mercredi 21 décembre 2016

Actualité 2016 de l’assurance construction : La prescription biennale



Actualité 2016 de l’assurance construction

La prescription biennale


Sur la prescription biennale et la durée de la garantie dommages-ouvrage voir ci-après.

Est inopposable à l’assuré la clause du contrat d'assurance relative à la prescription ne précisant pas que la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, pour être interruptive de prescription, doit concerner le règlement de l'indemnité
Cass. 2e civ., 7 avr. 2016, n° 15-14.154, RGDA2016.300 M. Asselain :
« Mais attendu qu'aux termes de l'article R. 112-1 du code des assurances, les polices d'assurance relevant des branches 1 à 17 de l'article R. 321-1 doivent rappeler les dispositions des titres Ier et II, du livre Ier de la partie législative du code des assurances concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance ; qu'il en résulte que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du code des assurances, les causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code ;

Et attendu qu'ayant constaté que la clause du contrat d'assurance relative à la prescription ne précisait pas que la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, pour être interruptive de prescription, doit concerner le règlement de l'indemnité, la cour d'appel en a exactement déduit que cette mention était insuffisante et que le délai de prescription était inopposable à l'assuré ; »

Il est en de même si les dispositions générales des contrats ne précisaient pas toutes les causes ordinaires d'interruption de la prescription.
Cass. 2e civ., 4 frév. 2016, n°15.14.649 :
« Attendu que, pour déclarer les demandes de M. X... irrecevables comme prescrites, l'arrêt énonce que les dispositions générales du contrat multirisques de la société Continent indiquent, sous la rubrique « Prescription »: «Toutes actions relatives au présent contrat sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui leur a donné naissance. La prescription peut être interrompue dans les cas suivants : désignation d'un expert à la suite d'un sinistre, envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception : par nous en ce qui concerne le paiement de la cotisation, par vous en ce qui concerne le règlement de l'indemnité, citation en justice (même référé), commandement ou saisie signifié à celui que l'on veut empêcher de prescrire » ; que les dispositions générales du contrat multirisques de l'assureur, sous la même rubrique « Prescription », indiquent : « Toutes les actions concernant ce contrat, qu'elles émanent de vous ou de nous, doivent être exercées dans un délai de deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance. La prescription peut être interrompue par : désignation d'un expert, envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception adressée par nous en ce qui concerne le paiement de la cotisation et par vous en ce qui concerne le règlement d'un sinistre, saisine d'un tribunal même en référé, toute autre cause ordinaire » ; que l'assureur a donc respecté ses obligations d'information telles qu'elles résultaient des articles L. 114-1 et R. 112-1 du code des assurances ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les dispositions générales des contrats ne précisaient pas toutes les causes ordinaires d'interruption de la prescription, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; »

La lettre recommandée de l’assuré qui informe l’assureur de l’évolution du sinistre, sans formuler de demande relative à ce dernier et à son indemnisation, n’interrompt pas la prescription biennale
Cass. 2e civ., 14 avr. 2016, n° 15-20.275, RGDA2016.300 M. Asselain:
“Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 septembre 2014), qu'après avoir constaté en juillet 2001 l'apparition d'importantes fissures sur la façade principale et le vide sanitaire du pavillon dont il est propriétaire, M. X... a effectué en août 2001 une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la société Mutuelle assurance des commerçants et industriels de France (l'assureur) ; que contestant le refus de garantie opposé par ce dernier, il a saisi un juge des référés d'une demande d'expertise ; qu'un expert judiciaire a été désigné par une ordonnance du 5 juillet 2005 ; qu'après avoir, le 4 juillet 2006, adressé à l'assureur une lettre recommandée avec demande d'avis de réception relative à ce sinistre, M. X... l'a assigné en exécution du contrat d'assurance ;
[…]
Mais attendu qu'ayant constaté que M. X... avait dans sa lettre du 4 juillet 2006 informé l'assureur de l'évolution du sinistre déclaré en août 2001 sans formuler de demande relative à ce dernier et à son indemnisation, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit que cette lettre n'avait pas concerné le règlement, pour ce sinistre, de l'indemnité, au sens de l'article L. 114-2 du code des assurances, et n'avait dès lors pu interrompre la prescription biennale ».

