mardi 1 avril 2025

Le paiement de l'intégralité des travaux et la prise de possession par le maître de l'ouvrage valent présomption de réception tacite non subordonnée à l'achèvement de l'ouvrage

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 159 F-D

Pourvoi n° F 23-20.475




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2025

La société Coheso, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 4], a formé le pourvoi n° F 23-20.475 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2023 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Concept et décoration, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], [Localité 9],

2°/ à la société QBE Europe, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 11],

3°/ à la société Décoration et agencement, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 10], [Localité 4],

4°/ à la société Saulnier-Ponroy et associés, mandataires judiciaires, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5], [Localité 3], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Concept étanchéité,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société civile immobilière Coheso, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société QBE Europe, après débats en l'audience publique du 11 février 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société civile immobilière Coheso (la SCI) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Concept et décoration et la société Décoration et agencement.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 8 juin 2023), la SCI a confié à la société Décoration et agencement, assurée auprès de la société QBE Insurance Europe Limited, aux droits de laquelle vient la société QBE Europe, des travaux de construction de logements.

3. Elle a également confié à la société Concept étanchéité des travaux de construction d'une piscine.

4. Des travaux ont été facturés par la société Concept et décoration.

5. Se plaignant de malfaçons, le maître de l'ouvrage a assigné les sociétés Décoration et agencement, Concept et décoration et QBE Europe, ainsi que la société Saulnier-Ponroy, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Concept étanchéité, aux fins d'indemnisation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La SCI fait grief à l'arrêt de condamner les seules sociétés Décoration et agencement et Concept et décoration, à l'exclusion de la société QBE Europe, à lui payer une certaine somme en réparation de son préjudice de jouissance, alors « que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police ; qu'en se bornant à énoncer que « au vu des pièces produites aux débats, aucune disposition contractuelle ne permet de mobiliser la garantie de la société QBE Europe dans le cadre de l'indemnisation de ce préjudice de jouissance, qui entre dans le champ des exclusions de garantie stipulées entre les parties », sans préciser quelles clauses elle appliquait ni comment elles étaient libellées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a mis la société QBE hors de cause au titre de la garantie décennale mais n'a pas rejeté, dans son dispositif, les autres demandes formées contre cet assureur.

8. Sous le couvert d'un grief de manque de base légale, le moyen critique, en réalité, une omission de statuer qui, pouvant être réparée par application des dispositions de l'article 463 du code de procédure civile, ne donne pas lieu à ouverture à cassation.

9. Le moyen est donc irrecevable.

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

10. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à voir prononcer la réception judiciaire, ou subsidiairement amiable, des travaux et mis en conséquence hors de cause la société QBE Europe au titre de la garantie décennale portant sur les logements concernés, alors « que la réception judiciaire des travaux peut être prononcée dès lors que les travaux sont en état d'être reçus, ce qui, s'agissant d'immeubles d'habitation, suppose seulement que l'immeuble soit habitable ; que la cour d'appel, tenue de déterminer si tel était le cas, ne pouvait se borner à relever pour ce qui concernait les appartements situés au [Adresse 7] "l'absence majoritaire de pose ou de raccordement des sanitaires, un défaut de finition du réseau électrique intérieur, l'absence de système de chauffage" pour considérer, contre l'avis de l'expert, que les appartements n'étaient pas habitables, sans préciser en quoi les défauts relevés interdisaient d'utiliser les lieux comme habitation ; qu'elle a ainsi violé l'article 1792-6 du code civil. »

Réponse de la Cour

11. La cour d'appel a constaté, au vu du rapport d'expertise judiciaire, l'absence majoritaire de pose ou de raccordement des sanitaires, un défaut de finition du réseau électrique intérieur, l'absence de système de chauffage, l'absence de certaines menuiseries/huisseries.

12. Elle a souverainement retenu que l'ampleur de ces seules malfaçons et non-façons, qui s'ajoutaient à de nombreux autres désordres relatifs à la charpente, aux menuiseries, au parquet, à la VMC et aux portes d'entrées empêchait que les appartements et la maison litigieux pussent être considérés comme habitables et, partant, en état d'être reçus.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

14. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à voir prononcer la réception judiciaire, ou subsidiairement amiable, des travaux et mis en conséquence hors de cause la société QBE Europe au titre de la garantie décennale portant sur les logements concernés, alors « que la prise de possession de l'ouvrage et le paiement des travaux font présumer la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de le recevoir avec ou sans réserves ; que dès lors, la cour d'appel ne pouvait comme elle l'a fait, se borner à énoncer que la preuve de la volonté non équivoque de recevoir l'ouvrage n'était pas rapportée, sans s'expliquer sur la prise de possession de l'ouvrage et le paiement des travaux qui étaient invoqués ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1792-6 du code civil :

15. Il est jugé, en application de ce texte, que le paiement de l'intégralité des travaux et la prise de possession par le maître de l'ouvrage valent présomption de réception tacite, laquelle n'est pas subordonnée à l'achèvement de l'ouvrage, mais peut être assortie de réserves.

