lundi 30 décembre 2019

Portée d'un rapport d'expertise non judiciaire réalisé à la demande de l'assureur pour retenir l'existence d'une fausse déclaration sur la cause du sinistre

Note Schulz, RGDA 2020-2, p. 23.
Note Waltz-Teracol, GP 2020, n° 9, p. 56.

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 12 décembre 2019
N° de pourvoi: 18-12.687
Non publié au bulletin Cassation
M. Pireyre (président), président
Me Le Prado, SCP Gatineau et Fattaccini, avocat(s)




Texte intégral


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches, qui est recevable comme étant né de la décision attaquée :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. S... a souscrit auprès de la société GMF assurances (l'assureur) un contrat d'assurance automobile selon la formule « tous risques conforts » incluant une garantie des dommages accidentels ; que M. S... a effectué une déclaration de sinistre en exposant que le 23 août 2013 son véhicule avait heurté un veau divaguant sur une route départementale de Haute-Corse, qu'il avait tenté de se garer quelque mètres plus loin sur le bas-côté pour constater les dégâts, que la voiture, dont les freins étaient défectueux, avait commencé à basculer dans le vide et qu'il en était sorti par le toit décapotable avant qu'elle ne verse dans le ravin en contrebas ; que l'assureur ayant dénié sa garantie, M. S... l'a assigné en exécution du contrat ;

Attendu que pour dire que M. S... a fait une fausse déclaration sur la cause du sinistre et le débouter de ses demandes, l'arrêt retient que l'attestation d'un gendarme, intervenu sur les lieux, établit que le véhicule est bien tombé dans un ravin ; que les certificats médicaux établissent que M. S... a été blessé ; qu'il est également démontré que, deux jours plus tard, un veau mort a été ramassé dans la zone de l'accident ; que, cependant, le rapport d'expertise de l'expert de l'assureur indique que le récit de la manoeuvre du véhicule sur le terre-plein ainsi que l'angle de la chute ne sont pas vraisemblables en considération du modèle du véhicule et de la configuration des lieux ; que le rapport de cet expert n'est contredit par aucune étude technique ; qu'il s'y ajoute les faits relevés par l'assureur, qu'en cas de défaillance du frein à pied, le frein à main aurait pu suffire à arrêter le véhicule, et que le conducteur ne pouvait pas avoir le temps matériel d'ouvrir la capote du toit et de s'éjecter du véhicule au cours de la chute ; que M. S... ne donne à toutes ces incohérences aucune explication concrète propre à justifier l'exactitude de ses déclarations à son assureur ; que celui-ci est par conséquent bien fondé à considérer que l'assuré a fait une fausse déclaration le privant de la garantie en application de l'article 5.1.1 du contrat liant les parties ;

Qu'en statuant ainsi, en se fondant exclusivement sur un rapport d'expertise non judiciaire réalisé à la demande de l'assureur pour retenir l'existence d'une fausse déclaration sur la cause du sinistre, sans constater que ce rapport était corroboré par d'autres éléments de preuve, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la société GMF assurances aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société GMF assurances ; la condamne à payer à M. S... la somme de 3 000 euros ;

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