Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 22-23.045
- ECLI:FR:CCASS:2024:C300169
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du jeudi 21 mars 2024
Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, du 20 septembre 2022- Président
- Mme Teiller (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 mars 2024
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 169 F-D
Pourvoi n° D 22-23.045
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 MARS 2024
La société Adour piscines, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 22-23.045 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2022 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant à M. [S] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Adour piscines, après débats en l'audience publique du 6 février 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 20 septembre 2022), M. [D] a confié à la société Adour piscines la réalisation de travaux de rénovation de sa piscine, après lui avoir versé un acompte.
2. N'ayant pas été payée du solde de sa facture, celle-ci l'a assigné en paiement. Il a formé, à titre reconventionnel, une demande d'indemnisation de ses préjudices.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et sur le second moyen, pris en sa première branche, réunis
Enoncé des moyens
3. Par son premier moyen, la société Adour piscines fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. [D] une certaine somme en réparation de désordres matériels, de prononcer la compensation judiciaire entre les dettes réciproques et de dire que le solde revenant au maître de l'ouvrage portera intérêt à compter du jour de l'arrêt, alors « que le juge ne peut pas modifier l'objet du litige ; qu'en se fondant sur la circonstance que le contrat conclu entre les parties avait été résilié et qu'en l'absence d'acte écrit listant les désordres apparents lors de cette résiliation et en l'absence de réception tacite par ailleurs, la société Adour piscines ne pouvait contester ni la mauvaise exécution de sa part, ni le droit du maître d'ouvrage d'obtenir réparation, cependant qu'aucune des parties ne prétendait que le contrat litigieux avait été résilié, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »
4. Par son deuxième moyen, la société Adour piscines fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. [D] une certaine somme en réparation du préjudice immatériel, de prononcer la compensation judiciaire entre les dettes réciproques et de dire que le solde revenant au maître de l'ouvrage porterait intérêt à compter du jour de l'arrêt, alors « que le juge n'est pas autorisé à modifier l'objet du litige ; qu'en se fondant, pour évaluer le préjudice immatériel de M. [D] à hauteur de 10 000 euros, sur la circonstance que le contrat conclu entre les parties aurait été rompu de manière unilatérale et injustifiée, cependant qu'aucune des parties ne prétendait que le contrat litigieux avait été résilié, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile :
5. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
6. Aux termes du second, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.
7. En premier lieu, pour condamner la société Adour piscines au paiement d'une indemnité équivalente au coût de la reprise des désordres matériels, l'arrêt retient qu'en l'absence de réception, le contrat a été résilié sans qu'aucun écrit ne liste les désordres apparents, de sorte que celle-ci n'était plus fondée à contester ni la mauvaise exécution des travaux, ni le droit du maître de l'ouvrage d'en obtenir réparation.
8. En second lieu, pour condamner la société Adour piscines au paiement d'une indemnité correspondant à un préjudice immatériel, l'arrêt retient qu'il résulte de la rupture unilatérale et injustifiée des relations contractuelles.
9. En statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions, ni M. [D] ni la société Adour piscines ne demandaient de constater la résiliation du contrat par l'une des parties ou de prononcer sa résolution judiciaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
10. La société Adour piscines fait grief à l'arrêt de déclarer M. [D] redevable envers elle du solde de prix non productif d'intérêts pour cause d'exception d'inexécution justifiée, de prononcer la compensation judiciaire entre les dettes réciproques (prix non productif d'intérêts d'une part, créance indemnitaire liquidée en principal et intérêts à la date de l'arrêt) et de dire que le solde revenant au maître de l'ouvrage porterait intérêt à compter du jour de l'arrêt, alors « que les intérêts afférents à une dette déjà déterminée que le juge constate sont dus de plein droit dès la mise en demeure, sauf pour le débiteur à établir une faute du créancier l'ayant empêché de s'acquitter du montant de sa dette ; qu'en jugeant que le solde du prix dû à la société Adour piscines n'était pas productif d'intérêts compte tenu de l'importance des défauts, tout en s'abstenant d'expliquer en quoi les défauts litigieux avaient empêché le débiteur de s'acquitter du montant de sa dette, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1153, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
11. Il est jugé, en application de ce texte, que les intérêts afférents à une dette déjà déterminée que le juge constate sont dus de plein droit dès la sommation de payer, sauf au débiteur à établir une faute du créancier l'ayant empêché de s'acquitter du montant de sa dette (Com., 19 octobre 1993, pourvoi n° 91-17.703, Bull. 1993, IV, n° 348).
12. Pour dire que le solde du prix dû à la société Adour piscines n'était pas productif d'intérêts, l'arrêt se fonde sur l'importance des défauts.