16. Pour écarter l'existence d'une réception tacite des ouvrages, l'arrêt énonce qu'une telle réception est conditionnée par l'existence d'une volonté non équivoque de la part du maître de l'ouvrage de recevoir l'ouvrage et retient qu'une telle preuve n'est pas rapportée en l'espèce.

17. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la prise de possession des ouvrages et le paiement du montant des travaux réalisés ne laissaient pas présumer la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir celui-ci en l'état, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

18. La cassation prononcée ne s'étend pas au rejet de la demande de prononcé de la réception judiciaire, dès lors que les motifs censurés ne sont pas le soutien de cette décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Coheso tendant à voir constater la réception amiable des travaux portant sur quatre logements du [Adresse 7] et sur la maison d'habitation du [Adresse 8], en ce qu'il met hors de cause la société QBE Europe au titre de la garantie décennale portant sur ces logements et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 8 juin 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne la société QBE Europe aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société QBE Europe et la condamne à payer à la société civile immobilière Coheso la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-cinq.ECLI:FR:CCASS:2025:C300159

Le délai biennal de l'article 1648 de l'action en garantie des vices cachés de la chose vendue est un délai de prescription susceptible de suspension

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2025




Cassation sans renvoi


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 158 F-D

Pourvoi n° R 23-19.610



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2025

1°/ Mme [C] [P], domiciliée [Adresse 5],

2°/ M. [E] [P], domicilié [Adresse 4],

3°/ M. [Y] [P], domicilié [Adresse 6],

ont formé le pourvoi n° R 23-19.610 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme [X] [H], domiciliée [Adresse 2],

2°/ au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 7], représentée par son syndic coopératif M. [S] [J], domicilié [Adresse 3],

3°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [P] et MM. [E] et [Y] [P], de Me Isabelle Galy, avocat de Mme [H], après débats en l'audience publique du 11 février 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Guillaudier, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à Mme [P] et MM. [E] et [Y] [P] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 7], pris en la personne de son syndic coopératif, M. [J], et la société Allianz IARD.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 juin 2023), par acte du 9 octobre 2017, Mme [H] (la venderesse) a vendu à Mme [P] et MM. [E] et [Y] [P] (les acquéreurs) un appartement dans un immeuble en copropriété.

3. Les acquéreurs ont constaté des infiltrations et une expertise amiable a été réalisée et déposée le 26 avril 2018.

4. Le 10 septembre 2018, la venderesse a été assignée en référé afin de voir désigner un expert.

5. Une expertise judiciaire a été ordonnée le 21 décembre 2018 et l'expert a déposé son rapport le 1er juin 2021.

6. Par acte du 4 novembre 2021, les acquéreurs ont assigné la venderesse et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble et son assureur en résolution de la vente et dommages-intérêts sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande formée contre la venderesse, alors :

« 1°/ que le délai de prescription biennal prévu à l'article 1648 du code civil
est, conformément à l'article 2241 de ce code, interrompu par une assignation en référé, et est, en outre, suspendu lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès en application de l'article 2239 du même code, le délai recommençant à courir
à compter du jour où la mesure a été exécutée ; qu'en déclarant irrecevable l'action introduite le 4 novembre 2021 par les acquéreurs, au motif que le délai biennal ayant couru à compter du dépôt du rapport d'expertise amiable le 26 avril 2018 avait été interrompu par l'assignation en référé du 10 septembre 2018 et qu'il avait recommencé à courir à compter de la décision ordonnant l'expertise, le 21 décembre 2018, de sorte que l'action introduite postérieurement au 21 décembre 2020 serait prescrite, quand le délai de prescription biennal avait été en outre suspendu durant l'exécution de la mesure d'expertise jusqu'au 1er juin 2021, de sorte que l'action introduite moins de deux ans après cette date, le 4 novembre 2021, était recevable, la cour d'appel a violé les articles 1648, 2239 et 2241 du code civil ;