Indépendamment de l’article L. 114-2 du code des assurances, la suspension de la prescription de l’article 2239 du code civil est applicable aux actions dérivant d’un contrat d’assurance.
Cass. 2e civ., 19 mai 2016, n° 15-19.792, RDI 2016, p. 418, D. Noguéro, Constr.-Urb. 2016, comm. 136, M.-L. Pagès-de Varenne, RGDA2016.379, R. Schulz   :
« Mais attendu qu'aux termes de l'article 2239, alinéa 1, du code civil, la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès ; que, selon l'alinéa 2 de ce texte, le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée ; que les articles L. 114-1, L. 114-2 et L. 114-3 du code des assurances ne font pas obstacle à l'application de l'article 2239 du code civil ; qu'il s'ensuit que la suspension de la prescription prévue par l'article 2239 du code civil est applicable aux actions dérivant d'un contrat d'assurance ;
Que la cour d'appel ayant constaté qu'une expertise judiciaire avait été ordonnée par une ordonnance du juge des référés du 4 novembre 2009 et que la mesure d'instruction était toujours en cours, en a déduit à bon droit que la mesure d'instruction ordonnée avait suspendu la prescription de l'action, de sorte que l'exception de prescription devait être rejetée ; »


Le jugement rendu à la demande de l'assureur dommages-ouvrage à l'encontre de l'entreprise et de son assureur (moins de deux ans après l’expertise ordonnée en référé)  ayant ordonné une nouvelle expertise, concernant les mêmes désordres et désignant les mêmes experts, a interrompu la prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des assurances.
Cass. 3e civ., 10 mars 2016, n° 14-29.397, Constr.-Urb. 2016, comm. 78, M.-L. Pagès-de Varenne :
« Vu les articles L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances, ensemble l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 septembre 2014), que le syndicat d'agglomération nouvelle de Marne-la-Vallée Val-Maubuée (le SAN), devenu la communauté d'agglomération de Marne-la-Vallée Val-Maubée (la communauté d'agglomération) a fait procéder à la construction d'une salle polyvalente à la réalisation de laquelle est intervenue, en qualité de sous-traitante, la société Paul Mathis, assurée par la CAMBTP ; qu'une police d'assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la société Generali IARD (la société Generali) ; que la société Generali ayant refusé sa garantie après une déclaration de sinistre, le SAN l'a assignée en référé et a obtenu, le 18 octobre 2000, la désignation d'expert ; qu'une ordonnance de référé du 21 mars 2001 a rejeté la demande de la société Generali en extension des opérations d'expertise ; qu'un jugement du 23 mai 2002, rendu au contradictoire de la société Paul Mathis et de son assureur, à la demande de la société Generali, a ordonné une expertise ; que le SAN a assigné la société Generali en paiement du coût des travaux de reprise des désordres ; que les deux instances ont été jointes ;
Attendu que, pour déclarer prescrite l'action de la communauté d'agglomération contre la société Generali, l'arrêt retient que le jugement du 23 mai 2002, rendu après assignation délivrée par la société Generali à la société Paul Mathis et son assureur, ordonne une nouvelle expertise et que la mission confiée aux experts n'est pas une extension ou une modification de la mission qui leur avait été donnée le 18 octobre 2000 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le jugement du 23 mai 2002 vise l'expertise ordonnée en référé le 18 octobre 2000, concerne les mêmes désordres et désigne les mêmes experts, et que dans les rapports entre l'assureur et son assuré, toute décision judiciaire apportant une modification quelconque à une mission d'expertise ordonnée par une précédente décision a un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties, y compris à l'égard de celles appelées uniquement à la procédure initiale et pour tous les chefs de préjudice procédant du sinistre en litige, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Bibliographie :
E. Seifert, Mentions de la police sur la prescription biennale : encore et toujours plus, Resp. et ass. 2016 form. 9

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