mardi 17 mai 2016

Coût d'objectif et responsabilité d'architecte

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 4 mai 2016
N° de pourvoi: 15-10.547
Non publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Boulloche, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Richard, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte à la société Habiter autrement du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Pierre Ollivier-Betom et la SMABTP ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 23 octobre 2014), que, le 11 avril 2005, la société Habiter autrement a conclu avec Mme X..., à laquelle a succédé la société Atelier X... architectes et associés (la société Atelier X...), et la société Pierre Ollivier-Betom un contrat de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation d'une opération de construction ; que, le 19 février 2008, la société Habiter autrement a résilié le contrat et a assigné Mme X..., la société Atelier X... et leur assureur, la société Mutuelle des architectes français (la MAF), en résolution du contrat et en dommages-intérêts ; que la société Pierre Ollivier-Betom et son assureur, la SMABTP, ont été attraits à l'instance ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que la société Habiter autrement fait grief à l'arrêt de prononcer uniquement la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre et de rejeter ses demandes en résolution judiciaire et en dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que la stipulation aux termes de laquelle le contrat est résilié de plein droit, dans des hypothèses déterminées, ne prive pas les parties de la faculté de demander la résolution judiciaire de la convention ; que la résolution provoque l'anéantissement rétroactif du contrat ; qu'en décidant que l'article II du contrat de maîtrise d'oeuvre n'envisageant qu'une résiliation et non une résolution, en cas de non-respect de ses obligations par l'architecte, il y avait lieu de prononcer la résiliation du contrat et de débouter la société Habiter autrement de sa demande de résolution, bien que cette dernière ait conservé, indépendamment de l'existence d'une clause résolutoire dans le contrat, la faculté d'en solliciter la résolution judiciaire dans les conditions du droit commun, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que, le coût estimé dépassant le coût d'objectif, l'architecte avait repris ses études, sans exiger de rémunération contractuelle, conformément à l'article II du contrat, mais n'était pas parvenu à respecter un coût entrant dans le budget prévisionnel, ce qui constituait un des éléments essentiels de sa mission, relevé que le maître de l'ouvrage, n'ayant pas souhaité signer un avenant, avait mis fin au contrat en faisant usage de l'article II qui n'envisageait qu'une résiliation et non une résolution, la cour d'appel a pu en déduire que le contrat de maîtrise d'oeuvre avait été résilié ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal :

Attendu que la société Habiter autrement fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que la responsabilité d'une partie au contrat n'est engagée que s'il existe un lien de causalité direct entre le fait qui lui est reproché et le dommage dont il est demandé réparation ; qu'en se bornant, pour débouter la société Habiter autrement de sa demande de dommages-intérêts, à énoncer que le lien de causalité entre l'inexécution, par l'architecte, de son obligation essentielle et les préjudices allégués par la société Habiter autrement n'était pas établi, sans rechercher si l'abandon du projet de construction du fait de la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre aux torts de la société Atelier X... avait contraint la société Habiter autrement à exposer des frais en pure perte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

2°/ qu'en énonçant, pour débouter la société Habiter autrement de sa demande de dommages-intérêts, que la société Habiter autrement avait contribué à l'échec de l'opération en retardant la résiliation qui aurait pu intervenir plus tôt, après avoir pourtant constaté que le contrat de maîtrise d'oeuvre avait été résilié aux torts exclusifs de la société Atelier X..., ce qui excluait toute responsabilité de la société Habiter autrement dans la réalisation du dommage qu'elle avait subi du fait de cette résiliation, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

3°/ qu'en énonçant, pour débouter la société Habiter autrement de sa demande de dommages-intérêts, qu'elle avait commis une faute en accordant des délais à l'Atelier X..., retardant ainsi une résiliation qui aurait pu intervenir plus tôt, sans rechercher si la société Habiter autrement avait accepté de proroger chaque délai au regard de l'engagement de l'architecte de terminer le programme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

4°/ que, subsidiairement, la faute de la victime ne peut la priver intégralement de l'indemnisation de son dommage lorsqu'elle n'en constitue pas la clause exclusive ; qu'en énonçant, pour débouter la société Habiter autrement de sa demande de dommages-intérêts, qu'elle avait contribué à l'échec de l'opération en accordant des délais contractuels, retardant ainsi la résiliation qui aurait pu intervenir plus tôt, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que le contrat de maîtrise d'oeuvre prévoyait, en cas de résiliation pour impossibilité de respecter le programme, le non-paiement de l'élément de mission « passation des contrats de travaux » et souverainement retenu que des notes d'honoraires devaient être remboursées par l'architecte, que la société Habiter autrement avait contribué à l'échec de l'opération en retardant la résiliation du contrat et que celle-ci n'établissait pas l'existence d'un lien de causalité entre l'absence de maîtrise par l'architecte du budget prévisionnel qui n'avait pas permis à l'opération d'aboutir dans les conditions initialement prévues et les préjudices invoqués, la cour d'appel a pu en déduire que la demande de la société Habiter autrement ne pouvait être accueillie ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les pourvois incidents éventuels :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Habiter autrement aux dépens des pourvois ;

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