2°/ que seule la connaissance du vice dans toute son ampleur et ses conséquences fait courir le délai biennal de prescription de l'action en garantie des vices cachés ; qu'en jugeant, pour déclarer irrecevable l'action des acquéreurs, que le rapport d'expertise amiable du 26 avril 2018 leur aurait permis de connaître la nature et la gravité des désordres affectant l'appartement qu'ils avaient acquis de sorte que le délai biennal avait couru dès cette date, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le rapport d'expertise amiable concluant au conditionnel, et ne formulant qu'une hypothèse sur la cause des désordres, qui devait être vérifiée par des investigations supplémentaires, avait permis aux acquéreurs de prendre connaissance de manière certaine de la cause des infiltrations affectant le bien vendu, et partant, du vice dans toute son ampleur et ses conséquences, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1648 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

8. La venderesse conteste la recevabilité du moyen, pris en sa première branche, comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit. Elle soutient que les acquéreurs n'invoquaient pas devant la cour d'appel la suspension du délai biennal par application de l'article 2239 du code civil.

9. Cependant, dans leurs conclusions d'appel, les acquéreurs soutenaient que le délai prévu par l'article 1648, alinéa 1er, du code civil, était qualifié de délai de prescription par certains arrêts de la Cour de cassation et pouvait faire l'objet d'une suspension.

10. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 1648, alinéa 1er, et 2239 du code civil :

11. Le délai biennal prévu par le premier de ces textes pour intenter l'action en garantie à raison des vices cachés de la chose vendue est un délai de prescription susceptible de suspension en application du second de ces textes (Ch. mixte, 21 juillet 2023, pourvoi n° 21-15.809, publié).

12. La sécurité juridique, invoquée par la défense sur le fondement du droit à un procès équitable pour contester l'application immédiate d'une solution nouvelle résultant d'une évolution de jurisprudence, ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence figée, dès lors que la partie qui s'en prévaut n'est pas privée de l'accès au juge.

13. Pour déclarer irrecevable l'action des acquéreurs sur le fondement de la garantie des vices cachés, l'arrêt retient que le point de départ du délai de forclusion biennal, qui doit être fixé à la date du dépôt du rapport de l'expert amiable le 26 avril 2018, a été interrompu par l'assignation en référé du 10 septembre 2018 et a repris son cours à la date de l'ordonnance du juge des référés du 21 décembre 2018 pour prendre fin le 21 décembre 2020 et que les acquéreurs n'ayant assigné au fond la venderesse que le 4 novembre 2021, leur action contre elle est irrecevable.

14. En statuant ainsi, alors que le délai biennal de garantie des vices cachés est un délai de prescription et que celui-ci, à supposer même qu'il ait commencé à courir le 26 avril 2018, date du dépôt du rapport de l'expert amiable, avait été interrompu le 10 septembre 2018 par l'assignation en référé-expertise, et suspendu par l'ordonnance du juge des référés du 21 décembre 2018 pour recommencer à courir pour une durée qui ne pouvait être inférieure à six mois, à compter du 1er juin 2021, date de dépôt du rapport d'expertise, de sorte qu'il n'était pas expiré au jour de l'assignation au fond, le 4 novembre 2021, la cour d'appel a violé les textes susvisés.



Portée et conséquences de la cassation

15. Tel que suggéré par les acquéreurs, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

16. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

17. Il résulte des motifs énoncés au paragraphe 14 que le délai biennal n'était pas expiré au jour de l'assignation au fond des acquéreurs.

18. Les acquéreurs sont, dès lors, recevables à agir en garantie des vices cachés. L'ordonnance du juge de la mise en état sera donc confirmée par substitution de motifs, et l'action des acquéreurs déclarée recevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 juin 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Confirme l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bobigny rendue le 3 octobre 2022 ;

Déclare recevable l'action de Mme [P] et MM. [E] et [Y] [P] formée contre Mme [H] sur le fondement de la garantie des vices cachés ;

Condamne Mme [H] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Paris ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [H] et la condamne à payer à Mme [P] et MM. [E] et [Y] [P] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-cinq.ECLI:FR:CCASS:2025:C300158

Portée d'une attestation d'assurance et activité déclarée

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 157 F-D

Pourvoi n° Q 23-18.873




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2025

La société MRS, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Q 23-18.873 contre l'arrêt rendu le 22 mai 2023 par la cour d'appel de Versailles (4e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MIC Insurance, dont le siège est [Adresse 1] (Gibraltar), anciennement dénommée Millennium Insurance Company, représentée en France par Leader Underwriting,

