mardi 29 mai 2018

Voisinage - trouble - ensoleillement

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 17 mai 2018
N° de pourvoi: 17-18.238
Non publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Paris, 17 mars 2017), que M. et Mme X..., propriétaires d'un pavillon d'habitation situé à [...], ont assigné M. Z..., propriétaire de la parcelle voisine, sur laquelle il a construit un immeuble d'une hauteur de 8,90 mètres, en suppression de vues et paiement de dommages et intérêts ;

Sur le premier moyen ci-après annexé :

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter la demande en suppression de vues ;

Mais attendu qu'ayant relevé que M. et Mme X... ne situaient pas avec certitude la ligne séparant les deux fonds, la cour d'appel en a déduit souverainement que ceux-ci ne démontraient pas que les quatre fenêtres litigieuses étaient à une distance inférieure à six décimètres ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen ci après-annexé :

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter la demande en paiement de dommages et intérêts ;

Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que les deux terrains étaient situés dans une zone fortement urbanisée de la petite couronne de la ville de Paris, où l'habitat évolue au gré des opérations de constructions, et retenu que M. et Mme X... ne sauraient exiger que l'ensoleillement dont ils bénéficiaient ne soit jamais modifié, la cour d'appel a pu en déduire que les troubles dont ils se plaignaient n'excédaient pas les inconvénients normaux de voisinage et a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... et les condamne à payer à M. Z... la somme de 3 000 euros ;

Droit de propriété - construction illégale - principe de proportionnalité

Note J. Laurent, SJ 2018, p. 1356.
Note Perruchot-Triboulet, RLDC 2018-7/8, p. 46.
Note Cornille, Constr.-urb. 2018-7/8, p. 25.
Note Périnet-Marquet, SJ G 2018, p. 1887.
Note Bergel, RDI 2018, p. 446.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 17 mai 2018
N° de pourvoi: 16-15.792
Publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
Me Carbonnier, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 11 janvier 2016 ), que M. et Mme X... ont assigné M. Z... en revendication de la propriété, par prescription trentenaire, de la parcelle qu'ils occupaient et sur laquelle ils avaient construit leur maison ; que M. Z..., se prévalant d'un titre de propriété, a demandé la libération des lieux et la démolition de la maison ;

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt d'accueillir les demandes de M. Z..., alors, selon le moyen, que le droit au domicile est une composante du droit à la vie privée dont le respect est protégé par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'ingérence dans ce droit doit demeurer proportionnée au but légitime poursuivi ; que, pour apprécier la proportionnalité de la perte d'un logement, qui est l'une des atteintes les plus graves au droit au respect du domicile, il y a lieu de tenir compte notamment de l'ancienneté de l'occupation des lieux et de la situation particulière de la personne concernée, qui commande une attention spéciale si elle est vulnérable ; qu'au cas présent, l'arrêt attaqué avait relevé que M. X... avait construit sur le terrain litigieux une maison depuis plus de vingt ans, dans laquelle il vivait avec son épouse, décédée durant l'instance d'appel ; qu'il ressortait également des documents de la cause que M. X... était âgé de plus de 87 ans, ce qui le rendait particulièrement vulnérable ; qu'en ordonnant néanmoins à M. X... de quitter la parcelle sur laquelle il avait établi son domicile et d'y démolir les constructions qui lui servaient de logement, sans rechercher si ces mesures étaient proportionnées au regard notamment de l'ancienneté de l'occupation des lieux et de l'âge de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que les mesures d'expulsion et de démolition d'un bien construit illégalement sur le terrain d'autrui caractérisent une ingérence dans le droit au respect du domicile de l'occupant, protégé par l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Qu'une telle ingérence est fondée sur l'article 544 du code civil, selon lequel la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements, et sur l'article 545 du même code, selon lequel nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité ;

Qu'elle vise à garantir au propriétaire du terrain le droit au respect de ses biens, protégé par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et par l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Que, l'expulsion et la démolition étant les seules mesures de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien, l'ingérence qui en résulte ne saurait être disproportionnée eu égard à la gravité de l'atteinte portée au droit de propriété ;

Attendu qu'ayant retenu qu'il résultait d'un acte notarié de partage du 20 mai 2005 que M. Z... était propriétaire de la parcelle litigieuse et que M. et Mme X... ne rapportaient pas la preuve d'une prescription trentenaire, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche inopérante, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... et Mme Y... X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et Mme Y... X... et les condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. Z... ;

lundi 28 mai 2018

Premiers pas vers la loi Elan

Focus Durand-Pasquier, Constr.-urb. 2018-5, p. 3.

Retour sur les éléments d'équipement installés sur l'existant

Repère Périnet-Marquet, Constr.-urb. 2018-5, p. 1.

Eléments d'équipement sur existants : la fin de la saga ?

Etude Ajaccio et Caston, GP 2018, n° 18, p. 67.

Assurance construction - panorama (avr. 2017/avr. 2018)

JP Karila, SJ G 2018, p. 1080.

La personnalité juridique des robots : une monstruosité juridique

Etude Loiseau, SJ G 2018, p. 1039.

Exploitation de l'image des biens publics

Note JM Bruguière, D. 2018, p.  1051, sur CE 397047.
Note Hansen, SJ G 2018, p. 1060.

Panorama : protection des données personnelles (déc. 2016/mai 2018)

Fauvarque-Cosson et Maxwell, D. 2018, p. 1033.

jeudi 24 mai 2018

Responsabilité décennale - notion de désordre grave

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 3 mai 2018
N° de pourvoi: 17-14.767
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 3 janvier 2017), que M. et Mme C..., aux droits desquels se trouvent Mme C... et ses enfants, Peter et Alexandra C..., ont fait édifier, en qualité de promoteurs, un groupe de deux immeubles et ont souscrit une assurance de responsabilité décennale auprès de la société La Concorde, devenue Generali ; que les travaux ont été achevés le 19 septembre 1996 ; que, se plaignant de différents désordres, le syndicat des copropriétaires et certains copropriétaires ont assigné M. et Mme C... et leur assureur en indemnisation de leurs préjudices ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatrième et cinquième branches, ci-après annexé :

Attendu que le syndicat des copropriétaires et des copropriétaires font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes au titre des désordres affectant l'étanchéité des terrasses ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue par les constatations de l'expert, a relevé que les fissures concernant l'étanchéité des terrasses, lesquelles ne couvraient pas des surfaces habitables, ne provoquaient ni infiltrations dans les parties habitables, ni dégradations du gros-oeuvre du bâtiment et ne compromettaient pas la destination de l'ouvrage ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique, pris en sa sixième branche, ci-après annexé :

Attendu que le syndicat des copropriétaires et des copropriétaires font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes au titre des fissures dans les appartements ;

Mais attendu qu'ayant relevé, procédant à la recherche prétendument omise, que le transport sur les lieux du 20 septembre 2013 avait permis de constater que les désordres qui lui étaient soumis, qui ne concernaient en réalité que neuf logements sur les quarante-trois livrés en 1996, étaient constitués de micro-fissures provoquées par le fluage du béton, la cour d'appel, qui en a souverainement déduit que ces désordres quasiment stabilisés en 2013, soit dix-sept ans après la construction des deux immeubles, n'étaient pas d'une gravité telle qu'ils rendaient ceux-ci impropres à leur destination, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième et troisième branches, réunies :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt dit que les désordres constatés sur les deux immeubles ne portent atteinte ni à la solidité des ouvrages ni à la destination des immeubles et qu'ils ne relèvent donc pas de la garantie décennale prévue à l'article 1792 du code civil et rejette toutes les demandes du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires ;

