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lundi 14 avril 2025

L'absence de renvoi par les conclusions aux pièces produite n'est assortie d'aucune sanction

 Note C. Bohnert, D. 2025, p. 652.

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 novembre 2024




Cassation


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 1184 F-B

Pourvoi n° T 22-16.664



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 NOVEMBRE 2024

M. [P] [W], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 22-16.664 contre l'arrêt rendu le 23 février 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-4), dans le litige l'opposant à Mme [T] [F], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Waguette, conseiller, les observations de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de M. [W], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [F], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 novembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Waguette, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 février 2022), Mme [F] a saisi un tribunal judiciaire d'une demande d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre elle et M. [W].

2. M. [W] a relevé appel du jugement rendu par le tribunal judiciaire.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième, quatrième et cinquième branches, le deuxième moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, et sur le troisième moyen, pris en sa première branche

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et sur les deuxième et troisième moyens, pris en leur deuxième branche

Enoncé des moyens

4. Par son premier moyen, M. [W] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir fixer le montant de la contribution de Mme [F] au titre du prêt immobilier de 200 000 euros et, en conséquence, de le débouter de sa demande tendant à ce que Mme [F] soit déclarée redevable à l'indivision d'une somme de 21 934,65 euros au titre de ce prêt, alors « que l'obligation pour les parties d'indiquer, pour chaque prétention, les pièces invoquées et leur numérotation, prévue à l'article 954 du code de procédure civile, n'est assortie d'aucune sanction ; qu'en rejetant néanmoins la demande de M. [W], motif pris que « dans les 12 pages que comptent les conclusions de M. [P] [W], appelant, aucun renvoi n'est fait aux 95 pièces figurant dans son dernier bordereau de pièces. La cour n'est donc pas mise en mesure de vérifier les calculs de l'appelant et les preuves des règlements qu'il prétend avoir effectués seul », la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile et l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

5. Par son deuxième moyen, M. [W] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir fixer le montant de la contribution de Mme [F] au titre du prêt relais (capital et intérêts) et, en conséquence, de le débouter de sa demande tendant à ce que Mme [F] soit déclarée redevable à l'indivision d'une somme de 73 372,21 euros au titre du prêt relais et d'une somme de 6 188,98 euros au titre de sa quote-part sur les intérêts du prêt relais, alors « que l'obligation pour les parties d'indiquer, pour chaque prétention, les pièces invoquées et leur numérotation, prévue à l'article 954 du code de procédure civile, n'est assortie d'aucune sanction ; qu'en rejetant néanmoins les demandes de M. [W] au motif que énoncé que dans les 12 pages que comptent ses conclusions, aucun renvoi n'est fait aux 95 pièces figurant dans son dernier bordereau de pièces, de sorte qu'elle n'est pas mise en mesure de vérifier les calculs de l'appelant et les preuves des règlements qu'il prétend avoir effectué, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile et l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

6. Par son troisième moyen, M. [W] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir fixer le montant de la contribution de Mme [F] au titre du prêt relais (capital et intérêts) et, en conséquence, de le débouter de sa demande tendant à ce que Mme [F] soit déclarée redevable à l'indivision d'une somme de 6 188,98 euros au titre de sa quote-part sur les intérêts du prêt relais, alors « que l'obligation pour les parties d'indiquer, pour chaque prétention, les pièces invoquées et leur numérotation, prévue à l'article 954 du code de procédure civile, n'est assortie d'aucune sanction ; qu'en rejetant néanmoins les demandes de M. [W] au motif que « dans les 12 pages que comptent les conclusions de M. [P] [W], appelant, aucun renvoi n'est fait aux 95 pièces figurant dans son dernier bordereau de pièces. La cour n'est donc pas mise en mesure de vérifier les calculs de l'appelant et les preuves des règlements qu'il prétend avoir effectués », la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile et l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 954, alinéa 1er, du code de procédure civile :

7. Selon le second de ces textes, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

8. Pour confirmer le jugement, l'arrêt retient que dans les douze pages que comptent les conclusions de M. [W], aucun renvoi n'est fait aux quatre-vingt-quinze pièces figurant dans son dernier bordereau et qu'ainsi la cour d'appel n'est pas mise en mesure de vérifier les calculs de l'appelant et les preuves des règlements qu'il prétend avoir effectués.

