mardi 5 novembre 2024

Référé-provision et notion de contestation sérieuse

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL




COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 octobre 2024




Cassation partielle sans renvoi


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 580 F-D

Pourvoi n° W 23-18.879








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 OCTOBRE 2024

La société SMACL assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 23-18.879 contre l'arrêt rendu le 23 février 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Rem Real Estate, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 7],

2°/ à Mme [X] [I], domiciliée [Adresse 4],

3°/ à M. [W] [P], domicilié [Adresse 9],

4°/ à M. [N] [E], domicilié [Adresse 4],

5°/ à la société Influence, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 10],

6°/ au syndicat des copropriétaires [Adresse 4], dont le siège est [Adresse 4], représenté par son syndic bénévole, M. [N] [E], domicilié [Adresse 4],

7°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

8°/ à la société Sada assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6],

9°/ à l'association syndicale libre Passage du Caire, dont le siège est [Adresse 3], représentée par la société Castin Gilles Villaret,

10°/ à la société SMA, société anonyme, dont le siège est [Adresse 8],

défendeurs à la cassation.

L'association syndicale libre Passage du Caire a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Baraké, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de la société SMACL assurances, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Sada assurances, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de l'association syndicale libre Passage du Caire, après débats en l'audience publique du 24 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Baraké, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société SMACL assurances du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Rem Real Estate, Mme [I], MM. [P] et [E], la société Influence, le syndicat des copropriétaires [Adresse 4] et les sociétés MMA IARD et SMA.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 février 2023), rendu en référé, et les productions, l'immeuble situé au [Adresse 4] Paris, soumis au statut de la copropriété, est mitoyen de celui situé au [Adresse 5] la même rue, appartenant initialement à la société La Muette. Une association syndicale libre Passage du Caire (l'ASL) gère un passage couvert situé entre ces deux immeubles.

3. Ayant constaté l'apparition de plusieurs fissures en façade et à l'intérieur du bâtiment, puis effectué un diagnostic les imputant à la défaillance du réseau d'évacuation des eaux situé dans le sous-sol de l'immeuble appartenant à la société La Muette, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] (le syndicat des copropriétaires) a obtenu la désignation d'un expert en référé.

4. Le syndicat des copropriétaires, ainsi que quatre copropriétaires, MM. [P] et [E], Mme [I] et la société Influence ont, ensuite, assigné la société Sada assurances, assureur du syndicat des copropriétaires, la société La Muette, aux droits de laquelle vient la société Rem Real Estate, la société MMA IARD, assureur de l'immeuble du [Adresse 5], l'ASL et les sociétés Sagebat, devenue la société SMA, et SMACL assurances, assureurs successifs de l'ASL, aux fins d'obtenir à titre principal la condamnation de la société Sada assurances à leur payer à chacun une indemnité provisionnelle à valoir sur les travaux réparatoires et les préjudices subis.

5. La société Sada assurances a sollicité la condamnation de la société Rem Real Estate, de l'ASL et de leurs assureurs respectifs à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche, et sur le moyen du pourvoi incident, pris en sa deuxième branche, réunis

Enoncé des moyens

6. Par son moyen, pris en sa deuxième branche, la société SMACL assurances fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum avec les sociétés Rem Real Estate, MMA IARD et l'ASL, à garantir la société Sada assurances de l'ensemble des condamnations provisionnelles prononcées à son encontre, alors « que le juge statuant en référé ne peut accorder une provision que si l'obligation à paiement ne se heurte à aucune contestation sérieuse ; qu'en interprétant l'article 15 des statuts de l'association syndicale libre du Passage du Caire pour en déduire qu'elle avait en charge l'entretien des canalisations d'eaux en sous-sol du passage, la cour d'appel, qui a tranché une contestation sérieuse, a violé l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile. »

7. Par son moyen, pris en sa deuxième branche, l'ASL fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum, avec les sociétés Rem Real Estate, MMA IARD, SMA et SMACL assurances, à garantir la société Sada assurances de l'ensemble des condamnations provisionnelles prononcées à son encontre, alors « que tranche une contestation sérieuse et excède ses pouvoirs, le juge des référés qui se livre à l'interprétation d'un acte ; que l'article 15 des statuts de l'ASL Passage du Caire stipule que l'ASL a « la charge des réparations ou de la réfection des descentes des eaux pluviales amenant les eaux au collecteur principal d'égouts, si elles y sont branchées, et ce jusqu'à ce dernier, même dans leur partie en sous-sol ou enterrée » ; qu'en considérant qu'en vertu de cet article 15, l'ASL Passage du Caire était tenue de la réparation ou de la réfection des canalisations fuyardes litigieuses dont l'expert précise qu'elles circulent dans la cave de l'immeuble [Adresse 5] et que l'ASL n'y a pas accès, la cour d'appel s'est livrée à une interprétation de cette clause dont il ne résulte pas clairement qu'elle s'appliquerait aux canalisations litigieuses, en violation de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile :

8. Selon ce texte, le président du tribunal judiciaire, statuant en référé, peut accorder une provision au créancier dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

9. Pour condamner in solidum l'ASL et la société SMACL assurances à garantir la société Sada assurances du paiement des indemnités provisionnelles mises à sa charge, l'arrêt retient que les désordres sont imputables à d'importantes fuites sur les deux réseaux d'évacuation des eaux circulant dans le sous-sol du n° 34/36, l'un desservant l'immeuble du 34/36, l'autre le passage du Caire, puis relève que l'ASL, constituée pour l'administration du passage, a notamment, selon l'article 15 de ses statuts, la charge des réparations ou de la réfection des descentes des eaux pluviales amenant les eaux au collecteur principal d'égouts, si elles y sont branchées et ce jusqu'à ce dernier, même dans leur partie en sous-sol ou enterrée, et en déduit qu'en sa qualité d'administrateur du passage et de son sous-sol, elle est responsable de plein droit des troubles causés par le réseau enterré d'évacuation des eaux.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a interprété les statuts de l'ASL, a tranché une contestation sérieuse et violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

12. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

13. Il résulte des motifs énoncés au paragraphe 10 que la demande de garantie formée par la société Sada assurances pour les condamnations provisionnelles prononcées à l'encontre de l'ASL et de son assureur, la société SMACL assurances, se heurte à l'existence d'une contestation sérieuse, et qu'il n'y a donc lieu à référé sur cette demande.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'association syndicale libre Passage du Caire et la société SMACL assurances, in solidum avec les sociétés Rem Real Estate, MMA IARD et SMA, à garantir la société Sada assurances de l'ensemble des condamnations provisionnelles prononcées à son encontre, et en ce qu'il condamne l'association syndicale libre Passage du Caire et la société SMACL assurances à garantir la société Sada assurances des condamnations prononcées à son encontre au titre des dépens de première instance et d'appel et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 23 février 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DIT n'y avoir lieu à référé sur la demande de garantie formée par la société Sada assurances à l'encontre de l'association syndicale libre Passage du Caire et de la société SMACL assurances relativement aux condamnations provisionnelles mises à sa charge ;

DIT n'y avoir lieu de modifier les dispositions de l'arrêt relatives aux dépens et aux indemnités allouées en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Sada assurances aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Sada assurances et la condamne à payer à l'association syndicale libre Passage du Caire la somme de 3 000 euros et à la société SMACL assurances la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300580

Principe de contradiction : seules les responsabilités décennale et contractuelle de droit commun avaient été débattues et non la responsabilité délictuelle

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 17 octobre 2024




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 561 F-D

Pourvoi n° J 23-14.981




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024

La société Priximbattable.net, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 23-14.981 contre l'arrêt rendu le 1er février 2023 par la cour d'appel de Lyon (8e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [H] [W], domicilié [Adresse 2],

2°/ à M. [L] [R], domicilié [Adresse 3],

3°/ à la société MIC Insurance, dont le siège est [Adresse 5], représentée par la société Leader Underwriting, dont le siège est [Adresse 6],

4°/ à la société Elite Insurance Company, dont le siège est [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Brillet, conseiller, les observations de Me Occhipinti, avocat de la société Priximbattable.net, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [W], de Me Haas, avocat de la société MIC Insurance, après débats en l'audience publique du 17 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Brillet, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Priximbattable.net du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Elite Insurance Company.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 1er février 2023), M. [W] a confié à la société Instaltoo, assurée auprès de la société Elite Insurance Company, la pose de fenêtres, portes-fenêtres et volets roulants.

3. La société Instaltoo a sous-traité à M. [R] la réalisation de ces travaux.

4. La société Instaltoo a fait l'objet d'un plan de cession au profit de la société Design ouverture, devenue Priximbattable.net, assurée auprès de la société MIC Insurance, puis a été placée en liquidation judiciaire.

5. Les travaux ont été achevés fin décembre 2013.

6. La société Design ouverture est intervenue en février 2014 sur les menuiseries posées pour remédier à des infiltrations d'eau.

