mardi 1 juillet 2025

Référé interruptif de prescription quinquennale d'un fabricant de peinture - responsabilité de l'entrepreneur et garantie d'assureur (activité déclarée)

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 26 juin 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 331 FS-B

Pourvoi n° N 23-20.274




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2025

La société Mufraggi matériaux, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 8], a formé le pourvoi n° N 23-20.274 contre l'arrêt rendu le 28 juin 2023 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société A Citadella, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6],

2°/ à M. [B] [X], domicilié [Adresse 4], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Mader Colors,

3°/ à M. [H] [R], domicilié [Adresse 9],

4°/ au syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 7], représenté par son syndic en exercice la société Ajaccio immobilier, dont le siège est [Adresse 2],

5°/ à la Société mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 5],

6°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], prise en sa qualité d'assureur des sociétés Mufraggi matériaux et Maders Colors,

7°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

M. [X], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Mader Colors, a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt.

La société A Citadella a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident et un pourvoi provoqué contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

M. [X], ès qualités, invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

La société A Citadella, invoque, à l'appui de son pourvoi incident et de son pourvoi provoqué, un moyen de cassation chacun.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Mufraggi matériaux, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société A Citadella, de la SCP Duhamel, avocat de la société Allianz IARD, de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 7], de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [X], ès qualités, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Foucher-Gros, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mme Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Mufraggi matériaux du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. [R], la SMABTP et la société Axa France IARD.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 28 juin 2023), le 1er juillet 2011, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7], bâtiment B (le syndicat des copropriétaires), a conclu avec la société A Citadella (l'entrepreneur), assurée auprès de la SMABTP, un marché de travaux de ravalement des façades.

3. L'entrepreneur a acquis la peinture auprès de la société Mufraggi matériaux (le fournisseur), qui s'est elle-même fournie auprès de la société Mader Colors (le fabricant), désormais en liquidation judiciaire, toutes deux assurées auprès de la société Allianz IARD.

4. Le 29 novembre 2012, lors des opérations préalables à la réception, l'expert chargé du suivi des travaux de ravalement a constaté une différence de teinte sur les façades du bâtiment.

5. Une expertise amiable, diligentée à l'initiative de l'assureur de l'entrepreneur, au contradictoire du fournisseur et du fabricant, a donné lieu à un rapport déposé le 1er février 2013.

6. Par actes des 28 mai et 4 juin 2013, l'entrepreneur a assigné le fabricant et le fournisseur en sollicitant l'opposabilité du jugement à intervenir au second. Par jugement du 30 mai 2016, le tribunal a sursis à statuer sur ces demandes.

7. Par actes des 1er, 4 et 22 avril 2016, le syndicat des copropriétaires, après expertise judiciaire, a assigné l'entrepreneur et son assureur de responsabilité décennale, le fournisseur, le fabricant et leur assureur, en indemnisation de ses préjudices.

8. M. [X], agissant en sa qualité de mandataire judiciaire du fabricant, est intervenu à l'instance.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen et le troisième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi incident de M. [X], ès qualités

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal et sur le premier moyen du pourvoi incident de M. [X], ès qualités, rédigés en termes similaires, réunis

Enoncé des moyens

10. Par son premier moyen, le fournisseur fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec M. [X], ès qualités, à relever et à garantir indemne l'entrepreneur de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires, alors « que le juge ne peut écarter la prescription d'une action sans fixer son point de départ ; qu'en écartant la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action formée par la société A Citadella à l'encontre de la société Mufraggi matériaux sans préciser à quelle date ce délai de prescription avait commencé à courir, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 110-4 du code de commerce et 2224 du code civil. »

11. Par son premier moyen, M. [X], ès qualités, fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec le fournisseur, à relever et à garantir indemne l'entrepreneur de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires, alors « que le juge ne peut écarter la prescription d'une action sans fixer son point de départ ; qu'en écartant la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action formée par la société A Citadella à l'encontre de la société Mader Colors sans préciser à quelle date ce délai de prescription avait commencé à courir, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 110-4 du code de commerce et 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

12. La cour d'appel a retenu que la prescription quinquennale avait commencé à courir à compter des 2 novembre 2011 et 4 juin 2012, de sorte que les moyens, qui manquent en fait, ne sont pas fondés.

