vendredi 8 octobre 2021

Intérêt à agir

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 septembre 2021




Cassation partielle et Cassation


M. MAUNAND, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 679 F-D

Pourvoi n° B 20-19.539




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 SEPTEMBRE 2021

1°/ Mme [L] [Z],

2°/ M. [E] [M],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° B 20-19.539 contre deux arrêts rendus les 11 février 2020 et 8 juin 2020 par la cour d'appel d'Orléans (chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Bacciocchi, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée société Barraco, exerçant sous le nom commercial Entreprise Barraco,

2°/ à M. [P] [V], domicilié [Adresse 1], pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Bacciocchi, société à responsabilité limitée, anciennement dénommée Barraco,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de Mme [L] et de M. [M], après débats en l'audience publique du 6 juillet 2021 où étaient présents M. Maunand, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, Mme Farrenq-Nési, conseiller, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Orléans, 11 février et 8 juin 2020), le 3 août 2012, Mme [L] et M. [M] (les maîtres de l'ouvrage) ont conclu un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture du plan avec la société Barraco, devenue la société Bacciocchi (le constructeur), aujourd'hui en liquidation judiciaire.

2. Les maîtres de l'ouvrage, ayant constaté un défaut d'implantation altimétrique de la construction, ont mis la société Barraco en demeure d'y remédier et ont réceptionné l'ouvrage avec réserve.

3. Le constructeur a assigné en paiement les maîtres de l'ouvrage, qui ont assigné la société Barraco en indemnisation de leurs préjudices. Les deux instances ont été jointes.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Les maîtres de l'ouvrage font grief à l'arrêt du 11 février 2020 de les condamner in solidum à payer à M. [V], liquidateur judiciaire de la société Bacciocchi, la somme de 11 750,88 euros au titre du solde du marché, alors « que le juge doit se prononcer seulement sur ce qui est demandé ; qu'en condamnant les maîtres de l'ouvrage à payer à Me [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Bacciocchi, la somme de 11 750,88 euros au titre du solde du marché, tandis que le liquidateur judiciaire, désigné en cours d'instance, n'avait pas constitué avocat ni a fortiori sollicité une quelconque condamnation des maîtres de l'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 5 du code de procédure civile :

5. Aux termes de ce texte, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

6. Pour condamner les maîtres de l'ouvrage, in solidum, à payer à M. [V], liquidateur judiciaire de la société Bacciocchi, la somme de 11 750,88 euros au titre du solde du marché, l'arrêt retient qu'ils étaient débiteurs de cette somme envers la société Bacciocchi.

7. En statuant ainsi, alors que M. [V], ès qualités, n'avait pas constitué avocat et n'avait présenté aucune demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. Les maîtres de l'ouvrage font grief à l'arrêt du 8 juin 2020 de déclarer irrecevable leur requête en ultra petita, alors « que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sans que l'intérêt à agir ne soit subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action ; qu'en déclarant les consorts [L]-[M] irrecevables en leur requête en ultra petita faute d'intérêt à agir, du fait qu'elle se serait prononcée, à leur demande, sur la recevabilité des demandes de la société Bacchiocchi, cependant que les consorts [L]-[M] avaient intérêt à faire déclarer que la cour d'appel les avait, au prix d'un ultra petita, condamnés à payer à Me [V], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Bacciocchi, la somme de 11 750,88 euros au titre du solde du marché, peu important le point de savoir si la requête était bien-fondée, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 31 du code de procédure civile :

9. Aux termes de ce texte, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

10. Pour déclarer irrecevable la requête en ultra petita formée par les maîtres de l'ouvrage, l'arrêt retient que les requérants n'ont pas d'intérêt à agir dès lors que la cour d'appel qui a statué au fond s'est prononcée, à leur demande, sur la recevabilité des demandes de la société Bacchiocchi, appelante principale.

11. En statuant ainsi, alors que les maîtres de l'ouvrage avaient intérêt à faire juger que leur condamnation à payer à M. [V], liquidateur judiciaire de la société Bacciocchi, la somme de 11 750,88 euros au titre du solde du marché, avait été prononcée ultra petita, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du premier moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum Mme [L] et M. [M] à payer à M. [V], liquidateur judiciaire de la société Bacciocchi, la somme de 11 750,88 euros au titre du solde du marché, l'arrêt rendu le 11 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel de la cour d'appel d'Orléans ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel de la cour d'appel d'Orléans ;

Remet, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt du 11 février 2020 et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans autrement composée ;

Condamne M. [V], liquidateur judiciaire de la société Bacciocchi aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [L] et M. [M] ;

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.