9. En statuant ainsi, alors que, sauf à priver l'appelant du droit à l'accès à un tribunal consacré par l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette absence de renvoi par les conclusions aux pièces produites, qui n'est assortie d'aucune sanction, ne la dispensait pas de son obligation d'examiner les pièces régulièrement versées aux débats par M. [W] et clairement identifiées dans les conclusions prises au soutien de ses prétentions, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

Condamne Mme [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt. ECLI:FR:CCASS:2024:C201184

lundi 15 mai 2023

L'annexe à la déclaration d'appel : à manipuler avec précaution...

 Note C. Bléry, GP 2023-15, p. 44

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 janvier 2023




Rejet


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 31 FS-B

Pourvoi n° Z 21-16.804


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JANVIER 2023

La société Kontron Modular Computers, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 21-16.804 contre l'arrêt rendu le 5 mars 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-6), dans le litige l'opposant à Mme [P] [W], épouse [O], domiciliée chez Mme [I] [X] et M. [L] [O], [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Delbano, conseiller, les observations et les plaidoiries de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Kontron Modular Computers, de la SCP Richard, avocat de Mme [W], épouse [O], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Delbano, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mmes Kermina, Durin-Karsenty, Vendryes, conseillers, Mmes Jollec, Bohnert, M. Cardini, Mmes Latreille, Bonnet, conseillers référendaires, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 mars 2021) et les productions, Mme [W] a contesté devant un conseil de prud'hommes son licenciement par la société Kontron Modular Computers (la société).

2. La société a fait appel du jugement ayant retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse et l'ayant condamnée au paiement de dommages-intérêts.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel, de constater l'absence d'appel incident dans le délai de l'appel principal, de dire n'y avoir lieu à statuer en l'absence d'effet dévolutif de l'appel principal et en l'absence d'appel incident recevable, alors :

« 1°/ que la déclaration d'appel est faite par acte contenant les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ; que selon l'article 3 de l'arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel, en vigueur du 31 mars 2011 au 22 mai 2020, "Pour les appels formés à compter du 1er septembre 2011, les envois et remises des déclarations d'appel et des actes de constitution ainsi que des pièces qui leur sont associées doivent être effectués par voie électronique", l'article 6 du même arrêté prévoyant expressément que "Lorsqu'un document doit être joint à un acte, le document est communiqué sous la forme d'un fichier séparé du fichier au format XML contenant l'acte sous forme de message de données. Le fichier contenant le document joint accompagnant l'acte est un fichier au format PDF" ; qu'il en résulte que les chefs du jugement critiqués peuvent être listés dans une pièce jointe annexée à la déclaration d'appel faisant corps avec elle, comme l'admet la circulaire du ministère de la Justice du 4 août 2017 et comme le prévoit désormais expressément l'article 8 de l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel ; qu'en l'espèce, l'appel a été interjeté le 26 septembre 2019 par voie électronique, en précisant dans le champ "Objet/Portée de l'appel : appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués exposés dans la pièce jointe faisant corps avec la déclaration d'appel", la pièce effectivement jointe désignant les chefs attaqués précisant expressément, elle aussi, qu'elle faisait corps avec la déclaration d'appel limité, ce conformément à la trame diffusée par le Conseil national des barreaux le 7 novembre 2017 ; qu'en jugeant que la déclaration d'appel était privée d'effet dévolutif faute de mention des chefs de jugement critiqués "dans la déclaration elle-même" sans que "l'appelante ne démontre avoir été dans l'impossibilité de faire figurer ces mentions dans la déclaration elle-même", et en affirmant que le document joint à la déclaration d'appel n'aurait "aucune valeur procédurale", et ne ferait "pas partie intégrale de cette déclaration au sens de l'article 10 de l'arrêté technique du 30 mars 2011", la cour d'appel a violé l'article 962 du code de procédure civile, l'article 901 du même code dans sa version en vigueur du 1er septembre 2017 au 1er janvier 2020, et l'arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel tel qu'il était en vigueur le 26 septembre 2019 ;

