jeudi 29 janvier 2015

1) Responsabilité décennale et dommage mineur; 2) Juge non tenu de changer fondement juridique des demandes

Voir note Lionel-Marie et Masucci, RTDI 2015-2, p. 35.

Remarques de FX Ajaccio :

Cet arrêt évoque, en réponse à la première branche du moyen, la destination convenue.


Mais, la Cour de cassation est restée ferme : pas d'application de la garantie décennale en l'absence de dommages graves affectant l'ouvrage, même en présence de performances convenues ; en l'espèce, il s'agissait d’entrepôts frigorifiques dans les isolants étaient viciés; le maitre de l'ouvrage prétendait que les performances n'étaient pas atteintes.

Un arrêt donc à mettre au débat sur la garantie de la performance....

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mardi 20 janvier 2015
N° de pourvoi: 13-26.085
Non publié au bulletin Rejet

M. Terrier (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Marc Lévis, SCP Odent et Poulet, SCP Spinosi et Sureau, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :







Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 6 juin 2013), que la société coopérative agricole Union fermière morbihannaise (la société UFM) assurée selon une police dommages-ouvrage auprès de la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de Loire (CRAMA), a fait édifier un bâtiment à usage de stockage et d'expédition de légumes surgelés ; que la société Noriso, assurée auprès de la société AGF aux droits de laquelle vient la société Allianz IARD, chargée du lot « parois isothermes » a fourni et posé les panneaux isolants fabriqués par la société Les Panneaux frigorifiques français (PFF) aux droits de laquelle se trouve la société Arcelormittal construction France (la société Arcelormittal) assurée auprès de la société Axa Corporate solutions (la société Axa Corporate) ; que les composants de la mousse incluse dans les panneaux ont été fournis par la société Elastogran, aux droits de laquelle se trouve la société BASF polyuréthannes France (la société BASF) assurée par la société HDI-Gerling Industrie Versicherung (la société HDI-Gerling) ; qu'après réception, la société UFM a constaté des désordres et a assigné en indemnisation la CRAMA qui a appelé en garantie la société Noriso, la société Arcelormittal ainsi que leurs assureurs respectifs ; que la société Arcelormittal a attrait en cause la société Elastogran et son assureur ;

Attendu que la société UFM fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que la non-conformité d'un ouvrage à la destination convenue entre les parties constitue un désordre de nature décennale ; qu'en l'espèce, en refusant d'engager la responsabilité du constructeur après avoir pourtant constaté l'existence de désordres affectant l'ouvrage commandé à la société Noriso révélant une non-conformité aux spécifications contractuelles, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a par là-même violé les articles 1792 et 1792-2 du code civil ;

2°/ que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé ; qu'en l'espèce la société UFM, dans le cadre de son action dirigée à l'encontre de la société Arcelormittal invoquait l'existence d'un vice affectant l'ouvrage et fondait sa demande sur la responsabilité du constructeur et la responsabilité contractuelle ; que la CRAMA, assureur de la société UFM, demandait la mise en jeu de la garantie des vices cachés de la société Arcelormittal ; que la société Arcelormittal prétendait que la garantie des vices cachés ne pouvait pas être mise en oeuvre ; qu'en retenant, pour rejeter l'action exercée par la société UFM à l'encontre de la société Arcelormittal, que la garantie des vices cachés, dont elle a reconnu l'existence, n'avait pas été invoquée par la société UFM, quand cette garantie avait pourtant été visée expressément par les parties au litige, la cour d'appel a manifestement violé tant l'article 12 du code de procédure civile que les articles 4 et 5 du même code ;

3°/ que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé ; qu'en l'espèce la société UFM, dans le cadre de son action dirigée à l'encontre de la société Elastogran invoquait l'existence d'un vice affectant l'ouvrage et fondait sa demande sur la responsabilité du constructeur et la responsabilité contractuelle ; que la CRAMA, assureur de la société UFM, demandait la mise en jeu de la responsabilité délictuelle de la société Elastogran ; qu'en retenant, pour rejeter l'action exercée par la société UFM à l'encontre de la société Elastogran, que la société UFM aurait dû agir sur le fondement de l'article 1382 du code civil et devait donc être déboutée pour ne pas l'avoir fait, quand la responsabilité délictuelle de la société Elastogran avait pourtant été envisagée expressément par les parties au litige, la cour d'appel a violé, une fois encore, tant l'article 12 du code de procédure civile que les articles 4 et 5 du même code ;

Mais attendu qu'ayant retenu, d'une part, que les désordres ne portaient pas atteinte à la solidité de l'ouvrage et ne le rendaient pas impropre à la destination convenue et d'autre part, que la société UFM n'invoquait ni la garantie des vices cachés contre la société Arcelormittal, ni la responsabilité délictuelle de la société Elastogran, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de changer le fondement juridique des demandes du maître d'ouvrage, en a justement déduit que celles-ci, fondées sur les articles 1792 et suivants et 1147 du code civil, ne pouvaient être accueillies ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Union fermière morbihannaise aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


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