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mardi 21 janvier 2025

Notion d'impropriété de l'ouvrage à sa destination et réparation en nature

  Note Caston, GP 27 mai 2025, p. 65.

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 janvier 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 19 FS-B

Pourvoi n° S 23-17.265




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 JANVIER 2025

La société La Dormoise, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 23-17.265 contre l'arrêt rendu le 28 février 2023 par la cour d'appel de Reims (chambre civile - 1re section), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Hanau énergies concept, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

La société Hanau énergies concept a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société La Dormoise, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Axa France IARD, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société Hanau énergies concept, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 3 décembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 28 février 2023), la société La Dormoise a confié l'installation d'une centrale photovoltaïque en toiture de bâtiment agricole à la société Hanau énergies concept (la société Hanau), assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa).

2. Se plaignant de désordres, elle a, après expertise, assigné les sociétés Hanau et Axa en indemnisation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

3. La société La Dormoise fait grief à l'arrêt de dire que la société Hanau n'est pas responsable des problèmes de condensation dus à l'absence d'écran sous toiture, et de rejeter sa demande indemnitaire à ce titre et sa demande en garantie à l'encontre de la société Axa, alors « que l'impropriété d'un ouvrage à sa destination doit s'apprécier par référence à la destination convenue entre les parties ; qu'en se contentant de relever, pour écarter la responsabilité décennale de la société Hanau au titre des désordres de condensation affectant la toiture, que les « phénomènes de condensation qui sont dus à l'absence d'écran sous-toiture » « ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination », sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si la condensation affectant ainsi la toiture devant assurer la couverture d'un bâtiment affecté au stockage de grains, ne rendait pas l'ouvrage impropre à sa destination contractuelle dès lors que toute humidité entraîne le pourrissement de ces grains, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 et suivants du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1792 du code civil :

4. Aux termes de ce texte, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

5. Il est jugé que l'impropriété de l'ouvrage à sa destination s'apprécie par référence à sa destination découlant de son affectation, telle qu'elle résulte de la nature des lieux ou de la convention des parties (3e Civ., 10 octobre 2012, pourvois n° 10-28.309, 10-28.310, publié ; 3e Civ., 4 avril 2013, pourvoi n° 11-25.198, publié ; 3e Civ., 20 mai 2015, pourvoi n° 14-15.107, publié).

6. Pour écarter le caractère décennal des désordres de condensation et rejeter la demande d'indemnisation, l'arrêt retient que, si les phénomènes d'infiltration dus à un défaut d'étanchéité causé par le mauvais placement de la parclose rendaient la toiture fuyarde et relevaient de la garantie décennale, les phénomènes de condensation dus à l'absence d'écran sous toiture ne rendaient pas l'ouvrage impropre à sa destination.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la condensation affectant la toiture d'un bâtiment affecté au stockage de grains ne rendait pas l'ouvrage impropre à sa destination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

8. La société La Dormoise fait grief à l'arrêt de condamner la société Hanau à faire poser le kit de réparation pour panneaux photovoltaïques Just Roof dans un délai de trois mois, alors « qu'une réparation en nature d'un désordre ne saurait être imposée à un maître de l'ouvrage ; qu'en condamnant la société Hanau à faire poser le kit de réparation pour panneaux photovoltaïques Just Roof afin de mettre fin aux infiltrations de la toiture, quand la société La Dormoise s'opposait à ce mode de réparation, la cour d'appel a violé les articles 1792 et suivants du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1792 du code civil :

9. Aux termes de ce texte, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

10. Il est jugé que l'entrepreneur, responsable de désordres de construction, ne peut imposer à la victime la réparation en nature du préjudice subi par celle-ci (3e Civ., 28 septembre 2005, pourvoi n° 04-14.586, publié).

11. Dès lors, le juge du fond ne peut condamner un constructeur responsable de désordres à procéder à leur reprise en nature, lorsque le maître de l'ouvrage s'y oppose.

12. Pour condamner la société Hanau à faire poser le kit de réparation des panneaux photovoltaïques, l'arrêt retient que doivent être réparés les seuls désordres d'infiltration sous toiture, que la solution tenant à la pose d'un kit de réparation permet de remédier aux infiltrations et que celle-ci constitue une réparation proportionnée et adaptée au dommage sans enrichissement pour le maître de l'ouvrage.

