lundi 8 août 2022

Absence d'indivisibilité et caducité partielle de la déclaration d'appel

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 juin 2022




Cassation partielle sans renvoi


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 627 F-B

Pourvoi n° D 19-11.671







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUIN 2022


1°/ la société Pronal, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ la société Strucflex, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3] (Tunisie),

ont formé le pourvoi n° D 19-11.671 contre l'arrêt rendu le 27 février 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige les opposant à la société Simtech, société à responsabilité limitée de droit belge, dont le siège est [Adresse 1] (Belgique), agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, M. [D] [O], défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat des sociétés Pronal et Strucflex, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Simtech, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 19 avril 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Kermina, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 février 2018), la société Simtech, domiciliée en Belgique, a interjeté appel le 25 février 2015 à l'encontre d'un jugement rendu dans un litige l'opposant aux sociétés Pronal et Strucflex.

2. La société Simtech a déposé et notifié à la société Pronal ses premières conclusions d'appel le 17 juillet 2015.

3. L'affaire a été radiée le 17 juillet 2015 en raison de l'inexécution du jugement par l'appelante.

4. La société Strucflex a constitué avocat le 10 août 2015.

5. L'affaire ayant été rétablie au rôle le 19 avril 2017, la société Simtech a notifié ses conclusions d'appel à la société Pronal et à la société Strucflex le 21 avril 2017.

6. Les sociétés intimées ont déféré devant la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant rejeté leur incident de caducité de la déclaration d'appel fondé sur l'article 908 du code de procédure civile, tant à l'égard de la société Pronal que de la société Strucflex.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. Les sociétés Pronal et Strucflex font grief à l'arrêt de rejeter le déféré et de dire que l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 12 septembre 2017 sortira son plein et entier effet, alors « que la radiation prononcée sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile n'emporte ni suspension ni interruption du délai imparti à l'appelant par les articles 908 et 911-2 du code de procédure civile ; qu'en jugeant que la radiation prononcée le 17 juillet 2015 avait eu pour effet d'interrompre ce délai, la cour d'appel a violé ces dispositions. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 377, 526, 908 et 911-2 du code de procédure civile, ces trois derniers textes dans leur rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 :

8. Il résulte de ces textes que la radiation de l'instance d'appel, fût-ce pour inexécution du jugement frappé d'appel, n'entraîne pas la suspension du délai imparti à l'appelant pour conclure.

9. Pour rejeter l'incident de caducité de la déclaration d'appel, l'arrêt retient qu'en l'état du droit antérieur à l'entrée en vigueur, le 1er septembre 2017, du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, la radiation de l'affaire pour inexécution du jugement, en application de l'article 377 du code de procédure civile et en l'absence de texte contraire, a entraîné la suspension de l'instance et des délais prévus aux articles 908 et 911-2 du code de procédure civile, de sorte que l'instance, suspendue le 17 juillet 2015 du fait de la radiation prononcée sur le fondement de l'article 526 du même code, a repris son cours le 19 avril 2017.

10. L'arrêt en déduit que la notification de ses conclusions par la société Simtech aux sociétés Pronal et Strucflex le 21 avril 2017 est intervenue avant l'expiration du délai de cinq mois résultant des articles 908 et 911-2, qui avait couru du 25 février 2015 au 17 juillet 2015, et qui a recommencé à courir à compter du 19 avril 2017.

11. En statuant ainsi, alors que la radiation de l'instance d'appel prononcée le 17 juillet 2015 n'avait pas pour effet de suspendre le délai pour conclure imparti à la société Simtech, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

12. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

14. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 8 et 11 que le délai pour conclure imparti à la société Simtech, non suspendu par la radiation de l'instance, qui courait à compter du 25 février 2015, expirait, à l'égard de la société Pronal, le 25 juillet 2015, et, à l'égard de la société Strucflex, alors non constituée, le 25 août 2015. Les conclusions ont, par conséquent, été déposées et notifiées dans le délai requis, le 17 juillet 2015, à l'égard de la société Pronal, tandis qu'à l'égard de la société Strucflex, qui a reçu notification des conclusions de l'appelante postérieurement au 25 août 2015, la caducité de la déclaration d'appel était encourue.

15. En l'absence d'indivisibilité des condamnations au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive prononcées à l'encontre de la société Pronal, d'une part, et de la société Strucflex, d'autre part, la caducité de la déclaration d'appel, en tant que formée contre la société Strucflex, n'atteint pas la déclaration d'appel en tant que formée contre la société Pronal.

16. Il y a, dès lors, lieu de prononcer la caducité de la déclaration d'appel du 25 février 2015, en tant seulement qu'elle est dirigée contre la société Strucflex.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'incident de caducité de la déclaration d'appel en tant que dirigée contre la société Strucflex, l'arrêt rendu le 27 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

INFIRME partiellement l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 12 septembre 2017 en ce qu'elle a rejeté l'incident de caducité de la déclaration d'appel de la société Strucflex ;

Statuant à nouveau :

PRONONCE la caducité de la déclaration d'appel du 25 février 2015 en tant que dirigée contre la société Strucflex.

Condamne la société Simtech aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Paris ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes au titre de la procédure devant la cour d'appel de Paris, et rejette la demande formée par la société Simtech et la condamne à payer à la société Pronal et à la société Strucflex la somme globale de 3 000 euros, au titre de la procédure suivie devant la Cour de cassation ;

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