Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 22-10.238
- ECLI:FR:CCASS:2024:C200306
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 04 avril 2024
Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Saint-Etienne, du 10 septembre 2021- Président
- Mme Martinel (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 avril 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 306 F-D
Pourvoi n° G 22-10.238
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024
La Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 22-10.238 contre le jugement rendu le 10 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Saint-Etienne (4e chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [M] [E], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Martin, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 février 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Martin, conseiller rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Saint-Etienne, 10 septembre 2021) rendu en dernier ressort, Mme [E], qui avait obtenu le versement d'une pension complémentaire d'invalidité par la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés (la caisse de prévoyance), a bénéficié d'un trop perçu pour la période du 1er avril 2016, date de liquidation de ses droits à retraite, au 30 mai 2016, date à laquelle elle a informé la caisse de prévoyance de son changement de situation.
2. Après avoir, devant un tribunal judiciaire, formé opposition à une ordonnance portant injonction de payer une certaine somme à la caisse de prévoyance au titre de ce trop perçu, Mme [E] a opposé à la caisse de prévoyance la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action en invoquant l'article L. 355-3 du code de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La caisse de prévoyance fait grief au jugement de déclarer prescrite son action à l'encontre de Mme [E], en application de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en déclarant prescrite l'action de la caisse de prévoyance sur le fondement de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale, quand l'application de cet article n'avait été invoquée par aucune des parties ni discutée par elles, la caisse de prévoyance revendiquant l'application de l'article 2224 du code civil et Mme [E] se bornant à solliciter l'application de l'article L. 355-3 du code de la sécurité sociale, le tribunal, qui a soulevé d'office un moyen sans en informer préalablement les parties afin de recueillir leurs observations dessus, a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ».
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
4. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
5. Pour déclarer prescrite l'action diligentée par la caisse de prévoyance en remboursement d'arrérages d'une pension complémentaire d'invalidité, dont le versement à Mme [E] avait été indûment poursuivi postérieurement à la liquidation de ses droits à la retraite, le jugement retient qu'aucun acte interruptif de prescription n'a été effectué par la caisse de prévoyance entre le 30 mai 2016, date à laquelle Mme [E] l'avait informée de la liquidation de ses droits à la retraite le 1er avril 2016, et le 30 mai 2018, date d'échéance du délai de prescription biennale de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale applicable à son action.
6. En statuant ainsi, après avoir relevé d'office ce moyen, tiré de la prescription de l'action exercée par la caisse de prévoyance aux fins de se voir rembourser les arrérages de la pension complémentaire d'invalidité indûment versés au regard des dispositions de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale dont aucune des parties ne s'était prévalue, le tribunal judiciaire, qui n'avait pas invité les parties à faire connaître leurs observations sur ce point, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il :
- déclare prescrite l'action de la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés à l'encontre de Mme [E], compte tenu de la prescription biennale de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale, ce délai de deux ans étant échu au 30 mai 2018 ;
- condamne la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés à verser à Mme [E] la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejette le surplus des demandes des parties plus amples ou contraires ;
- condamne la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés aux dépens de l'instance ;
le jugement rendu le 10 septembre 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Saint-Etienne ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Saint-Etienne autrement composé ;
Condamne Mme [E] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C200306
CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 avril 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 306 F-D
Pourvoi n° G 22-10.238
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024
La Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 22-10.238 contre le jugement rendu le 10 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Saint-Etienne (4e chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [M] [E], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Martin, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 février 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Martin, conseiller rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Saint-Etienne, 10 septembre 2021) rendu en dernier ressort, Mme [E], qui avait obtenu le versement d'une pension complémentaire d'invalidité par la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés (la caisse de prévoyance), a bénéficié d'un trop perçu pour la période du 1er avril 2016, date de liquidation de ses droits à retraite, au 30 mai 2016, date à laquelle elle a informé la caisse de prévoyance de son changement de situation.
2. Après avoir, devant un tribunal judiciaire, formé opposition à une ordonnance portant injonction de payer une certaine somme à la caisse de prévoyance au titre de ce trop perçu, Mme [E] a opposé à la caisse de prévoyance la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action en invoquant l'article L. 355-3 du code de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La caisse de prévoyance fait grief au jugement de déclarer prescrite son action à l'encontre de Mme [E], en application de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en déclarant prescrite l'action de la caisse de prévoyance sur le fondement de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale, quand l'application de cet article n'avait été invoquée par aucune des parties ni discutée par elles, la caisse de prévoyance revendiquant l'application de l'article 2224 du code civil et Mme [E] se bornant à solliciter l'application de l'article L. 355-3 du code de la sécurité sociale, le tribunal, qui a soulevé d'office un moyen sans en informer préalablement les parties afin de recueillir leurs observations dessus, a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ».
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
4. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
5. Pour déclarer prescrite l'action diligentée par la caisse de prévoyance en remboursement d'arrérages d'une pension complémentaire d'invalidité, dont le versement à Mme [E] avait été indûment poursuivi postérieurement à la liquidation de ses droits à la retraite, le jugement retient qu'aucun acte interruptif de prescription n'a été effectué par la caisse de prévoyance entre le 30 mai 2016, date à laquelle Mme [E] l'avait informée de la liquidation de ses droits à la retraite le 1er avril 2016, et le 30 mai 2018, date d'échéance du délai de prescription biennale de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale applicable à son action.
6. En statuant ainsi, après avoir relevé d'office ce moyen, tiré de la prescription de l'action exercée par la caisse de prévoyance aux fins de se voir rembourser les arrérages de la pension complémentaire d'invalidité indûment versés au regard des dispositions de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale dont aucune des parties ne s'était prévalue, le tribunal judiciaire, qui n'avait pas invité les parties à faire connaître leurs observations sur ce point, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il :
- déclare prescrite l'action de la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés à l'encontre de Mme [E], compte tenu de la prescription biennale de l'article L. 932-13 du code de la sécurité sociale, ce délai de deux ans étant échu au 30 mai 2018 ;
- condamne la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés à verser à Mme [E] la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejette le surplus des demandes des parties plus amples ou contraires ;
- condamne la Caisse de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés aux dépens de l'instance ;
le jugement rendu le 10 septembre 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Saint-Etienne ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Saint-Etienne autrement composé ;
Condamne Mme [E] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.
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