13. En statuant ainsi, alors que la société La Dormoise s'était opposée à la réparation en nature par la société Hanau, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal, et sur le moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi incident, rédigés en termes similaires, réunis

Enoncé des moyens

14. Par son troisième moyen, pris en sa seconde branche, la société La Dormoise fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en garantie à l'encontre de la société Axa, alors « que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen de cassation, faisant grief à l'arrêt d'avoir condamné la société Hanau à faire poser le kit de réparation pour panneaux photovoltaïques Just Roof entraînera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt en ce qu'il a débouté la société La Dormoise de sa demande aux fins de voir la société Axa, assureur de la société Hanau, garantir les conséquences du sinistre aux motifs que « la réparation du dommage n'est pas assurée par l'allocation d'une somme destinée à indemniser le coût des travaux de réfection (remplacement intégral du système) mais s'opère par équivalence, soit la fourniture et la pose d'un kit, cette prestation étant assurée par une autre entreprise que la société Hanau », en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

15. Par son moyen, pris en sa troisième branche, la société Hanau fait grief à l'arrêt de la condamner à faire poser à ses frais le kit de réparation pour panneaux photovoltaïques, alors « que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que, si la cassation devait être prononcée sur le fondement du deuxième moyen de cassation dirigé contre le chef de dispositif de l'arrêt ayant condamné la société Hanau à faire poser le kit de réparation pour panneaux photovoltaïques Just Roof, elle entraînera, par voie de conséquence, celle du chef de dispositif ayant condamné cette société à faire poser ce kit à ses frais, sans garantie de son assureur la société Axa, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

16. Selon ce texte, la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

17. La cassation du chef de dispositif de l'arrêt condamnant la société Hanau à faire poser le kit de réparation pour panneaux photovoltaiques Just Roof dans un délai de trois mois de la signification de l'arrêt, s'étend aux chefs de dispositif condamnant la société Hanau à faire poser ce kit à ses frais et rejetant la demande de la société La Dormoise tendant à voir la société Axa, assureur de la société Hanau, garantir les conséquences du sinistre, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

Portée et conséquences de la cassation

18. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant la société Hanau à faire poser à ses frais un kit de réparation et rejetant la demande indemnitaire au titre des désordres de condensation ne s'étend pas au rejet de la demande formée par la société La Dormoise au titre de son préjudice moral, qui n'est pas soutenu par les motifs critiqués par ces moyens.



PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de la société La Dormoise au titre du préjudice moral, l'arrêt rendu le 28 février 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne les sociétés Hanau énergies concept et Axa France IARD aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille vingt-cinq.ECLI:FR:CCASS:2025:C300019

vendredi 12 janvier 2024

Non-conformité de l'ouvrage vendu à la réglementation thermique conventionnelle

 

19 October 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-14.174

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:C300686

Texte de la décision

CIV. 3

VB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 octobre 2023




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 686 F-D

Pourvoi n° M 22-14.174




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 OCTOBRE 2023

La société A. [G], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 22-14.174 contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2022 par la cour d'appel de Dijon (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 2], pris en sa qualité d'assureur de la société DSL solution,

2°/ à la société Algeco, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

La société Algeco a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, quatre moyens de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société A. [G], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Algeco, après débats en l'audience publique du 12 septembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 18 janvier 2022), la société A. [G] a commandé à la société Algeco la fourniture et la pose de bureaux par modules assemblés.

2. La société DSL solution, depuis placée en liquidation judiciaire, assurée auprès de la SMABTP, est intervenue en qualité de maître d'oeuvre et a assuré l'assistance technique de la société A. [G].

3. Un procès-verbal de réception a été signé le 22 juin 2010 et un procès-verbal de levée des réserves a été établi le 6 avril 2012.

4. Invoquant des non-conformités des bureaux livrés, la société A. [G] a opéré une retenue sur les factures dont elle était redevable à la société Algeco, laquelle l'a assignée en paiement du solde et en dommages-intérêts.

5. La société A. [G] a formé une demande reconventionnelle en paiement du coût des travaux nécessaires à la mise en conformité de la chose vendue et en indemnisation de son préjudice pour manquement de la société Algeco à son devoir de conseil, en sollicitant la compensation entre les créances respectives des parties.