7. Des infiltrations étant réapparues courant 2016, M. [W], après expertise, a assigné les sociétés Priximbattable.net, MIC Insurance, Elite Insurance Company et M. [R] en indemnisation de son préjudice.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche



Enoncé du moyen

8. La société Priximbattable.net fait grief à l'arrêt de la condamner à payer in solidum avec M. [R] certaines sommes en réparation au titre de la remise en état de quatre fenêtres, de son préjudice moral, de ses frais de relogement et de son préjudice de jouissance, et de la condamner à relever et garantir M. [R] de toutes condamnations payées au-delà de sa part de responsabilité, alors « que les juges du fond ne peuvent pas relever d'office un moyen sans provoquer les explications des parties ; que la responsabilité délictuelle de la société Priximbattable.net n'était invoquée par aucune partie ; qu'en relevant d'office ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

9. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

10. Pour condamner la société Priximbattable.net à payer diverses sommes en réparation du préjudice de M. [W] et la condamner à relever et garantir M. [R] de toutes condamnations payées au-delà de sa part de responsabilité, l'arrêt, après avoir relevé que sa responsabilité ne pouvait pas être engagée sur les fondements de la garantie décennale des constructeurs et de la responsabilité contractuelle, retient que sa responsabilité délictuelle est établie.

11. En statuant ainsi, en requalifiant d'office le fondement de la demande dont elle était saisie alors que seules les responsabilités décennale et contractuelle de droit commun de la société Priximbattable.net avaient été débattues, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

12. La société Priximbattable.net fait grief à l'arrêt de rejeter son appel en garantie contre son assureur MIC Insurance, alors « que la cassation prononcée sur le premier moyen, qui remettra en cause la condamnation de la société Priximbattable.net et son fondement, s'étendra à la garantie de la société MIC Insurance, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 624 et 638 du code de procédure civile :

13. Aux termes du premier de ces textes, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

14. Il résulte du second que la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation, les parties étant remises dans l'état où elles se trouvaient avant la décision censurée et l'affaire étant à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation.

15. La cassation des chefs de dispositif condamnant la société Priximbattable.net à indemniser les préjudices de M. [W] remet en discussion, devant la cour d'appel de renvoi, le fondement de sa responsabilité, dont dépend la garantie de son assureur, la société MIC Insurance.

16. Elle entraîne donc la cassation du chef de dispositif critiqué par le moyen, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

Portée et conséquences de la cassation

17. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de l'arrêt qui condamnent la société Priximbattable.net à payer diverses sommes en réparation du préjudice de M. [W] et à relever et garantir M. [R] de toutes condamnations payées au-delà de sa part de responsabilité entraîne la cassation des chefs de dispositif la condamnant au titre des dépens et des frais irrépétibles, de première instance et d'appel, et rejetant ses demandes au titre de ces mêmes frais qui ne trouvent leur soutien dans aucun autre motif que ceux justement critiqués par les moyens.

Mise hors de cause

18. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société MIC Insurance, dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement ayant débouté M. [W] de sa demande de condamnation à l'encontre de la société Design ouverture, devenue www.Priximbattable.net, à l'indemniser de son préjudice matériel, en ce qu'il condamne la société www.Priximbattable.net, anciennement Design ouverture, à payer in solidum avec M. [R], certaines sommes à M. [W] en réparation de son préjudice de remise en état de ses quatre fenêtres, de son préjudice moral, de ses frais de relogement durant la période de travaux de remise en état et de son préjudice de jouissance, rejette l'appel en garantie de la société Priximbattable.net à l'encontre de son assureur, condamne la société Priximbattable.net à relever et garantir M. [R] de toutes condamnations qu'il aura payées au-delà de sa part de responsabilité à hauteur de 50 %, frais irrépétibles et dépens compris, la condamne aux dépens et à des frais irrépétibles et rejette sa demande au titre de ces frais, l'arrêt rendu le 1er février 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société MIC Insurance ;

Condamne M. [W] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300561

Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans (urbanisme et responsabilité des locateurs d'ouvrage)

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 17 octobre 2024




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 560 F-D

Pourvoi n° Z 23-14.880




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024

La société Marti [Localité 12], société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3], [Localité 10], a formé le pourvoi n° Z 23-14.880 contre l'arrêt rendu le 14 février 2023 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [Z] [N], domicilié [Adresse 4], [Localité 11],

2°/ à la société MMA IARD (Mutuelles du Mans assurances), société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 9],

3°/ à la société APR concept, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], [Localité 7],

4°/ à la société Entreprise Damin, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 14], [Localité 11],

5°/ à la société L'Auxiliaire, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 8],

6°/ à la société Associés [J] [N] [X], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 13], [Localité 5],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Brillet, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société civile immobilière Marti Pontault- Combault, de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la société MMA IARD, de la SARL Ortscheidt, avocat de M. [N] et de la société Associés [J] [N] [X], de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat des sociétés Entreprise Damin et L'Auxiliaire, après débats en l'audience publique du 17 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Brillet, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 14 février 2023), la société civile immobilière Marti [Localité 12] (la SCI) a entrepris la construction d'un centre commercial. Sont intervenues à l'opération de construction, la société APR concept, assurée auprès de la société MMA IARD (la société MMA), en qualité de maître d'oeuvre, et la société Entreprise Damin, assurée auprès de la société L'Auxiliaire, en charge des lots fondations, implantation du bâtiment et gros oeuvre, laquelle a sous-traité la partie de ses prestations relatives à l'implantation de l'édifice à M. [N], géomètre-expert associé de la société Associés [J] [N] [X].

