vendredi 24 février 2023

Moyen nouveau présenté par l'appelant postérieurement à ses conclusions d'appel

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 2 février 2023




Cassation


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 125 F-B

Pourvoi n° Q 21-18.382




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2023

M. [I] [J], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Q 21-18.382 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5 - chambre 6), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Société générale, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ au Fonds commun de titrisation Castanea, dont le siège est [Adresse 1], ayant pour société de gestion la société Equitis gestion, représenté par la société MCS & Associés, venant aux droits de la Société générale,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [J], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Société générale, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat du Fonds commun de titrisation Castanea, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 décembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 avril 2021), M. [J], condamné par un jugement d'un tribunal de commerce, en sa qualité de caution, à payer diverses sommes à la Société générale (la banque) en a relevé appel. Le Fonds commun de titrisation Castanea est intervenu volontairement à l'instance devant la cour d'appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. M. [J] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande fondée sur l'article L. 332-1 du code de la consommation et de le condamner à verser à la Société Générale et au Fonds commun de titrisation Castanea diverses sommes au titre de ses engagements de caution alors « que si les parties doivent, à peine d'irrecevabilité, présenter, dès leurs premières conclusions d'appel, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond, il faut, mais il suffit, que ces prétentions soient expressément formulées dans le dispositif des écritures ; que les parties sont alors recevables à invoquer, dans la discussion, tous les moyens, même nouveaux en cause d'appel, de nature à fonder ces prétentions ; qu'en retenant que, faute de discussion sur la déchéance de la banque dans le corps des conclusions du 10 mai 2019, la demande de débouté qui figure dans le dispositif de ces écritures ne renvoie à aucune prétention dûment explicitée, de sorte que doit être déclaré irrecevable le moyen de défense au fond soulevé pour la première fois dans des conclusions postérieures, la cour d'appel a violé les articles 910-4 et 954 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 910-4, alinéa 1er du code de procédure civile, créé par le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, dans sa version applicable du 1er septembre 2017 au 1er janvier 2020 et 954 dudit code :

3. Selon le premier de ces textes, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

4. En application de l'article 954 alinéas 1 et 3 du code de procédure civile, dans les procédures avec représentation obligatoire, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquelles chacune de ces prétentions est fondée, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

5. Il en résulte que le respect des diligences imparties par l'article 910-4 du même code s' apprécie en considération des prescriptions de l'article 954.

6. Pour confirmer le jugement, l'arrêt, après avoir rappelé les termes des articles 910-4 et 564 du code de procédure civile, retient que l'engagement disproportionné ouvre à la caution un moyen de défense au fond lui permettant de faire rejeter, selon l'article 71, la demande de son adversaire. Il ajoute que l'article 564 autorisant les nouvelles prétentions dès lors qu'elles ont pour objet de faire écarter les prétentions adverses, la demande tirée de la disposition n'est pas irrecevable comme nouvelle en cause d'appel. Il relève que, dans ses conclusions du 10 mai 2019, M. [J] n'a pas sollicité la déchéance de la banque dans sa motivation, la demande de débouté de la banque ne renvoyant à aucune prétention dûment explicitée et justifiée par des pièces comme l'exige l'article 564. Il retient qu'est irrecevable ce moyen de défense soulevé pour la première fois par conclusion du 26 septembre 2019 et dans son dispositif, déclare irrecevable la demande de l'appelant fondée sur l'article L. 332-1 du code de la consommation.

7. En statuant ainsi, alors que l'appelant avait, conformément à l'article 954 précité, mentionné ses prétentions tendant au débouté de la banque, dans le dispositif de ses premières conclusions remises dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile, et que l'article 910-4 ne fait pas obstacle à la présentation d'un moyen nouveau dans des conclusions postérieures, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la Société générale et le Fonds commun de titrisation Castanea aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la Société générale et le Fonds commun de titrisation Castanea et les condamne à payer à M. [J] la somme globale de 3 000 euros ;

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