6. La société Algeco a assigné la SMABTP en garantie des condamnations qui seraient prononcées à son encontre.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen et le quatrième moyen du pourvoi principal, le premier moyen, pris en ses première et troisième branches, les deuxième et troisième moyens du pourvoi incident


7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le premier moyen du pourvoi incident, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen

8. La société Algeco fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de la somme de 73 987,75 euros au titre des travaux de mise en conformité des bâtiments vendus, alors « que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties leur aurait proposée; qu'en se bornant, pour faire application des dispositions applicables à la vente et écarter celles relatives au louage d'ouvrage, à relever que les demandes de la société A. [G] étaient fondées sur le manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme, sans restituer aux contrats du 25 mars 2009 leur exacte qualification, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

9. La cour d'appel, qui a relevé que les demandes de la société A. [G] étaient fondées sur le manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme, a retenu que le contrat, intitulé « proposition de vente » et ayant pour objet la vente de bureaux par modules assemblés, n'était pas un marché de travaux répondant à la définition de l'article 1779, 3°, du code civil.

10. En retenant que l'article 1604 du code civil était applicable aux demandes de la société A. [G], auxquelles la société Algeco ne pouvait opposer les dispositions de l'article 1792-6 du code civil, relatives aux contrats de louage d'ouvrage, ni se prévaloir des dispositions de la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 portant sur les retenues de garantie en matière de marchés de travaux, la cour d'appel a exercé son pouvoir de qualification des actes litigieux.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche
Enoncé du moyen

12. La société A. [G] fait grief à l'arrêt de limiter à 73 987,75 euros la condamnation de la société Algeco au titre des travaux de mise en conformité des bâtiments vendus, alors « que le vendeur doit délivrer une chose conforme aux spécifications du contrat ; qu'en mettant à la charge de la société A. [G] une partie des travaux de climatisation nécessaires à la mise en conformité des bâtiments après avoir pourtant relevé que la société Algeco n'avait pas respecté « la réglementation thermique 2005 »« sur trois points essentiels » et qu'elle avait méconnu la « CEP réglementaire », « la température intérieure conventionnelle ( TIC) » et « le garde fou concernant les ouvertures de baies », ajoutant que le respect de la TIC permettait « de maintenir une température agréable tout au long de l'année sans recourir aux systèmes de climatisation », la cour d'appel a violé l'article 1604 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1604 du code civil :

13. Il résulte de ce texte que le vendeur doit délivrer la chose conformément aux stipulations du contrat.

14. Pour laisser à la charge de la société A. [G] la moitié du coût des travaux de climatisation des bureaux, la cour d'appel retient que l'acquéreur aurait dû faire réaliser une étude préalable des besoins en climatisation avant l'exécution, en mars et mai 2011, des travaux de mise en conformité.

15. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le contrat stipulait que la réglementation thermique 2005 devait être respectée, et retenu que tel n'était pas le cas sur trois points essentiels dont la température intérieure conventionnelle et que le respect de cette réglementation pouvait permettre d'éviter l'installation d'une climatisation, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

16. La société A. [G] fait le même grief à l'arrêt, alors « que le vendeur est tenu à la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en n'aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ; qu'en jugeant qu'il ne ressortait pas des constatations de l'expert que l'absence de ventilation sous le bâtiment R+2 rendait le bâtiment impropre à l'usage auquel il était destiné après avoir pourtant constaté que l'expert avait averti d'une dégradation anticipée des planchers, ce qui réduisait nécessairement l'usage auquel il était destiné, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 641 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1641 du code civil :

17. Aux termes de ce texte, le vendeur est tenu de la garantie à raison des vices cachés de la chose qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acquéreur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

18. Pour exclure que l'absence de ventilation sous le bâtiment R+2 constituait un vice caché, la cour d'appel retient qu'il ne ressort pas des constatations de l'expert qu'elle rende l'immeuble impropre à l'usage auquel il est destiné.

19. En se déterminant ainsi, après avoir constaté que l'existence, entre la sous face des modules du rez-de-chaussée et l'assiette d'implantation, d'un espace non accessible, qui n'était pas ventilé, était de nature à générer une condensation en sous face des planchers et une détérioration à moyen terme de ceux-ci, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à exclure l'existence d'un vice caché, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs , la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Algeco à payer à la société A. [G] la somme de 73 987,75 euros au titre des travaux de mise en conformité des bâtiments vendus, l'arrêt rendu le 18 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;

Condamne la société Algeco aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille vingt-trois.

vendredi 8 octobre 2021

1) Isolation insuffisante et responsabilité décennale du vendeur-constructeur; 2) Portée de la faute du diagnostiqueur

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 septembre 2021




Rejet


M. MAUNAND, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 691 F-D

Pourvoi n° E 20-17.311




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 SEPTEMBRE 2021

M. [Z] [P], domicilié [Adresse 5], a formé le pourvoi n° E 20-17.311 contre l'arrêt rendu le 30 avril 2020 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [F] [G], domicilié [Adresse 1],