2°/ qu'en tout état de cause, caractérise une violation de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge ; que constitue une telle atteinte le fait de nier l'effet dévolutif d'un appel au seul prétexte que les chefs de dispositif du jugement critiqués ont été précisés dans une annexe, pourtant expressément désignée comme faisant corps avec la déclaration d'appel ; que cette atteinte est d'autant plus disproportionnée que l'absence d'effet dévolutif est relevée d'office par la juridiction d'appel postérieurement à la clôture des débats, privant ainsi l'appelant de toute possibilité de régularisation, laquelle est admise seulement dans le délai accordé pour conclure ; qu'en l'espèce, il ressort de la décision attaquée que l'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 décembre 2019 et qu'à l'audience postérieure du 15 décembre 2020, les parties ont été invitées à faire valoir leurs observations "quant à l'absence d'effet dévolutif de l'appel au vu de la déclaration d'appel qui ne contient aucun chef de jugement critiqué, lesquels sont repris dans une annexe ainsi que sur la recevabilité de l'appel incident" ; que la cour d'appel a refusé tout effet dévolutif à la déclaration d'appel, dont elle a constaté qu'elle était accompagnée d'un "document intitulé "pièce jointe faisant corps avec la déclaration d'appel" précisant que les chefs de jugement critiqués", en affirmant que "l'appelante ne démontre pas avoir été dans l'impossibilité de faire figurer ces mentions dans la déclaration elle-même" et "que le document joint à la déclaration d'appel n'a aucune valeur procédurale et ne fait pas partie intégrale de cette déclaration, au sens de l'article 10 de l'arrêté technique du 30 mars 2011" ; que la cour d'appel a en outre souligné l'impossibilité de régularisation en l'espèce puisqu'elle n'était possible que "par une nouvelle déclaration d'appel intervenue dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, conformément aux dispositions de l'article 910-4 al.1 du code de procédure civile" ; qu'en portant ainsi une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge de l'appelante, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.»

Réponse de la Cour

4. Le décret n° 2022-245 du 25 février 2022, invoqué par la demanderesse au pourvoi, a modifié l'article 901, 4°, du code de procédure civile en tant qu'il prévoit que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, en ajoutant dans ce texte, après les mots : "faite par acte", les mots : "comportant le cas échéant une annexe". L'article 6 du décret précise que cette disposition est applicable aux instances en cours. La demanderesse au pourvoi soutient que ces dispositions sont applicables au présent litige.

5. Par avis du 8 juillet 2022 (n° 22-70.005) la Cour de cassation a notamment dit que le décret n° 2022-245 du 25 février 2022 et l'arrêté du 25 février 2022 modifiant l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel sont immédiatement applicables aux instances en cours pour les déclarations d'appel qui ont été formées antérieurement à l'entrée en vigueur de ces deux textes réglementaires, pour autant qu'elles n'ont pas été annulées par une ordonnance du magistrat compétent qui n'a pas fait l'objet d'un déféré dans le délai requis, ou par l'arrêt d'une cour d'appel statuant sur déféré.

6. Pour autant, l'instance devant une cour d'appel, introduite par une déclaration d'appel, prend fin avec l'arrêt que rend cette juridiction. Elle ne se poursuit pas devant la Cour de cassation, devant laquelle est introduite une instance distincte.

7. Il en résulte que le décret du 25 février 2022 n'est pas applicable au présent litige.

8. La Cour de cassation a jugé le 13 janvier 2022 (2e Civ., 13 janvier 2022, pourvoi n° 20-17.516, publié au Bulletin) qu'il résulte de la combinaison des articles 562 et 901, 4°, du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ainsi que des articles 748-1 et 930-1 du même code, que la déclaration d'appel, dans laquelle doit figurer l'énonciation des chefs critiqués du jugement, est un acte de procédure se suffisant à lui seul ; que, cependant, en cas d'empêchement d'ordre technique, l'appelant peut compléter la déclaration d'appel par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer.

9. Pour constater l'absence d'effet dévolutif, l'arrêt retient que la déclaration d'appel de la société ne précise pas les chefs de jugement critiqués mais procède par renvoi à une annexe transmise le même jour par RPVA les mentionnant, ce dernier document n'ayant aucune valeur procédurale et ne faisant pas partie intégrante de cette déclaration.

10. Il relève en outre que l'appelante ne démontre pas avoir été dans l'impossibilité de faire figurer ces mentions dans la déclaration elle-même, laquelle pouvait parfaitement contenir l'intégralité des chefs de jugement critiqués.

