] ,

3°/ la société Minouche, société civile immobilière, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° K 19-20.831 contre l'arrêt rendu le 6 juin 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-3), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme X... E..., domiciliée [...] ,

2°/ à la société la Mutuelle des architectes français, dont le siège est [...] ,

3°/ à la société Allianz IARD, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

La société Allianz IARD a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Gaschignard, avocat de M. et Mme U... et de la société Minouche, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Allianz IARD, de la SCP Boulloche, avocat de Mme E... et de la société la Mutuelle des architectes français, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 juin 2019), la société civile immobilière Minouche (la SCI), qui a pour associés M. et Mme U..., a fait construire une maison sous la maîtrise d'oeuvre de Mme E..., assurée auprès de la Mutuelle des architectes français, la société La Compagnie provençale, désormais en liquidation judiciaire, assurée auprès de la société Allianz IARD, étant chargée des lots maçonnerie, gros oeuvre, charpente et couverture.

2. Se plaignant, après réception, d'inondations et d'infiltrations répétées du sous-sol, aménagé en salle de cinéma et de jeux et en cave, la SCI et M. et Mme U... ont, après expertise, assigné les intervenants à l'acte de construire et leurs assureurs en réparation sur le fondement de la garantie décennale.

Recevabilité du pourvoi principal examinée d'office

Vu l'article 125 du code de procédure civile :

3. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application de l'article 125 de ce code.

4. Selon ce texte, le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

5. Il y a lieu de déclarer le pourvoi principal irrecevable en ce qu'il est formé par M. et Mme U... dont les demandes ont été déclarées irrecevables par un chef du dispositif non critiqué de la décision attaquée et qui n'ont pas été condamnés par celle-ci, faute d'intérêt à agir en cassation.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi incident

Enoncé du moyen

6. La société Allianz IARD fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec Mme E..., la MAF et la société La Compagnie provençale, à payer diverses sommes à la SCI et de la condamner à lui payer une somme complémentaire au titre de son préjudice matériel, alors :

« 1°/ que le juge est tenu de respecter et de faire respecter le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, la SCI Minouche soutenait qu' "il apparai[ssai]t incontestablement que les infiltrations [avaient] provoqu[é] des dommages importants qui compromett[ai]ent l'étanchéité de l'ouvrage et [l'avaient] rend[u] impropre à sa destination"; que la société La Compagnie provençale soutenait, quant à elle, que "le sous-sol [
] a été aménagé en local de jeux, contrairement aux permis de construire" et que "la présence d'eau dans un sous-sol est parfaitement admise, et ne rend pas l'ouvrage impropre à sa destination" ; que la cour d'appel a décidé que "la SARL La Compagnie Provençale ne peut valablement soutenir que les pièces du sous-sol n'étaient pas destinées à être habitables et ne seraient pas conformes au permis de construire, alors même que le PRO établi par l'architecte, dont la société La Compagnie Provençale a eu nécessairement connaissance, puisqu'il est utilisé sur le chantier par les différents corps d'état lors de l'exécution des travaux, prévoit bien en sous-sol la réalisation d'un "salon télé" avec home cinéma, une salle de jeux et une cave" si bien que "l'étanchéité de ces pièces étaient donc nécessaires à leur usage conforme" ; qu'en soulevant ainsi d'office un moyen tiré de ce que la société La Compagnie Provençale aurait nécessairement eu connaissance de la destination voulue par le maître de l'ouvrage, dans la mesure où cette volonté aurait été indiquée dans le PRO établi par l'architecte, la cour, qui n'a pas au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que la destination d'un immeuble ne peut être définie que par référence à la destination qui peut normalement en être attendue ou à la destination qui a été contractuellement convenue entre les parties ; qu'en l'espèce la cour s'est bornée à affirmer que la société La Compagnie provençale ne pouvait ignorer que le sous-sol de l'immeuble détenu par la SCI Minouche était destiné à être habité ; que la cour s'est ainsi abstenue de rechercher si le sous-sol de cet immeuble avait normalement vocation à être habité ; que la cour n'a pas non plus recherché l'existence d'un accord contractuel entre la SCI Minouche et la société La Compagnie provençale à propos de la destination dudit sous-sol ; que la cour s'est donc déterminée par des motifs inopérants, violant ainsi l'article 1792 du code civil ;