2°/ à M. [U] [R], domicilié [Adresse 6],

3°/ à la société Gan assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],

4°/ à la société Allo diagnostic, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

5°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

M. [R] et la société Gan Assurances ont formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi incident éventuel invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de M. [P], de la SCP Boulloche, avocat de M. [G], de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Allo diagnostic, de la société Axa France IARD, de la SCP Marc Lévis, avocat de M. [R] et de la société Gan assurances, après débats en l'audience publique du 6 juillet 2021 où étaient présents M. Maunand, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Nivôse, conseiller, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 30 avril 2020), par acte du 2 septembre 2013, M. [P] a vendu à M. [G] une maison d'habitation en bois qu'il avait en partie édifiée lui-même et achevée le 14 février 2006.

2. Se plaignant de divers désordres, M. [G] a, après expertise, assigné M. [P], la société Allo diagnostic, qui a établi l'état parasitaire annexé à l'acte de vente, et son assureur, la société AXA France IARD, ainsi que M. [R], auteur du diagnostic de performance énergétique, et son assureur, la société Gan assurances, en indemnisation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, et le troisième moyen du pourvoi principal, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. M. [P] fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec la société Gan assurances et M. [R], à payer à M. [G] la somme de 69 188,22 euros au titre de la reprise de l'isolation et dans la limite de 21 000 euros en ce qui concerne M. [R] et la compagnie Gan assurances, alors :

« 1°/ que seuls les dommages compromettant la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination engagent la responsabilité décennale du constructeur ; que la simple surconsommation de chauffage ne caractérise pas l'impropriété de l'ouvrage à sa destination ; que la cour d'appel qui a relevé que l'absence d'isolation ou l'isolation insuffisante rendait la maison impropre à sa destination du fait de l'impossibilité de la chauffer sans exposer des surcoûts, n'a pas constaté l'existence d'un dommage compromettant la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination ; qu'elle a violé l'article 1792 du code civil par fausse application ;

3°/ que le défaut de conformité aux normes thermiques ne peut constituer un désordre de nature décennale qui si ces normes étaient obligatoires au moment du permis de construire ou à la date de la construction et non pas à la date de l'expertise judiciaire ; qu'en retenant les conclusions de l'expert indiquant que l'isolation de la maison était inexistante par endroit et très inférieure aux normes de la réglementation technique, sans s'expliquer comme cela lui était demandé, sur le fait que Monsieur [P] avait respecté les normes en vigueur à la date du permis de construire et que l'expert ne précisait pas à quelles normes il faisait référence, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1792 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a constaté que la maison ne comportait aucune isolation au niveau des tableaux de fenêtre et sur les soubassements du mur de façade sur une hauteur de 1,10 mètre de haut où la pierre naturelle était collée au parpaing, que, sur la partie haute, l'isolant en polystyrène mis en place entre un habillage en brique rouge fixé au parpaing et la pierre naturelle était d'une épaisseur de cinq centimètres alors que le diagnostic de performance énergétique mentionnait dix centimètres d'épaisseur de l'isolant sur l'ensemble de la maison.

6. Elle a également constaté que les descentes d'eaux pluviales entre les deux parois (parpaing/pierres) prenaient la place de l'isolant, que la salle de bains n'était pas isolée au niveau du rampant et que les combles étaient isolés avec de la laine de verre de vingt centimètres, par endroits posés en vrac, avec un film plastique non respirant entre la laine de verre et le lambris.

7. Elle en a souverainement déduit que l'absence d'isolation à certains endroits, l'isolation insuffisante à d'autres et la pose en vrac ou mal ventilée de la laine de verre rendaient la maison impropre à sa destination du fait de l'impossibilité de la chauffer sans exposer des surcoûts qu'elle a constatés.

