mardi 1 octobre 2019

Responsabilité décennale et disproportionnalité du mode de réparation revendiqué

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 19 septembre 2019
N° de pourvoi: 18-19.121
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
Me Le Prado, SCP Boullez, SCP Boulloche, SCP L. Poulet-Odent, avocat(s)





Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims,13 mars 2018), que la société LJS a entrepris la construction de deux maisons jumelées, sous la maîtrise d'oeuvre de Mmes K... et O..., assurées auprès de la société Mutuelle des architectes français (la MAF) ; que les travaux relevant du lot n° 1 (terrassement, réseaux divers, démolition et gros oeuvre) ont été confiés à la société D... Q... (D...), assurée auprès de la SMABTP ; que, se plaignant, notamment, de désordres acoustiques, la société LJS a, après expertise, assigné Mmes K... et O..., la MAF et la SMABTP en démolition et reconstruction des immeubles et en indemnisation de ses préjudices ;

Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, ci-après annexé :

Attendu que la société LJS fait grief à l'arrêt de rejeter la demande de démolition et de reconstruction des immeubles ;

Mais attendu qu'ayant relevé, sans dénaturation de l'étude acoustique de la société Acoustique France, que la démolition et la reconstruction des immeubles n'étaient pas préconisées par l'expert, que le caractère filant des planchers n'était pas établi et que, si la pose de doublages sur le mur de refend provoquait une perte de surface importante, celle-ci constituait un préjudice indemnisable et retenu que la démolition et la reconstruction des immeubles n'avaient pas lieu d'être ordonnées lorsqu'il existait des solutions techniques alternatives de nature à remédier aux désordres, qu'elles constituaient une mesure disproportionnée au regard de la nature et de l'ampleur des désordres et qu'elles n'étaient justifiées par aucune expertise technique, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que la demande de la société LJS en démolition et reconstruction des immeubles devait être rejetée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le second moyen, pris en ses trois premières branches, ci-après annexé :

Attendu que la société LJS fait grief à l'arrêt de condamner in solidum la société D..., la SMABTP, Mmes K... et O... et la MAF au paiement de la seule somme de 28358,76 euros au titre des travaux de mise en conformité acoustique et de rejeter sa demande subsidiaire d'expertise ;

Mais attendu qu'ayant retenu, sans dénaturation de l'étude acoustique de la société Acoustique France, que la société LJS échouait à établir que les planchers étaient filants, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui n'a pas modifié l'objet du litige dès lors que la SMABTP soutenait qu'il n'était pas démontré que les planchers fussent filants, a, pour évaluer le coût de la mise en conformité acoustique des immeubles, écarté souverainement un devis portant sur des travaux d'isolation acoustique d'un plancher filant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 4 du code civil ;

Attendu que, pour condamner in solidum la société D..., la SMABTP, Mmes K... et O... et la MAF à payer à la société LJS la seule somme de 6124 euros au titre des préjudices immatériels, l'arrêt retient que la mise en conformité de l'acoustique va entraîner une perte de surface de vingt millimètres sur toute la longueur du mur de refend de chaque côté et que ce préjudice est indemnisable mais qu'aucune pièce permettant de l'évaluer, comme une estimation de la valeur des maisons, n'est versée aux débats, la société LJS se bornant à se référer à une note de l'expert non produite ;

Qu'en statuant ainsi, en refusant d'évaluer le préjudice lié à la perte de surface dont elle avait constaté l'existence en son principe, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum la société D... Q..., M... , Mmes E... K... et S... O... et la société Mutuelle des architectes français à payer à la société LJS la somme de 6 214 euros au titre des préjudices immatériels et rejette le surplus de la demande à ce titre, l'arrêt rendu le 13 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne Mmes K... et O..., la SMABTP et les sociétés D... et MAF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de Mmes K... et O..., de la SMABTP et des sociétés D... et MAF ; les condamne à payer à la société LJS la somme globale de 3 000 euros ;

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