Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 23-11.371
- ECLI:FR:CCASS:2024:C100175
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation sans renvoi
Audience publique du jeudi 04 avril 2024
Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, du 24 novembre 2022- Président
- Mme Champalaune (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 avril 2024
Cassation sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 175 F-D
Pourvoi n° K 23-11.371
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024
La société Daudruy, Lantez-Mani, Van Overbeke, Nivelet, Douriez, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-11.371 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [K] [C], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Daudruy, Lantez-Mani, Van Overbeke, Nivelet, Douriez, de la SCP Spinosi, avocat de Mme [C], après débats en l'audience publique du 13 février 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 24 novembre 2022), [O] [M], décédé le 4 août 2010, avait été condamné à payer à Mme [C] une certaine somme.
2. Le règlement de la succession a été confié à M. [G] (le notaire) puis à la société civile professionnelle Daudruy, Lantez et Van Overbeke (la société notariale).
3. A compter du mois d'avril 2011, Mme [C] s'était rapprochée du notaire afin que sa créance soit prise en compte dans le règlement de la succession.
4. Les ayants-droit de [O] [M] ont accepté la succession à concurrence de l'actif net par déclaration enregistrée au tribunal puis publiée au BODACC le 4 juillet 2011.
5. Le 23 septembre 2019, Mme [C] a assigné la société notariale en responsabilité et indemnisation du préjudice résultant de la perte de sa créance.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
6. La société notariale fait grief à l'arrêt de déclarer l'action non prescrite, alors « que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'en jugeant, pour écarter la prescription de l'action indemnitaire formée par Mme [C] contre le notaire tendant à la réparation du dommage causé par l'extinction de sa créance que, dans le courrier du 5 août 2014, le notaire se content[ait] d'indiquer [?] qu'il n'a[vait] pas procédé à la vente d'un immeuble de la succession dont le conseil de Mme [C] entendait faire opposition sur le prix de vente à hauteur de sa créance, quand ce courrier indiquait, en outre, que les ayants droit de Monsieur [M] [avaient] accepté la succession à concurrence de l'actif net, ainsi qu'il résult[ait] de la déclaration effectuée auprès du tribunal de grande instance de Bourges le 16 juin 2011, qu'il précisait qu'à compter de la publicité au BODACC de la déclaration d'acceptation, les créanciers de la succession [avaient] eu un délai de quinze mois pour déclarer leur créance en l'étude, domicile élu de la succession et que faute de déclaration dans les délais, les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession [étaient] éteintes à l'égard de celle-ci, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce courrier dont il résultait que Mme [C] savait ou aurait dû savoir dès le 5 août 2014 que sa créance était éteinte, en violation de l'interdiction de ne pas dénaturer les documents de la cause. »
Réponse de la Cour
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :
7. Pour déclarer l'action non prescrite, l'arrêt retient que la lettre adressée le 5 août 2014 par le notaire au conseil de Mme [C] se bornait à indiquer qu'il n'avait pas été procédé à la vente d'un immeuble dépendant de la succession, sur le prix duquel celle-ci entendait faire opposition à hauteur de sa créance.
8. En statuant ainsi, alors que cette lettre indiquait que, sauf erreur de la société notariale, Mme [C] n'avait pas procédé à la déclaration de sa créance dans le délai de quinze mois de la publicité au BODACC de l'acceptation de la succession à concurrence de l'actif net par les ayants- droit de [O] [M], la cour d'appel, qui en a dénaturé le sens clair et précis, a violé le principe susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
11. Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
12. Mme [C] a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son action à compter de la lettre adressée par le notaire à son conseil le 5 août 2014 indiquant que, sauf erreur de la société notariale, elle n'avait pas procédé à la déclaration de sa créance dans le délai de quinze mois de la publicité au BODACC de l'acceptation de la succession à concurrence de l'actif net.
