mercredi 14 décembre 2016

L'absence de syndic ne constituait pas un vice de nature à rendre l'immeuble vendu impropre à son usage d'habitation

Note Coutant-Lapalus, Loy. et  copr. 2017-2, p. 37.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 8 décembre 2016
N° de pourvoi: 14-27.986 15-16.494
Publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Joint les pourvois n° J 14-27.986 et n° P 15-16.494 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 septembre 2014), que, par acte dressé le 11 septembre 2009 par M. X..., notaire, avec la participation de Mme Y..., notaire, Mme Z..., architecte, a acheté deux appartements d'un même immeuble, l'un appartenant à la société civile immobilière Canovas et l'autre à la société civile immobilière Quentin ; que la vente a été négociée par l'intermédiaire de la société Cabinet Grignan investissements ; que, se prévalant de l'ouverture d'une procédure de péril imminent par le maire le 14 décembre 2009, ainsi que de l'impossibilité de déterminer l'identité du propriétaire du rez-de-chaussée, de l'absence de syndic et de l'absence de paiement des loyers et d'un gestionnaire chargé de les encaisser, Mme Z... a assigné les venderesses, les notaires et l'agent immobilier sur le fondement de la garantie des vices cachés et en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt de rejeter son action estimatoire, alors, selon le moyen :

1°/ que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou diminuent fortement cet usage ; que le syndic est notamment tenu d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation et de représenter le syndicat dans tous les actes civils et en justice, c'est-à-dire que son absence rend impossible la gestion dudit immeuble, diminuant ainsi largement son usage ; qu'en retenant toutefois que « l'absence de syndic [n'est pas un vice] affectant le bien immobilier objet de la vente », la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil ;

2°/ que le jugement doit être motivé ; qu'en l'espèce, l'arrêt énonce uniquement que « l'impossibilité de déterminer l'identité du propriétaire du rez-de-chaussée, l'absence de syndic, l'absence de règlement des loyers, l'absence d'un gestionnaire chargé d'encaisser les loyers ne sont pas des vices affectant le bien immobilier objet de la vente et de nature à le rendre impropre à son usage d'habitation ni à en diminuer tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait acquis qu'à un prix moindre » ; qu'en statuant ainsi, sans aucunement justifier ses motifs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit que l'absence de syndic ne constituait pas un vice de nature à rendre l'immeuble impropre à son usage d'habitation ni à en diminuer tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait acquis qu'à un prix moindre, la cour d'appel, par une décision motivée, en a exactement déduit que l'action de Mme Z... ne pouvait être accueillie ;

D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes formées contre M. X... et Mme Y..., alors, selon le moyen :

1°/ que l'efficacité d'un acte dépend du respect de la volonté des parties ; que le notaire doit informer ses clients lorsque des circonstances de fait sont susceptibles de nuire à ladite efficacité de l'acte, étant le cas échéant responsable de l'éventuelle réduction du prix lorsque le trop payé découle de sa faute ; qu'en se contentant d'affirmer que « la somme correspondant à la réduction du prix ne peut être demandée qu'aux venderesses », sans rechercher comme cela lui était demandée si la faute commise par le notaire – soit le défaut d'information de l'acquéreur quant à l'absence de syndic – n'avait pas eu pour conséquence de participer à la mesure de péril immédiat et la procédure d'expropriation du fait de l'impossibilité subséquente d'engager des travaux sur les parties communes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

2°/ que les arrêts qui ne contiennent pas de motifs sont déclarés nuls et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, Mme Z... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que l'inexistence d'un syndic emportait pour elle un important préjudice, notamment lié aux faits qu'elle habitait Paris – l'immeuble litigieux étant situé à Marseille – et que l'absence de ce dernier et les difficultés en découlant l'ont obligée à se déplacer et à effectuer elle-même un certain nombre de travaux ; qu'en affirmant uniquement que « les autres sommes invoquées comme préjudices n'ont aucun lien de causalité avec l'absence d'avertissement du notaire sur la difficulté tenant à l'absence de syndic », sans répondre au moyen péremptoire dont elle était saisie, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que les arrêts qui ne contiennent pas de motifs sont déclarés nuls et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, Mme Z... faisait encore valoir dans ses conclusions d'appel que les informations délivrées par les notaires s'agissant de l'existence d'un règlement de copropriété se sont avérées confuses et erronées – les divers actes en présence se contredisant, certains visant expressément un tel document –, l'absence de ce dernier ayant contribué au défaut de gestion de la copropriété puisque l'administrateur provisoire désigné par ordonnance de référé en date du 20 juillet 2009 n'a pu, justement de ce fait, réaliser sa mission, l'immobilisme quant à la réalisation des travaux – lesquels relèvent de la compétence exclusive du syndic – ayant conduit à la prise d'un arrêté de péril immédiat ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que la promesse de vente indiquait qu'il n'avait pas été établi de règlement de copropriété, relevé que la somme correspondant à la réduction du prix ne pouvait être demandée qu'aux venderesses et retenu que les autres sommes invoquées comme préjudices n'avaient aucun lien de causalité avec le défaut d'avertissement des notaires sur la difficulté tenant à l'absence de syndic, la cour d'appel a pu en déduire que les demandes de Mme Z... ne pouvaient être accueillies ;

D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne Mme Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

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