mardi 2 décembre 2025

Sous-traitance et caution

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL


COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 27 novembre 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, présidente



Arrêt n° 572 FS-B

Pourvoi n° X 23-19.800



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 NOVEMBRE 2025

La société Cazal, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 23-19.800 contre l'arrêt rendu le 13 juin 2023 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), dans le litige l'opposant à la société Compagnie européenne de garanties et de cautions, société anonyme à conseil d'administration, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Brillet, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Cazal, de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la Compagnie européenne de garanties et de cautions, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2025 où étaient présents Mme Teiller, présidente, M. Brillet, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, M. Pety, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Letourneur, greffière de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des présidente et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 juin 2023), à l'occasion de la construction d'un complexe algo-solaire, la société Global Ecopower, entrepreneur principal, désormais en liquidation judiciaire, a, par divers contrats et avenants, confié la réalisation de différents travaux en sous-traitance à la société Cazal (le sous-traitant).

2. Par plusieurs engagements successifs, la société Compagnie européenne de garanties et cautions (la caution) s'est constituée caution solidaire du paiement par l'entrepreneur principal des sommes pouvant être dues au titre des travaux réalisés par le sous-traitant.

3. N'ayant pas été réglé de l'intégralité des travaux réalisés, le sous-traitant a assigné la caution en paiement.

4. Pour s'opposer au paiement de certaines factures de travaux, celle-ci a fait valoir que sa garantie avait été mobilisée postérieurement au terme stipulé de son engagement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

5. Le sous-traitant fait grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme la condamnation prononcée contre la caution au titre de ses engagements et de rejeter ainsi sa demande de condamnation de ce chef à hauteur de la somme totale de 1 302 752,47 euros, alors :

« 1°/ qu'il résulte des articles 14 et 15 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance que, sauf délégation du maître de l'ouvrage au sous-traitant, le paiement de toutes les sommes dues par l'entrepreneur au sous-traitant, en application du sous-traité, doit être garanti par un cautionnement personnel et solidaire donné par un établissement qualifié et que sont nuls et de nul effet, quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui auraient pour effet de faire obstacle à cette garantie ; que ces dispositions d'ordre public interdisent toute renonciation ou remise conventionnelle accordée par le sous-traitant à la caution ; que l'obligation de fournir une caution au sous-traitant subsiste tant que les comptes entre les parties ne sont pas soldés ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que la facture 99K6092 de 309 595,48 euros émise le 30 juin 2020 par la société Cazal au titre des travaux de fondations qui lui avaient été sous-traités par la société GEP, et correspondant à la situation de travaux n° 4, n'était exigible qu'au « 30 août 2020 », soit postérieurement à la date du 24 août 2020 à laquelle le contrat de cautionnement garantissant le paiement de ces travaux fixait le terme de l'engagement de caution de la CEGC ; qu'il y avait lieu en conséquence, comme le faisait valoir la société Cazal par ses conclusions d'appel et conformément à ce qu'avaient retenu les premiers juges, de déclarer le terme extinctif stipulé au contrat de cautionnement non valable et d'en écarter l'application, en ce qu'il avait pour effet de faire obstacle à la garantie du paiement de l'intégralité des sommes dues par l'entrepreneur principal au sous-traitant en application des sous-traités relatifs aux travaux de fondations ; que la cour d'appel s'est cependant fondée sur l'extinction du cautionnement au 24 août 2020 pour considérer que la CEGC ne pouvait pas être condamnée au paiement de la somme de 309 595,48 euros correspondant au montant de la facture 99K6092 émise le 30 juin 2020 et exigible au « 30 août 2020 » ; qu'elle a jugé le terme extinctif du cautionnement valable aux motifs que la durée du cautionnement expirant le 24 août 2020 apparaissait « cohérente avec la durée contractuelle des travaux » qui avaient « commencé au cours du mois de mars 2020 », que « compte tenu du délai d'un mois contractuellement convenu et de la durée, non discutée, de paiement des factures qui étaient exigibles à 45 jours fin de mois, la durée du cautionnement, lorsqu'il a[vait] été accordé par la société CEGC permettait, conformément à son objet, de garantir la société sous-traitante du paiement des travaux qu'elle avait à effectuer dans le délai convenu au marché » et que l'allongement des travaux « au-delà du délai contractuellement convenu sur la base duquel la caution s' [était] engagée, ne p[ouvait] pas lui être opposé dès lors qu'il [était] indépendant de ses propres engagements » ; qu'en statuant ainsi, quand le cautionnement requis par les dispositions d'ordre public de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 doit garantir le paiement de toutes les sommes dues en application du sous-traité, et quand le prix des travaux de fondations effectués au-delà du délai initialement convenu restait dû en application des sous-traités, nonobstant l'allongement du délai de réalisation de ces travaux, la cour d'appel a violé les articles 14 et 15 de la loi susdite du 31 décembre 1975 ;