2. La SCI a obtenu un permis de construire un ouvrage comportant l'obligation de respecter un prospect de 10 mètres entre la bordure de la voie publique et la façade du bâtiment.

3. Il est apparu en cours de construction que l'implantation de l'ouvrage avait été modifiée et que la distance séparant le mur pignon du bâtiment de la voie publique avait été réduite à 5,27 mètres.

4. La SCI a déposé une première demande de permis de construire modificative, qui a fait l'objet d'un rejet en date du 24 juillet 2009.

5. Un nouveau permis de construire lui a été accordé dont il résultait une amputation de la surface hors oeuvre nette de l'ouvrage et la suppression de places de stationnement.

6. Les travaux ont été réceptionnés le 29 octobre 2009, avec une réserve étrangère au désordre d'implantation.

7. Par actes du 25 juin 2014, la SCI a assigné les sociétés Entreprise Damin et APR concept et leurs assureurs en réparation de son préjudice consécutif à l'erreur d'implantation de l'ouvrage.

8. La société Entreprise Damin a assigné en garantie M. [N] et la société Associés [J] [N] [X].

Examen du moyen

Enoncé du moyen

9. La SCI fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses prétentions à l'encontre des sociétés Entreprise Damin, L'Auxiliaire, APR concept et MMA, alors « que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, pour dire prescrite l'action en responsabilité contractuelle, avant réception, exercée par la SCI contre les constructeurs et leurs assureurs, la cour d'appel a fixé le point de départ de la prescription de l'action au 19 mars 2009, date du courrier que lui a adressé le service urbanisme de la commune de [Localité 11], la mettant en demeure de revenir au projet du permis de construire initial, ou de présenter une demande de permis de construire modificatif, étant précisé que cette dernière ne pourrait être la régularisation du projet souhaité, compte tenu du non-respect de la règle d'implantation par rapport au domaine public, en retenant que ce courrier était dépourvu d'ambiguïté sur le défaut de respect par la construction litigieuse des règles d'urbanisme, et sur l'absence de régularisation possible en l'état de cette construction, de sorte que le maître d'ouvrage était, à cette date, en possession de tous les éléments lui permettant d'exercer son action à l'encontre de ses cocontractants, et que le rejet de la demande de permis de construire modificatif du 24 juillet 2009 était sans emport, dès lors qu'il était motivé par les mêmes considérations que celles portées à la connaissance du maître d'ouvrage par le courrier du 19 mars précédent ; qu'en statuant ainsi, quand le maître d'ouvrage n'avait eu connaissance, avec certitude, du dommage résultant de l'erreur d'implantation de l'ouvrage commise par les constructeurs qu'à la date du refus de la demande de permis de construire modificatif relative aux travaux déjà réalisés, ayant pour conséquence inéluctable leur illégalité, et donc leur nécessaire démolition, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

10. Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

11. La cour d'appel a souverainement retenu que la lettre adressée par le service urbanisme de la mairie de [Localité 11] à la SCI le 19 mars 2009, la mettant en demeure de revenir au projet du permis de construire initial ou de présenter une demande de permis ne pouvant en aucun cas être la régularisation du projet souhaité, était dépourvue de toute ambiguïté sur l'absence de régularisation possible du non-respect, par la construction, de la règle d'implantation prévue par le PLU imposant un retrait de 10 mètres par rapport à la voie publique.

12. Ayant ainsi fait ressortir que la SCI avait eu, dès cette lettre, connaissance du caractère inéluctable de la suppression d'une partie de l'ouvrage non conforme aux règles d'urbanisme et que cette non-conformité n'était pas régularisable, elle en a exactement déduit qu'elle disposait, dès cette date, de tous les éléments lui permettant d'agir en responsabilité à l'encontre de ses cocontractants, de telle sorte que l'action engagée le 24 juin 2014, plus de cinq ans après, était prescrite.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société civile immobilière Marti [Localité 12] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300560 

Manquement du diagnostiqueur à son obligation d'information (performance énergétique)

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 17 octobre 2024




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 535 FS-D

Pourvoi n° B 22-22.882




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024

1°/ Mme [A] [B], domiciliée [Adresse 3],

2°/ M. [L] [M], domicilié [Adresse 5],

ont formé le pourvoi n° B 22-22.882 contre l'arrêt rendu le 13 septembre 2022 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [V] [J],