11. Par ces énonciations et constatations, la cour d'appel a fait une exacte application des textes précités, sans porter d'atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Condamne la société Kontron Modular Computers aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Kontron Modular Computers et la condamne à payer à Mme [W], épouse [O] la somme de 3 000 euros ;

lundi 8 août 2022

Les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure peuvent être proposées en tout état de cause (art. 117, 118 CPC)

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 juin 2022




Cassation partielle


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 600 F-B

Pourvoi n° A 19-20.592





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUIN 2022

Mme [B] [X], épouse [V], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 19-20.592 contre l'arrêt rendu le 4 juillet 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-1), dans le litige l'opposant à la société Grandes Études européennes de santé (GEDS), société de droit portugais, dont le siège est [Adresse 2]), défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [X] épouse [V], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Grandes Études européennes de santé (GEDS), et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 avril 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 juillet 2019), Mme [X] est titulaire des marques françaises « GEDS » n° 4 422 912, « Grandes Études européennes de santé » n° 4 422 914, « Grandes Études européennes de santé », n° 4 422 915, « Grands Établissements européens de santé » n° 4 422 917, « Grandes Écoles portugaises de santé GEPS » n° 4 422 934 et « Grandes Écoles portugaises de santé GEPS » n° 4 422 955.

2. La société de droit portugais Grandes Études européennes de santé (GEDS) (la société GEDS) a assigné Mme [X] devant le tribunal de grande instance de Marseille en revendication ou annulation de ces marques.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [X] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'exception de nullité de l'assignation, alors « que les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure, tel le défaut de pouvoir d'une personne figurant au procès comme représentant d'une personne morale, peuvent être proposées en tout état de cause ; que dès lors, en déclarant irrecevable comme soulevée tardivement, l'exception de nullité opposée par Mme [V] fondée sur le défaut de pouvoir de M. [H] pour représenter la prétendue société de droit portugais GEDS, la Cour d'appel a méconnu son office en refusant de trancher le litige par une fausse application des dispositions des articles 117 et suivants du Code de procédure civile, excédant ainsi ses pouvoirs. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. La société GEDS conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que les articles 607-1 et 608 du code de procédure civile doivent conduire à distinguer entre les chefs de dispositif, en cas de décision mixte, et que, dès lors, en application du dernier de ces textes, le second moyen est irrecevable en l'absence d'excès de pouvoir.

6. Cependant, le pourvoi qui attaque une décision ayant notamment prononcé sur la compétence, sans statuer sur le fond du litige, et critique le chef de dispositif ayant prononcé sur la compétence ainsi que d'autres chefs de l'arrêt, entre dans les prévisions de l'article 607-1 du code de procédure civile.

7. Il en résulte que, comme le moyen qui critique le chef de dispositif relatif à la compétence de la juridiction, le moyen relatif au chef de dispositif de l'arrêt statuant sur une exception de nullité est recevable quand bien même aucun excès de pouvoir ne serait caractérisé.

8. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien fondé du moyen

Vu les articles 117 et 118 du code de procédure civile :

9. Les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure peuvent être proposées en tout état de cause.

10. Pour déclarer irrecevable cette exception, l'arrêt retient qu'il résulte de l'articulation des articles 118 et 74 du code de procédure civile que toutes les exceptions de nullité de fond, fussent-elles d'ordre public, doivent être présentées simultanément, c'est à dire dans les mêmes conclusions dès lors que la procédure est écrite.

11. Il relève que Mme [X] a déposé le 7 septembre 2018 devant le juge de la mise en état des conclusions soulevant une exception d'incompétence territoriale et que ce n'est que par conclusions déposées le 26 septembre 2018 qu'elle a soulevé une exception tendant à faire déclarer nul l'acte introductif d'instance.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'exception de nullité, l'arrêt rendu le 4 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.

