mardi 25 novembre 2025

Le vendeur a l'obligation de délivrer une chose conforme à celle promise

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SA



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 13 novembre 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, présidente



Arrêt n° 525 F-D

Pourvoi n° V 23-18.464




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 NOVEMBRE 2025


1°/ M. [S] [J],

2°/ Mme [K] [G], épouse [J],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° V 23-18.464 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige les opposant à M. [X] [O], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pety, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [J], de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [O], après débats en l'audience publique du 23 septembre 2025 où étaient présents Mme Teiller, présidente, M. Pety, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffière de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des présidente et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 mai 2023), par acte sous seing privé du 24 juin 2016, M. [O] (le vendeur) a consenti à M. et Mme [J] (les acquéreurs) une promesse synallagmatique de vente d'une parcelle provenant de la division d'un terrain, au prix de 154 000 euros.

2. L'avant-contrat stipulait plusieurs conditions suspensives dont celle d'obtention par les acquéreurs d'un permis de construire purgé de tout recours, la réitération authentique de la vente étant fixée au 24 février 2017.

3. Les acquéreurs se sont vu refuser leurs deux demandes de permis de construire, en dernier lieu pour absence de permission de voirie relative aux aménagements à réaliser au regard de la dangerosité de l'accès des parcelles issues de la division à la voie publique.

4. Les acquéreurs ont notifié au vendeur leur désistement de tout projet d'acquisition et l'ont assigné en remboursement de divers frais et en paiement de la clause pénale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de les condamner à payer au vendeur une certaine somme à titre de clause pénale, de dire acquis à ce dernier le dépôt de garantie et d'ordonner au notaire de le lui remettre, alors « que celui qui a, par ses propres manquements, empêché la réalisation d'une vente, ne peut invoquer de mauvaise foi la défaillance d'une condition imputable à son cocontractant ; qu'en jugeant que l'échec de la vente était dû au désistement des époux [J] sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si cette attitude n'était pas justifiée par le manquement de M. [O] à son obligation de délivrer une parcelle préalablement divisée et constructible et à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1603 du code civil. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, 1603 et 1604 du code civil :

6. Selon le premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.

7. Il résulte des deux derniers que le vendeur a l'obligation de délivrer une chose conforme à celle promise.

8. Pour imputer l'échec de la vente aux acquéreurs, l'arrêt retient que, si le rejet de la seconde demande de permis de construire est motivé par un accès des parcelles à la voie publique ne garantissant pas suffisamment la visibilité et la sécurité des usagers, aucune stipulation de la promesse de vente ne met à la charge du vendeur une quelconque obligation à ce titre et que les acquéreurs, assistés d'un architecte pour le dépôt de leur demande de permis de construire, ont obtenu un avis favorable sur sa proposition d'aménagement sous réserve d'un recul de cinq mètres par rapport au bord de la chaussée, ce qui leur permettait de réitérer dans les temps et avec un succès assuré une nouvelle demande de permis de construire.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, la décision de non-opposition à la déclaration préalable du vendeur aux fins de division de son terrain, dont était issue la parcelle litigieuse, étant intervenue sous réserve de la présentation d'une demande de permission de voirie permettant l'accès des deux parcelles à la route départementale et garantissant la sécurité des usagers, le rejet de la seconde demande de permis de construire présentée par les acquéreurs ne résultait pas d'un manquement du vendeur, qui avait mis en vente la parcelle en cause sans avoir préalablement obtenu une telle permission, à son obligation d'exécuter le contrat de bonne foi ou à son obligation de délivrance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt infirmant les dispositions du jugement déféré à l'exception du rejet des demandes indemnitaires du vendeur entraîne la cassation des chefs de dispositif rejetant la demande de remboursement de frais des acquéreurs, et statuant sur les dépens et les frais irrépétibles, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement rejetant les demandes indemnitaires de M. [O], l'arrêt rendu le 16 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [O] et le condamne à payer à M. et Mme [J] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le treize novembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300525

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