2°/ à la société Axeria IARD, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ à la société Eiffage construction amélioration de l'habitat, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

4°/ à la société MIC Insurance Company, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseiller, les observations de la SCP Françoise Fabiani-François Pinatel, avocat de la société MRS, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Axeria IARD, de Me Haas, avocat des sociétés MIC Insurance et MIC Insurance Company, après débats en l'audience publique du 11 février 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Foucher-Gros, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 22 mai 2023), la société Valophis habitat, assurée par la société Axeria IARD, a confié à la société Eiffage construction amélioration de l'habitat (la société Eiffage) des travaux de réhabilitation de deux immeubles.

2. La société Eiffage a sous-traité le lot flocage, isolation, combles, faïence, plâtrerie, à la société MRS, assurée auprès de la société Millennium Insurance Company, devenue MIC Insurance.

3. Des travaux de flocage réalisés par la société MRS ont provoqué des infiltrations et le soulèvement du parquet dans plusieurs appartements situés au rez-de-chaussée des immeubles.

4. La société Axeria IARD, après expertise et indemnisation de son assurée, a assigné en paiement les sociétés Eiffage et MRS. Celle-ci a assigné son assureur en garantie et les instances ont été jointes.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

5. La société MRS fait grief à l'arrêt de rejeter l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société MIC Insurance, alors « qu'après avoir énoncé que les garanties du contrat d'assurance ne s'appliquaient qu'aux activités précisées sur l'attestation d'assurance, la cour d'appel ne pouvait omettre de vérifier la clause « annexe des activités » incluse en page 5 de cette attestation d'assurance et dont il résultait que l'activité de doublage thermique ou acoustique intérieur, mise en oeuvre des matériaux ou produits contribuant à l'isolation thermique, acoustique et à la sécurité incendie » relevait de la garantie sans égard à une prétendue activité complémentaire ou accessoire, sauf à priver sa décision de toute base légale au regard de l'article 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1103 du code civil :

6. Aux termes de ce texte, les contrats tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

7. Pour rejeter les demandes de la société MRS contre son assureur, l'arrêt relève, d'abord, que l'activité déclarée de « Plâtrerie, staff, gypserie, stuc » est garantie pour la réalisation de plâtrerie, cloisonnement et faux plafonds à base de plâtre et que cette activité comprend les travaux accessoires ou complémentaires de menuiseries intégrées aux cloisons, doublage thermique et acoustique intérieur, et mises en oeuvre des produits contribuant à l'isolation thermique, acoustique et à la sécurité incendie.

8. Il retient, ensuite, qu'en l'absence de lien accessoire entre les travaux déclarés et les travaux de flocage, qui ont été réalisés sous parquet, à l'origine du dommage, ceux-ci constituent une activité autonome non garantie.

9. En se déterminant ainsi, après avoir relevé que le référentiel, opposable à l'assurée, précisait que les travaux accessoires ou complémentaires ne pouvaient faire l'objet d'un marché de travaux à part entière et que, si tel était le cas, l'attestation d'assurance devait reproduire précisément l'activité objet du marché de travaux, à défaut de quoi, ceux-ci n'étaient pas garantis, ce dont il résultait que, dans les termes du contrat, des travaux accessoires ou complémentaires pouvaient, le cas échéant, être garantis, même s'ils constituaient une activité autonome, si l'attestation d'assurance le précisait, sans rechercher, comme il lui incombait, si tel était le cas, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée entraîne la cassation du chef de dispositif condamnant la société MRS à payer à la société MIC Insurance la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

Mise hors de cause

11. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause la société Axeria IARD, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour de renvoi.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société MRS à l'encontre de la société MIC Insurance, et en ce qu'il condamne la société MRS à payer à la société MIC Insurance une indemnité de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 22 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Met hors de cause la société Axeria IARD ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société MIC Insurance aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-cinq.ECLI:FR:CCASS:2025:C300157

Limites de la mission du maître d'oeuvre

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 156 F-D

Pourvoi n° A 23-17.273




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2025

M. [G] [N], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 23-17.273 contre l'arrêt rendu le 17 avril 2023 par la cour d'appel de Nancy (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Ludovic Spengler, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [N], de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Ludovic Spengler, après débats en l'audience publique du 11 février 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Foucher-Gros, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 17 avril 2023), M. [N], après avoir fait réaliser par une société tierce, une étude relative à la structure de la réfection du mur pignon d'un immeuble lui appartenant, détruit par un incendie, a confié à la société Ludovic Spengler (la société Spengler) les travaux de réfection de ce mur.