Condamne la société Grandes Études européennes de santé (GEDS) aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Grandes Études européennes de santé (GEDS) et la condamne à payer à Mme [X] la somme de 3 000 euros ;

mardi 15 octobre 2019

L'effet interruptif de prescription de la demande en justice est non avenu si celle-ci est déclarée irrecevable

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 26 septembre 2019
N° de pourvoi: 18-13.635
Non publié au bulletin Rejet

Mme Flise (président), président
SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Spinosi et Sureau, avocat(s)





Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mmes T..., Q..., G..., N... et M. E... A... (les consorts A... ) ont donné à bail à M. D... Z... un local à usage commercial situé à Saint-Louis ; que, se prévalant de loyers impayés, les consorts A... ont fait délivrer à M. D... Z... un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail puis ont saisi le tribunal de grande instance de Saint-Pierre qui, par un jugement irrévocable du 3 février 1995, a constaté la résiliation du bail et a condamné M. D... Z... au paiement de diverses sommes ; qu'après avoir diligenté diverses mesures d'exécution forcée, les consorts A... ont fait assigner M. D... Z... et son épouse, Mme C... H..., devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre qui, par jugement du 28 mars 2014, a dit que les consorts A... étaient créanciers de M. D... Z... pour une somme de 108 272,88 euros, a ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. et Mme D... et C... Z..., a dit que l'indivision se composait des lots de copropriété n° 5, 6 et 7 de l'immeuble situé à Saint-Louis et a ordonné la licitation de l'indivision en un lot unique ; que M. et Mme D... et C... Z... ayant interjeté appel de ce jugement, M. O... Z..., Mme K... Z... et M. M... L... sont intervenus volontairement à l'instance ; que les consorts A... ont fait assigner en intervention forcée M. W... Z..., M. F... Z... et M. J... Z... sur le fondement d'une action paulienne pour voir constater que les actes de division, de vente et de donations consentis par M. et Mme D... et C... Z... sur des lots de l'immeuble leur étaient inopposables ;

Sur le deuxième moyen, qui est préalable :

Attendu que les consorts A... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables leurs demandes visant à ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation, et partage de l'indivision existant entre M. et Mme D... et C... Z... et à ordonner la licitation des biens indivis, alors selon le moyen, que les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance peuvent être appelées devant la cour d'appel, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause ; qu'en l'espèce, le jugement entrepris a ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. et Mme D... et C... Z... sur leurs biens immobiliers et en a ordonné la licitation ; que M. et Mme D... et C... Z... ont interjeté appel de ce jugement en se prévalant de divers actes de disposition par lesquels la propriété de leur parcelle a été morcelée en onze lots lesquels ont fait l'objet de vente et de démembrement de la propriété ; que cette évolution du litige impliquait la mise dans la cause de toutes les parties ayant des droits sur les biens immobiliers litigieux ; qu'en déclarant néanmoins irrecevables les demandes des consorts A... visant à ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. et Mme D... et C... Z... et la licitation des biens indivis, au motif que les consorts A... ne pouvaient appeler pour la première fois en cause d'appel toutes les parties ayant des droits sur les biens immobiliers litigieux, sans rechercher si la teneur des moyens d'appel de M. et Mme D... et C... Z... et l'évolution du litige en résultant n'impliquaient pas la mise en cause de toutes ces parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 555 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que, dès 2009, les consorts A... étaient informés de ce que l'immeuble n'appartenait plus en totalité à M. et Mme D... et C... Z... et qu'ils ont pu, dès cette date, avoir connaissance des actes de vente et de donation-partage qu'ils contestent aujourd'hui, la cour d'appel en a exactement déduit, sans être tenue d'effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, qu'aucune évolution du litige n'était caractérisée, les éléments dont se prévaut le demandeur à l'intervention étant déjà connus en première instance de sorte que, faute pour les consorts A... d'avoir appelé à l'instance les nus-propriétaires et autres propriétaires de l'immeuble, leur demande tendant à l'ouverture des opérations de compte, liquidation, et partage n'était pas recevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen, qui est recevable :

Attendu que les consorts A... font encore grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande fondée sur l'action paulienne et visant à ce que l'acte de division du 20 février 2006, l'acte de vente du 23 novembre 2007 et l'acte de donation du 28 novembre 2008 leur soient déclarés inopposables, alors, selon le moyen :