2°/ qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que les factures impayées émises en avril et en mai 2020 par la société Cazal, au titre des travaux de terrassement et voiries qu'elle avait réalisés en exécution du sous-traité du 27 septembre 2019 et des avenants n° 1 et 2 à ce sous-traité, étaient exigibles au-delà du 30 avril et du 31 mai 2020, c'est-à-dire au-delà des dates auxquelles les contrats de cautionnement du 30 septembre 2019, du 25 novembre 2019 et du 11 février 2020 visant ce sous-traité et ces deux avenants fixaient leurs termes extinctifs ; qu'il y avait lieu en conséquence, comme le faisait valoir la société Cazal par ses conclusions d'appel et conformément à ce qu'avaient retenu les premiers juges, de déclarer les termes extinctifs stipulés auxdits contrats de cautionnement non valables et d'en écarter l'application, en ce qu'ils avaient pour effet de faire obstacle à la garantie du paiement de l'intégralité des sommes dues par l'entrepreneur principal au sous-traitant en application du sous-traité et des avenants relatifs aux travaux de terrassement et voiries ; que la cour d'appel s'est cependant fondée sur l'extinction desdits cautionnements avant l'exigibilité des factures d'avril et mai 2020 relatives aux travaux de terrassement et voiries pour considérer que la CEGC ne pouvait pas être condamnée au paiement de ces factures ; qu'elle a jugé les termes extinctifs des cautionnements valables aux motifs que les « différentes dates d'effet des cautionnements, comme pour les travaux de fondations, apparaiss[aient] tout à fait cohérentes avec la durée contractuellement convenue pour les travaux initiaux puis pour les avenants consentis », que « la validité des cautionnements d[evait] être appréciée à la date à laquelle chacun a[vait] été consenti, la société intimée n'étant pas fondée à invoquer le fait que certaines des situations dont elle sollicit[ait] le paiement n'étaient pas encore exigibles alors que la durée d'effet du cautionnement avait pris fin, la caution n'étant pas responsable du fait que les délais d'exécution des travaux s'[étaient] prolongés au-delà des durées initialement prévues » ; qu'en statuant ainsi, quand le cautionnement requis par les dispositions d'ordre public de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 doit garantir le paiement de toutes les sommes dues en application du sous-traité, et quand le prix des travaux de terrassement et voiries effectués au-delà des délais initialement convenus restait dû en application du sous-traité et de ses avenants, nonobstant l'allongement des délais de réalisation de ces travaux, la cour d'appel a violé les articles 14 et 15 de la loi susdite du 31 décembre 1975. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 14 et 15 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance :

6. Selon le premier de ces textes, sauf délégation du maître de l'ouvrage au sous-traitant, à peine de nullité du sous-traité, l'entrepreneur principal doit garantir le paiement de toutes les sommes dues à celui-ci par une caution personnelle et solidaire obtenue auprès d'un établissement qualifié et agréé.

7. Il est jugé que l'entrepreneur principal doit fournir le cautionnement répondant aux exigences légales avant la conclusion du sous-traité et, si le commencement d'exécution des travaux lui est antérieur, avant celui-ci (3e Civ., 21 janvier 2021, pourvoi n° 19-22.219, publié).

8. Cette disposition trouve sa justification dans l'intérêt général de protection du sous-traitant (3e Civ., 10 juin 2014, pourvoi n° 14-40.020, publié).

9. Selon le second texte, sont nuls et de nul effet, quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui auraient pour effet de faire échec aux dispositions de la loi du 31 décembre 1975 susvisée.

10. Le sous-traitant ne peut mobiliser le cautionnement tant que n'est pas constatée la défaillance de l'entreprise générale dans le paiement du prix de ses travaux, ce qui suppose que ce paiement soit contractuellement exigible.

11. Il résulte de la combinaison de ces textes que, si la caution peut limiter son engagement à une certaine durée ou l'affecter d'un terme extinctif, une telle clause n'est régulière, au regard des dispositions d'ordre public de cette loi destinée à assurer la protection du sous-traitant contre, notamment, le risque d'insolvabilité de l'entreprise principale, que si cette durée ou ce terme n'ont pas pour effet de priver le sous-traitant de la faculté de mobiliser la garantie avant que le prix de ses travaux mentionné dans le cautionnement ne soit contractuellement exigible.

12. Pour limiter à une certaine somme la condamnation prononcée contre la caution au titre de ses engagements, l'arrêt constate que chacun des contrats de cautionnement prévoit qu'il cessera de produire ses effets au plus tard à une certaine date.

