vendredi 6 octobre 2023

A nouveau, l'acte d'appel !...

 Note, Soraya Amrani-Mekki, Procédures 2023-10, p. 13

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 29 juin 2023




Cassation


Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 713 F-B

Pourvoi n° P 21-24.821




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 29 JUIN 2023

M. [C] [Z], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 21-24.821 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2021 par la cour d'appel de Nîmes (5e chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société KPI Expertises 30, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [Z], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société KPI Expertises 30, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 mai 2023 où étaient présentes Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 14 septembre 2021), le 12 avril 2018, M. [Z] a relevé appel d'un jugement rendu par un conseil des prud'hommes dans une instance l'opposant à la société KPI Expertises 30.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

2. M. [Z] fait grief à l'arrêt de dire que la cour n'est saisie d'aucun chef du jugement déféré à défaut d'effet dévolutif de l'appel, alors « que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d'appel a en l'espèce relevé d'office que la déclaration d'appel ne mentionnait pas les chefs de jugement expressément critiqués et qu'en conséquence l'effet dévolutif n'ayant pas opéré, elle n'était saisie d'aucun litige ; qu'en statuant ainsi sans inviter les parties à faire valoir leurs observations sur le contenu et la portée de la déclaration d'appel, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

3. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

4. Pour dire que la cour n'est saisie d'aucun chef du jugement déféré, à défaut d'effet dévolutif de l'appel, et rejeter les demandes respectives des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt retient l'absence d'énonciation expresse, dans la déclaration d'appel, des chefs de jugement critiqués tandis que l'appel ne tend pas à l'annulation du jugement et que l'objet du litige n'est pas indivisible.

5. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. M. [Z] fait le même grief, alors « que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; que la déclaration d'appel doit en conséquence comporter l'énoncé des chefs de dispositif du jugement ayant autorité de chose jugée qui sont critiqués ; qu'en l'espèce, le dispositif du jugement du conseil des prud'hommes de Nîmes du 16 mars 2018, objet de l'appel, comportait un chef « déboutant M. [C] [Z] de l'ensemble de ses demandes » un chef « déboutant la société KPI expertise 30 de sa demande reconventionnelle » et un chef « laissant les dépens à la charge de M. [C] [Z] »; qu'en jugeant que la déclaration d'appel mentionnant qu'il était fait appel total du jugement rendu le 16 mars 2018 par le conseil des prud'hommes de Nîmes « en ce qu'il a débouté M. [C] [Z] de l'ensemble de ses demandes et laissé les dépens à la charge de M. [C] [Z] » ne mentionnait pas les chefs de jugement expressément critiqués, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 562 et 901, 4°, du code de procédure civile et de l'article 4 du code civil et a ainsi privé l'appelant de son droit d'accès au juge en violation de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 562 et 901, 4°, du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n°2015-891 du 6 mai 2017 :

7. Selon le premier de ces textes, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. Selon le second, régissant la procédure avec représentation obligatoire devant la cour d'appel, la déclaration d'appel qui tend à la réformation du jugement doit mentionner les chefs de jugement critiqué.

8. Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de dispositif du jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.

9. Pour dire que la cour n'est saisie d'aucun chef du jugement déféré, à défaut d'effet dévolutif de l'appel, et rejeter les demandes respectives des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt retient l'absence d'énonciation expresse, dans la déclaration d'appel, des chefs de jugement critiqués tandis que l'appel ne tend pas à l'annulation du jugement et que l'objet du litige n'est pas indivisible.

10. En statuant ainsi, alors que la déclaration d'appel mentionne des chefs du dispositif du jugement critiqués, la cour d'appel, qui ne pouvait constater l'absence d'effet dévolutif, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.

Condamne la société KPI Expertises 30 aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société KPI Expertises 30 à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille vingt-trois. ECLI:FR:CCASS:2023:C200713

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