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

13. Le fournisseur fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec M. [X], ès qualités, à relever et à garantir indemne l'entrepreneur de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires, alors « qu'une demande en justice n'interrompt la prescription d'une action en responsabilité que si elle manifeste l'intention du demandeur de mettre en cause la responsabilité du défendeur ; qu'en jugeant que « les appels en garantie présentés à l'encontre de la fournisseuse et de la fabricante de la peinture inadaptée, quel que soit l'article invoqué en défense, ne peuvent se voir opposer de prescription » au motif que l'action engagée devant le tribunal de commerce d'Ajaccio par actes des 28 mai et 4 juin 2013 avait « clairement interrompu la prescription » cependant qu'elle constatait que les demandes en justice qui avaient alors été formulées étaient dirigées contre des tiers ou ne visait la société Mufraggi qu'afin que le jugement statuant sur la responsabilité délictuelle d'un tiers lui soit déclaré opposable, ce dont il résultait que cette demande ne manifestait pas la volonté de l'entrepreneur de mettre en cause la responsabilité contractuelle de la société Mufraggi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 2241 du code civil. »

Réponse de la Cour

14. Selon l'article 2241 du code civil, une demande en justice, même en référé, interrompt les délais de prescription et de forclusion.

15. L'assignation aux fins de voir rendre opposable à une partie le jugement rendu à l'encontre d'une autre a pour effet de permettre, d'une part, à la partie appelée en déclaration de jugement opposable de faire valoir des observations en défense, d'autre part, au demandeur à l'action d'invoquer directement à l'encontre de cette partie l'autorité de la chose jugée de la décision qui sera rendue. Aussi, une telle assignation constitue-t-elle une demande en justice interruptive de prescription au sens du texte précité.

16. Il en résulte que c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'assignation délivrée par l'entrepreneur, tendant à voir déclarer opposable au fournisseur un jugement statuant sur des demandes dirigées contre le fabricant, avait interrompu le délai de prescription à l'égard de ce fournisseur.

17. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal et sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident de M. [X], ès qualités, rédigés en termes similaires, réunis

Enoncé des moyens

18. Par son troisième moyen, le fournisseur fait grief à l'arrêt de déclarer hors de cause la société Allianz IARD et de le condamner, in solidum avec M. [X], ès qualités, à relever et à garantir indemne l'entrepreneur de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires, alors « que le juge ne peut écarter la prescription d'une action sans fixer son point de départ ; qu'en jugeant prescrite l'action exercée par la société A Citadella à l'encontre de la société Allianz IARD, assureur de la société Mufraggi matériaux, sans préciser à quelle date ce délai de prescription avait commencé à courir, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 110-4 du code de commerce et 2224 du code civil. »

19. Par son troisième moyen, M. [X], ès qualités, fait grief à l'arrêt de déclarer hors de cause la société Allianz IARD et de le condamner, in solidum avec le fournisseur, à relever et à garantir indemne l'entrepreneur de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires, alors « que le juge ne peut écarter la prescription d'une action sans fixer son point de départ ; qu'en jugeant prescrite l'action exercée par la société A Citadella à l'encontre de la société Allianz IARD, assureur de la société Mader Colors, sans préciser à quelle date ce délai de prescription avait commencé à courir, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 110-4 du code de commerce et 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

20. La cour d'appel a retenu que la prescription quinquennale avait commencé à courir à compter des 2 novembre 2011 et 4 juin 2012, de sorte que les moyens, qui manquent en fait, ne sont pas fondés.

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident de M. [X], ès qualités

