mardi 8 juillet 2025

Honoraires d'architecte et absence de motifs de l'arrêt

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

IV. 3

FC



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 26 juin 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 319 F-D

Pourvoi n° J 23-22.686




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2025

La société Les Sources, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 5], a formé le pourvoi n° J 23-22.686 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2023 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, 2e chambre section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [J] [E], domicilié [Adresse 4],

2°/ à la société Mutuelle des architectes français, dont le siège est [Adresse 1], prise en sa qualité d'assureur de M. [J] [E],

3°/ à la société Piscines Allard construction, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

4°/ à la société AXA France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

5°/ à la société Fabre, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6],

6°/ à la société Mutuelle des architectes français, dont le siège est [Adresse 1], prise en sa qualité d'assureur de la société Bureau d'études thermiques et acoustiques Boulaygues (BETA),

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de la société civile immobilière Les Sources, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [E], de la société Mutuelle des architectes français, prise en sa qualité d'assureur de M. [E], de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Fabre, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Foucher-Gros, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société civile immobilière Les Sources (la SCI) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Piscines Allard construction, la Mutuelle des architectes français (la MAF), prise en sa qualité d'assureur du Bureau d'études thermiques et acoustiques Boulaygues, et la société Axa France IARD.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 21 septembre 2023), la SCI, a confié à M. [E] (l'architecte), assuré auprès de la MAF, la maîtrise d'oeuvre des travaux de réhabilitation de son bien immobilier et de création d'une piscine. Sa rémunération était calculée en fonction du coût total des travaux.

3. La société Fabre est intervenue à l'opération pour le lot comprenant la piscine.

4. Le juge des référés, saisi par la SCI, a ordonné une expertise et fixé la consignation à sa charge à une somme équivalente au solde des honoraires demandés par l'architecte.

5. Après qu'une seconde expertise a été ordonnée, la SCI, qui avait assigné l'architecte et la société Fabre, a assigné la MAF, en sa qualité d'assureur du premier, aux fins d'obtenir réparation des désordres dont elle se plaignait.

6. Reconventionnellement, l'architecte a demandé le paiement de ses honoraires et la société Fabre le paiement du solde de son marché.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Fabre la somme de 68 374,21 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2007, et, après avoir ordonné la compensation entre leurs créances respectives, la somme de 31 392,95 euros et de la condamner à payer à l'architecte la somme de 49 753 euros, au titre du solde de ses honoraires, outre les intérêts au taux légal à compter du 5 juin 2007, alors « que tout jugement doit être motivé et le défaut de réponse aux conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en confirmant le jugement en ce qu'il avait condamné la SCI Les Sources à payer à la société Fabre la somme de 68 374,21 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2007, et capitalisation des intérêts et, après avoir ordonné la compensation entre leurs créances respectives, la somme de 31 392,95 euros, sans répondre aux conclusions d'appel de la SCI Les Sources selon lesquelles faute de produire des devis acceptés, la société Fabre ne rapportait pas la preuve de l'étendue de sa créance, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

8. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

9. Pour condamner la SCI à payer à la société Fabre une certaine somme au titre du solde de son marché, l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'il ne ressort pas des écritures de la SCI que cette demande est contestée.

10. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la SCI, qui soutenait que la société Fabre devait être déboutée de ses demandes, à défaut pour elle de justifier d'une commande matérialisée par un devis accepté, d'une facture correspondant à ce devis, et de disposer de ces mêmes éléments par une synthèse des comptes du maître d'oeuvre, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt qui confirme le jugement condamnant la SCI à payer à la société Fabre la somme de 68 374,21 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2007, capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil et condamnant après compensation des créances respectives, la SCI à payer à la société Fabre la somme de 31 392,95 euros entraîne la cassation des chefs de dispositif confirmant le jugement en ce qu'il a condamné la SCI à payer à l'architecte la somme de 49 753 euros au titre du solde de ses honoraires, ordonné la déconsignation immédiate au profit de l'architecte de la somme versée à la CARPA par la SCI en exécution de l'ordonnance du 7 novembre 2007 du président du tribunal de grande instance d'Avignon, condamné la SCI et la société Fabre à verser à l'architecte et la MAF la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement en ce qu'il :

- condamne la société civile immobilière Les Sources à payer à la société Fabre la somme de 68 374,21 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2007,
- dit que les intérêts légaux sur cette somme courent à partir du 23 mars 2007,
- dit que les intérêts sur cette somme seront capitalisés dans les termes de l'article 1343-2 du code civil,
- condamne, après compensation des créances respectives, la société civile immobilière Les Sources à payer à la société Fabre la somme de 31 392,95 euros,
- condamne la société civile immobilière Les Sources à payer à M. [E] la somme de 49 753 euros au titre du solde de ses honoraires outre intérêts au taux légal sur ladite somme avec application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil à compter du 5 juin 2007 et jusqu'à parfait paiement,
- ordonne la déconsignation immédiate au profit de M. [E] de la somme versée à la CARPA par la société civile immobilière Les Sources en exécution de l'ordonnance du 7 novembre 2007 du président du tribunal de grande instance d'Avignon,
- condamne la société civile immobilière Les Sources et la société Fabre à verser à M. [E] et la Mutuelle des architectes français la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

l'arrêt rendu le 21 septembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société Fabre et M. [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-six juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de la décision au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par M. Boyer, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mme Teiller, président empêché, le conseiller rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300319

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