2°/ à Mme [K] [N], épouse [J],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

3°/ à M. [S] [U],

4°/ à Mme [F] [C], épouse [U],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

5°/ à la société Cabinet Barrere, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pety, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [B] et de M. [M], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Cabinet Barrere, de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. et Mme [J], et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 3 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Pety, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, M. Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à Mme [B] et à M. [M] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme [U].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 13 septembre 2022), par acte authentique du 24 juillet 2015, ensuite d'une promesse synallagmatique de vente du 15 mai 2015, Mme [B] et M. [M] (les acquéreurs) ont acquis de M. et Mme [J] (les vendeurs) une maison d'habitation que M. et Mme [U] leur avaient vendue le 14 novembre 2014.

3. L'acte authentique de vente contenait une clause exclusive de la garantie des vices cachés.

4. Les différents diagnostics ont été établis par la société Cabinet Barrere (le diagnostiqueur).

5. Ayant constaté de nombreux désordres affectant l'immeuble, notamment
l'isolation et la performance énergétique, les acquéreurs ont obtenu en référé la désignation d'un expert judiciaire qui a déposé son rapport le 18 avril 2017.

6. Ils ont assigné les vendeurs en garantie des vices cachés et le diagnostiqueur sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses cinq dernières branches

Enoncé du moyen

8. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes dirigées contre les vendeurs, alors :

« 2°/ que la qualité d'agent immobilier en laquelle le vendeur s'est présenté dans l'acte authentique de vente, qui a une incidence directe et déterminante sur le régime des garanties, constitue un élément contractuel revêtu de la force obligatoire des contrats ; qu'en l'espèce, [V] [J] s'est présenté, tant dans la promesse de vente du 15 mai 2015 que dans l'acte authentique de vente du 24 juillet 2015 comme « agent immobilier » ; qu'en retenant toutefois, pour considérer M. [J] comme un vendeur profane, qu' « il n'avait pas la qualité d'agent immobilier », quand il s'était expressément prévalu de cette qualité dans l'acte authentique de vente, la cour d'appel a violé l'articl 1134 devenu 1103 du code civil ;

3°/ que les juges du fond qui ne peuvent statuer par voie de simples affirmations, doivent préciser l'origine de leurs renseignements et donc préciser sur quelles pièces ils se fondent pour déduire tel ou tel fait ; qu'en l'espèce, [V] [J] s'était présenté, tant dans la promesse de vente du 15 mai 2015 que dans l'acte authentique de vente du 24 juillet 2015 comme « agent immobilier » ; qu'en affirmant que M. [J] exerçait au moment de la vente des fonctions salariées de « négociateur immobilier » au sein de l'agence Square-Habitat, qu'il n'avait pas la qualité d'agent immobilier, ni la faculté de prendre seul des décisions d'achat en vue de la rénovation d'immeubles pour les vendre, sans préciser les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait pour en déduire que M. [J] n'avait pas la qualité « d'agent immobilier » expressément mentionnée dans la promesse de vente et l'acte authentique de vente, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que sont soumises au régime des agents immobiliers toutes les personnes, physiques ou morales, se livrant ou prêtant habituellement les concours à des opérations d'entremise portant sur les biens d'autrui, ainsi que les collaborateurs que le titulaire de la carte professionnelle a habilités à négocier, s'entremettre ou s'engager pour son compte ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que « M. [V] [J] exerçait au moment de la vente des fonctions salariées de "négociateur immobilier" au sein de l'agence Square-Habitat » ; qu'en retenant toutefois que M. [J] était vendeur profane, quand il résultait de ses propres constatations qu'il pratiquait à titre habituel l'intermédiation immobilière, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1641 et 1643 du code civil, ensembles les articles 1er et 4 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 ;

5°/ que le seul fait de vendre un bien ressortissant de son patrimoine privé ne suffit pas à exclure la qualité de vendeur professionnel ; qu'en l'espèce, pour considérer M. [J] comme un vendeur profane, la cour d'appel a relevé que la vente « a été conclue dans un cadre privé », que « l'impôt sur la plus-value a été calculé suivant le régime des particuliers » et que « s'agissant d'une opération isolée de gestion de leur patrimoine privé dans un but à l'origine locatif, les époux [V] et [K] [J] ne peuvent se voir reconnaître le caractère de vendeurs professionnels » ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure la qualité de vendeur professionnel de M. [J], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1641 et 1643 du code civil ;

6°/ que le seul fait de réaliser, à l'occasion d'une vente, une plus-value limitée ne suffit pas à exclure la qualité de vendeur professionnel ; qu'en l'espèce, pour considérer M. [J] comme un vendeur profane, la cour d'appel a considéré que « la plus-value brute (155 000 - 98.000 = 57 000 euros) doit être relativisée au regard du remboursement du prêt et de l'impôt payé, ce qui leur a laissé un solde de 22 840,21 euros ; qu'en se déterminant par ce motif impropre à exclure la qualité de vendeur professionnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1641 et 1643 du code civil. »

Réponse de la Cour

9. La cour d'appel a relevé que le projet initial des vendeurs était l'achat d'un bien immobilier en vue de sa location, qu'ils n'avaient procédé à sa revente après travaux qu'en raison de l'état de santé de M. [J] et qu'il s'agissait d'une opération isolée de gestion de leur patrimoine privé.