Enoncé du moyen

21. M. [X], ès qualités, fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec le fournisseur, à relever et à garantir indemne l'entrepreneur de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires, alors « qu'en l'espèce, M. [X], se fondant sur les conclusions de l'expert judiciaire, faisait valoir que 51 pots de peinture « teintée » étant nécessaires pour repeindre les façades est, ouest et sud de l'immeuble entre les mois de septembre 2011 et février 2012, ces façades ne pouvaient avoir été peintes exclusivement avec les 55 pots de peinture « teintée » livrés par la société Mader Colors puisqu'elle n'avait livré qu'un total de 33 pots de peinture « teintée » le 2 novembre 2011, les 22 pots supplémentaires de peinture « teintée » n'ayant été livrés que le 4 juin 2012, soit après l'achèvement des travaux de peinture de ces façades en février 2012 ; qu'il en concluait que soit une autre peinture que celle livrée par la société Mader Colors avait été utilisée au commencement des travaux, soit qu'un mélange avait été réalisé et était à l'origine de l'hétérogénéité des produits relevée par l'expert ; qu'en jugeant cependant, pour condamner la société Mader Colors à garantir la société A Citadella des condamnations prononcées à son encontre, que la société Mader Colors avait livré au total 66 pots de peinture les 3 octobre 2011 et 2 novembre 2011, soit un nombre suffisant de pots pour réaliser des travaux nécessitant 51 pots avant le mois de février 2012, sans vérifier, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si la livraison effectuée le 3 octobre 2011 par la société Mader Colors ne portait pas exclusivement sur 33 pots de peinture blanche « non teintée », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1217 du code civil. »

Réponse de la Cour

22. Ayant souverainement retenu que les désordres trouvaient leur cause dans une absence d'homogénéisation de la peinture vendue par le fabricant, en raison d'une carence en colorant à la fabrication, qu'aucun problème n'avait été rencontré sur la façade nord, peinte avec un autre produit, et que le fabricant avait envoyé en analyse de la peinture blanche aux lieu et place de la peinture livrée, de sorte que sa démonstration n'était pas crédible, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche sur le contenu de la livraison du 3 octobre 2011 que ses constatations rendaient inopérante, a pu déduire de ces seuls motifs que le fabricant devait garantir l'entrepreneur des condamnations prononcées à son encontre.

23. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.

Sur le moyen du pourvoi incident de la société A Citadella

Enoncé du moyen

24. L'entrepreneur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au syndicat des copropriétaires une certaine somme, en réparation des défauts de remise en état des façades sud, ouest et est du bâtiment B, avec intérêts au taux légal, et de fixer la durée de réalisation de remise en état, alors « que le constructeur, tenu d'une obligation de résultat pour les dommages intervenus durant la période antérieure à la réception, peut toujours s'exonérer en présence d'une cause étrangère présentant les caractères de la force majeure ; qu'il y a force majeure lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur ; qu'en jugeant que la société A Citadella ne démontrait pas que les conditions de la force majeure étaient réunies, tout en s'abstenant de vérifier, ainsi qu'elle y était invitée, si cette société pouvait être en mesure de déceler les vices dont la peinture se trouvait affectée avant son application en façade, et alors qu'il ressortait de ses propres constatations que d'un côté l'expert amiable avait conclu que les désordres trouvaient leur origine dans une réaction chimique au colorant contenu dans la peinture avec le support datant des années 70 alors que l'expert judiciaire, à la suite des investigations et analyses qu'il avait fait réaliser par le laboratoire Catalyse, était parvenu à déterminer que les causes du désordre avaient pour origine une absence d'homogénéisation de peinture vendue par la société Mader Colors due à une carence en colorant à la fabrication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

25. La cour d'appel a relevé que l'entrepreneur avait lui-même choisi la peinture à l'origine des désordres et qu'il se bornait à rappeler qu'il ne l'avait pas fabriquée.

26. Elle a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, que l'entrepreneur ne rapportait pas la preuve d'un événement revêtant les caractères de la force majeure, exonératoire de sa responsabilité, et a ainsi légalement justifié sa décision.

Sur le moyen du pourvoi provoqué de la société A Citadella

Enoncé du moyen

27. L'entrepreneur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en garantie formée à l'encontre de la SMABTP, alors :