1°/ que les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ; qu'en l'espèce, les consorts A... ont exercé en cause d'appel une action paulienne qui visait à ce que divers actes conclus par M. et Mme D... et C... Z... sur des biens immobiliers en indivision leur soient déclarés inopposables, et ce en complément de leurs demandes d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. et Mme D... et C... Z... et de licitation des biens immobiliers en question ; qu'en déclarant néanmoins irrecevable comme nouvelle l'action paulienne, quand la demande visant à ce que divers actes conclus par M. et Mme D... et C... Z... sur leurs biens immobiliers soient déclarés inopposables aux consorts A... , constituait l'accessoire et le complément nécessaire de la demande de licitation de ces mêmes biens, la cour d'appel a violé l'article 566 du code de procédure civile ;

2°/ que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; qu'en l'espèce, pour juger prescrite l'action paulienne des consorts A... , la cour d'appel a estimé que l'assignation du 27 novembre 2012 contenant une demande de licitation des biens indivis de M. et Mme D... et C... Z... n'a pu interrompre sa prescription dès lors qu'elle ne concernait ni les mêmes demandes ni les mêmes parties ; qu'en statuant par ce motif inopérant, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'action paulienne des consorts A... ne tendait pas au même but que la demande de licitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2241 du code civil ;

Mais attendu que, selon l'article 2243 du code civil, l'effet interruptif de prescription de la demande en justice est non avenu si celle-ci est déclarée irrecevable ; que l'arrêt ayant déclaré irrecevable l'action aux fins de licitation et de partage de l'indivision, le moyen qui soutient que l'interruption de la prescription de cette action s'est étendue à l'action paulienne des consorts A... est inopérant ;

Et attendu qu'ayant constaté que l'action paulienne était prescrite, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

Et attendu enfin qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les troisième et quatrième moyens, annexés, qui dénoncent en réalité une omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mmes T..., Q..., G..., N... et M. E... A... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. D... Z..., Mme C... Z..., M. O... Z..., Mme K... Z..., M. M... L..., M. W... Z..., M. F... Z..., M. J... Z... la somme globale de 3 000 euros ;

vendredi 10 mai 2019

Le caractère apparent ou caché des désordres s'apprécie en la personne du maître de l'ouvrage au jour de la réception

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 18 avril 2019
N° de pourvoi: 18-14.337
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Boullez, SCP Piwnica et Molinié, SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat(s)





Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 septembre 2017), que, pour la construction d'une maison d'habitation, M. et Mme P... ont chargé M. I..., assuré auprès de la société l'AUXILIAIRE, du gros oeuvre, la société Atre design de l'installation de la cheminée et M. X... de la réalisation de la chape sur plancher électrique ; qu'une réception tacite est intervenue le 28 juin 2002 ; que, par acte du 7 juin 2007, les maîtres de l'ouvrage ont vendu la maison à Mme C... ; que, se plaignant de désordres, celle-ci a assigné en indemnisation M. et Mme P..., qui ont appelé en garantie les constructeurs et la société l'AUXILIAIRE ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Vu les articles 1792 et 1792-1, 2° du code civil ;

Attendu que, pour rejeter les demandes formées par Mme C... sur le fondement de la garantie décennale au titre de l'absence de ventilation et d'isolation thermique au niveau des combles, du défaut d'étanchéité à l'air des portes-fenêtres du salon et de la chambre et de l'insuffisance de chauffage, l'arrêt retient que, par une simple visite, Mme C... pouvait se convaincre de l'absence de grilles d'aération et de ventilation mécanique contrôlée, qu'il lui appartenait d'aérer la maison afin d'éviter une atmosphère confinée susceptible de générer des moisissures, ainsi que le préconisait le diagnostic de performance énergétique du 27 avril 2007, que ce diagnostic, établi avant la vente, faisait état de la qualité énergétique médiocre de la maison, l'absence d'isolation des combles et le défaut d'étanchéité des deux portes-fenêtres ne modifiant pas ce diagnostic de piètres performances énergétiques, et que, le manque de performance de l'installation de chauffage ayant été porté à la connaissance de Mme C..., il s'agit d'un vice apparent ne rendant pas l'immeuble impropre à sa destination, l'acquéreur ayant acheté le bien en connaissance de cause ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le caractère apparent ou caché des désordres s'apprécie en la personne du maître de l'ouvrage au jour de la réception, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident de la société l'AUXILIAIRE et le moyen unique du pourvoi incident de M. I..., réunis :

Vu l'article 2241 du code civil ;