10. Elle a pu déduire de ces seuls motifs que M. et Mme [J] n'étaient pas des vendeurs professionnels, peu important que celui-ci ait été agent ou négociateur immobilier, de sorte qu'ils pouvaient se prévaloir de la clause de non-garantie des vices cachés.

11. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

12. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme la condamnation prononcée contre le diagnostiqueur en réparation de leur préjudice de perte de chance, de constater le paiement de cette somme en exécution du jugement et de les condamner in solidum à payer une certaine somme au diagnostiqueur au titre de la répétition de l'indu, alors « que, lorsque le diagnostic n'a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l'art, et qu'il se révèle erroné, le diagnostiqueur est tenu à la réparation de l'intégralité du préjudice subi par l'acquéreur ; qu'en retenant toutefois, pour réduire à la somme de 20 268,34 euros l'indemnisation par le cabinet Barrere du préjudice subi par les acquéreurs, que l'erreur de diagnostic du cabinet Barrere a causé aux consorts [B]-[M] une simple perte de chance devant être fixée à 50 %, la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien devenu 1240 du code civil, ensemble l'article L. 271-4 du code de la construction et de l'habitation, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

13. La cour d'appel a exactement rappelé que, selon le II de l'article L. 271-4 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, le diagnostic de performance énergétique (DPE) mentionné au 6° de ce texte n'a, à la différence des autres documents constituant le dossier de diagnostic technique, qu'une valeur informative.

14. Elle a aussi relevé que le diagnostiqueur avait, avant la signature de la promesse de vente, remis aux acquéreurs un diagnostic de performance énergétique erroné quant à l'épaisseur de l'isolant utilisé dans les combles de l'immeuble, puis transmis au notaire, avant la signature de l'acte authentique, c'est-à-dire tardivement, un diagnostic rectifié.

15. Elle en a déduit, à bon droit, que le manquement du diagnostiqueur à son obligation d'information avait fait perdre aux acquéreurs une chance de négocier une réduction du prix de vente, perte qu'elle a souverainement évaluée à la proportion qu'elle a retenue.

16. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [B] et M. [M] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300535

mardi 22 octobre 2024

Sous-traitance et cession de créance

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 17 octobre 2024




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 555 FS-B

Pourvoi n° Y 23-11.682




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024

La caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée, société coopérative de banque à forme anonyme et capital variable, dont le siège est [Adresse 1], a formé un pourvoi le 6 février 2023 et un pourvoi rectificatif le 15 mai 2023 n° Y 23-11.682 contre l'arrêt rendu le 15 novembre 2022 par la cour d'appel de Montpellier (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société Pernod Ricard France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société Pernod, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Pernod Ricard France, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mmes Oppelt, Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 15 novembre 2022), le 15 mars 2018, la société Pernod Ricard France, venant aux droits de la société Pernod (la société Pernod), a confié l'exécution de travaux de terrassement et de gros oeuvre à la société François Fondeville, qui a sous-traité à la société Farines TP les travaux de démolition du dallage et de création de réseaux enterrés, dont le paiement a été garanti par un cautionnement de la société compagnie européenne de garantie et cautions (la CECG).

2. Le 5 juillet 2018, la société François Fondeville a cédé la totalité des créances résultant du marché de travaux conclu avec la société Pernod à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée (la CRCAM).

3. Par deux avenants des 16 juillet et 5 septembre 2018, la société François Fondeville a confié à la société Farines TP la réalisation de travaux supplémentaires.