2. Après avoir réalisé les travaux, la société Spengler a émis une facture que M. [N] a refusé de régler, se plaignant de désordres et du non-respect de diverses préconisations du bureau d'études techniques.

3. La société Spengler a assigné M. [N] en paiement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. M. [N] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société Spengler une certaine somme au titre du paiement des travaux, alors « que l'entrepreneur doit délivrer un bien conforme aux stipulations contractuelles, la conformité de l'ouvrage aux règles de l'art ne le dispensant pas de cette obligation ; qu'en retenant que M. [N] n'était pas fondé à invoquer des manquements de l'entrepreneur à ses obligations et en le condamnant, pour cette raison, à payer à la société Spengler la somme de 13 608,42 euros, aux motifs que les « réclamations de M. [N] ne concernent que les modalités d'exécution de l'ouvrage, les adaptations décidées par la SARL Ludovic Spengler par rapport à l'étude technique réalisée par le bureau d'études Adam Vosges ne constituant pas des non-conformités », car les adaptations étaient conformes aux règles de l'art, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si les modalités préconisées par le bureau d'études Adam Vosges n'étaient pas entrées dans le champ contractuel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. Ayant constaté que, au cours des opérations d'expertise judiciaire, après une visite des lieux le 27 juin 2018, le bureau d'études techniques avait produit une note du 22 août 2018 selon laquelle les plans qui avaient été fournis étaient des principes à mettre en oeuvre et que les adaptations réalisées par la société Spengler étaient conformes aux règles de l'art, la cour d'appel a souverainement retenu, procédant à la recherche prétendument omise, que ces adaptations ne constituaient pas des non-conformités contractuelles.

6. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-cinq.ECLI:FR:CCASS:2025:C300156

La capitalisation des intérêts est de droit lorsqu'elle est judiciairement demandée,

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 147 FS-B

Pourvoi n° Y 23-16.765




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2025


La société Hôtel le Bristol, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 23-16.765 contre l'arrêt rendu le 29 mars 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 5), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [E] [M], domicilié [Adresse 6], exerçant sous l'enseigne Agence d'architecture [E] [M],

2°/ à la société TPF ingénierie, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 9], anciennement Beterem, venant aux droits Beterem ingénierie,

3°/ à la société Vialatte ingénierie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 7],

4°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],

5°/ à la Mutuelle des architectes français (MAF), société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 2],

6°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 5],

7°/ à la société Bureau Veritas, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 8], aux droits de laquelle vient la société Bureau Veritas construction,

8°/ à la société QBE Insurance Europe Limited, société étrangère, dont le siège est [Adresse 11], et en tant que de besoin en son siège au Royaume-Uni, sis [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SARL Gury & Maitre, avocat de la société Hôtel le Bristol, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat des sociétés Bureau Veritas et QBE Insurance Europe Limited, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la Mutuelle des architectes français, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [M], et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 11 février 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, Mmes Vernimmen, Rat, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 mars 2023), rendu sur requête en omission de statuer, la société Hôtel le Bristol a confié à M. [M], assuré auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), la maîtrise d'oeuvre de travaux d'extension de l'hôtel qu'elle exploite.



2. Sont intervenus à l'opération :

- pour l'ingénierie structure et génie civil, la société COBATECO, assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) ;
- pour les études portant sur les équipements techniques, la société Beterem, aux droits de laquelle vient la société TPF ingénierie ;
- pour le contrôle technique, la société Bureau Veritas, aux droits de laquelle vient la société Bureau Veritas construction, assurée auprès de la société QBE Insurance Europe Limited (la société QBE Europe) et de la SMABTP ;
- pour les lots gros oeuvre, maçonnerie, cloisons, doublages, couverture et charpente, la société Est constructions, assurée auprès de la SMABTP.

3. La société Est constructions a sous-traité des études techniques à la société Vialatte ingénierie.

4. La société Hôtel le Bristol a résilié les contrats de M. [M] et des sociétés Est constructions et COBATECO en cours de chantier.

5. Se plaignant de désordres et de retards, la société Hôtel le Bristol a assigné, notamment, M. [M], la MAF, la SMABTP et les sociétés Axa, Bureau Veritas construction et QBE Europe, en indemnisation de ses préjudices.