13. Il y a lieu en conséquence de constater que l'action en responsabilité et indemnisation introduite le 23 septembre 2019 par Mme [C] contre la société notariale est prescrite.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable comme prescrite l'action de Mme [C] contre la société civile professionnelle Daudruy, Lantez et Van Overbeke ;
Condamne Mme [C] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant les juges du fond ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C100175
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 avril 2024
Cassation sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 175 F-D
Pourvoi n° K 23-11.371
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024
La société Daudruy, Lantez-Mani, Van Overbeke, Nivelet, Douriez, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-11.371 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [K] [C], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Daudruy, Lantez-Mani, Van Overbeke, Nivelet, Douriez, de la SCP Spinosi, avocat de Mme [C], après débats en l'audience publique du 13 février 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 24 novembre 2022), [O] [M], décédé le 4 août 2010, avait été condamné à payer à Mme [C] une certaine somme.
2. Le règlement de la succession a été confié à M. [G] (le notaire) puis à la société civile professionnelle Daudruy, Lantez et Van Overbeke (la société notariale).
3. A compter du mois d'avril 2011, Mme [C] s'était rapprochée du notaire afin que sa créance soit prise en compte dans le règlement de la succession.
4. Les ayants-droit de [O] [M] ont accepté la succession à concurrence de l'actif net par déclaration enregistrée au tribunal puis publiée au BODACC le 4 juillet 2011.
5. Le 23 septembre 2019, Mme [C] a assigné la société notariale en responsabilité et indemnisation du préjudice résultant de la perte de sa créance.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
6. La société notariale fait grief à l'arrêt de déclarer l'action non prescrite, alors « que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'en jugeant, pour écarter la prescription de l'action indemnitaire formée par Mme [C] contre le notaire tendant à la réparation du dommage causé par l'extinction de sa créance que, dans le courrier du 5 août 2014, le notaire se content[ait] d'indiquer [?] qu'il n'a[vait] pas procédé à la vente d'un immeuble de la succession dont le conseil de Mme [C] entendait faire opposition sur le prix de vente à hauteur de sa créance, quand ce courrier indiquait, en outre, que les ayants droit de Monsieur [M] [avaient] accepté la succession à concurrence de l'actif net, ainsi qu'il résult[ait] de la déclaration effectuée auprès du tribunal de grande instance de Bourges le 16 juin 2011, qu'il précisait qu'à compter de la publicité au BODACC de la déclaration d'acceptation, les créanciers de la succession [avaient] eu un délai de quinze mois pour déclarer leur créance en l'étude, domicile élu de la succession et que faute de déclaration dans les délais, les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession [étaient] éteintes à l'égard de celle-ci, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce courrier dont il résultait que Mme [C] savait ou aurait dû savoir dès le 5 août 2014 que sa créance était éteinte, en violation de l'interdiction de ne pas dénaturer les documents de la cause. »
Réponse de la Cour
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :
7. Pour déclarer l'action non prescrite, l'arrêt retient que la lettre adressée le 5 août 2014 par le notaire au conseil de Mme [C] se bornait à indiquer qu'il n'avait pas été procédé à la vente d'un immeuble dépendant de la succession, sur le prix duquel celle-ci entendait faire opposition à hauteur de sa créance.
8. En statuant ainsi, alors que cette lettre indiquait que, sauf erreur de la société notariale, Mme [C] n'avait pas procédé à la déclaration de sa créance dans le délai de quinze mois de la publicité au BODACC de l'acceptation de la succession à concurrence de l'actif net par les ayants- droit de [O] [M], la cour d'appel, qui en a dénaturé le sens clair et précis, a violé le principe susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
11. Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
12. Mme [C] a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son action à compter de la lettre adressée par le notaire à son conseil le 5 août 2014 indiquant que, sauf erreur de la société notariale, elle n'avait pas procédé à la déclaration de sa créance dans le délai de quinze mois de la publicité au BODACC de l'acceptation de la succession à concurrence de l'actif net.
13. Il y a lieu en conséquence de constater que l'action en responsabilité et indemnisation introduite le 23 septembre 2019 par Mme [C] contre la société notariale est prescrite.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable comme prescrite l'action de Mme [C] contre la société civile professionnelle Daudruy, Lantez et Van Overbeke ;
Condamne Mme [C] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant les juges du fond ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.
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