lundi 8 août 2022

En statuant par simple affirmation, sans analyser, fût-ce sommairement, ni même mentionner les éléments de preuve sur lesquels elle fondait sa décision, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile :

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 juillet 2022




Cassation partielle


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 605 F-D

Pourvoi n° Y 21-11.329




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 JUILLET 2022

M. [N] [U], domicilié chez Mme [L] [S], [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 21-11.329 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2020 par la cour d'appel de Bordeaux (3e chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [R] [X], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [U], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [X], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 juin 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 30 novembre 2020), un jugement du 28 juillet 2009 a prononcé le divorce de M. [U] et de Mme [X], mariés sans contrat en 1978.

2. Des difficultés sont survenues au cours des opérations de liquidation et de partage de leurs intérêts patrimoniaux.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens et sur le quatrième moyen, en ce qu'il est dirigé contre le chef de dispositif de l'arrêt ayant dit que le complément retraite union mutualiste était un bien propre de M. [U], ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premier, deuxième et troisième moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation, et sur le quatrième moyen, en ce qu'il est dirigé contre le chef de dispositif de l'arrêt ayant dit que le complément retraite Union mutualiste était un bien propre de M. [U], qui est irrecevable.

Mais sur le quatrième moyen, pris en sa première branche, en ce qu'il est dirigé contre les chefs de dispositif ayant dit que la communauté détenait, à l'encontre de M. [U], une créance devant être fixée à la somme de 20 163,63 euros, à défaut pour lui de justifier au notaire liquidateur du montant des cotisations qu'il a réglées avant le mariage

Enoncé du moyen

4. M. [U] fait grief à l'arrêt de dire que la communauté détient à son encontre une créance équivalente aux cotisations que celle-ci a réglées pour son compte de 1978 à 2003 et de dire qu'à défaut pour lui de produire au notaire liquidateur les justificatifs des cotisations dont il s'est acquitté pour son complément retraite union mutualiste de 1974 à 1978, la créance détenue par la communauté à son encontre à ce titre sera fixée à la somme de 20 163,63 euros, alors « que les juges ne peuvent accueillir les demandes d'une partie par simple référence à des documents n'ayant fait l'objet d'aucune analyse sommaire ; qu'en s'étant bornée à énoncer, pour dire que la communauté détenait une créance à hauteur de 20 163,63 euros, qu'il ressortait des « pièces communiquées » par Mme [X] qu'à compter du mariage, les cotisations de ce complément retraite avaient été prélevées sur le compte joint des époux, sans préciser de quelles pièces il s'agissait et sans procéder à leur analyse, même sommaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

5. Tout jugement doit être motivé.

6. Pour dire, après avoir qualifié de propre de M. [U] le complément retraite Union mutualiste, que la communauté détient, à l'encontre de celui-ci, une « créance » équivalente aux cotisations que celle-ci a versées pour son compte de 1978 à 2003, l'arrêt retient qu'il ressort des pièces communiquées par Mme [X] qu'à compter du mariage les cotisations de ce complément retraite ont été prélevées sur le compte joint des époux.

7. En statuant ainsi, par simple affirmation, sans analyser, fût-ce sommairement, ni même mentionner les éléments de preuve sur lesquels elle fondait sa décision, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Et sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

8. M. [U] fait grief à l'arrêt de dire que le véhicule Volkswagen Polo doit être intégré à l'actif commun et qu'il lui appartiendra de justifier auprès du notaire liquidateur de sa valeur actualisée, alors « que le juge doit déterminer lui-même la valeur d'un bien litigieux ; qu'en renvoyant, sur la question du véhicule Volkswagen, M. [U] auprès du notaire sans trancher elle-même la question litigieuse, la cour d'appel a méconnu son office et violé l'article 4 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code civil :

9. Il résulte de ce texte que le juge, auquel il incombe de trancher lui-même les contestations soulevées par les parties, ne peut se dessaisir et déléguer ses pouvoirs à un notaire liquidateur.

10. Après avoir qualifié le véhicule litigieux de bien de communauté devant être intégré à l'actif commun, l'arrêt retient qu'il appartiendra à M. [U], qui a récupéré ledit véhicule en 2006, de justifier de sa valeur actualisée auprès du notaire liquidateur.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du quatrième moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la communauté détient une créance à l'encontre de M. [U] équivalente aux cotisations qu'elle a réglées pour son compte de 1978 à 2003, qu'à défaut pour M. [U] de produire au notaire liquidateur les justificatifs des cotisations dont il s'est acquitté pour son complément retraite union mutualiste de 1974 à 1978, la créance que détient la communauté à son encontre à ce titre sera fixée à la somme de 20 163,63 euros et qu'il appartiendra à M. [U] de justifier auprès du notaire liquidateur de la valeur actualisée du véhicule Volskwagen Polo, l'arrêt rendu le 30 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;

Condamne Mme [X] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

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