Examen des moyens

Sur le premier moyen

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

7. La société Hôtel le Bristol fait grief à l'arrêt de rejeter la demande tendant à l'application des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2013 avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil, alors « que les seules conditions pour que les intérêts échus des capitaux produisent des intérêts sont que la demande en ait été judiciairement formée et qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; qu'en rejetant la demande de capitalisation des intérêts dont elle fixait le point de départ au jugement en date du 12 février 2018, la cour d'appel a violé l'article 1343-2 du code civil. »



Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

8. M. [M] conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que la cour d'appel ne s'est pas prononcée sur la demande de capitalisation dans ses motifs, de sorte que le moyen s'attaque, en réalité, à une omission de statuer.

9. Cependant, l'arrêt, qui rejette, dans son dispositif, la demande tendant à l'application des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2013 avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil, a statué sur la demande de capitalisation, pour la rejeter.

10. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 1343-2 du code civil :

11. Aux termes de ce texte, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise.

12. Après avoir fixé le point de départ des intérêts au jour du jugement, l'arrêt rejette la demande de capitalisation des intérêts formée par la créancière.

13. En statuant ainsi, alors que la capitalisation des intérêts est de droit lorsqu'elle est judiciairement demandée, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

14. La société Hôtel le Bristol fait grief à l'arrêt de rejeter sa requête au titre de l'omission de statuer concernant les condamnations prononcées à l'encontre de la MAF, alors « que pour chacun des chefs de préjudice dont elle demandait réparation, la société Hôtel le Bristol sollicitait la condamnation de la MAF à son profit in solidum avec M. [M] son assuré ; que la Cour, par son arrêt du 2 juin 2021, n'a pas statué sur ces demandes en ce qu'elles étaient dirigées contre la MAF, dès lors qu'elle n'a pas prononcé de condamnation de la MAF à verser la moindre somme à la société Hôtel le Bristol, ni débouté cette dernière de ses demandes de condamnation dirigées contre cet assureur ; que l'omission de statuer était ainsi de facto caractérisée, toute autre considération étant nécessairement soit inopérante, soit erronée ; qu'en estimant qu'elle n'avait pas omis de statuer sur cette demande aux motifs inopérants qu'elle avait prononcé une condamnation de M. [M] « sous la garantie de son assureur, la MAF » et que les dispositions relatives à l'action directe de la victime à l'encontre de l'assureur n'avaient pas été invoquées, la cour a violé l'article 463 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 463 du code de procédure civile :

15. Selon ce texte, la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

16. Pour rejeter la requête en omission de statuer, l'arrêt retient que la décision du 2 juin 2021, en condamnant M. [M] « sous la garantie de son assureur, la MAF », a répondu aux demandes de la société Hôtel le Bristol, qui ne visaient pas les dispositions relatives à l'action directe du tiers lésé, de sorte qu'il n'a pas été statué infra petita.

17. En statuant ainsi, après avoir constaté que la société Hôtel le Bristol avait demandé la condamnation de la MAF à lui payer diverses sommes, in solidum avec M. [M], la cour d'appel, qui n'avait ni accueilli ni rejeté ces demandes et qui devait donc compléter sa décision, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

18. La cassation prononcée du chef du rejet de la capitalisation des intérêts ne s'étend pas au chef de dispositif fixant le point de départ des intérêts.

19. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

20. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond sur certaines demandes.

21. En application de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt lorsque la demande en est judiciairement formée.

22. En l'espèce, la société Hôtel le Bristol, qui avait demandé la capitalisation des intérêts devant le tribunal, a sollicité, dans ses conclusions d'appel que celle-ci fût fixée à la date de l'assignation. Le point de départ des intérêts légaux ayant été fixé à la date du jugement, la demande de capitalisation doit être accueillie pour les intérêts échus pour au moins une année entière à compter de cette date. L'arrêt du 2 juin 2021 sera complété en ce sens.

23. Par ailleurs, le principe de la garantie de la MAF ayant été retenu, la société Hôtel le Bristol est fondée à demander la condamnation de cet assureur à lui payer directement, par application de l'article L. 124-3 du code des assurances, les sommes dues par son assuré au titre des réservations (A1), de l'ascenseur et du monte-charge (A2 et A3), du rabotage (A4), des panneaux acoustiques (A5), de la couverture (A8 et B19) et du gros oeuvre (A13) et au titre des préjudices immatériels. L'arrêt du 2 juin 2021 sera complété en ce sens.

24. Conformément à la demande de la société Hôtel le Bristol, les condamnations seront prononcées dans les limites de la police de la MAF.