Attendu que, pour déclarer recevables les demandes formées contre la société l'AUXILIAIRE et M. I... sur le fondement de la garantie décennale, l'arrêt retient que l'assignation en référé et l'ordonnance de référé du 2 juin 2010 désignant un expert a interrompu le délai décennal ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'assignation en référé, qui n'était pas dirigée contre M. I... ni la société l'AUXILIAIRE, n'avait pas pu interrompre le délai à leur égard, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS :

Met hors de cause la société Atre design ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare recevables les demandes formées contre M. I... et la société l'AUXILIAIRE et en ce qu'il rejette les demandes formées contre M. et Mme P... sur le fondement de la garantie décennale au titre de l'absence de ventilation et d'isolation thermique au niveau des combles, du défaut d'étanchéité à l'air des portes-fenêtres du salon et de la chambre et de l'insuffisance de chauffage, l'arrêt rendu le 28 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. et Mme P... aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. et Mme P... à payer à Mme C... la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

mardi 11 juillet 2017

Le juge ne doit pas modifier l'objet du litige

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 29 juin 2017
N° de pourvoi: 16-17942
Non publié au bulletin Cassation

M. Chauvin (président), président
Me Le Prado, avocat(s)




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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 2016), que, par acte sous seing privé du 8 mars 2011, la société Mimex a vendu à la société civile immobilière Océane 44 (la SCI) un immeuble, la vente devant être réitérée avant le 15 mai 2011 ; que, la réitération n'ayant pas eu lieu, la SCI a assigné la société Mimex aux fins de « voir constater la résolution de la vente » sur le fondement des articles 1134, 1156, 1184 et 1226 du code civil et condamner la venderesse au paiement de certaines sommes au titre de la clause pénale et de dommages-intérêts ;

Attendu que, pour constater la résolution de la vente et rejeter les demandes formées du chef de la clause pénale ou à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que tant la société Mimex immobilier que la SCI Océane demandent à la cour de « constater la résolution » de la vente litigieuse et non pas de prononcer la résolution dudit contrat, alors même que cette demande de constatation n'est pas articulée sur l'acquisition d'une clause résolutoire, aucune clause résolutoire n'étant stipulée dans l'acte litigieux, qu'il se déduit de cette formulation des demandes de la société Mimex immobilier et de la SCI Océane leur volonté commune de « résoudre la vente litigieuse » et qu'elles sont par conséquent mal fondées à réclamer des dommages et intérêts ou le bénéfice de la clause pénale, stipulée dans l'acte à l'encontre de leur cocontractant au motif que ce dernier aurait refusé de réitérer la vente litigieuse ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la SCI fondait sa demande sur les dispositions de l'article 1184 du code civil applicable à la cause et que chacune des parties invoquait la responsabilité de l'autre pour expliquer l'absence de réitération de la promesse de vente et justifier une demande de dommages-intérêts ou d'application de la clause pénale, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;




PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Mimex immobilier aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mimex immobilier à payer la somme de 2 500 euros à la SCI Océane 44 ;

vendredi 13 janvier 2017

Référé-provision - solde marché - situations visées par le maître d'oeuvre

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 5 janvier 2017
N° de pourvoi: 15-25.508 15-25.509
Non publié au bulletin Cassation

M. Chauvin (président), président
SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Joint les pourvois n° M 15-25.508 et N 15-25.509 ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 26 mai 2015), statuant en référé, que la société civile immobilière Petit Bourg cannelle (la SCI) a entrepris une opération de construction d'immeubles ; que les menuiseries ont été fournies par la société Socomi, la pose étant réalisée par la société ITM ; que la société Socomi a assigné la SCI en paiement d'une provision ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que la société Socomi réclame le paiement du solde du marché, que les pièces fournies aux débats démontrent que des travaux n'ont pas été exécutés ou n'ont pas été achevés et que les délais n'ont pas été respectés, que les parties se rejettent mutuellement la responsabilité de la mauvaise réalisation du chantier et que l'ensemble de ces éléments constituent des contestations sérieuses ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société Socomi ne réclamait pas le solde du marché, mais le paiement de situations provisoires visées par le maître d'oeuvre, en se prévalant du régime juridique de celles-ci, tel qu'il résulte de la norme NF P 03-001, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 mai 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;

Condamne la SCI Petit Bourg cannelle aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Petit Bourg cannelle et la condamne à payer à la société Socomi la somme de 3 000 euros ;  

mercredi 28 décembre 2016

Suspension du délai de péremption de l'instance


Notes :

- Bléry, D. 2017, p. 141, sur cass. civ. 2ème, n° 15-26.083 et 15-27.917 (2 arrêts publiés et rendus en formation de section). L'auteur y voit, avec raison, une nouvelle illustration des dangers de la procédure d'appel "Magendie" et pressent, pour l'une des espèces (celle où l'affaire n'avait pas reçu fixation), une nouvelle condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), pour violation du droit d’accès au juge.