Qu'en statuant ainsi, sans aucun motif, s'agissant des demandes formées au titre des désordres affectant le joint de dilatation du premier niveau de la Tour A et les planchers des buanderies, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le moyen unique, pris en ses septième et huitième branches, réunies :

Vu l'article 1792 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande formée au titre du désordre affectant la dalle du parking, l'arrêt retient que, lors de son transport sur les lieux, la cour a été conduite à constater qu'aucune aggravation du désordre affectant la poutre porteuse n° 5 sur laquelle avait été fixé un témoin, ne pouvait être relevée, que, si le témoin de la poutre n° 6 pouvait être de nature à établir une aggravation du désordre, le conseil du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires avait affirmé que les manoeuvres de camions sur la dalle située au-dessus étaient désormais interdites afin d'éviter toute aggravation de ce désordre et que le désordre ne rendait pas l'immeuble impropre à sa destination ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le fléchissement de la dalle du parking, la flèche de plusieurs centimètres de l'une des poutres, l'éclatement des têtes de poteaux et la fissuration sur appuis pour certaines poutres relevés par l'expert ne constituaient pas eux-mêmes d'ores et déjà une atteinte caractérisée à la solidité de l'ouvrage ou à sa destination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires au titre des désordres affectant le joint de dilatation du premier niveau de la Tour A, les planchers des buanderies et la dalle du parking, l'arrêt rendu le 3 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Vente immobilière - notion de dol

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 3 mai 2018
N° de pourvoi: 17-16.861
Non publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
Me Rémy-Corlay, SCP Delvolvé et Trichet, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Chambéry, 24 janvier 2017), que, le 27 janvier 2011, M. X... et la société civile immobilière Chalet X... ont vendu à la société civile immobilière Apopka (la SCI) un chalet situé à Courchevel ; que, par une lettre du 26 novembre 2002, le directeur régional des affaires culturelles a avisé M. X... qu'aucune mesure au titre des monuments historiques n'était prise concernant son chalet compte tenu de sa volonté de ne pas procéder de son vivant à des modifications irréversibles ; que, le 28 janvier 2011, le ministre de la culture et de la communication a pris une décision de mise en instance de classement du chalet comme monument historique ; que la SCI a assigné les vendeurs en annulation de la vente, demande ultérieurement modifiée en réparation des préjudices subis résultant d'un dol ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en indemnisation, d'ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire et de la condamner au paiement du solde du prix de vente ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que le défaut de communication par M. X... à l'acquéreur, avant la vente, de la lettre du 26 novembre 2002 n'était pas constitutif d'un dol, dès lors que les termes de la lettre n'étaient pas comminatoires, que les vendeurs n'avaient pas dissimulé les discussions qu'ils avaient eues avec l'administration près de dix ans auparavant, que M. X... avait pu légitimement estimer au moment de la vente qu'il n'existait aucun risque de classement ni d'inscription, compte tenu du délai écoulé et de l'absence de sa part d'un engagement formel de ne pas procéder à une modification de l'ouvrage et que la décision de classement provisoire de 2011 n'était pas la conséquence des démarches de l'administration effectuées au début des années 2000, la cour d'appel a pu déduire de ces seuls motifs que les demandes de la SCI fondées sur le dol ne pouvaient être accueillies et que le paiement du solde du prix de vente était dû, de sorte qu'elle a légalement justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire et de la condamner au paiement du solde du prix de vente, somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 février 2011 ;

Mais attendu que les sommes placées sous séquestre n'entrent pas dans le patrimoine des créanciers ; qu'ayant constaté qu'une somme restait due au titre du solde du prix de vente et que l'instance entraînait pour le vendeur un préjudice en raison du retard apporté au paiement de ce solde, la cour d'appel en a exactement déduit que l'acquéreur devait payer au vendeur le solde du prix et n'a fait qu'user de son pouvoir discrétionnaire en assortissant la condamnation des intérêts au taux légal à compter du jour de la vente avec capitalisation par année entière ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à des dommages-intérêts au titre du préjudice moral ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que l'instance avait occasionné un préjudice moral aux vendeurs dont la bonne foi avait été mise en cause, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur un abus d'ester en justice, a légalement justifié sa décision en condamnant la SCI au paiement de dommages-intérêts ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la SCI Apopka aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Apopka et la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. X... et la société civile immobilière Chalet X... ;

Preuve du contrat d'entreprise et de son étendue

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 3 mai 2018
N° de pourvoi: 17-17.798
Non publié au bulletin Cassation

M. Chauvin (président), président
SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 8 mars 2017), rendu en référé, que la société Les Voyageurs a confié des travaux à la société SML BTP ; que, des désordres étant apparus en cours de chantier, les parties ont cessé toute relation après avoir dressé un procès-verbal de réception et les travaux ont été poursuivis par une tierce entreprise, la société Giovellina ; que, de nouveaux désordres étant survenus sur la dalle de l'aire de stationnement, la société Les Voyageurs a assigné en référé la société SML BTP en désignation d'un expert pour les désordres de cette dalle et en paiement d'une provision au titre des désordres affectant le carrelage de la salle de restaurant et la réalisation d'une cage d'ascenseur présentés comme ayant été repris par la société Giovellina ;

Attendu que, pour condamner la société SML BTP à payer une certaine somme à titre de provision à la société Les Voyageurs pour les désordres affectant le carrelage de la salle de restaurant et la cage d'ascenseur, l'arrêt retient qu'à l'inverse de ce qui est soutenu par l'entreprise, le dallage pour le parking de la cour intérieure a été facturé et « qu'ainsi en est-il du carrelage », que, si le procès-verbal ne comporte aucune remarque sur l'ascenseur, il faisait partie du devis et des factures qui ont été intégralement payées et que, eu égard au délai écoulé entre le procès-verbal de réception du 7 novembre 2013 et les factures de l'entreprise Giovellina des 3 et 17 décembre 2013 pour la reprise des travaux de carrelage et la réalisation d'une cage d'ascenseur, il est démontré que les travaux ont été réalisés pour reprendre ceux effectués par la société SML BTP ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la facture récapitulative du 25 septembre 2013 ne mentionnait pas de travaux de carrelage et sans relever l'existence de désordres de nature décennale quant aux travaux relatifs à la cage d'ascenseur après avoir retenu que le procès-verbal de réception ne comportait aucune réserve sur ceux-ci, la cour d'appel, qui a dénaturé la facture et n'a pas caractérisé l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de la société SML BTP pour les travaux de la cage d'ascenseur, a violé le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la société Les Voyageurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Les Voyageurs à payer la somme de 3 000 euros à la société SML BTP ;

Erreur d'implantation - responsabilité du géomètre ?