8. Sans être tenue de procéder à une recherche sur les normes applicables à la date du permis de construire que la reconnaissance de l'existence d'un désordre décennal rendait inopérante, la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

9. M. [P] fait grief à l'arrêt de le condamner à garantir intégralement la société Allo diagnostic et la société AXA France IARD de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre, alors « que le vendeur peut se prévaloir de la faute du diagnostiqueur dont le diagnostic était erroné dès lors qu'il a été privé des informations nécessaires lui permettant de remédier immédiatement aux vices affectant le bien avant la vente ; que la cour d'appel qui a constaté la faute du diagnostiqueur et qui a débouté l'exposant de sa demande en garantie au motif que ses manquements étaient à l'origine du dommage sans rechercher comme cela lui était demandé si la faute du diagnostiqueur n'avait pas empêché Monsieur [P] de procéder aux reprises nécessaires et de vendre son bien conformément à son état, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil devenu l'article 1231-1 du même code. »

Réponse de la Cour

10. La cour d'appel, qui a retenu, par motifs propres et adoptés, que la faute reprochée au diagnostiqueur, consistant à avoir fourni à l'acquéreur une information erronée sur l'état de l'immeuble lors de la vente, était sans lien de causalité avec l'obligation pour M. [P] de supporter la charge des travaux de reprise, a procédé à la recherche prétendument omise et exclu que le vendeur ait été empêché de faire les reprises nécessaires et de vendre son bien conformément à son état.

11. Elle a ainsi légalement justifié sa décision de ce chef. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident, qui n'est qu'éventuel, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. [P] aux dépens des pourvois ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

"Smart building" et responsabilité des constructeurs : une révolution ?

 Etude, J. Mel, GP 2021, n° 34, p. 52.

mardi 13 juillet 2021

Même s'ils ont comme origine une faute du constructeur, les dommages qui relèvent d'une garantie légale ne peuvent donner lieu, contre les personnes tenues à cette garantie, à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun

 Note JP Karila, RGDA 2021-8/9, p. 23

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 juillet 2021




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 598 F-D

Pourvoi n° B 19-15.165




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 JUILLET 2021

La société Viticole de France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 19-15.165 contre l'arrêt rendu le 15 janvier 2019 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société Malmezat-Prat-Lucas-Dabadie, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Piscines Occitanes,

3°/ à la société Piscines Occitanes, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],

4°/ à la société Etablissements Rouch Sylvain, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5],

défenderesses à la cassation.

La société Axa France IARD a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de la société Viticole de France, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Axa France IARD, après débats en l'audience publique du 8 juin 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 15 janvier 2019), par acte sous seing privé du 17 juin 2002, la Société viticole de France (la SVF) a confié à la société Piscines occitanes la construction d'une piscine et d'un local technique.

2. La réalisation d'un dallage a été confiée à la société Établissements Rouch Sylvain (la société Rouch).

3. L'ouvrage a été réceptionné sans réserve en juillet 2003.

4. En 2006, des infiltrations sont apparues dans le local technique. La SVF a assigné la société Piscines occitanes, ainsi que la société Axa France IARD (la société Axa), recherchée comme assureur de ce constructeur. La société Établissements Rouch Sylvain a été appelée en intervention forcée.

5. La société Piscines occitanes a été placée en liquidation judiciaire le 6 mai 2013 et son liquidateur a été appelé en intervention forcée. La liquidation a été clôturée le 2 juillet 2015 pour insuffisance d'actif.

Examen des moyens Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. La société SVF fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de la société Axa à lui verser, sans franchise, diverses sommes au titre de ses préjudices matériel et économique, alors :

« 1°/ qu'en énonçant que la convention n° 33300051429187 passée entre les sociétés Piscines occitanes et Axa était un contrat de responsabilité civile qui excluait les conséquences de la responsabilité décennale, sans examiner le courrier du 14 novembre 2003 de la société Marsh, courtier d'assurance, adressé à la société Piscines occitanes, produit par l'assureur lui-même, dont il résultait que ce contrat couvrait la garantie décennale due par la société Piscines occitanes, les juges du fond ont violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que pour retenir que la convention n° 33300051429187 passée entre les sociétés Piscines occitanes et Axa était un contrat de responsabilité civile qui excluait les conséquences de la responsabilité décennale, la cour d'appel s'est fondée sur une attestation de la société Axa, « qui, compte tenu de sa date, ne p[ouvai]t être suspectée d'avoir été établie pour les besoins de la cause » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si n'étaient pas plus dignes de foi l'attestation du 13 mars 2002 et le courrier du 14 novembre 2003, qui émanaient de la société Marsh, dès lors que, d'une part, eu égard à leur date respective, eux non plus ne « pouvaient être suspecté[s] d'avoir été établi[s] pour les besoins de la cause », d'autre part, ils n'émanaient pas d'une partie au litige, enfin, étant l'oeuvre d'un courtier d'assurance, leur contenu ne pouvait pas être, qui plus est à une année d'intervalle, le fruit d'une confusion entre responsabilité civile de droit commun et garantie décennale, les juges du fond, qui n'ont pas suffisamment motivé leur décision, ont violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en retenant que la convention n° 33300051429187 passée entre les sociétés Piscines occitanes et Axa était un contrat de responsabilité civile qui excluait les conséquences de la responsabilité décennale, après avoir relevé que le contrat n° 333000514291 B entre les sociétés Piscines occitanes et Axa était lui aussi un contrat de responsabilité civile et non de responsabilité décennale, sans expliquer, même brièvement, ce qui aurait pu justifier que la société Piscines occitanes conclue ainsi deux conventions pour couvrir un même risque, l'engagement de sa responsabilité civile, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision et a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour

7. Sous le couvert de griefs non fondés de défaut de motifs, le moyen ne tend en réalité qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond quant à l'absence de contrat d'assurance décennale souscrit par la société Piscines occitanes auprès de la société Axa.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens, réunis

9. Par son deuxième moyen, la société SVF fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de la société Axa à lui verser, sans franchise, diverses sommes au titre de ses préjudices matériel et économique, alors :

« 1°/ que le versement de primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période et que toute clause ayant pour effet de réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré est génératrice d'une obligation sans cause et doit être réputée non écrite ; qu'ainsi, en faisant application de la clause selon laquelle « la garantie s'applique aux dommages survenus postérieurement à la date d'effet du contrat et antérieurement à sa suspension ou à sa résiliation », laquelle tendait pourtant à exclure la garantie lorsque le dommage était postérieur à l'expiration du contrat d'assurance, ce même si le fait générateur était intervenu durant la période d'effet de la convention, la cour d'appel a violé l'article 1131 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article L. 124-1 du code des assurances ;

2°/ subsidiairement, que le versement de primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période et que toute clause ayant pour effet de réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré est génératrice d'une obligation sans cause et doit être réputée non écrite ; qu'ainsi, en faisant application de la clause selon laquelle « la garantie s'applique aux dommages survenus postérieurement à la date d'effet du contrat et antérieurement à sa suspension ou à sa résiliation », sans rechercher, comme l'y invitait pourtant la Société viticole de France si cette clause ne tendait pas à exclure la garantie pour le dommage causé par un évènement intervenu pourtant au cours de la période d'effet de la convention d'assurance lorsque ce dommage était postérieur à l'expiration du contrat et n'avait pas pour effet de réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article L. 124-1 du code des assurances ;

3°/ plus subsidiairement, que qu'en vertu de l'article L. 124-5 du code des assurances, la garantie est, selon le choix des parties, déclenchée soit par le fait dommageable, soit par la réclamation mais lorsqu'elle couvre la responsabilité des personnes physiques en dehors de leur activité professionnelle, la garantie est déclenchée par le fait dommageable ; qu'il résulte du IV. de l'article 80 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, entré en vigueur le 2 novembre 2003, d'une part, que l'article L. 124-5, entre autres, s'applique aux garanties prenant effet postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, du fait de la souscription d'un nouveau contrat, ou de la reconduction de garanties d'un contrat en cours, d'autre part, que toute autre garantie, dès lors qu'il est stipulé que la survenance du fait dommageable pendant la durée de validité du contrat est une condition nécessaire de l'indemnisation, est déclenchée par le fait dommageable conformément aux dispositions des articles L. 124-1-1 et L. 124-5 du code des assurances, enfin, que toute garantie ne relevant d'aucune des deux hypothèses précédentes est déclenchée par la réclamation ; qu'en mettant en oeuvre la clause selon laquelle « la garantie s'applique aux dommages survenus postérieurement à la date d'effet du contrat et antérieurement à sa suspension ou à sa résiliation » et en retenant que la garantie de la société Axa n'était pas due car les dommages invoqués par la Société viticole de France étaient postérieurs à la résiliation du contrat d'assurance, cependant qu'il résultait du IV de l'article 80 de la loi du 1er août 2003 que les garanties dues par la société Axa en vertu du contrat d'assurance litigieux résilié le 31 décembre 2003 ne pouvaient être déclenchées que par le fait dommageable ou par la réclamation, les juges du fond ont violé l'article 80 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ;