25. Compte tenu de la cassation avec renvoi prononcée le 25 mai 2023 des chefs de dispositif :

- limitant la condamnation de M. [M] sous la garantie de la MAF au titre des préjudices financiers liés au retard du chantier à la somme de 68 071,77 euros HT,
- condamnant M. [M], sous la garantie de la MAF, à payer à la société Hôtel le Bristol la somme de 253 487,35 euros HT en indemnisation des surcoûts liés au non-respect du PPRI de [Localité 10] et de l'implantation de gaines CVCD dans une cour commune,
- disant M. [M] tenu à indemnisation au profit de la société Hôtel le Bristol au titre du désordre affectant la porte cochère, et fixant le partage de responsabilité entre M. [M] et la MAF d'une part et la société Bureau Veritas construction sous la garantie de la société QBE Europe d'autre part,
- condamnant M. [M], sous la garantie de la MAF, celle-ci dans les limites contractuelles de sa police, à payer à la société Hôtel le Bristol, la somme de 12 244,80 euros HT au titre de la porte cochère,

il n'y a pas lieu de statuer au fond sur la condamnation de la MAF au titre de ces préjudices mais de renvoyer l'affaire à la cour d'appel de Paris, autrement composée.

Mises hors de cause

26. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause M. [M] et les sociétés Axa, Bureau Veritas construction et QBE Europe, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour de renvoi.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il complète le dispositif de l'arrêt du 2 juin 2021 en rejetant la demande de capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil, en ce qu'il rejette la requête de la société Hôtel le Bristol au titre de l'omission de statuer concernant les condamnations prononcées à l'encontre de la Mutuelle des architectes français et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 29 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi des chefs de la capitalisation des intérêts et des condamnations de la Mutuelle des architectes français au titre des réservations (A1), de l'ascenseur et du monte-charge (A2 et A3), du rabotage (A4), des panneaux acoustiques (A5), de la couverture (A8 et B19) et du gros oeuvre (A13) et au titre des préjudices immatériels ;

Complète le dispositif de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 2 juin 2021 (RG n° 18/06191), comme suit :

« Condamne la Mutuelle des architectes français, dans les limites de sa police, à payer à la société Hôtel le Bristol :

- la somme de 87 295,23 euros HT au titre des réservations (A1) ;
- la somme de 11 246,76 euros HT au titre de l'ascenseur et du monte-charge (A2 et A3) ;
- la somme de 92 803,50 euros HT au titre du rabotage (A4), des panneaux acoustiques (A5), de la couverture (A8 et B19) et du gros oeuvre (A13) ;
- la somme de 808 927,80 euros HT au titre des préjudices immatériels ;

Dit que les intérêts échus des condamnations prononcées au bénéfice de la société Hôtel le Bristol, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt à compter du jugement du 12 février 2018 ; »

Met hors de cause M. [M] et les sociétés Axa France IARD, Bureau Veritas construction et QBE Insurance Europe Limited ;

Remet, sur les points restant en litige, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt du 29 mars 2023 et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse les dépens de l'instance sur omission de statuer au Trésor public ;

Condamne M. [M], la Mutuelle des architectes français et les sociétés TPF ingénierie, Axa France IARD, Bureau Veritas construction, QBE Insurance Europe Limited aux dépens exposés devant la Cour de cassation ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Mutuelle des architectes français à payer à la société Hôtel le Bristol la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés devant la Cour de cassation et rejette les autres demandes formées tant devant la cour d'appel statuant sur omission de statuer que devant la Cour de cassation ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-cinq.ECLI:FR:CCASS:2025:C300147

mardi 25 mars 2025

Diagnostic technique annexé à la promesse de vente : l'acquéreur doit faire procéder aux travaux de mise en conformité

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL




COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 146 FS-B

Pourvoi n° D 23-18.472






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2025

Le syndicat mixte de production d'eau potable et de traitement des déchets du Gers-Trigone, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° D 23-18.472 contre l'arrêt rendu le 26 avril 2023 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [P] [O], épouse [Z], domiciliée [Adresse 2],

2°/ à Mme [F] [J], épouse [I], domiciliée [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Mme [O] a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat du syndicat mixte de production d'eau potable et de traitement des déchets du Gers-Trigone, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [O], et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 11 février 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Guillaudier, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mme Foucher-Gros, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte au syndicat mixte de production d'eau potable et de traitement des déchets du Gers-Trigone du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme [I].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 26 avril 2023), par acte authentique du 9 décembre 2014, Mme [I] a vendu à Mme [Z] une maison d'habitation.