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 3 mai 2018
N° de pourvoi: 17-16.260
Non publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 9 février 2017), que le port autonome de Bordeaux a confié à la société Demathieu Bard construction (la société Demathieu) la réalisation d'un immeuble de bureaux dont le rez-de-chaussée devait être situé à la cote d'altitude 5,46 NGF, l'ouvrage se situant dans une zone inondable ; que l'article B410 du CCTP stipulait que l'implantation des constructions serait à la charge du lot gros oeuvre ; que la société Demathieu a confié à la SELARL Cabinet A... B...    , géomètre, une mission d''implantation du bâtiment ; qu'après achèvement des travaux, il est apparu que le rez-de-chaussée avait été implanté à la cote 5,20 NGF ; que le maître de l'ouvrage a refusé la réception des travaux non conformes au permis de construire ; qu'un permis de construire modificatif a été obtenu le 14 décembre 2011, permettant la réception le 15 décembre 2011 ; que, le maître de l'ouvrage lui ayant appliqué des pénalités de retard, la société Demathieu a, après expertise, assigné la SELARL Cabinet A... B... et la société Generali IARD en paiement de sommes ;

Attendu que la société Demathieu fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que le seul fait qu'un bâtiment soit édifié à une hauteur différente de celle à laquelle un géomètre expert était chargé de fixer son implantation suffit à engager la responsabilité de ce dernier ; que dès lors, en se bornant à retenir, pour débouter la société Demathieu Bard construction de sa demande de condamnation à l'encontre de la société A... B... , qui s'était vue confier une mission d'implantation des bâtiments en planimétrie et en altimétrie, que la justesse de l'implantation du repère Z, qui devait être placé à 5,44 m, ne pouvait être vérifiée en ce qu'il avait été apposé sur un ouvrage disparu, et qu'aucune erreur d'implantation n'était démontrée, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait, non contesté, que le plancher ait été posé à 5,20 m au lieu de 5,44 m ne suffisait
pas à engager la responsabilité de du géomètre chargé de s'assurer de l'implantation altimétrique du bâtiment, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

2°/ que commet une faute de nature à engager sa responsabilité le géomètre-expert qui, chargé d'une mission d'implantation, ne s'assure pas de la pérennité des repères qu'il installe, empêchant ainsi la détermination de l'origine d'un éventuel désordre topographique affectant
l'ouvrage pendant et postérieurement à son édification ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter la société Demathieu Bard de sa demande de condamnation de la société A... B... , que M. B... ne pouvait être tenu pour responsable de la disparition du trait de peinture qu'il avait réalisé sur l'immeuble voisin pour marquer le point de niveau litigieux dans la mesure où l'immeuble avait fait l'objet, postérieurement aux travaux, d'une rénovation par décapage et remise en peinture, sans rechercher, comme elle y était invitée et comme le faisait valoir l'expert, si le fait de n'avoir matérialisé le point de niveau que par un simple trait de peinture sans s'être assuré de sa pérennité, ne constituait pas, en soi, un manquement de nature à engager la responsabilité du géomètre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que, pour matérialiser le repère d'altitude Z, le géomètre avait tracé sur le bâtiment voisin un trait de peinture, que ce repère n'avait pu être retrouvé, le bâtiment voisin ayant fait l'objet postérieurement d'une rénovation par décapage et remise en peinture de la façade, et que M. C... n'était pas responsable de cette disparition, la cour d'appel, qui, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a pu en déduire qu'aucune erreur d'implantation imputable au géomètre n'était démontrée, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Demathieu Bard construction aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

mardi 15 mai 2018

nul ne peut se contredire au détriment d'autrui

Note Strickler, Procédures 2018-5, p. 14
Voir aussi cass. n° 16-27.823.
Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 15 mars 2018
N° de pourvoi: 17-21.991
Publié au bulletin Rejet

Mme Flise, président
SCP Foussard et Froger, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 11 juillet 2017), qu'exerçant une activité salariée en Suisse depuis 2006 et domicilié [...] , affilié à l'assurance maladie suisse et à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie (la caisse), M. Y... (l'assuré) a présenté à cette dernière, le 9 octobre 2015, une demande de radiation qui a été rejetée ; qu'il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'accueillir ce recours, alors, selon le moyen :

1°/ qu'à raison du principe suivant lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, une partie ne peut contester la légalité d'une demande qu'elle formule ou d'un choix qu'elle opère ; qu'en décidant le contraire, pour dire irrégulière la demande d'affiliation formée par l'assuré auprès de l'assurance maladie française et en conséquence l'affiliation qui en résulte, les juges du fond ont violé le principe suivant lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ;

2°/ que l'impossibilité pour une partie de contester la légalité des demandes qu'elle a formulées ou d'un choix qu'elle a opéré s'impose sans qu'il y ait lieu de rechercher si elle a été éclairée au moment où elle a formulé la demande ou effectué le choix ; qu'à cet égard également, les juges du fond ont violé le principe suivant lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ;

3°/ que l'impossibilité pour une partie de contester la demande qu'elle a formulée ou le choix qu'elle opéré s'impose sans qu'il soit besoin de relever à son endroit l'existence d'une fraude ; que de ce point de vue également, les juges du fond ont violé le principe suivant lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ;

Mais attendu que la fin de non-recevoir tirée du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui sanctionne l'attitude procédurale consistant pour une partie, au cours d'une même instance, à adopter des positions contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions qui induisent en erreur son adversaire sur ses intentions ;

Et attendu qu'il ressort des constatations de la cour d'appel que les positions contraires de l'assuré alléguées par la caisse n'ont pas été adoptées au cours de l'instance ;

Que, par ce motif de pur droit, substitué aux motifs critiqués par le moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée en ce qu'elle a admis la recevabilité de la demande ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que la caisse fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, qu'à supposer par impossible que l'affiliation au régime français ait été illégale et qu'au regard du principe de l'unicité de l'affiliation, l'assuré devait être affilié au régime suisse, les juges du fond se devaient de constater cette situation, depuis l'origine et en tirer toutes les conséquences ; qu'à ce titre, il était exclu qu'ils puissent décider que l'assuré pouvait être affilié pour une certaine période au régime français, puis être autorisé à faire volte-face pour être assuré, pendant la période suivante, au régime suisse ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 3, sous « Suisse », de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que la cour d'appel n'a pas décidé ni que l'assuré pouvait être affilié pour une certaine période au régime français, puis être autorisé à faire volte-face pour être assuré, pendant la période suivante, au régime suisse, ni le contraire ;

D'où il suit que le moyen manque en fait ;

Et sur les deuxième et troisième moyens réunis :

Attendu que la caisse fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1°/ que, s'agissant de la demande de l'assuré, en application des dispositions de l'Accord de libre circulation du 21 juin 1999 et des objectifs qu'il poursuit, la demande tendant à l'affiliation du travailleur frontalier dans son Etat de résidence constitue une demande au sens de l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004 ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que, à tout le moins, en application des dispositions de l'Accord de libre circulation du 21 juin 1999 et des objectifs qu'il poursuit, la demande d'exemption peut être tacite et résulter d'une manifestation de volonté de l'assuré en faveur d'une affiliation dans son Etat de résidence ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

3°/ que, également à propos de la demande de l'assuré, celle-ci résulte sans équivoque de ce qu'évoluant dans le système juridique français en faveur duquel il avait opté, l'assuré a choisi, non pas l'affiliation au régime général, mais la souscription d'une assurance auprès d'un assureur privé, ce qui était exclu dans l'ordre juridique suisse ; qu'en décidant que l'affiliation était irrégulière quand l'assuré, ayant opté pour le système français, avait choisi de souscrire une assurance privée, les juges du fond ont violé l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

4°/ que, également à propos de la demande, celle-ci produit ses effets juridiques, sans qu'il soit besoin que l'assuré fasse l'objet d'une information quelconque et notamment de la part de l'employeur suisse ; que de ce point de vue également, l'arrêt a été rendu en violation de l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

5°/ que, toujours à propos de la demande, les juges du fond ne se sont pas expliqués sur le point de savoir si, compte tenu de la clarté des dispositions légales et au vu de la note conjointe des autorités suisses et françaises et du formulaire de choix rédigé par ces autorités, il n'était pas exclu que l'assuré puisse prétendre n'avoir pas été informé ou éclairé ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué encourt la censure pour défaut de base légale au regard de l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