13. Il relève que la durée convenue des cautionnements était cohérente avec la durée contractuelle des travaux, même en tenant compte du délai prévu de paiement des factures, et qu'elle permettait, lorsqu'ils ont été accordés, conformément à leur objet, de garantir la société sous-traitante du paiement des travaux qu'elle avait à effectuer dans le délai convenu.

14. Il retient que, si les travaux se sont poursuivis au-delà de la durée de l'engagement de la caution contractuellement convenue, cet allongement au-delà du délai sur la base duquel la caution s'est engagée ne peut pas lui être opposé dès lors qu'il est indépendant de ses propres engagements.

15. En statuant ainsi, après avoir constaté qu'en application de la clause de terme, les cautionnements avaient pris fin avant que les sommes dont ils garantissaient le paiement ne deviennent contractuellement exigibles, la cour d'appel, qui a refusé d'en écarter l'application, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

16. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant la caution à payer au sous-traitant une certaine somme au titre de ses engagements entraîne la cassation du chef de dispositif rejetant la demande de dommages-intérêts formée par le sous-traitant, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Compagnie européenne de garanties et cautions à payer à la société Cazal une somme limitée à 640 873,88 euros au titre de ses engagements de caution, rejette la demande de dommages et intérêts de la société Cazal et statue sur les frais de procédure et les dépens, l'arrêt rendu le 13 juin 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Compagnie européenne de garanties et cautions aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Compagnie européenne de garanties et cautions et la condamne à payer à la société Cazal la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-sept novembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2025:C300572

Référé - expertise - motif légitime

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SA



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 27 novembre 2025




Rejet


Mme TEILLER, présidente



Arrêt n° 576 FS-B

Pourvoi n° E 23-20.727






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 NOVEMBRE 2025


La Société de valorisation immobilière et foncière, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 23-20.727 contre l'arrêt rendu le 4 juillet 2023 par la cour d'appel de Riom (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [P] [B],

2°/ à Mme [F] [W],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

3°/ à la société Mic Insurance Company, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

4°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

La SMABTP a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société de valorisation immobilière et foncière, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la SMABTP, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2025 où étaient présents Mme Teiller, présidente, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, M. Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, Mmes Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, et Mme Letourneur, greffière de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de la présidente et des conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 4 juillet 2023), M. [B] et Mme [W] (les maîtres de l'ouvrage) ont confié à la Société de valorisation immobilière et foncière (le maître d'oeuvre), assurée, successivement, auprès de la société Millenium Insurance Company puis de la SMABTP, la maîtrise d'oeuvre de la construction d'une maison d'habitation.

2. Après l'obtention de deux permis de construire, les maîtres de l'ouvrage ont résilié le contrat de maîtrise d'oeuvre en faisant valoir que l'implantation prévue par le contrat n'était pas réalisable.

3. Imputant l'échec de leur projet au maître d'œuvre, ils ont assigné celui-ci et ses deux assureurs en référé en sollicitant que soit ordonnée une mesure de consultation.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal du constructeur, pris en ses trois dernières branches, et sur le moyen du pourvoi incident de la SMABTP, pris en ses trois dernières branches

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen du pourvoi principal du maître d'oeuvre, pris en sa première branche, et sur le moyen du pourvoi incident de la SMABTP, pris en sa première branche, rédigés en termes identiques, réunis

Enoncé des moyens

5. Par leur moyen, le maître d'oeuvre et la SMABTP font grief à l'arrêt d'ordonner une mesure d'expertise, alors « que le juge, qui ne peut méconnaître les termes du litige dont il est saisi, doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'en l'espèce, les consorts [B]-[W] avaient expressément demandé, en cause d'appel, « une mesure de consultation judiciaire » ; que dès lors, en ordonnant une mesure d'expertise motif pris de ce qu'« étant donné la nature du problème posé, qui va nécessiter une étude sur le terrain, ainsi que la réalisation de plans et des estimations budgétaires, il est préférable d'ordonner une expertise plutôt qu'une simple mesure de consultation », la cour d'appel a méconnu les termes du litige et, partant, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte des articles 145 et suivants et 232 et suivants du code de procédure civile que ne modifie pas l'objet du litige le juge des référés qui, saisi sur le fondement du premier de ces textes, d'une demande de désignation d'un technicien en vue d'une mission de consultation, après avoir constaté le motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, commet un technicien avec une mission d'expertise au motif, souverainement apprécié, que, l'issue du litige requérant des investigations complexes, la mesure de consultation sollicitée ne serait pas suffisante.

7. Les moyens, qui postulent le contraire, ne sont donc pas fondés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la Société de valorisation immobilière et foncière et la SMABTP aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-sept novembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2025:C300576