« 1°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties, lesquelles sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; qu'en l'espèce, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 7] avait fait assigner la SMABTP, se prévalant de sa qualité d'assureur de la société A Citadella au titre d'une police intitulée « contrat d'assurance professionnelle des entreprises du bâtiment et des travaux publics CAP 2000 » et portant le numéro 1247000/001294687, et dont elle justifiait l'existence par la production aux débats d'une attestation d'assurance ; que de son côté, la société A Citadella faisait valoir qu'en cas de condamnation, son assureur, la SMABTP, lui devrait « garantie contractuelle » ; qu'enfin, la société SMABTP elle-même ne niait pas que la société A Citadella était bien assurée par ses soins et produisait même aux débats un extrait des « conditions générales du contrat souscrit » ; qu'en jugeant toutefois que la société A Citadella ne précisait pas sur quel fondement elle demandait la garantie de son assureur en cas de condamnation, cependant que les parties s'accordaient sur le fait que cette
demande de garantie était fondée sur le contrat que la société A Citadella avait souscrit auprès de la SMABTP, et dont personne ne contestait l'existence, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; qu'en l'espèce, il ressortait de l'attestation d'assurance produite aux débats que la SMABTP garantissait les activités de « peinture et ravalement » de son sociétaire, la société A Citadella, non seulement au titre de sa « responsabilité en cas de dommages matériels à l'ouvrage après réception » mais également au titre de sa « responsabilité civile en cours ou après travaux », précisant qu'à ce titre le « contrat garantit la responsabilité civile encourue vis-à-vis des tiers par le sociétaire, du fait de ses activités professionnelles mentionnées ci-avant, que ce soit en cours ou après exécution de ses travaux », limitant sa garantie à 1 000 000 par sinistre concernant les « dommages matériels » ; que par ailleurs, il ressortait des conditions générales du contrat souscrit, également produites aux débats, qu'était considéré comme tiers « toute personne autre que : - vous-même [le sociétaire] ; - vos associés dans le cadre de votre entreprise ou dans le cadre d'une association ou d'un groupement d'entreprises auquel vous participez ; - si votre entreprise est une personne morale, le président, les administrateurs, directeurs généraux et gérant de la société assurée, dans l'exercice de leurs fonctions ; - vos préposés ou ceux de la société assurée dans l'exercice de leurs fonctions ; - celles exerçant un emploi, même non rémunéré, dans votre entreprise, au cours de leur travail » ; qu'en rejetant toutefois la demande en garantie formulée à l'encontre de la SMABTP, après avoir pourtant confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la société A Citadella, au titre de sa responsabilité contractuelle vis-à vis du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 7], tiers au contrat d'assurance, à lui payer la somme de 132 069,08 euros en réparation des défauts de remise en état des façades sud, ouest et est du bâtiment B, la cour d'appel a violé la loi des parties en violation de l'article 1134 alinéa 1, devenu 1103, du code civil. »

Réponse de la Cour

28. La cour d'appel a, sans modifier l'objet du litige, constaté que la SMABTP déniait sa garantie pour les désordres relevant de la responsabilité contractuelle, et relevé que les conditions générales du contrat liant les parties ne prévoyaient de prise en charge par l'assureur que pour les dommages survenus après réception.

29. Ayant constaté qu'aucune réception n'était intervenue, elle a pu en déduire, sans être tenue de se référer aux mentions de l'attestation d'assurance, qui, à l'égard de l'assuré, ne peuvent prévaloir sur les stipulations de la police d'assurance, que les conditions de la garantie n'étaient pas réunies.

30. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-six juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par M. Boyer, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mm Teiller, président empêché, le conseiller rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2025:C300331

Vente immobilière et responsabilité décennale

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 26 juin 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 330 FS-B

Pourvoi n° U 23-21.775




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2025

1°/ M. [O] [E], domicilié [Adresse 7], [Localité 8] (Maroc),

2°/ Mme [Y] [E], épouse [R], domiciliée [Adresse 6], [Localité 5],

3°/ Mme [C] [E], épouse [T], domiciliée [Adresse 1], [Localité 4],

4°/ la société BBC distribution, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], [Localité 5],

ont formé le pourvoi n° U 23-21.775 contre l'arrêt rendu le 4 juillet 2023 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [I] [N],

2°/ à Mme [X] [V], épouse [N],

tous deux domiciliés [Adresse 2], [Localité 3],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [E], de Mmes [Y] et [C] [E] et de la société BBC distribution, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 4 juillet 2023), soutenant que la maison que M. et Mme [E] leur avait vendue le 18 février 2013 était affectée de désordres, M. et Mme [N] les ont, après expertise, en août 2015, assignés en indemnisation de leurs préjudices.

2. Par ordonnance du 21 décembre 2017, confirmée en appel le 17 janvier 2019, le juge de la mise en état a condamné in solidum M. et Mme [E] à payer à M. et Mme [N] diverses indemnités à titre provisionnel en réparation de ces désordres.

