mardi 23 septembre 2025

L'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurances, les causes d'interruption de la prescription biennale

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

FC



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 11 septembre 2025




Cassation


Mme TEILLER, présidente



Arrêt n° 393 F-D

Pourvoi n° A 23-16.468




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 SEPTEMBRE 2025

Le syndicat des copropriétaires de la résidence du Petit Lac sis [Adresse 11], représenté par son syndic en exercice la société Nardi Jean Jaurès, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 23-16.468 contre l'arrêt rendu le 9 mars 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-4), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 9],

2°/ à la société d'assurance mutuelle l'Auxiliaire, dont le siège est [Adresse 5], prise en sa qualité d'assureur des sociétés Gerfa et Proj'Isol,

3°/ à la société Crudeli, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 12],

4°/ à la société Allamanno entreprise, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 24],

5°/ à la société Lassauge, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 8],

6°/ à la société Qualiconsult, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1],

7°/ à la société Millet paysage-environnement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 10],

8°/ à l'organisme mutualiste assurance mutuelle agricole Groupama Rhône Alpes Auvergne, dont le siège est [Adresse 15],

9°/ à la société Fayat bâtiment, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 6],

10°/ à la société Proj'Isol, société par actions simplifiée, prise en la personne de son mandataire liquidateur, la société SBCMJ, société d'exercie libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 14],

11°/ à la société LGL France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 16],

12°/ à la société Dumez Côte d'Azur, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 6],

13°/ à la société Générale d'étanchéité et de réfection des façades (GERFA), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 17],

14°/ à la société SMABTP, société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 18],

15°/ à la société Menui Metal Serru Indu Azuralu, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 22],

16°/ à la société Molding façades, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 21],

17°/ à la société d'assurance mutuelle MAAF assurances, dont le siège est [Adresse 19],

18°/ à la société Marbrerie azuréenne, société anonyme, dont le siège est [Adresse 7],

19°/ à la société SMA, société anonyme, venant aux droits de la société Sagena, dont le siège est [Adresse 18],

20°/ à la société Generali IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],

21°/ à la société Bet Olivier Octobon, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 20],

22°/ à la société Giani, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 23],

23°/ à la société Maçonnerie de la plaine, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

24°/ à la société d'assurance mutuelle Areas dommages, dont le siège est [Adresse 13],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bironneau, conseillère référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence du Petit Lac, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Axa France IARD, après débats en l'audience publique du 11 juin 2025 où étaient présents Mme Teiller, présidente, Mme Bironneau, conseillère référendaire rapporteure, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffière de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée de la présidente et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte au syndicat des copropriétaires de la résidence du Petit Lac du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Qualiconsult, L'Auxiliaire, Allamanno entreprise, Areas dommages, Crudeli, Lassauge, Millet paysage-environnement, Groupama Rhône Alpes Auvergne, Fayat bâtiment, Proj'Isol, prise en la personne de son mandataire liquidateur la société SBCMJ, LGL France, Dumez Côte d'Azur, Générale d'étanchéité et de réfection des façades (GERFA), SMABTP, Menui Metal Serru Indu Azuralu, Molding façades, MAAF assurances, Marbrerie azuréenne, SMA, Generali IARD, Bet Olivier Octobon, Giani et Maçonnerie de la plaine.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 mars 2023) et les productions, la société civile immobilière Petit Lac (la SCI) a fait édifier un ensemble immobilier, après avoir souscrit un contrat d'assurance dommages-ouvrage auprès de la société Axa France IARD (la société Axa).

3. Les travaux ont été réceptionnés le 28 mai 2008, avec réserves.

4. Par courrier du 29 mars 2010, la société Axa a refusé de prendre en charge les sinistres déclarés par le syndicat des copropriétaires de la résidence du Petit Lac (le syndicat des copropriétaires).

5. Sur assignation en référé du syndicat des copropriétaires au contradictoire, notamment de l'assureur dommages-ouvrage, une expertise a été ordonnée par décision du 15 décembre 2010, qui a été étendue à d'autres désordres par ordonnance du 14 avril 2014.

6. Le syndicat des copropriétaires a, ensuite, assigné les différents constructeurs et leurs assureurs aux fins d'indemnisation, puis, par assignation du 12 février 2020, la société Axa.

7. Celle-ci a opposé au syndicat des copropriétaires la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de déclarer opposables à son égard les clauses relatives à la prescription biennale et de déclarer prescrite son action engagée à l'encontre de la société Axa, alors « que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du code des assurances, les causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code ; qu'en retenant que les mentions de la police d'assurance dommages-ouvrage souscrite le 5 juin 2008 étaient suffisantes pour permettre à l'assuré, le syndicat des copropriétaires, de connaître les causes d'interruption du délai de prescription biennale, de sorte que la clause relative à la prescription biennale lui était bien opposable, après avoir pourtant constaté que les conditions générales se bornaient à indiquer "Toute action dérivant du contrat d'assurance est prescrite par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance, dans les termes des articles L. 14-1 et L. 114-2 du code des assurances" et à rappeler divers textes du code des assurances dont les articles L. 114-1 et L. 114-2, ce dernier texte se bornant à prévoir que "La prescription est interrompue par une des causes ordinaires d'interruption de la prescription et par la désignation d'experts à la suite d'un sinistre. L'interruption de la prescription de l'action peut, en outre, résulter de l'envoi d'une lettre recommandée ou d'un envoi recommandé électronique, avec accusé de réception, adressés par l'assureur à l'assuré en ce qui concerne l'action en paiement de la prime et par l'assuré à l'assureur en ce qui concerne le règlement de l'indemnité" sans préciser quelles sont les causes ordinaires d'interruption de la prescription, de sorte que lesdites conditions générales ne précisaient pas les causes ordinaires d'interruption de la prescription, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article R. 112-1 du code des assurances dans sa rédaction issue du décret n° 2006-740 du 27 juin 2006. »

Réponse de la Cour

Vu l'article R. 112-1 du code des assurances, dans sa rédaction issue du décret n° 2006-740 du 27 juin 2006 :

9. Selon ce texte, l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du code des assurances, les causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code.

10. Pour déclarer opposables au syndicat des copropriétaires les clauses de la police d'assurance dommages-ouvrage relatives à la prescription biennale et déclarer prescrite son action engagée à l'encontre de la société Axa, l'arrêt énonce, d'abord, que le représentant de la SCI a signé les conditions particulières du contrat dans lequel il reconnaît avoir reçu un exemplaire des conditions générales, lesquelles rappellent le délai de prescription biennale en matière de police d'assurance et divers textes du code des assurances, dont les articles L. 114-1 et L. 114-2.

11. Puis il retient que ces mentions sont suffisantes pour permettre à l'assuré de connaître les causes d'interruption du délai de prescription biennale, de sorte que la prescription biennale est opposable au syndicat des copropriétaires et que, un délai de plus de deux années s'étant écoulé entre le dernier acte interruptif intervenu le 14 avril 2014 et l'assignation au fond de l'assureur dommages-ouvrage le 12 février 2020, l'action du syndicat des copropriétaires est prescrite.

12. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat ne précisait pas les causes ordinaires d'interruption de la prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Axa France IARD et la condamne à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence du Petit Lac la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le onze septembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C30039

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