6°/ que, s'agissant de la décision d'exemption, en application de l'accord de libre circulation du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable à l'espèce, les travailleurs frontaliers exerçant leur activité en Suisse et résidants en France sont exemptés de l'obligation de s'assurer en Suisse, à leur demande, s'ils bénéficient d'une couverture en cas de maladie en France ; que l'exemption résulte de plein droit des dispositions de l'accord de libre circulation du 21 juin 1999 ; qu'elle n'est qu'un effet légal attaché à une situation juridique ; qu'elle n'est pas subordonnée à l'intervention d'une décision administrative de la part des autorités suisses ; qu'en décidant le contraire, les juges d'appel ont violé l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

7°/ que, s'agissant encore de la décision d'exemption, à supposer que l'exemption soit subordonnée à l'intervention d'une décision administrative des autorités suisses, cette décision peut elle-même être implicite et résulter de l'absence de réaction de la part des autorités suisses en vue de procéder à l'affiliation de l'assuré ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il le leur était demandé, si l'inaction des autorités suisses ne révélait pas l'existence d'une décision d'exemption, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

8°/ que, dès lors que la décision d'affiliation prise par l'autorité française est chronologiquement et logiquement antérieure à la décision que peut prendre l'autorité suisse et dès lors qu'elle est devenu définitive, faute d'être contestée, la décision telle que prise par l'autorité s'impose au juge français ; qu'en décidant le contraire pour considérer que la décision française d'affiliation était illégale, les juges du fond ont violé l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

9°/ que, s'il est vrai que l'accord prévoit un principe d'unicité d'affiliation, l'assuré ne peut revendiquer le bénéfice de ce principe que pour autant qu'il ait respecté, sur le fond et sur la forme, les règles de l'accord ; qu'ayant opté pour le droit français avant toute intervention des autorités suisses, l'assuré ne peut contester la légalité d'affiliation au régime français pour pouvoir invoquer l'unicité de régime et se prévaloir, à la faveur de ce principe, de l'affiliation au régime suisse ; qu'à cet égard également, les juges du fond ont violé l'article 3, sous "Suisse", de l'annexe XI du règlement (CE) n° 883/2004, dans sa rédaction issue de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que l'annexe II à l'accord entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, du 21 juin 1999, dans sa rédaction applicable au litige, rend applicable, entre les parties, l'article 11 du règlement (CE) 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, qui édicte les principes d'unicité d'affiliation et de rattachement du travailleur à la législation de l'Etat membre dans lequel il exerce son activité ; qu'il ressort de l'annexe XI audit règlement que la personne travaillant en Suisse peut, sur sa demande, y être exemptée de l'assurance obligatoire tant qu'elle réside en France et y bénéficie d'une couverture en cas de maladie ; qu'il résulte de ces dispositions que la personne résidant en France qui est affiliée à l'assurance maladie obligatoire en Suisse au titre de l'activité qu'elle exerce dans cet Etat, ne peut être affiliée au régime français de sécurité sociale ou, en tout cas, doit en être radiée dès qu'elle le demande, peu important l'antériorité de son affiliation au régime français ;

Et attendu que l'arrêt constate qu'à la date à laquelle il a demandé à la caisse de procéder à sa radiation, l'assuré était affilié à l'assurance maladie suisse ;

Que par ce motif de pur droit, substitué aux motifs critiqués par le moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie et la condamne à payer à M. Y...la somme de 1 000 euros ;

Vente immobilière - notion de réticence dolosive

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 3 mai 2018
N° de pourvoi: 17-17.110
Non publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
Me Haas, SCP Rousseau et Tapie, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième et quatrième branches, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 23 février 2017),que, par acte du 15 décembre 2012, Mme Z... a vendu à M. et Mme X... une maison d'habitation ; que, par jugement du 13 mars 2003 intervenu après expertise, Mme Z... avait obtenu la condamnation de son vendeur à réparer les causes des infiltrations d'eau dans le sous-sol de la maison ; que, se plaignant de désordres liés à des infiltrations d'eau et à des odeurs nauséabondes de la fosse septique, M. et Mme X... ont assigné Mme Z... en résolution de la vente et en dommages-intérêts sur le fondement du dol ;

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'il résultait des pièces du dossier que les infiltrations, dénoncées par le procès-verbal d'un huissier de justice du 15 novembre 2013, par l'avis d'un électricien venu les 27 et 28 juillet 2013 pour la mise en conformité de l'installation électrique, par des attestations de MM. C... et D... constatant des infiltrations après de fortes précipitations en juin et juillet 2014 et par des photographies prises dans le sous-sol les 6 et 7 juin 2016, s'inscrivaient toutes dans un contexte de très fortes précipitations et retenu qu'aucun élément du dossier n'établissait formellement la relation entre les désordres invoqués par les acquéreurs et les désordres initiaux subis dix ans avant par la venderesse et qu'il n'était pas démontré que celle-ci avait pu constater la persistance ou la réitération d'infiltrations au sous-sol avant la vente de l'immeuble en décembre 2012 ni qu'elle se serait volontairement abstenue d'évoquer avec ses acheteurs l'expertise et le jugement du 13 mars 2003, la cour d'appel, qui a souverainement déduit, sans dénaturation, que les acquéreurs ne rapportaient pas la preuve d'une réticence dolosive de la venderesse et que leurs demandes devaient être rejetées, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... et les condamne à payer à Mme Z... la somme de 3 000 euros ;

Notion de CCMI et principe de proportionnalité

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 3 mai 2018
N° de pourvoi: 17-15.067
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 25 janvier 2017), que Mme C... D... a conclu avec la société G... B... MO, dont le gérant est M. B..., un contrat intitulé maîtrise d'oeuvre en vue de la construction d'une maison individuelle ; que des contrats de louage d'ouvrage ont été conclus notamment avec M. Y..., exerçant sous l'enseigne H2E pour le lot électricité, M. Z... pour le lot maçonnerie, la société HE, dont le gérant est M. B..., pour les travaux de plâtrerie, isolation et menuiseries ; que le chantier, débuté le 10 mai 2007, a été interrompu le 25 janvier 2008 ; que Mme C... D... a, après expertise, assigné la société G... B... MO, la société HE, M. Y..., M. Z..., et M. B... en son nom personnel, notamment en nullité des contrats et indemnisation ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses première, deuxième, et troisième branches, ci-après annexé :

Attendu que la société G... B... MO, son mandataire judiciaire et la société HE font grief à l'arrêt de requalifier le contrat de maîtrise d'oeuvre en contrat de construction de maison individuelle et d'en prononcer la nullité ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le « contrat de maîtrise d'oeuvre » comprenait en annexe la facture de l'architecte ayant établi les plans, les devis des treize entreprises en charge des lots et un document récapitulatif des prix des différents intervenants faisant apparaître le coût total de la construction, que la société G... B... MO avait choisi les entreprises et fait établir les devis sans proposer au maître d'ouvrage plusieurs devis par lot et que ce dernier avait donné son accord sur un prix global et définitif, et retenu que la société G... B... MO avait assuré la maîtrise et la direction de toute l'opération et s'était chargée de l'intégralité de la construction, la cour d'appel a déduit à bon droit, de ces seuls motifs, que le contrat devait être requalifié en contrat de construction d'une maison individuelle ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa cinquième branche, ci-après annexé :