3. Courant 2016, M. et Mme [N] ont assigné M. [E] et ses deux filles (les consorts [E]) ainsi que la société BBC distribution, aux fins d'inopposabilité, sur le fondement de l'action paulienne, de la cession par M. [E] à ses deux filles de ses parts au sein de la société BBC distribution intervenue le 20 mars 2015, de la donation par M. [E] à ses deux filles de la pleine propriété d'un appartement intervenue le 15 mai 2015, et de la cession par M. [E] de ses parts au sein de la société Avenir patrimoine d'entreprises à la société BBC distribution intervenue le 17 septembre 2015.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Les consorts [E] et la société BBC distribution font grief à l'arrêt de déclarer recevable et bien fondée l'action paulienne de M. et Mme [N] contre la donation et les cessions de parts sociales litigieuses, alors « que si le créancier demandeur à l'action paulienne doit justifier d'une créance au moins certaine en son principe au moment de l'acte argué de fraude, la recevabilité de l'action suppose en revanche que sa créance soit certaine et liquide au jour où elle est exercée ; qu'en l'espèce, pour juger l'action paulienne intentée par M. et Mme [N] recevable, la cour d'appel a constaté que ces derniers justifiaient d'un principe de créance tant au moment des actes argués de fraude courant 2015 qu'au jour de l'arrêt ; qu'en se déterminant ainsi alors que la créance de M. et Mme [N] n'était ni certaine ni liquide lorsqu'ils ont intenté l'action paulienne, la cour d'appel a violé l'article 1167 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. Le créancier qui exerce l'action paulienne doit justifier d'une créance certaine au moins en son principe à la date de l'acte argué de fraude ainsi, sous peine d'irrecevabilité, qu'au moment où le juge statue (Com., 24 mars 2021, pourvoi n° 19-20.033, publié).

6. La cour d'appel, qui a relevé que, dès la note aux parties n° 1 du 1er décembre 2014, l'expert avait constaté la présence d'infiltrations rendant la maison acquise quasiment inhabitable ou insalubre, et que, par ordonnance du 21 décembre 2017, le juge de la mise en état avait retenu le caractère incontestablement décennal des désordres et la responsabilité de plein droit des vendeurs en leur qualité de constructeurs, mettant à leur charge des provisions n'ayant, par leur nature, pas vocation à éteindre définitivement la créance de M. et Mme [N] ni à fixer définitivement la part de responsabilité incombant à M. et Mme [E], en a exactement déduit que, M. et Mme [N] justifiant d'un principe certain de créance tant à la date des actes argués de fraude qu'au jour où elle statuait, la fin de non-recevoir, qui leur était opposée au motif de l'absence de créance certaine et liquide au jour de l'action, devait être rejetée.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [E], Mmes [Y] et [C] [E] et la société BBC distribution aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-six juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa del'article 450 du code de procédure civile et signé par M. Boyer, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mme Teiller, président empêché, le conseiller rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300330

Manquements du maître d'oeuvre dans le suivi du chantier justifiant sa condamnation à des pénalités de retard au bénéfice du maître de l'ouvrage

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 26 juin 2025




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 329 FS-B

Pourvoi n° Y 23-18.306




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2025

1°/ La société La Résistance, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 6],

2°/ Mme [T] [G], épouse [P],

3°/ M. [F] [P],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

4°/ la société Serv'auto, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6],

ont formé le pourvoi n° Y 23-18.306 contre l'arrêt rendu le 9 mai 2023 par la cour d'appel de Pau (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société AXA France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ à la société Bernadet construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5],

3°/ à la société Atlantic design construction France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 7],

4°/ à la société Dilmex, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 8],

5°/ à la société MMA IARD, société anonyme, venant aux droits de la compagnie Covea Risks,

6°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, venant aux droits de la compagnie Covea Risks,

toutes deux ayant leur siège [Adresse 1]

7°/ à la société Ekip', société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], anciennement dénommée François Legrand, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Siba,

défenderesses à la cassation.