 - Deharo, SJ G 2017, p. 15, sur cass. n° 15-26.083 et 15-27.917.
- Cholet, SJ G 2017, p. 186.
Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du vendredi 16 décembre 2016
N° de pourvoi: 15-26.083
Publié au bulletin Cassation

Mme Flise (président), président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)


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REPUBLIQUE FRANCAISE

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Vu les articles 2 et 386 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Levo Ag Wohlen (la société Levo) a interjeté appel d'un jugement rendu dans un litige l'opposant à la société Invacare Poirier (la société Invacare) ; que les parties ayant conclu, le conseiller de la mise en état les a avisées le 22 février 2013 de ce qu'il proposait de retenir une clôture de l'instruction au 19 février 2015 et l'audience de plaidoiries au 16 avril 2015, ces dates devenant impératives passé un délai de quinze jours ; que, le 19 février 2015, la société Invacare a soulevé la péremption de l'instance ;

Attendu que, pour confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant constaté la péremption de l'instance au 20 décembre 2014, l'arrêt retient que l'avis de fixation, adressé le 22 février 2013, a fixé la clôture de l'instruction de l'affaire au 19 février 2015 pour être plaidée le 16 avril 2015 de sorte qu'avant la clôture rien n'indique qu'elle était en l'état d'être jugée, cette information donnée sur la date de la clôture de l'instance ne dispensant pas les parties d'accomplir les diligences propres à éviter la péremption d'instance ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'à compter de la fixation, le 22 février 2013, de la date des débats, les parties n'avaient plus à accomplir de diligences de nature à faire progresser l'instance de sorte que le délai de péremption se trouvait suspendu, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y a ait lieu de statuer sur les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Invacare Poirier aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Levo Ag Wohlen la somme de 3 000 euros ;

jeudi 19 novembre 2015

Effet interruptif de prescription d'un acte de procédure affecté d'un vice de fond

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 8 juillet 2015
N° de pourvoi: 14-15.192
Publié au bulletin Rejet

M. Terrier (président), président
SCP Gadiou et Chevallier, SCP Spinosi et Sureau, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 février 2014),
que la société Agence Victor Hugo (la société), preneuse à bail d'un local commercial, a sollicité le renouvellement du bail, que les bailleresses, Mme Huguette X..., usufruitière et Mme Michèle X..., nue-propriétaire, ont accepté moyennant un nouveau loyer annuel ; que par mémoire préalable du 22 décembre 2010, Mme Huguette X... a sollicité la fixation du loyer hors plafonnement ; que par acte du 27 juin 2011, Mmes Huguette et Michèle X... ont assigné la société devant le juge des loyers commerciaux en fixation du loyer du bail renouvelé ; que la société a sollicité la nullité du mémoire préalable du 22 décembre 2010 et invoqué la prescription de l'action en fixation du loyer en résultant ;

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu qu'il résulte de l'article 33 du décret du 30 septembre 1953 réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux à loyer d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal et de l'article 2241 du code civil que le mémoire relatif à la fixation du prix du bail renouvelé, même affecté d'un vice de fond, a un effet interruptif de prescription ; qu'ayant constaté que l'irrégularité affectant le mémoire préalable du 22 décembre 2010 avait été couverte par l'assignation du 27 juin 2011 ainsi que par tous les actes de procédure suivants et avait disparu avant que le tribunal ne statue, la cour d'appel en exactement déduit que ce mémoire avait eu un effet interruptif de prescription et que l'action introduite par l'assignation du 27 juin 2011 n'était pas prescrite ;

D'où il résulte que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Agence Victor Hugo aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Agence Victor Hugo à payer la somme globale de 3 000 euros à Mmes Huguette et Michèle X... ; rejette les demandes de la société Agence Victor Hugo ;