4°/ plus subsidiairement encore, que qu'en vertu de l'article L. 124-5 du code des assurances, la garantie est, selon le choix des parties, déclenchée soit par le fait dommageable, soit par la réclamation mais lorsqu'elle couvre la responsabilité des personnes physiques en dehors de leur activité professionnelle, la garantie est déclenchée par le fait dommageable ; qu'il résulte du IV. de l'article 80 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, entré en vigueur le 2 novembre 2003, d'une part, que l'article L. 124-5, entre autres, s'applique aux garanties prenant effet postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, du fait de la souscription d'un nouveau contrat, ou de la reconduction de garanties d'un contrat en cours, d'autre part, que toute autre garantie, dès lors qu'il est stipulé que la survenance du fait dommageable pendant la durée de validité du contrat est une condition nécessaire de l'indemnisation, est déclenchée par le fait dommageable conformément aux dispositions des articles L. 124-1-1 et L. 124-5 du code des assurances, enfin, que toute garantie ne relevant d'aucune des deux hypothèses précédentes est déclenchée par la réclamation ; qu'en mettant en oeuvre la clause selon laquelle « la garantie s'applique aux dommages survenus postérieurement à la date d'effet du contrat et antérieurement à sa suspension ou à sa résiliation » et en retenant que la garantie de la société Axa n'était pas due car les dommages invoqués par la Société viticole de France étaient postérieurs à la résiliation du contrat d'assurance, sans rechercher s'il ne résultait pas du IV de l'article 80 de la loi du 1er août 2003 que les garanties dues par la société Axa en vertu du contrat d'assurance litigieux résilié le 31 décembre 2003 ne pouvaient être déclenchées que par le fait dommageable ou par la réclamation, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 80 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003. »

10. Par son troisième moyen, la société SVF fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que l'assureur qui prend la direction d'un procès intenté à l'assuré est censé aussi renoncer à toutes les exceptions dont il avait connaissance lorsqu'il a pris la direction du procès ; qu'en énonçant que « les circonstances de l'espèce ne permett[ai]ent pas de considérer qu[e l'assureur] a[vait] pris la direction du procès pour le compte de son assurée », par la considération que « celle-ci, au début de la procédure, a[vait] fait le choix d'un conseil distinct et a[vait] présenté sa propre défense en totale autonomie », cependant que l'assureur peut prendre la direction du procès en cours de procédure, les juges du fond qui, ont statué par un motif inopérant, ont violé l'article L. 113-17 du code des assurances ;

2°/ subsidiairement, que l'assureur qui prend la direction d'un procès intenté à l'assuré est censé aussi renoncer à toutes les exceptions dont il avait connaissance lorsqu'il a pris la direction du procès ; qu'en énonçant que « les circonstances de l'espèce ne permett[ai]ent pas de considérer qu[e l'assureur] a[vait] pris la direction du procès pour le compte de son assurée », par la considération que « celle-ci, au début de la procédure, a[vait] fait le choix d'un conseil distinct et a[vait] présenté sa propre défense en totale autonomie », sans rechercher si, comme le soutenait la Société viticole de France, dès lors qu'en cours d'expertise judiciaire, la société Piscines occitanes n'avait plus été représentée et qu'en première instance et en cause d'appel, elle n'avait pas comparu, la société Axa n'avait pas pris la direction du procès, les juges du fond ont privé leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 113-17 du code des assurances ;

3°/ plus subsidiairement, que l'assureur qui prend la direction d'un procès intenté à l'assuré est censé aussi renoncer à toutes les exceptions dont il avait connaissance lorsqu'il a pris la direction du procès ; qu'en énonçant que « les circonstances de l'espèce ne permett[ai]ent pas de considérer qu[e l'assureur] a[vait] pris la direction du procès pour le compte de son assurée », sans répondre au moyen de la Société viticole de France selon lesquels l'attitude la société Axa durant les débats qui ont conduit à la désignation d'un expert judiciaire par une décision du 12 décembre 2011, durant les opérations d'expertise et encore au cours de l'instance devant le tribunal de commerce qui a abouti au jugement entrepris du 21 mars 2016 et pendant celle conclue par l'arrêt attaqué, instances durant lesquelles la société Piscines occitanes ne comparaissait pas que la société Axa avait pris la direction du procès, les juges du fond ont violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en énonçant que, dans sa note en délibéré du 29 septembre 2011, la société Axa France n'avait pas renoncé à se prévaloir de la résiliation du contrat d'assurance intervenue le 31 décembre 2003, cependant que dans ce document, l'avocat de l'assureur écrivait : « La police souscrite auprès de la compagnie Axa par la société Les Piscines occitanes a, effectivement, été résiliée à compter du 31 décembre 2003. / La compagnie Axa renonce donc à son moyen tiré de la résiliation de la police », ce dont il résultait, sans ambiguïté, une renonciation à tout moyen tiré de la résiliation, quelle que soit la date de celle-ci, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette pièce, partant, a violé l'interdiction qui lui est faite de ne pas dénaturer les documents de la cause et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