13. En se déterminant ainsi, sans rechercher si la société Adour piscines avait commis une faute ayant empêché M. [D] de s'acquitter du montant de sa dette, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. [D] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Adour piscines ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300169
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 mars 2024
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 169 F-D
Pourvoi n° D 22-23.045
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 MARS 2024
La société Adour piscines, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 22-23.045 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2022 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant à M. [S] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Adour piscines, après débats en l'audience publique du 6 février 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 20 septembre 2022), M. [D] a confié à la société Adour piscines la réalisation de travaux de rénovation de sa piscine, après lui avoir versé un acompte.
2. N'ayant pas été payée du solde de sa facture, celle-ci l'a assigné en paiement. Il a formé, à titre reconventionnel, une demande d'indemnisation de ses préjudices.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et sur le second moyen, pris en sa première branche, réunis
Enoncé des moyens
3. Par son premier moyen, la société Adour piscines fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. [D] une certaine somme en réparation de désordres matériels, de prononcer la compensation judiciaire entre les dettes réciproques et de dire que le solde revenant au maître de l'ouvrage portera intérêt à compter du jour de l'arrêt, alors « que le juge ne peut pas modifier l'objet du litige ; qu'en se fondant sur la circonstance que le contrat conclu entre les parties avait été résilié et qu'en l'absence d'acte écrit listant les désordres apparents lors de cette résiliation et en l'absence de réception tacite par ailleurs, la société Adour piscines ne pouvait contester ni la mauvaise exécution de sa part, ni le droit du maître d'ouvrage d'obtenir réparation, cependant qu'aucune des parties ne prétendait que le contrat litigieux avait été résilié, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »
4. Par son deuxième moyen, la société Adour piscines fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. [D] une certaine somme en réparation du préjudice immatériel, de prononcer la compensation judiciaire entre les dettes réciproques et de dire que le solde revenant au maître de l'ouvrage porterait intérêt à compter du jour de l'arrêt, alors « que le juge n'est pas autorisé à modifier l'objet du litige ; qu'en se fondant, pour évaluer le préjudice immatériel de M. [D] à hauteur de 10 000 euros, sur la circonstance que le contrat conclu entre les parties aurait été rompu de manière unilatérale et injustifiée, cependant qu'aucune des parties ne prétendait que le contrat litigieux avait été résilié, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile :
5. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
6. Aux termes du second, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.
7. En premier lieu, pour condamner la société Adour piscines au paiement d'une indemnité équivalente au coût de la reprise des désordres matériels, l'arrêt retient qu'en l'absence de réception, le contrat a été résilié sans qu'aucun écrit ne liste les désordres apparents, de sorte que celle-ci n'était plus fondée à contester ni la mauvaise exécution des travaux, ni le droit du maître de l'ouvrage d'en obtenir réparation.
8. En second lieu, pour condamner la société Adour piscines au paiement d'une indemnité correspondant à un préjudice immatériel, l'arrêt retient qu'il résulte de la rupture unilatérale et injustifiée des relations contractuelles.
9. En statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions, ni M. [D] ni la société Adour piscines ne demandaient de constater la résiliation du contrat par l'une des parties ou de prononcer sa résolution judiciaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
10. La société Adour piscines fait grief à l'arrêt de déclarer M. [D] redevable envers elle du solde de prix non productif d'intérêts pour cause d'exception d'inexécution justifiée, de prononcer la compensation judiciaire entre les dettes réciproques (prix non productif d'intérêts d'une part, créance indemnitaire liquidée en principal et intérêts à la date de l'arrêt) et de dire que le solde revenant au maître de l'ouvrage porterait intérêt à compter du jour de l'arrêt, alors « que les intérêts afférents à une dette déjà déterminée que le juge constate sont dus de plein droit dès la mise en demeure, sauf pour le débiteur à établir une faute du créancier l'ayant empêché de s'acquitter du montant de sa dette ; qu'en jugeant que le solde du prix dû à la société Adour piscines n'était pas productif d'intérêts compte tenu de l'importance des défauts, tout en s'abstenant d'expliquer en quoi les défauts litigieux avaient empêché le débiteur de s'acquitter du montant de sa dette, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1153, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
11. Il est jugé, en application de ce texte, que les intérêts afférents à une dette déjà déterminée que le juge constate sont dus de plein droit dès la sommation de payer, sauf au débiteur à établir une faute du créancier l'ayant empêché de s'acquitter du montant de sa dette (Com., 19 octobre 1993, pourvoi n° 91-17.703, Bull. 1993, IV, n° 348).
12. Pour dire que le solde du prix dû à la société Adour piscines n'était pas productif d'intérêts, l'arrêt se fonde sur l'importance des défauts.
13. En se déterminant ainsi, sans rechercher si la société Adour piscines avait commis une faute ayant empêché M. [D] de s'acquitter du montant de sa dette, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. [D] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Adour piscines ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille vingt-quatre.
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