mercredi 28 décembre 2016

Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 8 décembre 2016
N° de pourvoi: 15-27.430
Non publié au bulletin Cassation partielle

Mme Flise (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Odent et Poulet, avocat(s)


Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Fourre et Rhodes génie civil (la société FRGC), assurée auprès de la SMABTP, s'est vue confier par le district de Saint-Quentin, aux droits duquel vient la communauté d'agglomération de Saint-Quentin, la réalisation de certains lots d'une opération de réhabilitation et de transformation d'une station d'épuration exploitée par la Compagnie générale des eaux, à laquelle avait succédé la société Vivendi ; que la société FRGC a sous-traité la pose des canalisations entre les ouvrages de génie civil à la société Bonna, assurée par la société Axa corporate solutions (la société Axa) et la pose de canalisations en acier sous ouvrages de génie civil à la société T2M , assurée par la société Zurich international France ; que, saisie notamment par la communauté d'agglomération de Saint-Quentin, la juridiction administrative a condamné la société FRGC à lui payer certaines sommes en réparation des préjudices liés aux travaux de réparation de la station d'épuration et à la garantir de condamnations prononcées en faveur de la société Veolia eau, venue aux droits de la société Vivendi ; que la société FRGC et la SMABTP ont assigné devant la juridiction civile la société Bonna et la société Axa, ainsi que le mandataire ad hoc de la société T2MI et la société Zurich international France, devenue la société Zurich insurance public limited company (la société Zurich insurance), aux fins, tout d'abord, de se voir garantir des condamnations prononcées contre elles, puis de les voir condamnées à leur rembourser les sommes réglées en exécution de celles-ci ;

Sur le second moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que la SMABTP fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'ensemble des demandes qu'elle a formées à l'encontre des sociétés Bonna, Axa et Zurich insurance, alors, selon le moyen, qu'une partie assignée en justice est en droit d'appeler une autre en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ; que l'appel en garantie se distingue du recours subrogatoire en ce qu'il ne nécessite pas le paiement préalable de l'indemnité par l'assureur ; qu'est recevable l'action engagée par l'assureur avant l'expiration du délai de forclusion décennale, bien qu'il n'ait pas encore eu au moment de la délivrance de son assignation la qualité de subrogé dans les droits de son assuré, dès lors qu'il a payé l'indemnité due à ce dernier avant que le juge du fond ait statué ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'en 1997 le district de Saint-Quentin a été informé de l'existence de fuites affectant les canalisations ; que le lot n° 2 relatif au génie civil, superstructures, bâtiments et canalisations avait fait l'objet d'un procès-verbal de réception sans réserve le 7 octobre 1996 avec effet au 17 septembre 1995 ; que la FRGC a assigné par acte du 9 janvier 2004, les sociétés Bonna et Axa ainsi que la société Zurich international France devant la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Béthune aux fins de les voir condamner solidairement à la garantir intégralement des responsabilités susceptibles d'être retenues à son encontre ; que, par jugement du 15 juin 2005, le tribunal a déclaré recevable l'intervention volontaire de la SMABTP à l'instance ; qu'en déboutant la SMABTP de sa demande de garantie à l'encontre des sociétés Bonna, Axa et Zurich insurance au motif qu'elle ne justifiait pas de sa qualité et de son intérêt à agir, les conditions des subrogations légale et conventionnelle n'étant pas remplies, quand l'appel en garantie ne nécessitait pas la preuve de paiements préalables, la cour d'appel a violé l'article L. 121-12 du code des assurances et l'article 126 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en l'état des dernières prétentions de la SMABTP, la cour d'appel était saisie, non de demandes en garantie dirigées contre les sociétés Bonna, Axa et Zurich insurance, mais de demandes en paiement des sommes qu'elle affirmait avoir réglées à la communauté d'agglomération de Saint-Quentin ;

D'où il suit que le moyen est inopérant ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première et deuxième branches du second moyen annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable l'ensemble des demandes formées par la société FRGC à l'encontre des sociétés Bonna, Axa et Zurich insurance, l'arrêt, après avoir relevé que la société FRGC produisait une lettre établissant le versement de la somme de 216 237 euros au conseil de la communauté d'agglomération de Saint-Quentin, énonce qu'elle ne rapporte pas la preuve d'une quittance subrogative accordée par cet établissement public ;

Qu'en relevant ainsi d'office le moyen tiré de l'absence de subrogation, quand les sociétés Bonna, Axa et Zurich insurance ne contestaient que la réalité du paiement dont la société FRGC réclamait le remboursement, sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel, qui a méconnu le principe de la contradiction, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable l'ensemble des demandes formées par la société FRGC à l'encontre des sociétés Bonna, Axa corporate solutions et Zurich insurance, et en ce qu'il la condamne à payer la somme de 8 000 euros aux sociétés Bonna et Axa corporate solutions et celle de 6 000 euros à la société Zurich insurance, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 24 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne les sociétés Bonna, Axa corporate solutions et Zurich insurance public limited company aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leurs demandes et les condamne in solidum à payer à la société Fourre et Rhodes génie civil la somme globale de 3 000 euros ; rejette la demande de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics ;

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