mercredi 2 octobre 2019

Marché public - Délai de contestation du décompte de résiliation

CAA de NANTES

N° 17NT02729   
Inédit au recueil Lebon
4ème chambre
Mme TIGER-WINTERHALTER, président
Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU, rapporteur
M. BRECHOT, rapporteur public
SCP LEHMAN & ASSOCIES, avocat


lecture du vendredi 15 mars 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sera 2 a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) des rives de l'Elorn à lui verser, d'une part, la somme de 44 684,55 euros TTC en règlement de la note d'honoraires n°30 du 25 septembre 2013, assortie des intérêts moratoires au taux de 2,04 % à compter du 9 janvier 2014, d'autre part, la somme de 4 000 euros en réparation des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Par un jugement n° 1600157 du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 septembre 2017 et le 18 février 2019, MeD..., mandataire judiciaire de la société Sera 2, représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 6 juillet 2017 ;

2°) de condamner le SIVU des rives de l'Elorn à lui verser la somme de 44 684,55 euros TTC en règlement de la note d'honoraires n°30 du 25 septembre 2013, assortie des intérêts moratoires au taux de 2,04 % à compter du 9 janvier 2014 ;

3°) de condamner le SIVU des rives de l'Elorn à lui verser la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

4°) de mettre à la charge du SIVU des Rives de l'Elorn les dépens et la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Me D...soutient que :
- le mémoire en réclamation, qui porte sur les prestations qu'elle a réalisées et n'ont pas été payées et dont la valeur contractuelle n'est pas définie par le décompte de liquidation joint à la décision de résiliation du marché, n'est pas tardif ;
- les motifs retenus par le SIVU pour ne pas acquitter le paiement des prestations d'architecte restant dues sont injustifiés ; elle a droit au paiement des prestations réalisées jusqu'au 30 septembre 2013, date à laquelle la résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre a pris effet ;
- compte tenu de la mauvaise foi du SIVU des Rives de l'Elorn, elle est en droit de solliciter le versement d'une indemnité de 4 000 euros.


Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 décembre 2017 et le 20 février 2019, le SIVU des rives de l'Elorn, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la société Sera 2 en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- la société Sera 2 n'a pas qualité pour agir de sorte que sa demande est irrecevable ; MeD..., en qualité de mandataire judiciaire sans mission d'administration n'a pas davantage qualité pour agir ;
- les moyens soulevés par MeD..., mandataire judiciaire de la société Sera 2, ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de commerce ;
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles et la modification du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés industriels ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Allio-Rousseau,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant MeD..., mandataire judiciaire de la société Sera 2.


Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) des Rives de l'Elorn a décidé de rénover et d'étendre la maison pour personnes âgées dépendantes " Les Rives d'Elorn " située à Guipavas. A cette fin, il a attribué, par un acte d'engagement du 25 octobre 2006, la maîtrise d'oeuvre de cette opération à un groupement solidaire dont faisait partie la société Sera 2, placée en redressement judiciaire depuis le 2 novembre 2016. Par une décision du 20 septembre 2013, le SIVU des Rives de l'Elorn a décidé de résilier ce marché et a notifié cette décision ainsi que le décompte de résiliation au groupement de maîtrise d'oeuvre le 26 septembre 2013. Par un mémoire en date du 25 novembre 2013, la société Sera 2 a contesté le décompte de liquidation et demandé le paiement d'une somme de 44 684,55 euros TTC au titre des prestations qu'elle a réalisées et de son manque à gagner. Le SIVU des Rives de l'Elorn a rejeté cette demande par un courrier du 22 janvier 2014. MeD..., mandataire judiciaire de la société Sera 2, relève appel du jugement du 6 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation du SIVU des Rives de l'Elorn à lui verser d'une part, la somme de 44 684,55 euros TTC en règlement de la note d'honoraires n°30 du 25 septembre 2013, assortie des intérêts moratoires au taux de 2,04 % à compter du 9 janvier 2014, d'autre part, la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Sur le décompte de résiliation :

2. D'une part, le cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre de l'opération d'extension et de restructuration de la maison pour personnes âgées dépendantes " Les rives de l'Elorn " renvoie au cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles approuvé par le décret du 26 décembre 1978, qui constitue l'une des pièces générales du marché selon son article 2.2. Les stipulations de l'article 13 relatif à la résiliation du marché du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre litigieux ne dérogent pas aux stipulations de l'article 35 et de l'article 12.32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles de 1978.

3. D'autre part, aux termes de l'article 35.4. du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles : " La résiliation fait l'objet d'un décompte qui est arrêté par la personne publique et notifié au titulaire. Les stipulations du 32 de l'article 12 sont applicables à ce décompte. ". Aux termes de cet article 12.32. : " Toute réclamation sur un décompte doit être présentée par le titulaire à la personne publique dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte. / Passé ce délai, le titulaire est réputé avoir accepté le décompte (...). ".
4. Il résulte de l'instruction que le SIVU des Rives de l'Elorn a notifié par voie d'huissier, le 26 septembre 2013, d'une part, la décision de résiliation du marché en date du 20 septembre 2013 avec effet au 30 septembre suivant et d'autre part, le décompte de liquidation arrêté par le président du SIVU. En application des stipulations de l'article 12.32, le maître d'oeuvre avait donc jusqu'au 10 novembre 2013 pour présenter sa réclamation. Or la société Sera 2 n'a adressé au SIVU un mémoire en réclamation, dont l'objet était bien de contester le décompte de liquidation, que le 25 novembre 2013. Il en résulte que cette réclamation a été adressée au SIVU des Rives de l'Elorn après l'expiration du délai de 45 jours imparti par le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles de sorte qu'elle n'était plus recevable à contester le décompte devenu définitif. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté sa demande tendant au paiement d'une somme de 44 684,55 euros TTC au titre des prestations qu'elle a réalisées et de son manque à gagner comme étant irrecevable.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :
5. Si MeD..., mandataire judiciaire de la société Sera 2 demande la condamnation du SIVU des Rives de l'Elorn à lui verser une somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts au motif que le SIVU a fait preuve de mauvaise foi en résiliant le marché de maîtrise d'oeuvre sans motif alors que les travaux étaient quasiment achevés, il ne résulte pas de l'instruction que la résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre, à laquelle le maître de l'ouvrage était en droit de procéder, même sans faute du titulaire en application de l'article 35 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, dans sa rédaction issue du décret du 26 décembre 1978, auquel le cahier des clauses administratives particulières du marché litigieux ne déroge pas, ait présenté un caractère abusif. Dans ces conditions, les conclusions tendant au versement d'une somme de 4 000 euros ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais d'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge du SIVU des Rives de l'Elorn, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche et dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de MeD..., es qualités de mandataire judiciaire de la société Sera 2, le versement au SIVU des Rives de l'Elorn une somme de 1 000 euros en application des mêmes dispositions.

DÉCIDE :
Article 1er : La requête de MeD..., es qualités de mandataire judiciaire de la société Sera 2, est rejetée.
Article 2 : MeD..., es qualités de mandataire judiciaire de la société Sera 2, versera au SIVU des Rives de l'Elorn une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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