mardi 11 juin 2019

Maître d'oeuvre : portée de la clause limitative de responsabilité et obligation in solidum

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 23 mai 2019
N° de pourvoi: 18-12.262
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
SARL Cabinet Briard, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Boulloche, SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Delvolvé et Trichet, avocat(s)





Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 14 septembre 2017), que la société civile immobilière [...] (la SCI) a entrepris la réalisation de deux bâtiments, vendus en l'état futur d'achèvement et placés sous le régime de la copropriété ; que sont intervenues à l'acte de construire la société K... et X..., chargée d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, la société Bureau VERITAS construction (la société Bureau VERITAS), contrôleur technique, la société Satrelec, assurée en responsabilité décennale auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) pour le lot électricité/VMC, la société SAE, aux droits de laquelle se trouve la société Eiffage construction Nord Pas-de-Calais (la société Eiffage), pour le lot gros oeuvre et la société Nord asphalte pour lot étanchéité ; que, certaines réserves à la réception n'ayant pas été levées, le syndicat des copropriétaires des [...] (le syndicat des copropriétaires) a assigné la SCI et son assureur, la SMA, en indemnisation ; que la SCI a appelé en garantie les sociétés K... et X..., Axa et Bureau VERITAS, puis les sociétés Nord asphalte et Eiffage ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident de la société K... et X..., ci-après annexé :

Attendu que la société K... et X... fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec d'autres parties, à garantir la SCI et à payer certaines sommes ;

Mais attendu qu'ayant retenu, par une interprétation souveraine de l'article 11.8 du contrat de maîtrise d'oeuvre que son imprécision rendait nécessaire, que les parties ayant concouru à la survenance des mêmes dommages, étaient tenues in solidum à garantir la SCI, les stipulations du contrat excluant seulement que le maître d'oeuvre fût tenu pour responsable des fautes commises par les autres intervenants et le partage des responsabilités lui permettant de n'assumer que sa part de responsabilité, la cour d'appel a pu en déduire que la société K... et X... devait être condamnée, in solidum avec d'autres intervenants, à garantir la SCI et à payer diverses sommes ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi incident de la société K... et X... et les trois premiers moyens du pourvoi incident du syndicat des copropriétaires, réunis, ci-après annexés :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi de la société Nord asphalte et le moyen unique du pourvoi incident de la société Bureau VERITAS, réunis :

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation ;

Attendu que, pour condamner, in solidum, la société Nord asphalte et la société Bureau VERITAS à garantir la SCI pour les désordres affectant le bardage en zinc, l'arrêt retient que la première a commis une faute contractuelle en ne posant pas un matériau conforme et que la seconde a manqué à ses obligations contractuelles en n'alertant pas le maître d'ouvrage sur les non-conformités ou inexécution révélées au cours du chantier et donc avant la réception des ouvrages ;

Qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme il le lui était demandé, si des réserves avaient été émises par le maître d'ouvrage à la réception sur le désordre esthétique affectant le bardage en zinc et si la mission du contrôleur technique n'excluait pas toute intervention sur ce point, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le troisième moyen du pourvoi de la société Nord asphalte, ci-après annexé :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation de la disposition condamnant la société Nord asphalte pour le désordre affectant le bardage en zinc entraîne la cassation, par voie de conséquence, des dispositions relatives à l'indemnisation du trouble de jouissance du syndicat des copropriétaires qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;
Et sur le quatrième moyen du pourvoi incident du syndicat des copropriétaires, ci-après annexé :

Vu l'article 2247 du code civil ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires pour le claquement causé par le bloque-porte de la cage d'escalier 100, l'arrêt retient que ce défaut a été inclus par les premiers juges dans les désordres entraînant des nuisances sonores, sans que les parties remettent en cause ce point, qu'il relève de la garantie prévue par l'article L. 111-11 du code de la construction et de l'habitation et que la demande à ce titre est prescrite ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le syndicat des copropriétaires n'invoquait pas un défaut d'isolation phonique de l'immeuble mais le fonctionnement défectueux et la non-conformité d'un élément d'équipement et qu'aucune partie n'opposait la prescription à sa demande, la cour d'appel, qui a soulevé d'office une fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen du pourvoi principal ;

Met hors de cause les sociétés Axa France IARD et Eiffage construction Nord Pas-de-Calais ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Nord asphalte, la société K... et X... et la société Bureau VERITAS construction, in solidum, à garantir la SCI [...] pour les désordres affectant le bardage en zinc et le trouble de jouissance du syndicat des copropriétaires, à payer les frais irrépétibles, en ce qu'il partage les responsabilités entre les coobligés selon le pourcentage retenu et en ce qu'il déclare irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires pour le mauvais fonctionnement du bloque-porte de la cage n° 100, l'arrêt rendu le 14 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne la SCI [...] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.