3. L'acte de vente mentionnait la présence d'une installation autonome de type fosse septique et se référait à un rapport du 28 mars 2012 du syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable Auch Nord, désormais intégré au syndicat mixte de production d'eau potable et de traitement des déchets du Gers-Trigone (le syndicat mixte), concluant que le système était conforme, satisfaisant, complet et en bon état de fonctionnement.

4. Se plaignant de dysfonctionnements de l'installation, Mme [Z] a, après expertise, assigné Mme [I] et le syndicat mixte en réparation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le second moyen du pourvoi principal

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

6. Le syndicat mixte fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à Mme [Z] une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors « que, s'agissant d'une créance de dommage, la prescription quadriennale des créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public prévue par la loi du 31 décembre 1968 commence à courir le premier jour de l'année au cours de laquelle s'est produit le fait générateur du dommage allégué ; qu'en fixant dès lors le point de départ de la prescription quadriennale à la date à laquelle Mme [Z] avait eu connaissance de son dommage au cours de l'année 2015, quand elle constatait que le fait générateur de celui-ci résultait d'une faute commise lors de la réalisation, le 28 mars 2012, du contrôle de l'installation d'assainissement du bien qu'elle avait acquis ultérieurement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public.

8. Aux termes de l'article 3 de cette loi, la prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement.

9. Il résulte de ces textes que, si le point de départ de la prescription quadriennale est le premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle s'est produit le fait générateur du dommage allégué, la prescription ne peut courir tant que la victime n'a pas eu connaissance du dommage, fondant sa créance en réparation.

10. La cour d'appel, qui a constaté que le rapport de contrôle des installations d'assainissement, réalisé le 28 mars 2012 et joint à l'acte de vente, était erroné et que Mme [Z] avait acquis la maison le 9 décembre 2014, faisant ainsi ressortir qu'elle ignorait l'existence de sa créance en réparation avant cette date, en a déduit, à bon droit, qu'ayant assigné le syndicat mixte en référé expertise les 11 et 16 octobre 2018, la prescription quadriennale, qui avait été interrompue par cette assignation, n'était pas expirée à la date de son assignation au fond.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

12. Mme [Z] fait grief à l'arrêt de condamner le syndicat mixte à lui payer la seule somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors « que
le préjudice causé par les erreurs contenues dans un diagnostic relatif à une installation d'assainissement non collectif est certain ; qu'en jugeant que le manquement du syndicat mixte Trigone qui n'avait pas effectué de façon effective le contrôle de l'installation d'assainissement et avait conclu que le dispositif était conforme avait causé un préjudice « constitué par la perte d'une chance d'obtenir un prix de vente moins élevé, en raison du défaut de conformité et de fonctionnement de l'installation d'assainissement », la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble les articles L. 271-4 du code de la construction et de l'habitation dans sa version alors applicable, et L. 1331-11-1 du code de la santé publique dans sa version alors applicable. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 271-4 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction alors applicable :

13. Selon ce texte, le dossier de diagnostic technique annexé à la promesse de vente ou à l'acte authentique de vente d'un immeuble comprend le document établi à l'issue du contrôle des installations d'assainissement non collectif et, en cas de non-conformité de celles-ci lors de la signature de l'acte authentique de vente, l'acquéreur doit faire procéder aux travaux de mise en conformité dans un délai d'un an après l'acte de vente.

14. Il en résulte que les préjudices liés au caractère erroné du document établi à l'issue du contrôle des installations d'assainissement non collectif revêtent un caractère certain.

15. Pour limiter à une certaine somme l'indemnisation de Mme [Z], l'arrêt retient que son préjudice s'analyse en une perte de chance d'obtenir un prix de vente moins élevé en raison du défaut de conformité et de fonctionnement de l'installation d'assainissement.

16. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

17. La cassation du chef de dispositif limitant la condamnation du syndicat mixte à la somme de 10 000 euros n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt le condamnant aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, dispositions de l'arrêt non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second grief du pourvoi incident, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite la condamnation du syndicat mixte de production d'eau potable et de traitement des déchets du Gers-Trigone à la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 26 avril 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne le syndicat mixte de production d'eau potable et de traitement des déchets du Gers-Trigone aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le syndicat mixte de production d'eau potable et de traitement des déchets du Gers-Trigone et le condamne à payer à Mme [Z] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-cinq.ECLI:FR:CCASS:2025:C300146