4. La société François Fondeville a été placée en redressement judiciaire par jugement du 9 octobre 2018.

5. Se heurtant au refus de la société Pernod de payer, en exécution de la cession de créance, la situation n° 4 de travaux, la CRCAM l'a assignée en paiement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. La CRCAM fait grief à l'arrêt de dire que la cession de créances du 5 juillet 2018 qu'elle a conclue avec la société François Fondeville est inopposable à la société Farines TP, sous-traitant, et de rejeter sa demande en paiement à l'encontre de la société Pernod, maître de l'ouvrage et débiteur cédé, alors « que la cession par l'entrepreneur principal de créances résultant du marché passé avec le maître de l'ouvrage et correspondant à des travaux qu'il a sous-traités n'est pas inopposable, en son intégralité, au sous-traitant et, partant, au maître de l'ouvrage, dans le cas où l'action directe est exercée à son encontre, pour les raisons que le paiement d'une partie seulement de ces créances, correspondant à des travaux supplémentaires, n'a pas été garanti par le cautionnement visé à l'article 14 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance et n'a pas donné lieu à une délégation de paiement par l'entrepreneur principal du maître de l'ouvrage au sous-traitant ; qu'en énonçant, par conséquent, après avoir relevé que le paiement au sous-traitant des créances cédées à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée à hauteur d'un montant de 86 532,50 euros, correspondant aux travaux initialement sous-traités par la société François Fondeville à la société Farines TP le 17 avril 2018, avait bien été garanti par un cautionnement souscrit par la société Compagnie européenne de garantie et cautions à hauteur de la somme de 86 532,50 euros avant la cession de créances conclue entre la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée et la société François Fondeville, pour dire que la cession de créances conclue entre la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée et la société François Fondeville était inopposable à la société Farines TP, sous-traitant, et pour rejeter, en conséquence, la demande en paiement formée par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée, cessionnaire, à l'encontre de la société Pernod Ricard France, maître de l'ouvrage et débiteur cédé, qu'il n'était pas contesté qu'aucune délégation n'avait été régularisée et que l'absence de cautionnement des travaux supplémentaires sous-traités, les 16 juillet et 5 septembre 2018, et de délégation de paiement relative à ces travaux rendait inopposable au sous-traitant la cession de créances relative à ces travaux que l'entrepreneur principal n'avait pas effectué lui-même et en déduisant que le maître de l'ouvrage, débiteur cédé, demeurait débiteur sur le fondement de l'action directe, peu important la date de cette cession de créance, quand les circonstances qu'elle relevait ne rendaient pas, à elles seules, inopposable, en son intégralité, la cession de créances, conclue entre la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée et la société François Fondeville, à la société Farines TP, sous-traitant et, partant, à la société Pernod Ricard France, maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 13-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 13-1 et 14 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 :

7. D'une part, il résulte de la combinaison de ces textes que l'entrepreneur principal ne peut céder la part de sa créance sur le maître de l'ouvrage correspondant à sa dette envers le sous-traitant sans avoir obtenu, préalablement et par écrit, un cautionnement personnel et solidaire garantissant les paiements de toutes les sommes qu'il doit au sous-traitant en application du sous-traité.

8. Il est, en conséquence, jugé qu'en l'absence d'un tel cautionnement, la cession par l'entrepreneur principal de créances correspondant à des travaux qu'il a sous-traités est inopposable au sous-traitant, peu important qu'une telle cession et le paiement effectué pour en assurer l'exécution soient intervenus antérieurement à l'exercice de l'action directe du sous-traitant contre le maître de l'ouvrage (Com., 16 mai 1995, pourvoi n° 92-21.876, publié), de sorte que le sous-traitant, qui exerce l'action directe prévue à l'article 12 de la loi précitée, doit être payé par préférence au cessionnaire de la créance de l'entrepreneur principal (3e Civ., 29 mai 1991, pourvoi n° 89-13.504, publié).

9. Cette primauté du paiement du sous-traitant, qui vise à sanctionner une cession de créance intervenue en méconnaissance de ses droits, ne s'applique que pour les travaux sous-traités dont le paiement n'a pas été garanti.

10. D'autre part, il est jugé que la banque, qui a fourni le cautionnement prévu à l'article 14 susvisé, subrogée, après paiement, dans les droits et actions du sous-traitant, est fondée à exercer l'action directe dont disposait celui-ci contre le maître de l'ouvrage (3e Civ., 18 mai 2017, pourvoi n° 16-10.719, publié).

11. Il en résulte que, si le cautionnement ne couvre pas les travaux confiés ultérieurement au sous-traitant par la conclusion d'autres contrats, la cession par l'entrepreneur principal de créances correspondant aux travaux sous-traités n'est inopposable au sous-traitant et à la caution subrogée que dans la limite des travaux dont le paiement n'a pas été garanti. Le maître de l'ouvrage ne peut donc se prévaloir d'une telle inopposabilité qu'à concurrence des sommes correspondant au montant des travaux sous-traités non garanti.

12. Pour rejeter la demande du cessionnaire en paiement de la situation de travaux n° 4, d'un montant de 77 458,26 euros, l'arrêt retient que la société François Fondeville a cédé à la CRCAM la totalité des créances nées du marché conclu avec la société Pernod dont une partie correspondait à sa dette envers le sous-traitant et que si le paiement des travaux figurant au sous-traité a fait l'objet d'un acte de cautionnement, celui des travaux supplémentaires n'a pas été garanti.

