vendredi 27 février 2015

La subrogation de l'assureur qui n'était pas tenu à paiement

Voir notes :

- Pélissier, RGDA 2015, p. 89.
- Groutel, RCA 2015-3, p. 32.

Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 16 décembre 2014
N° de pourvoi: 13-23.342
Non publié au bulletin Cassation partielle

Mme Mouillard (président), président
SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir pris en location un moteur d'avion, la société Air Méditerranée l'a confié à la société TAT industries Osiris (la société TAT industries) pour qu'il soit procédé aux vérifications d'usage avant restitution au loueur ; qu'à l'issue de ces opérations, la société DHL s'est vu confier l'acheminement du moteur à Londres ; que le destinataire ayant refusé de le réceptionner au motif que l'arrimage sur le plateau du camion, défectueux, avait empêché le bon fonctionnement des dispositifs d'amortisseurs de vibration, la société Air Méditerranée a décidé de poursuivre la location et d'utiliser le moteur sous surveillance renforcée entraînant des frais ; que la société TAT industries et son assureur, la société Axa corporate solutions assurance (la société Axa), refusant de prendre en charge le sinistre, la société Air Méditerranée et son assureur, le groupement d'intérêt économique La Réunion aérienne (le GIE) les ont assignées en paiement ;

Sur le second moyen :

Attendu que les sociétés TAT industries et Axa font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer au GIE et à la société Air Méditerranée une certaine somme alors, selon le moyen :

1°/ que les conventions ne tiennent lieu de loi qu'à ceux qui les ont faites ; que la cour d'appel qui, après avoir constaté qu'un contrat spécifique avait été conclu le 18 octobre 2004 quant au conditionnement du moteur confié par la société Air Méditerranée et à son chargement, s'est néanmoins fondée, pour juger que la société TAT industries était le seul co-contractant de la société Air Méditerranée et ainsi la condamner à l'indemniser au titre de l'arrimage défectueux du moteur au véhicule du transporteur, sur les circonstances inopérantes que le devis initial, dont elle avait pourtant relevé qu'il ne portait que sur la partie technique des opérations, aurait été préparé à Dinard, siège de la société TAT industries, par un responsable de celle-ci et que c'est ce dernier qui avait adressé à la société nîmoise une commande interne de prestation, qui était pourtant antérieure au contrat spécifique du 18 octobre 2004, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;

2°/ que le chargement de la marchandise à bord du véhicule du transporteur ne comprend pas l'arrimage de celle-ci ; que la cour d'appel qui, après avoir constaté que la société TAT industries avait seulement été chargée du conditionnement du moteur et de son chargement, ce dont il résultait que les opérations d'arrimage ne lui incombaient pas, a néanmoins jugé, pour la condamner, avec son assureur, à payer une certaine somme, que les opérations de chargement comprenaient nécessairement celles d'arrimage, de sorte que la responsabilité de la société TAT industrie était engagée à raison de l'arrimage défectueux de la marchandise, a violé l'article 1147 du code civil ;

3°/ que l'expéditeur, ou donneur d'ordre, qui est celui qui conclut le contrat avec le transporteur, exécute le chargement, le calage et l'arrimage de la marchandise ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que la société Air Méditerranée avait choisi le transporteur et réglé sa facture, ce dont il résultait qu'elle était le donneur d'ordre qui, en cette qualité, devait s'assurer de l'arrimage de la marchandise, s'est néanmoins fondée, pour juger que la société TAT industries avait la qualité de donneur d'ordre et ainsi la condamner à indemniser la compagnie aérienne, sur les circonstances inopérantes qu'elle avait accepté de procéder au conditionnement du transport, à la manutention/handling et chargement puis signé la lettre de transport, a violé les articles 1147 du code civil et 7.2 du décret n° 99-269 du 6 avril 1999 ;

Mais attendu, d'une part, que le moyen ne tend, sous le couvert d'un grief de violation de la loi, qu'à remettre en cause, devant la Cour de cassation, le pouvoir souverain des juges du fond de rechercher la commune intention des parties et d'apprécier la portée et les éléments de preuve qui leur étaient soumis ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que la société TAT industries était chargée du conditionnement du moteur pour son transport, sa manutention et son chargement, l'arrêt en déduit exactement que la société TAT industries était chargée de l'arrimage des marchandises ;

Attendu, enfin, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve que la cour d'appel a retenu que la société TAT industries s'était vu confier, par contrat spécifique, la charge du transport et les responsabilités correspondantes, que la marchandise a été prise en charge par le transporteur dans les locaux de la société TAT industries et que cette société a signé la lettre de voiture, la société Air Méditerranée ne pouvant contrôler la bonne exécution de ces prestations exécutées dans les locaux de son prestataire ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 121-12 du code des assurances ;

Attendu que, pour déclarer recevable l'action subrogatoire du GIE, l'arrêt retient que les sociétés TAT industries et Axa n'ont aucune qualité pour contester la garantie résultant de la police d'assurance conclue entre le GIE et la société Air Méditerrannée, qui l'ont estimée acquise au regard des stipulations contractuelles et dont l'interprétation incombait à ces dernières, sous le contrôle du juge en cas de désaccord ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le paiement fait par l'assureur l'avait été en exécution de la police, à défaut de quoi sa subrogation légale était exclue, ce dont les tiers au contrat d'assurance pouvaient se prévaloir, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable l'action du groupement d'intérêt économique La Réunion aérienne et condamné la société TAT industries Osiris et la société Axa corporate solutions assurance à payer au groupement d'intérêt économique La Réunion aérienne la somme de 112 540,27 euros, l'arrêt rendu le 7 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne le groupement d'intérêt économique La Réunion aérienne et la société Air Méditerranée aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


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