Attendu que la société G... B... MO, son mandataire judiciaire et la société HE font grief à l'arrêt de les condamner au paiement d'une somme au titre de loyers ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le chantier, interrompu le 25 janvier 2008, avait été abandonné par le constructeur avec des désordres relatifs à la non-conformité des menuiseries extérieures affectées de problèmes d'étanchéité et au non-respect de la norme relative à la réglementation thermique, et que l'expert avait préconisé la remise en état des tableaux et des appuis après dépôt des fenêtres, la réparation de la baie vitrée cassée et du soubassement, la reprise de travaux d'électricité et des lots non exécutés concernant les revêtements de sol et des murs extérieurs, les volets roulants, les finitions de menuiserie, les doublages et les cloisonnements retirés par le constructeur, la cour d'appel, qui a pu retenir l'impossibilité pour Mme C... D... de se loger dans la construction, a souverainement apprécié le préjudice en résultant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


Sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que Mme C... D... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de remise en état de son terrain et de démolition de la construction ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les sommes versées par Mme C... D... n'avaient pas excédé le montant des travaux réalisés et facturés, que le chantier, achevé à plus des deux tiers, était clos et couvert, avec un gros oeuvre de charpente couverture de bonne qualité, un gros oeuvre de maçonnerie tout à fait correct, et qu'il aurait pu être terminé à la date prévue et retenu le caractère disproportionné de la sanction de la démolition de l'ouvrage, la cour d'appel, qui n'a pas limité la réparation dans l'intérêt du responsable, a pu rejeter cette demande ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article L. 230-1 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que, pour condamner la société G... B... MO à payer à Mme C... D... la somme de 113 502 euros, l'arrêt retient que, compte tenu de la requalification du contrat, cette société, en qualité de constructeur, est redevable de l'intégralité des sommes réglées aux divers intervenants à la construction ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la remise en état des parties dans la situation antérieure au contrat annulé justifiait le paiement au constructeur des sommes exposées lors de la construction de l'immeuble conservé par le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société G... B... MO à payer à Mme C... D... la somme de 113 502, 96 euros en remboursement des sommes versées en application du contrat annulé, l'arrêt rendu le 25 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne Mme C... D... aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Garantie de paiement de l'art. 1799-1 du code civil : conditions

Note Sizaire, Constr.-urb. 2018-7/8, p. 29.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 3 mai 2018
N° de pourvoi: 17-16.332
Publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat(s)




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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 13 février 2017), que la société Castel et Fromaget, ayant réalisé des travaux de charpente métallique pour la société JCB aéro, qui avait conclu un contrat de crédit-bail avec les sociétés Natiocrédibail, Sogefimur et Cicobail, a assigné en paiement le crédit-preneur et les crédit-bailleurs ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour condamner la société JCB aéro et les crédit-bailleurs à payer à la société Castel et Fromaget une somme de 684,05 euros à titre de solde, l'arrêt retient que la société Castel et Fromaget ne conteste pas le décompte de la société JCB aéro faisant apparaître un solde impayé de 684,05 euros ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Castel et Fromaget qui avait repris le détail des sommes dues et le montant des règlements effectués pour solliciter le paiement d'un solde restant dû de 7 460,92 euros, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 1799-1 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande de garantie de paiement formée par l'entrepreneur contre les sociétés Natiocrédibail, Sogefimur et Cicobail, crédit-bailleurs, l'arrêt retient que, le concours financier de ces sociétés étant constitutif d'opérations de crédit, il y a lieu de constater que la société JCB aéro a bien eu recours à un crédit spécifique, au sens de l'article 1799-1 du code civil, pour le financement de son projet et que les fonds avaient été versés directement par ces dernières entre les mains de l'entrepreneur et que les dispositions de ce texte ne prévoient pas la possibilité d'exiger un tel cautionnement sous astreinte pour l'entrepreneur, lequel n'a au demeurant pas adressé la mise en demeure prévue à son troisième alinéa pour revendiquer le paiement de travaux exécutés ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le crédit-bailleur, maître de l'ouvrage, tenu de fournir la garantie de paiement de l'article 1799-1 du code civil, n'avait pas eu recours à un crédit spécifique pour financer les travaux, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société JCB aéro et les sociétés Natiocrédibail, Sogefimur et Cicobail, à payer à la société Castel et Fromaget la somme de 684,05 euros au titre du solde contractuel resté impayé, et en ce qu'il rejette la demande de fourniture d'une garantie de paiement par les crédit-bailleresses, l'arrêt rendu le 13 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne les sociétés JCB aéro, Natiocrédibail, Sogefimur et Cicobail, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés JCB aéro, Natiocrédibail, Sogefimur et Cicobail, à payer la somme globale de 3 000 euros à la société Castel et Fromaget et rejette les autres demandes ;

vendredi 4 mai 2018

Sur la loi de ratification de la réforme du droit des contrats

Etudes :

 - Mekki, D. 2018, p. 900,
- D. Mazeaud, D. 2018, p. 912.
- T. Andrieu et MC Dreux, GP 2018, n° 16, p. 13.
- O. Deshayes, T. Genicon, YM Laithier, SJ G 2018, p. 805.

Enrichissement sans cause - faute lourde de l'appauvri

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 5 avril 2018
N° de pourvoi: 17-12.595 17-14.029
Publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Boulloche, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Yves et Blaise Capron, avocat(s)




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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Joint les pourvois n° S 17-12.595 et A 17-14.029, qui sont connexes ;

Donne acte à Mme Chantal K...           du désistement de son pourvoi n° A 17-14.029 à l'égard de M. X..., de MM. Laurent et Michel K...           et de Mme Valérie K...           ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 novembre 2016), que le notaire en charge du règlement de la succession de Patrice K...          , décédé le [...]        , a fait appel à M. X..., commissaire-priseur judiciaire (le commissaire-priseur judiciaire), pour réaliser la prisée des biens meubles composant l'actif successoral, comprenant, notamment, deux lavis sur papier attribués à Pablo E... ; que, suivant acte de partage du 8 octobre 2007, lesdites oeuvres, évaluées à la somme de 250 000 euros chacune, ont été attribuées à Mme Chantal K...          , l'épouse du défunt ; qu'en 2011, celle-ci s'est adressée à la société Artcurial qui a estimé leur valeur entre 500 000 et 700 000 euros chacune ; que, des doutes ayant été ultérieurement émis sur leur authenticité, Mme Chantal K...           a sollicité en référé la désignation d'un expert, qui a conclu que les lavis litigieux étaient des faux ; qu'elle a ensuite assigné en responsabilité le commissaire-priseur judiciaire et la société Artcurial ; que ceux-ci ont appelé en garantie les autres héritiers, MM. Laurent et Michel K...           et Mmes Valérie, Z... et Charlotte K...           (les consorts K...          ), sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;

Sur les premier, deuxième, troisième et cinquième moyens du pourvoi n° S 17-12.595, ci-après annexés :

Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le quatrième moyen du même pourvoi :

Attendu que le commissaire-priseur judiciaire fait grief à l'arrêt de rejeter son appel en garantie formé contre les consorts K...          , alors, selon le moyen :

1°/ que le fait d'avoir commis une imprudence ou une négligence ne prive pas de son recours fondé sur l'enrichissement sans cause celui qui, en s'appauvrissant, a enrichi autrui ; que la cour d'appel, qui a rejeté l'action du commissaire-priseur judiciaire fondée sur l'enrichissement sans cause en relevant une faute s'analysant en une négligence, a violé l'article 1371 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les principes qui régissent l'enrichissement sans cause ;

2°/ que celui qui bénéficie d'un enrichissement injustifié au détriment d'autrui doit, à celui qui s'en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l'enrichissement et de l'appauvrissement ; que l'indemnisation peut être modérée par le juge si l'appauvrissement procède d'une faute de l'appauvri ; que la cour d'appel, qui a privé le commissaire-priseur judiciaire de toute indemnisation au titre de l'enrichissement injuste dont avaient bénéficié les consorts K...           pour la raison que sa faute était seule à l'origine de l'appauvrissement invoqué, a violé les principes gouvernant l'enrichissement sans cause ;