3°/ que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes et ne nuisent point au tiers ; qu'à supposer que la cour ait retenu que le projet de réalisation des ouvrages (PRO) établi par Mme E... à l'adresse des époux U... avait la nature d'une convention portant sur la destination du sous-sol de l'immeuble détenu par la SCI Minouche, une telle convention ne pouvait en tout état de cause être opposé à la société La Compagnie provençale ; qu'en jugeant le contraire, la cour a violé l'article 1165 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

4°/ que l'entrepreneur, qui doit attirer l'attention du maître de l'ouvrage sur l'inadéquation des travaux réalisés, est tenu à une obligation de conseil ; que cette obligation de conseil est cependant limitée aux missions confiées à l'entrepreneur ; qu'en jugeant qu'en tant que professionnelle chargée de l'exécution des ouvrages de gros oeuvre la société La Compagnie provençale était tenue d'un devoir de conseil envers la SCI Minouche à propos des travaux d'étanchéité extérieure dont l'immeuble dont celle-ci était propriétaire aurait dû faire l'objet, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les travaux d'étanchéité extérieure n'avaient pas été exclus des missions confiées à la société La Compagnie provençale, pour être confiés exclusivement à la société Soprema, la cour a privé sa décision de base légale, au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a constaté que les désordres s'étaient manifestés par des inondations et infiltrations répétées en sous-sol ayant provoqué des efflorescences sur toutes les parois périphériques et séparatives jusqu'à environ 1,20 mètre du sol et a retenu, par motifs adoptés, que, si, s'agissant d'un sous-sol, une certaine humidité pouvait être admise, le seuil acceptable était largement dépassé en l'espèce et, par motifs propres, que ces désordres rendaient l'ouvrage impropre à sa destination.

8. En l'état de ces énonciations, les griefs des première, deuxième et troisième branches, qui critiquent un motif surabondant relatif à la destination particulière réservée au sous-sol, sont inopérants.

9. Elle a ensuite relevé, d'une part, que, selon l'expert judiciaire, les règles de l'art commandaient de réaliser un cuvelage afin d'assurer l'étanchéité des parois enterrées pour éviter les remontées d'eau de la nappe phréatique, d'autre part, que la société de gros oeuvre n'avait pas suivi les indications portées sur la coupe du bureau d'études structures qui prévoyait un tel cuvelage, n'avait pas réalisé le radier qui était mentionné sur son devis et avait finalement posé un dallage plus épais mais sans armatures et recouvert d'un adjuvant d'hydrofuge dépourvu d'enduit d'imperméabilisation.

10. Elle a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l'entreprise, en tant que professionnelle chargée de l'exécution des ouvrages de gros oeuvre et bien que le cuvelage ne figurât pas dans son descriptif de travaux, avait manqué à son obligation de conseil.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

12. La SCI fait grief à l'arrêt de lui allouer, à titre de réparation de ses dommages matériels, des sommes hors taxe, alors « que les juges du fond sont tenus d'examiner, même sommairement, les pièces versées aux débats par les parties à l'appui de leurs prétentions ; que la SCI Minouche faisait valoir qu'elle justifiait, par une attestation de la direction générale des finances publiques en date du 22 juin 2015, constituant sa pièce n° 66, n'être pas assujettie à la TVA ; qu'en statuant comme ci-dessus sans même examiner ce document dont il ressortait que la SCI Minouche n'était pas assujettie à la TVA de sorte que les condamnations prononcées à son bénéfice devaient l'inclure, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

13. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

14. Pour allouer à la SCI, à titre de réparation, des sommes hors taxe, l'arrêt retient qu'il lui appartient de justifier de sa situation fiscale et de l'option choisie, ce qu'elle ne fait pas.

15. En statuant ainsi, sans procéder à une analyse, même sommaire, de l'attestation fiscale, que la SCI avait produite sous le numéro 66 du bordereau de communication de pièces annexé à ses conclusions, indiquant qu'elle n'était pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

16. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

17. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi principal en ce qu'il est formé par M. et Mme U... ;

REJETTE le pourvoi incident de la société Allianz IARD ;

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la SCI Minouche tendant à voir assortir de la TVA les sommes qui lui ont été allouées à titre de réparation de son préjudice matériel, l'arrêt rendu le 6 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que les sommes allouées à la SCI à titre d'indemnité et d'indemnité complémentaire réparant ses préjudices matériels seront assorties de la taxe sur la valeur ajoutée en vigueur au jour du prononcé de l'arrêt ;

Condamne Mme E..., la Mutuelle des architectes français et la société Allianz IARD aux dépens du présent arrêt ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum Mme E..., la Mutuelle des architectes français et la société Allianz IARD à payer à la SCI Minouche la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;