vendredi 4 juin 2021

L'action fondée sur un trouble anormal du voisinage constitue, non une action réelle immobilière, mais une action en responsabilité civile extra-contractuelle qui peut être dirigée contre tout voisin auteur des nuisances, quel que soit son titre d'occupation

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mai 2021




Cassation partielle


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 435 F-D

Pourvoi n° B 20-11.926




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MAI 2021

1°/ Mme [G] [L],

2°/ Mme [T] [Q], épouse [D],

domiciliées toutes deux [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° B 20-11.926 contre l'arrêt rendu le 28 novembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [A] [A],

2°/ à Mme [M] [A],

domiciliés tous deux [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.




Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de Mmes [L] et Ruesch-Slodkowski, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme [A], après débats en l'audience publique du 7 avril 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 novembre 2019), Mme [L] et Mme Ruesch-Slodkowski ont assigné M. et Mme [A] en réparation des préjudices consécutifs à un trouble anormal du voisinage occasionné par l'édification d'une construction sur le terrain appartenant à la SCI [Personne physico-morale 1] (la SCI) dont M. [A] est le gérant.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

2. Mmes [L] et Ruesch-Slodkowski font grief à l'arrêt de déclarer leur demande irrecevable, alors « que l'action en responsabilité fondée sur un trouble anormal de voisinage constitue non une action réelle immobilière mais une action en responsabilité civile extra-contractuelle ; que l'auteur des travaux à l'origine du trouble est responsable de plein droit des troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage constatés dans le fonds voisin ; que la cour d'appel a relevé que M. [A] avait reconnu avoir effectué les travaux, à l'origine du trouble allégué ; qu'en considérant toutefois que cette circonstance était inopérante dès lors que la demande d'indemnisation des exposantes était fondée sur la théorie du trouble anormal de voisinage, la cour d'appel a violé le principe selon lequel nul ne peut causer à autrui un dommage excédant les inconvénients normaux du voisinage. »

Réponse de la Cour

Vu le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal du voisinage :

3. L'action fondée sur un trouble anormal du voisinage constitue, non une action réelle immobilière, mais une action en responsabilité civile extra-contractuelle qui peut être dirigée contre tout voisin auteur des nuisances, quel que soit son titre d'occupation.

4. Pour déclarer irrecevables les demandes de Mmes [L] et Ruesch-Slodkowski contre M. et Mme [A], l'arrêt retient que, si M. [A] a réalisé la construction litigieuse sur le terrain appartenant à la SCI, l'action qui se fonde sur un trouble anormal du voisinage doit nécessairement être engagée contre le propriétaire du bien à l'origine des nuisances.

5. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables les demandes de Mmes [L] et Ruesch-Slodkowski, l'arrêt rendu le 28 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne M. et Mme [A] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [A] et les condamne à payer à Mmes [L] et Ruesch-Slodkowski la somme globale de 3 000 euros. 

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