Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 22-15.964
- ECLI:FR:CCASS:2024:C201192
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 12 décembre 2024
Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, du 14 décembre 2021- Président
- Mme Martinel (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 12 décembre 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1192 F-D
Pourvoi n° H 22-15.964
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 DÉCEMBRE 2024
La société Sivas, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 1], a formé le pourvoi n° H 22-15.964 contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2021 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société L'Immobilière européenne des mousquetaires, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 3], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Sivas, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société L'Immobilière européenne des mousquetaires, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 novembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 14 décembre 2021), le 29 septembre 2009, la société Norminter lyonnais, aux droits de laquelle vient la société L'Immobilière européenne des mousquetaires (le créancier) a fait pratiquer, sur le fondement d'un titre exécutoire judiciaire, une saisie-attribution à l'encontre de la société Sivas (la société) entre les mains du notaire chargé de la réitération d'une promesse synallagmatique de vente souscrite par le créancier au profit de la société Sivas.
2. La société a assigné le créancier en mainlevée de cette saisie devant un juge de l'exécution qui l'a déboutée de sa demande par un jugement du 3 juin 2010, confirmé en appel.
3. Statuant sur renvoi après cassation (3e Civ., 10 juillet 2012, pourvoi n° 11-19.320 et 11-19.316), une cour d'appel a, par arrêt du 15 décembre 2015, infirmé, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 3 juin 2010 par le juge de l'exécution et ordonné, en conséquence, la mainlevée de cette saisie.
4. Par actes des 26 novembre et 15 décembre 2020, la société a saisi un juge de l'exécution en nullité de nouveaux actes d'exécution pratiqués à son encontre en vertu du même titre. Elle a également formé une demande de dommages et intérêts en raison du caractère abusif de la saisie-attribution initiale dont la mainlevée a été ordonnée judiciairement.
5. Par un jugement du 17 juin 2021, ce juge a validé pour partie les nouvelles mesures d'exécution et déclaré irrecevable comme prescrite la demande de dommages et intérêts.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. La société fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite sa demande indemnitaire tirée du caractère abusif de la saisie-attribution pratiquée le 29 septembre 2009 entre les mains du notaire, alors « qu'en cas d'abus de saisie, le délai de prescription de l'action tendant à la condamnation du créancier saisissant à des dommages et intérêts ne court qu'à compter de la date à laquelle le caractère abusif de la saisie litigieuse a été reconnu par une décision de justice passée en force de chose jugée ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande indemnitaire formée par la société Sivas tirée du caractère abusif de la saisie-attribution pratiquée le 29 septembre 2009, que le caractère irrégulier de la saisie était incontestablement connu de la société débitrice qui l'a contestée devant le juge de l'exécution en 2009 et qu'il importait peu à cet égard que la mainlevée de la saisie n'ait été définitivement prononcée que le 15 décembre 2015, puisque dès l'origine la société Sivas en connaissait le vice », cependant que le point de départ du délai de la prescription de cette demande indemnitaire ne pouvait être fixé qu'à la date de la décision ayant définitivement annulé la saisie-attribution litigieuse et reconnu son caractère abusif, la cour d'appel a violé les articles 2224 du code civil et L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution. »
Réponse de la Cour
8. La Cour de cassation a notamment jugé (Ch. mixte., 19 juillet 2024, pourvoi n° 20-23.527, publié) qu'il se déduit de l'article 2224 du code civil que le délai de prescription de l'action en responsabilité civile court à compter du jour où celui qui se prétend victime a connu ou aurait dû connaître le dommage, le fait générateur de responsabilité et son auteur ainsi que le lien de causalité entre le dommage et le fait générateur.
9. Ayant exactement retenu que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au jour de la manifestation du dommage ou de la date à laquelle la victime en a eu connaissance, et constaté que le dommage, caractérisé par l'immobilisation des fonds saisis ayant fait obstacle au projet de construction de la société, s'est réalisé dès la mise en oeuvre de la saisie-attribution entre les mains du notaire, le caractère irrégulier de la saisie-attribution étant connu de la débitrice qui l'avait contestée devant le juge de l'exécution en 2009, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a décidé que la demande de dommages et intérêts, formée le 26 novembre 2020, soit plus de dix années après la saisie, était prescrite, peu important le fait que la mainlevée de la saisie n'ait été définitivement prononcée que le 15 décembre 2015.