Mais attendu que, si le fait d'avoir commis une imprudence ou une négligence ne prive pas de son recours fondé sur l'enrichissement sans cause celui qui, en s'appauvrissant, a enrichi autrui, l'action de in rem verso ne peut aboutir lorsque l'appauvrissement est dû à la faute lourde ou intentionnelle de l'appauvri ;

Et attendu que la cour d'appel a relevé, d'une part, que, pour procéder à l'estimation des oeuvres litigieuses, le commissaire-priseur judiciaire s'était borné à effectuer un examen visuel superficiel et rapide, sur la foi d'un certificat établi en 1992, soit quinze ans auparavant, dans des conditions qu'il ignorait complètement, d'autre part, que les enjeux financiers et fiscaux de la succession en cause requéraient de ce professionnel de l'art une attention particulière justifiant qu'il procède à des investigations complémentaires ; qu'ayant ainsi fait ressortir que le commissaire-priseur judiciaire avait commis une faute lourde, elle en a exactement déduit que ce manquement à ses obligations professionnelles le privait de son recours fondé sur l'enrichissement sans cause ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° A 17-14.029, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Code de la consommation - Devoir de conseil du banquier prêteur

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 5 avril 2018
N° de pourvoi: 17-13.528
Non publié au bulletin Cassation partielle

Mme Batut (président), président
SCP Marc Lévis, SCP Piwnica et Molinié, SCP Zribi et Texier, avocat(s)




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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 26 avril 2012, à la suite d'un démarchage à domicile, Mme X... et Mme Y... (les acquéreurs) ont commandé des panneaux photovoltaïques, pour un prix de 23 500 euros, à la société Photoclim (le vendeur), désormais placée en liquidation judiciaire et représentée par la société Christophe Basse (le liquidateur judiciaire) ; que, le même jour, en vue de financer cette acquisition, elles ont souscrit un prêt auprès de la société Solféa, aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas Personal Finance (la banque) ; qu'invoquant des dysfonctionnements, les acquéreurs ont assigné le liquidateur judiciaire et la banque en annulation du contrat de vente et du contrat de prêt, ainsi qu'en indemnisation de leur préjudice ; que la banque a sollicité reconventionnellement la restitution du capital emprunté ;

Attendu que, pour condamner les acquéreurs in solidum à restituer le capital emprunté, après avoir annulé le contrats de vente et de prêt, l'arrêt retient qu'au vu de l'attestation de livraison, qui est dépourvue d'ambiguïté et fait état de l'exécution des travaux à l'exception du raccordement, la banque, sur laquelle ne pesait aucune obligation de procéder à de plus amples vérifications, a pu se convaincre de l'exécution du contrat principal, de sorte qu'elle n'a commis aucune faute en remettant les fonds au vendeur ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que le bon de commande des panneaux photovoltaïques avait été établi en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation, ce dont il résultait qu'en versant les fonds au vendeur sans procéder préalablement aux vérifications nécessaires qui lui auraient permis de constater que le contrat de vente était affecté d'une cause de nullité, la banque avait commis une faute qui la privait de sa créance de restitution, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il convient de prononcer, sur sa demande, la mise hors de cause de la société Chistophe Basse, ès qualités, dont la présence n'est pas nécessaire devant la juridiction de renvoi ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum Mme X... et Mme Y... à payer à la société Solféa, aux droits de laquelle se trouve la BNP Paribas Personal Finance, la somme de 23 500 euros, sous déduction des échéances déjà remboursées, l'arrêt rendu le 18 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;

Met hors de cause la société Christophe Basse, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Photoclim ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... et Mme Y... la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Contradiction et office du juge

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 5 avril 2018
N° de pourvoi: 16-24.747
Non publié au bulletin Cassation

Mme Batut (président), président
SCP Yves et Blaise Capron, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du 1er juin 1988, la société Sofi Sovac, aux droits de laquelle se trouve la société Hoist Kredit Ab (la banque), a consenti à Mme X... une ouverture de crédit utilisable par fractions, au moyen de laquelle celle-ci a acquis un véhicule ; qu'à la suite de difficultés de paiement, le véhicule a été repris et vendu au profit de la banque ; qu'invoquant, notamment, l'absence de mise en demeure préalable à la déchéance du terme, l'insuffisance du prix de revente du véhicule, le caractère usuraire du taux fixé à 19,95 % l'an et la prescription quinquennale, Mme X... a formé opposition à l'ordonnance lui ayant fait injonction de payer à la banque une certaine somme ;

Attendu que, pour condamner Mme X... à payer à la banque la somme de 5 161,28 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2006, l'arrêt retient que l'existence d'une mise en demeure n'est pas démontrée, mais que, le terme contractuel fixé au 10 juin 1993 étant expiré, l'intégralité de la dette est devenue exigible ;

Qu'en statuant ainsi, en relevant d'office, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, le moyen tiré de ce que la déchéance du terme contractuel était intervenue à la date du 10 juin 1993, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Hoist Kredit Aktiebolag aux dépens ;

Notaire - devoir d'efficacité

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 5 avril 2018
N° de pourvoi: 17-14.114
Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Boullez, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 12 janvier 2017), que, suivant acte reçu le 2 février 2010 par M. X..., notaire (le notaire), Mme A... (l'acquéreur) a acquis de la société civile immobilière Le Moulin de Boly (le vendeur) un appartement en l'état futur d'achèvement dans un ancien hôtel à rénover, moyennent un prix financé en totalité par un prêt souscrit auprès de la société Banque patrimoine et immobilier, aux droits de laquelle vient la société Crédit immobilier de France développement (la banque) ; que, les travaux de rénovation n'ayant jamais été réalisés, l'acquéreur a assigné Mme Y..., prise en sa qualité de liquidateur judiciaire du vendeur, la banque et le notaire en résolution de la vente et du prêt et en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le second moyen :

Attendu que le notaire fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à l'acquéreur, à titre de dommages-intérêts, la somme de 177 718,72 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la date de chacun des versements, soit à compter du 2 février 2010 sur la somme de 92 461,60 euros et à compter du 8 mai 2011 sur celle de 26 147,60 euros, jusqu'à complet remboursement à la banque de cette somme totale, la somme de 21 646,53 euros correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée réglée, sous réserve de justifier de son non-remboursement par les services fiscaux, et le montant des cotisations de l'assurance à parfaire au jour du remboursement à la banque de la fraction du prêt débloqué, alors, selon le moyen :

1°/ que tout jugement doit être motivé ; qu'en retenant, dans ses motifs, que le notaire devait être condamné à verser à l'acquéreur la somme totale de 177 718,72 euros et en le condamnant, dans son dispositif, à verser à l'acquéreur la somme de 177 718,72 euros augmentée de celle de 21 646,53 euros, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre le motif et le dispositif, en violation des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que la réparation du préjudice ne doit engendrer ni enrichissement ni appauvrissement de la victime ; qu'en retenant, dans ses motifs, que le notaire devait être condamné à verser à l'acquéreur la somme totale de 177 718,72 euros et en le condamnant, dans son dispositif, à verser à l'acquéreur la somme de 177 718,72 euros augmentée de celle de 21 646,53 euros, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale sans perte ni profit ;

