mardi 7 décembre 2021

Lorsqu'il s'est assuré de la réalité du domicile du destinataire de l'acte et que celui-ci est absent, l'huissier de justice n'est pas tenu de tenter une signification à personne sur son lieu de travail, et peut remettre l'acte à domicile

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 2 décembre 2021




Rejet


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1123 F-B

Pourvoi n° Q 19-24.170




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 DÉCEMBRE 2021

M. [F] [S], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 19-24.170 contre l'arrêt rendu le 19 septembre 2019 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société AMD + gestion, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Nord de France, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de M. [S], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Nord de France, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société AMD + gestion, et après débats en l'audience publique du 13 octobre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 septembre 2019), le 13 avril 2018, M. [S] a relevé appel du jugement d'un tribunal de commerce du 6 février 2018 le condamnant notamment à payer à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Nord de France (la banque) diverses sommes, en sa qualité de caution de la société [S] Trading Company, en liquidation judiciaire.

2. La banque a conclu à l'irrecevabilité de l'appel comme étant tardif, le jugement, ayant en premier lieu, été signifié à M. [S] à domicile le 28 février 2018.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

4. M. [S] fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 24 janvier 2019 en ce qu'elle le déboute de sa demande tendant à prononcer la nullité de l'acte de signification du jugement rendu par le tribunal de commerce le 6 février 2018 et déclare l'appel formé par lui le 13 avril 2018 irrecevable alors :

« 1°/ que ce n'est que si la signification à personne s'avère impossible que l'acte peut être délivré à domicile ; qu'en conséquence, l'huissier qui a connaissance de l'adresse du lieu de travail de celui auquel l'acte doit être signifié doit procéder à cette signification sur le lieu de travail de l'intéressé lorsqu'il est absent à son domicile et ne peut se contenter de le remettre à la personne présente ; qu'en l'espèce, M. [S] faisait valoir que son lieu de travail était connu de la CRCA du Nord lorsque l'huissier a procédé à la signification du jugement ; qu'en jugeant que l'huissier n'était pas tenu de signifier le jugement 6 février 2018 au lieu de travail de M. [S] dès lors qu'il était absent de son domicile, que son épouse avait confirmé qu'il s'agissait de son domicile et qu'elle avait accepté de recevoir l'acte, la cour d'appel a violé les articles 654 et 655 du code de procédure civile ;

2°/ que ce n'est que si la signification à personne s'avère impossible que l'acte peut être délivré à domicile ; qu'en conséquence, l'huissier qui a connaissance du lieu de travail de celui auquel l'acte doit être signifié doit procéder à cette signification sur le lieu de travail de l'intéressé lorsqu'il est absent à son domicile et ne peut se contenter de le remettre à la personne présente ; qu'en l'espèce, M. [S] faisait valoir que son lieu de travail était connu de la CRCA du Nord lorsque l'huissier a procédé à la signification du jugement, M. [S] ayant communiqué son contrat de travail dans le cadre de la première instance ; qu'en jugeant régulière la signification faite au domicile de M. [S] entre les mains de son épouse sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 6) si l'huissier n'était pas en mesure de signifier l'acte à personne, au lieu de travail de M. [S], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 654 et 655 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article 654 du code de procédure civile, la signification doit être faite à personne.

6. Selon l'article 655 de ce code, si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

7. Aux termes de l'article 689 du même code, les notifications sont faites au lieu où demeure le destinataire s'il s'agit d'une personne physique. Toutefois, lorsqu'elle est faite à personne, la notification est valable quel que soit le lieu où elle est délivrée, y compris le lieu de travail.

8. Il résulte de ces textes que lorsqu'il s'est assuré de la réalité du domicile du destinataire de l'acte et que celui-ci est absent, l'huissier de justice n'est pas tenu de tenter une signification à personne sur son lieu de travail, et peut remettre l'acte à domicile.

9. C'est, dès lors, à bon droit que la cour d'appel, après avoir constaté que l'huissier de justice avait mentionné la confirmation de l'adresse par la personne présente au domicile et l'absence du destinataire à son domicile, a retenu qu'il en résultait des circonstances caractérisant l'impossibilité d'une remise à personne, et que l'huissier de justice pouvait recourir à la signification à domicile, quand bien même l'absence du destinataire serait momentanée, sans qu'il soit nécessaire pour lui de se présenter à nouveau ou de procéder à une signification sur le lieu de travail.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [S] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [S] et le condamne à payer à la société AMD+gestion la somme de 2 000 euros et à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Nord de France la somme de 2 000 euros ;

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