13. Il constate que, pour un montant total de travaux sous-traités par l'entreprise principale de 120 282,50 euros, la société Pernod, maître de l'ouvrage et débiteur cédé, a remboursé à la caution la somme de 86 532,50 euros et payé à la société Farines TP, au titre de l'action directe exercée par celle-ci, celle de 28 709,98 euros, correspondant aux travaux supplémentaires non couverts par un cautionnement, de sorte que le maître de l'ouvrage n'est redevable d'aucune somme à la CRCAM.

14. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que seuls les travaux supplémentaires confiés au sous-traitant à hauteur des sommes de 26 750 euros et de 7 000 euros n'avaient pas été garantis par un cautionnement, de sorte que le maître de l'ouvrage ne pouvait se prévaloir de l'inopposabilité de la créance cédée qu'à concurrence de ces sommes, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de nullité du jugement, l'arrêt rendu le 15 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Pernod Ricard France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre. ECLI:FR:CCASS:2024:C300555

Retards et clause pénale...

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CC



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 3 octobre 2024




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 531 F-D

Pourvoi n° B 23-12.536




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 OCTOBRE 2024

L'Association cultuelle de la grande mosquée de Clichy-Montfermeil, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 23-12.536 contre l'arrêt rendu le 18 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Kilic batiment, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de l'Association cultuelle de la grande mosquée de Clichy-Montfermeil, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Kilic batiment, après débats en l'audience publique du 3 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 novembre 2022), en 2009, l'Association cultuelle de la grande mosquée de Clichy-Montfermeil (l'association) a confié à la société Kilic bâtiment des travaux de construction d'un immeuble.

2. La société Kilic bâtiment a suspendu l'exécution des travaux pour non-paiement des situations, puis a assigné l'association aux fins de paiement et de résiliation du contrat de construction.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. L'association fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Kilic bâtiment une certaine somme à titre d'indemnité contractuelle de résiliation, alors « que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être respectées par le juge ; qu'en l'espèce, il résulte de l'article 13 de la lettre de commande, dont les termes ont été rappelés par la cour, qu'« en cas de retard dans la délivrance de l'ordre de service n° 2 (?) au-delà d'un délai de 180 jours, le présent contrat qui lie le maitre d'ouvrage et l'entrepreneur sera purement et simplement résilié. Dans ce cas, le maitre d'ouvrage s'acquittera auprès de l'entrepreneur, d'une indemnité complémentaire égale à 30 % du montant des travaux restant à exécuter. Cette indemnité sera versée à l'entrepreneur, au plus tard 30 jours après l'établissement d'un constat contradictoire de l'état d'avancement du chantier. Ce constat sera établi par huissier » ; que cette indemnité contractuelle n'était donc due qu'en cas de résiliation de plein droit du contrat consécutive au retard dans la délivrance de l'ordre de service ; qu'en condamnant l'A.C.G.M.C.M à payer à la société Kilic bâtiment la somme de 1 631 818,62 euros, quand la résiliation du contrat avait été prononcée judiciairement aux torts exclusifs de l'A.C.G.M.C.M pour absence de paiement de situations de travaux et de fourniture d'une garantie, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103 du code civil :

5. Selon ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

6. Pour condamner l'association au paiement d'une indemnité contractuelle, l'arrêt constate que, selon l'article 13 de la lettre de commande, en cas de retard dans la délivrance de l'ordre de service n° 2 au-delà d'un délai de 180 jours, le contrat sera purement et simplement résilié et, dans ce cas, le maître de l'ouvrage s'acquittera auprès de l'entrepreneur d'une indemnité complémentaire égale à 30 % du montant des travaux restant à exécuter.

7. Il retient que cette clause constitue une clause pénale en ce qu'elle fixe forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractuelle et qu'elle trouve à s'appliquer car la résiliation du marché a été prononcée aux torts exclusifs de l'association.

8. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'indemnité était due, non en cas de résiliation judiciaire du marché pour non-paiement du prix des travaux, mais en cas de résiliation de plein droit pour délivrance tardive de l'ordre de service n° 2, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. La cassation du chef de dispositif relatif à la clause pénale n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'association aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'Association cultuelle de la grande mosquée de [Localité 3] à payer à la société Kilic bâtiment la somme de 1 631 618,62 euros au titre de l'article 13 de la lettre de commande, avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2009, l'arrêt rendu le 18 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Kilic bâtiment aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Kilic bâtiment et la condamne à payer à l'Association cultuelle de la grande mosquée de Clichy-Montfermeil la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300531