3°/ qu'en toute hypothèse, la fonction de la responsabilité civile est de replacer la victime dans la situation qui aurait été la sienne sans la faute imputée au défendeur ; qu'en condamnant le notaire à verser à l'acquéreur le montant du prix versé en vain pour une opération qu'il n'aurait pas conclue s'il avait été mieux informé et la perte de chance de percevoir les bénéfices fiscaux qu'aurait dû générer l'opération, la cour d'appel a replacé la victime dans deux situations incompatibles, en violation de l'article 1382 du code civil et du principe de réparation intégrale sans perte ni profit ;

Mais attendu, d'abord, que, sous le couvert de griefs non fondés de contradiction entre les motifs et le dispositif et de violation de l'article 1382, devenu 1240 du code civil, le moyen ne tend qu'à dénoncer une erreur matérielle qui, pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 462 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation ;

Et attendu, ensuite, qu'après avoir retenu que les dommages invoqués par l'acquéreur trouvaient directement leur cause dans le manquement du notaire à son obligation d'information et de conseil et relevé que le vendeur, placé en liquidation judiciaire, était en état d'insolvabilité, la cour d'appel a pu, sans méconnaître le principe de réparation intégrale sans perte ni profit, condamner le notaire, d'une part, à indemniser l'acquéreur de la perte de chance de percevoir les avantages fiscaux qu'aurait dû générer l'opération, d'autre part, à garantir le paiement de la restitution du prix incombant au vendeur par suite de la résolution de la vente ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en ses deux premières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Notion de préjudice actuel et certain

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 5 avril 2018
N° de pourvoi: 17-13.102
Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Yves et Blaise Capron, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 15 novembre 2016), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 3 juin 2015, pourvoi n° 14-13.326), que, les 20 mars 1981, 29 mars 1985 et 24 octobre 1986, M. et Mme Z... ont contracté trois prêts hypothécaires auprès de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne (la banque), suivant trois actes authentiques reçus par M. X..., notaire ; que, par jugement du 6 novembre 1991, ils ont été mis en liquidation judiciaire, M. A... étant désigné en qualité de liquidateur ; que la banque a déclaré ses créances ; que les trois prêts étaient garantis par trois hypothèques conventionnelles prises sur une propriété agricole appartenant à M. Z..., qui l'avait reçue de ses parents à la suite d'une donation-partage, assortie d'un droit de retour et d'une interdiction d'aliéner ; qu'un arrêt irrévocable du 12 octobre 2009 a annulé, pour faux, les trois actes authentiques de prêt en ce qu'ils mentionnaient la renonciation des donateurs au bénéfice du droit de retour et de l'interdiction d'aliéner, et déclaré nulles les inscriptions d'hypothèque ; que la banque a assigné M. X... en responsabilité et paiement des trois prêts ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, et sans mettre les parties à même de s'en expliquer, le moyen tiré de la théorie des chances perdues, quand elle énonce que le préjudice subi par la banque « s'analyse en la perte de chance de disposer d'une créance hypothécaire lui permettant de récupérer tout ou partie des sommes prêtées plus favorablement que dans le cas d'une créance chirographaire », la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble le principe du respect des droits de la défense ;

2°/ que l'annulation d'une hypothèque cause au créancier hypothécaire un préjudice direct et certain qui est égal à la somme que l'hypothèque annulée lui aurait, si elle avait été valide, permis de recouvrer ; qu'en énonçant que l'annulation de l'hypothèque dont la banque était titulaire lui a seulement fait perdre la « chance de disposer d'une créance hypothécaire lui permettant de récupérer tout ou partie des sommes prêtées plus favorablement que dans le cas d'une créance chirographaire », préjudice qu'elle tient pour « minime » et qui « ne peut être par suite indemnisé faute d'être direct et certain », la cour d'appel a violé les articles 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil ;

3°/ que la responsabilité des professionnels du droit ne présente pas un caractère subsidiaire ; que doit donc être réparé par le notaire, qui a failli à son devoir d'assurer l'efficacité juridique de l'acte par lui reçu, le dommage directement causé par sa faute, quand bien même la victime disposerait d'une autre voie de droit pour se remplir de tout ou partie de ses droits ; qu'en énonçant « que le choix de la banque était manifestement de soutenir cette exploitation agricole [celle de M. et Mme Jacques Z...] dont elle connaissait les importants besoins de trésorerie sans préoccupation réelle sur le sort de ses créances qu'elle soient hypothécaires ou chirographaires en sorte que le préjudice tenant à la perte de chance d'être réglé grâce à l'existence d'une hypothèque est minime et ne peut être par suite indemnisé faute d'être direct et certain », la cour d'appel, qui reproche à la banque de ne pas avoir utilisé la voie de droit dont elle disposait contre ses débiteurs pour se remplir de tout ou partie des droits que l'hypothèque annulée par la faute de M. X... lui aurait permis de recouvrer, a violé les articles 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil ;

4°/ que le juge ne peut pas, pour refuser de réparer le préjudice que subit la victime, relever que ce préjudice serait minime sans méconnaître le principe de la réparation intégrale ; qu'en relevant que le préjudice qui est résulté pour la banque de la perte de la chance qu'elle avait de recouvrer comme créancier hypothécaire des sommes plus importantes que celles qu'elle aurait recouvrées comme créancier chirographaire, est « minime », et que, par conséquent, il ne peut pas être indemnisé « faute d'être direct et certain », la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les biens de M. et Mme Z... n'avaient toujours pas été vendus, de sorte que la banque ne justifiait pas d'une perte définitive des sommes prêtées, la cour d'appel en a exactement déduit que son préjudice n'était pas actuel et certain ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Vente - notion de vice caché - dol

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 5 avril 2018
N° de pourvoi: 17-15.345
Non publié au bulletin Cassation

Mme Batut (président), président
Me Balat, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 21 avril 2008, M. X... (l'acquéreur) a acquis auprès de la société Gem (le vendeur) un engin de manutention produit par la société Manitou BF (le fabricant), au prix de 81 328 euros toutes taxes comprises, livré et mis en service le 7 mai 2008 ; que plusieurs pannes ont affecté le système de freinage et de levage de l'engin, nécessitant autant d'interventions du vendeur ; que, le 16 février 2011, l'acquéreur a sollicité en référé la désignation d'un expert, puis, après le dépôt du rapport de l'expert intervenu le 16 mai 2012, a, par acte du 8 novembre 2012, assigné le vendeur et le fabricant en résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés, en annulation de cette vente pour dol et en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le deuxième moyen :

Vu l'article 1648 du code civil ;

Attendu que, pour dire prescrite l'action engagée par l'acquéreur sur le fondement des vices cachés, l'arrêt énonce que l'examen du rapport d'expertise permet de retenir que les vices sont apparus dès le mois de mai 2008 et qu'aucun vice caché n'y est précisément décrit, les expressions de « vice caché » ou « raté de fabrication » employées par l'expert s'avérant insuffisantes à établir que ce rapport aurait révélé l'existence d'un vice à l'acquéreur, qui avait sollicité le vendeur à quatorze reprises pendant plus de deux années pour tenter de remédier aux problèmes constatés, de sorte que l'action introduite le 16 février 2011 est tardive ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, à quelle date l'acquéreur avait eu connaissance du vice, dans toute son ampleur et ses conséquences, celui-ci soutenant qu'il avait pu croire les dysfonctionnements aptes à être résolus par de simples mises au point couvertes par la garantie contractuelle, et qu'il n'avait découvert la gravité du problème affectant l'engin, insusceptible de réparation, qu'avec le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu que, pour rejeter la demande de l'acquéreur fondée sur la réticence dolosive du vendeur, l'arrêt retient que le premier soutient en vain ne pas avoir été informé d'une intervention du second sur l'engin avant la vente, dès lors qu'aucun lien n'est établi entre les désordres allégués et que ladite intervention était décrite par la société Manitou, qui n'est pas contredite sur ce point, comme étant banale ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'acquéreur soutenait, dans ses conclusions, que les interventions sur l'engin avaient été lourdes et nombreuses, la cour d'appel a dénaturé ces écritures et violé le principe susvisé ;