10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sivas aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Sivas et la condamne à payer à la société L'Immobilière européenne des mousquetaires la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en l'audience publique du douze décembre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.ECLI:FR:CCASS:2024:C201192
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 décembre 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1192 F-D
Pourvoi n° H 22-15.964
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 DÉCEMBRE 2024
La société Sivas, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 1], a formé le pourvoi n° H 22-15.964 contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2021 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société L'Immobilière européenne des mousquetaires, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 3], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Sivas, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société L'Immobilière européenne des mousquetaires, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 novembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 14 décembre 2021), le 29 septembre 2009, la société Norminter lyonnais, aux droits de laquelle vient la société L'Immobilière européenne des mousquetaires (le créancier) a fait pratiquer, sur le fondement d'un titre exécutoire judiciaire, une saisie-attribution à l'encontre de la société Sivas (la société) entre les mains du notaire chargé de la réitération d'une promesse synallagmatique de vente souscrite par le créancier au profit de la société Sivas.
2. La société a assigné le créancier en mainlevée de cette saisie devant un juge de l'exécution qui l'a déboutée de sa demande par un jugement du 3 juin 2010, confirmé en appel.
3. Statuant sur renvoi après cassation (3e Civ., 10 juillet 2012, pourvoi n° 11-19.320 et 11-19.316), une cour d'appel a, par arrêt du 15 décembre 2015, infirmé, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 3 juin 2010 par le juge de l'exécution et ordonné, en conséquence, la mainlevée de cette saisie.
4. Par actes des 26 novembre et 15 décembre 2020, la société a saisi un juge de l'exécution en nullité de nouveaux actes d'exécution pratiqués à son encontre en vertu du même titre. Elle a également formé une demande de dommages et intérêts en raison du caractère abusif de la saisie-attribution initiale dont la mainlevée a été ordonnée judiciairement.
5. Par un jugement du 17 juin 2021, ce juge a validé pour partie les nouvelles mesures d'exécution et déclaré irrecevable comme prescrite la demande de dommages et intérêts.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. La société fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite sa demande indemnitaire tirée du caractère abusif de la saisie-attribution pratiquée le 29 septembre 2009 entre les mains du notaire, alors « qu'en cas d'abus de saisie, le délai de prescription de l'action tendant à la condamnation du créancier saisissant à des dommages et intérêts ne court qu'à compter de la date à laquelle le caractère abusif de la saisie litigieuse a été reconnu par une décision de justice passée en force de chose jugée ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande indemnitaire formée par la société Sivas tirée du caractère abusif de la saisie-attribution pratiquée le 29 septembre 2009, que le caractère irrégulier de la saisie était incontestablement connu de la société débitrice qui l'a contestée devant le juge de l'exécution en 2009 et qu'il importait peu à cet égard que la mainlevée de la saisie n'ait été définitivement prononcée que le 15 décembre 2015, puisque dès l'origine la société Sivas en connaissait le vice », cependant que le point de départ du délai de la prescription de cette demande indemnitaire ne pouvait être fixé qu'à la date de la décision ayant définitivement annulé la saisie-attribution litigieuse et reconnu son caractère abusif, la cour d'appel a violé les articles 2224 du code civil et L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution. »
Réponse de la Cour
8. La Cour de cassation a notamment jugé (Ch. mixte., 19 juillet 2024, pourvoi n° 20-23.527, publié) qu'il se déduit de l'article 2224 du code civil que le délai de prescription de l'action en responsabilité civile court à compter du jour où celui qui se prétend victime a connu ou aurait dû connaître le dommage, le fait générateur de responsabilité et son auteur ainsi que le lien de causalité entre le dommage et le fait générateur.
9. Ayant exactement retenu que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au jour de la manifestation du dommage ou de la date à laquelle la victime en a eu connaissance, et constaté que le dommage, caractérisé par l'immobilisation des fonds saisis ayant fait obstacle au projet de construction de la société, s'est réalisé dès la mise en oeuvre de la saisie-attribution entre les mains du notaire, le caractère irrégulier de la saisie-attribution étant connu de la débitrice qui l'avait contestée devant le juge de l'exécution en 2009, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a décidé que la demande de dommages et intérêts, formée le 26 novembre 2020, soit plus de dix années après la saisie, était prescrite, peu important le fait que la mainlevée de la saisie n'ait été définitivement prononcée que le 15 décembre 2015.
10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sivas aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Sivas et la condamne à payer à la société L'Immobilière européenne des mousquetaires la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en l'audience publique du douze décembre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
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