11. Par son quatrième moyen, la société SVF fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ qu'en énonçant qu'il était établi que les désordres étaient survenus après la résiliation du contrat, le 31 décembre 2003, pour en déduire que la garantie de la société Axa n'était pas due, cependant qu'il était constant que la mauvaise conception du local technique par la société Piscines occitanes, laquelle constituait en elle-même un désordre dont la Société viticole de France demandait réparation au titre du « préjudice matériel », était intervenue avant la résiliation de la convention d'assurance, les travaux litigieux ayant été réceptionnés le 28 juillet 2003, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°/ subsidiairement, qu'en énonçant qu'il était établi que les désordres étaient survenus après la résiliation du contrat, le 31 décembre 2003, pour en déduire que la garantie de la société Axa France n'était pas due, sans rechercher si la mauvaise conception du local technique par la société Piscines occitanes ne constituait pas en elle-même un désordre dont la Société Viticole de France demandait réparation au titre du « préjudice matériel » qui était intervenu avant la résiliation de la convention d'assurance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

12. Même s'ils ont comme origine une faute du constructeur, les dommages qui relèvent d'une garantie légale ne peuvent donner lieu, contre les personnes tenues à cette garantie, à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun (3e Civ., 13 avril 1988, pourvoi n° 86-17.824, Bull. 1988, III, n° 67 ; 3e Civ., 12 novembre 2020, pourvoi n° 19-22.376, publié).

13. La cour d'appel a, d'une part, constaté que les dommages étaient apparus trois ans après la réception, d'autre part, retenu qu'ils rendaient l'ouvrage impropre à sa destination, enfin, relevé que le contrat d'assurance souscrit par la société Piscines occitanes auprès de la société Axa ne couvrait pas la responsabilité décennale de ce constructeur.

14. Il en résulte que les demandes formées par la société SVF, relevant de cette garantie légale, devaient être rejetées.

15. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié.

Sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

16. La SVF fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il fixe sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Piscines occitanes à la somme de 208 590,28 euros et, statuant à nouveau sur ce point, de fixer le montant de cette créance à la somme de 186 015,28 euros, alors :

« 1°/ que les juges du fond ne peuvent aggraver le sort de l'appelant sur son seul appel, en l'absence d'appel incident ; qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait fixé à 208 590,28 euros la créance de la Société viticole de France au passif de la liquidation judiciaire de la société Piscines occitanes et en ramenant ce montant à 186 015,28 euros, cependant qu'en cause d'appel, les société Piscines occitanes et Malmezat-Prat, en qualité de liquidateur judiciaire à la procédure ouverte contre la société Piscines occitanes, n'avaient pas comparu et la société Établissements Rouch Sylvain n'avait pas conclu, les juges du second degré ont violé l'article 562 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait fixé à 208 590,28 euros la créance de la Société viticole de France au passif de la liquidation judiciaire de la société Piscines occitanes et en ramenant ce montant à 186 015,28 euros, accueillant ce faisant la demande « infiniment subsidiaire » de la société Axa tendant à ce que soit « limité le préjudice économique » invoqué par la Société viticole de France, après avoir pourtant accueilli la demande principale de cette même entité tendant à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la Société viticole de France de ses demandes à l'encontre de la société Axa, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, partant, a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ subsidiairement, qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait fixé à 208 590,28 euros la créance de la Société Viticole de France au passif de la liquidation judiciaire de la société Piscines occitanes et en ramenant ce montant à 186 015,28 euros, accueillant ce faisant la demande de la société Axa tendant à ce que soit « limité le préjudice économique » invoqué par la Société viticole de France, après avoir pourtant débouté la Société viticole de France de ses demandes à l'encontre de la société Axa, de sorte que celle-ci n'avait plus d'intérêt à réclamer la réduction du montant de la créance de la Société viticole de France contre la société Piscines occitanes, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

17. La société Piscines occitanes, dont la liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d'actif le 2 juillet 2015, a pris fin à cette date, par application de l'article l'article 1844-7 du code civil et n'a pas été régulièrement attraite à l'instance.

18. Le moyen, dirigé contre une fixation de créance au passif de cette société, est donc irrecevable.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident de la société Axa, qui n'est qu'éventuel, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société viticole de France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;