Et sur la deuxième branche du même moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour statuer comme il a été dit, l'arrêt retient que le vendeur soutient vainement avoir été l'objet d'une réticence dolosive du vendeur, qui ne l'aurait pas informé d'une intervention de sa part sur l'engin avant la vente, dès lors qu'aucun lien n'est établi entre les désordres allégués et ladite intervention, que le fabricant décrit comme étant banale ;

Qu'en statuant ainsi, sans examiner même sommairement les conclusions de l'expertise judiciaire qui établissaient un lien précis entre les réparations opérées avant la vente du véhicule et le problème hydraulique apparu ensuite, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen et la troisième branche du troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne la société Gem et la société Manitou BF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. X... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite d

Avocat - responsabilité - perte de chance - causalité

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 5 avril 2018
N° de pourvoi: 17-11.515
Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Foussard et Froger, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 29 novembre 2016), que M. X... a assigné en responsabilité et indemnisation M. Y... (l'avocat) qui l'avait représenté dans les opérations de liquidation du régime matrimonial à la suite du prononcé de son divorce, lui reprochant de lui avoir fait perdre une indemnité de gestion qui lui était due ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que toute personne qui concourt à la survenance d'un dommage est tenue de le réparer ; qu'à supposer même que l'avocat intervenu en second n'ait pas accompli les diligences nécessaires pour obtenir la reconnaissance d'un droit à indemnité postérieurement au 20 novembre 2006, de toute façon, en s'abstenant de formuler une demande, antérieurement à cette date, comme le postulait la mise en oeuvre des droits du client, l'avocat a commis une faute ayant concouru à la production du dommage ; qu'en écartant tout droit à réparation au profit de M. X..., les juges du second degré ont violé les articles 1134 et 1147 du code civil (article 1103 et 1231-1 nouveaux du code civil), ensemble le principe suivant lequel la partie qui a concouru à la production du dommage est tenue de le réparer en son entier ;

2°/ que l'obligation de réparer le dommage, qui pèse sur celui qui a contribué à le produire, subsiste même si le dommage ne s'est réalisé in fine qu'à raison de la faute postérieure d'un tiers ; qu'en décidant le contraire, pour nier le lien de cause à effet entre le dommage et la faute de l'avocat à raison de la faute de l'avocat qui lui a succédé, les juges du fond ont violé les articles 1134 et 1147 du code civil (article 1103 et 1231-1 nouveaux du code civil), ensemble le principe suivant lequel la partie qui a concouru à la production du dommage est tenue de le réparer en son entier ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que le mandat d'assistance et de représentation de M. X... par l'avocat avait pris fin au plus tard le 20 novembre 2006, l'arrêt retient que le préjudice de l'intéressé, qui s'analyse en une perte de chance de ne pas avoir présenté sa demande d'indemnité de gestion, n'est pas né pendant que l'avocat le conseillait et n'est devenu certain que le jour où le deuxième procès-verbal de difficultés a été établi, le 10 janvier 2008 ; que la cour d'appel a pu en déduire qu'il n'existait aucun lien de causalité direct entre le manquement imputable à l'avocat et la perte de chance subie par M. X..., dès lors que ce dernier disposait encore de la possibilité de former sa demande lorsqu'il avait déchargé l'avocat de son mandat ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Vente - garantie des vices cachés - droit transitoire

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 11 avril 2018
N° de pourvoi: 17-14.091
Non publié au bulletin Cassation

Mme Batut (président), président
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat(s)




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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 22 juin 2007, la maison de Mme Guillemot-Sillard a été partiellement détruite par un incendie ; que, soutenant que ce sinistre avait été causé par le sèche-linge qu'elle avait acquis le 14 mars 2006 auprès de la société Carrefour hypermarchés, Mme Guillemot-Sillard et son assureur, la société Le Finistère assurances, ont assigné en indemnisation cette dernière ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la seconde branche du moyen qui, étant de pur droit, est recevable :

Vu les articles 1648, 2231 du code civil, et 26, II, de la loi n° 2008-561du 17 juin 2008 ;

Attendu qu'aux termes du deuxième de ces textes, l'interruption efface le délai de prescription acquis et fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien ;

Attendu que, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'expiration du délai pour agir de l'article 1648 du code civil, après avoir relevé que Mme Guillemot-Sillard a assigné en référé-expertise la société Carrefour hypermarchés le 26 septembre 2007 et que le juge des référés a accueilli sa demande par ordonnance du 11 octobre 2007, l'arrêt retient que le délai de droit commun, alors de dix ans et réduit à cinq ans par la loi du 17 juin 2008, a couru à compter de cette date, et que, par l'effet de l'article 26, II, de cette loi, le nouveau délai de prescription a expiré le 19 juin 2013, de sorte que l'action introduite par une assignation délivrée le 15 octobre 2010, soit avant cette date, est recevable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'action résultant du vice caché devait être intentée dans le délai de deux ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne Mme Guillemot-Sillard et la société Le Finistère assurance aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

mercredi 2 mai 2018

Vente immobilière - état parasitaire - vice rédhibitoire

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 12 avril 2018
N° de pourvoi: 16-24.033 17-13.635
Non publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Alain Bénabent , SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Gaschignard, SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Joint les pourvois n° D 16-24.033 et X 17-13.635 ;

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 7 juin 2016), que M. Y... et Mme X... ont, par l'entremise de la société Carnot immobilier, vendu une maison à M. et Mme A... ; que l'état parasitaire de l'immeuble a été réalisé par la société Innax France ; que la vente a été régularisée par acte authentique dressé par M. Z..., notaire ; que, peu de temps après l'emménagement des acquéreurs, un des pignons de la maison s'est effondré ; que M. et Mme A... ont, après expertise, assigné en indemnisation M. Y... et Mme X..., la société Carnot immobilier, la société Innax France ; que M. Z... a été appelé à la cause et la société Hiscox Insurance Company Limited est intervenue volontairement à l'instance en sa qualité d'assureur de la société Innax France ;

Attendu que M. Y... et Mme X... font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à payer diverses sommes à M. et Mme A... ;

Mais attendu, d'une part, que la mention d'un montant erroné dans le dispositif de l'arrêt résulte d'une simple erreur matérielle qui, pouvant être rectifiée suivant la procédure de l'article 462 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que M. et Mme A..., acquéreurs profanes, ne pouvaient pas appréhender les risques inhérents à la boursouflure apparue sur le mur pignon et n'étaient pas en mesure de connaître dans son ampleur et ses conséquences ce vice antérieur à la vente et présentant un caractère rédhibitoire en raison d'un risque manifeste d'effondrement et que M. Y..., qui travaillait dans le bâtiment en qualité de menuisier plaquiste, et Mme X... ne pouvaient ignorer la dangerosité de la situation alors qu'ils avaient reconnu devant l'expert qu'ils s'en étaient eux-mêmes inquiétés auprès d'un maçon qui les aurait rassurés, la cour d'appel en a souverainement déduit, sans se contredire, que la demande indemnitaire formée par les acquéreurs contre les vendeurs devait être accueillie ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. Y... et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer la somme de 3 000 euros à M. et Mme A... et rejette les autres demandes ;