La société Atlantic design construction a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société civile immobilière La Résistance, de M. et Mme [P] et de la société Serv'auto, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société AXA France IARD, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Atlantic design construction France, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Foucher-Gros, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mme Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société civile immobilière La Résistance (la SCI), M. et Mme [P] et la société Serv'auto du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Bernadet construction, MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles et Ekip', prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Siba.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 9 mai 2023), la SCI a fait construire un local commercial et industriel, occupé après son achèvement par la société Serv'auto, gérée par M. et Mme [P].

3. Sont intervenues à l'opération de construction :

- la société Atlantic design construction SL, aux droits de laquelle vient la société Atlantic design construction France, pour la maîtrise d'oeuvre,

- la société Dilmex, assurée auprès de la société Axa France IARD, pour les travaux de terrassement-VRD,

- la société Bernadet construction, assurée auprès des sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD, pour la maçonnerie et le gros oeuvre,

- la société Siba, sous-traitante de la société Bernadet construction, pour le dallage.

4. Après expertise, la SCI, M. et Mme [P] et la société Serv'auto ont assigné la société Atlantic design construction France, la société Dilmex et son assureur, la société Bernadet construction et ses assureurs en indemnisation de leurs préjudices.

5. La société Atlantic design construction France a appelé en garantie son assureur, la société Axa France IARD.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

6. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement d'une certaine somme dirigée contre les sociétés Atlantic design construction France, Dilmex et son assureur, alors « que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; que le risque avéré d'inondation et de demande de démolition et réfection de l'immeuble par les pouvoirs publics le rendent, en eux-mêmes, impropre à sa destination, même s'ils ne se sont pas réalisés dans le délai d'épreuve ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que l'expert avait conclu, concernant le désordre n° 2.2, que « ce désordre rendait impropre l'ouvrage à sa destination dès lors que : - la démolition et la réfection conforme du réseau d'eaux pluviales pouvait être exigée par les pouvoirs publics, - l'absence d'alimentation électrique de secours du relevage des eaux peut en entraîner l'arrêt et une élévation de l'eau sur le parking qui sera susceptible de pénétrer dans les locaux » ; qu'il résultait de ces constatations que le désordre n° 2.2 affectant l'immeuble de la SCI La Résistance constituait un dommage actuel rendant l'immeuble impropre à sa destination, relevant en conséquence de la garantie décennale et devant dès lors être garanti par les sociétés ADC, Dilmex et son assureur Axa France IARD ; qu'en retenant au contraire, pour statuer comme elle l'a fait, qu'il s'agissait « d'un dommage futur dès lors que l'expert fait état uniquement d'un risque d'inondation et d'un risque de demande de démolition et de réfection de la part des pouvoirs publics », et que « le dommage ne s'ét(ait) pas produit dans le délai d'épreuve de dix ans », la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1792 du code civil. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel, qui a relevé que la SCI ne démontrait pas avoir subi des inondations avant l'expiration du délai d'épreuve ni fait l'objet d'une injonction de l'administration aux fins de démolition ou de mise en conformité, a pu en déduire que le risque d'inondation mentionné au rapport d'expertise judiciaire ne constituait pas un dommage relevant de la garantie décennale.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le premier moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

9. La société Atlantic design construction France fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la SCI une certaine somme au titre des pénalités de retard, alors « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, l'exposante soutenait dans ses conclusions d'appel qu'elle n'avait pas commis de faute à l'origine du retard des travaux et que, à l'opposé, le retard avait notamment été provoqué par le comportement du maître de l'ouvrage qui n'avait pas procédé au règlement « de l'acompte demandé par l'entreprise Feugas » et avait ainsi retardé de trois semaines le début du chantier, ce qu'elle offrait au demeurant de prouver en visant les courriers figurant en annexes 2-13 et 2-14 du rapport d'expertise produit aux débats ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des conclusions de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

10. La cour d'appel a relevé que la société Atlantic design construction France avait commis des manquements en n'avertissant pas au fur et à mesure le maître de l'ouvrage que le chantier prenait du retard pour des motifs qui seraient légitimes et en n'établissant pas des documents probants de nature à expliciter les événements responsables des retards.

11. Elle en a déduit, répondant en les écartant aux conclusions prétendument délaissées, qu'au regard des manquements du maître d'oeuvre dans le suivi du chantier, la demande formée à son encontre par le maître de l'ouvrage au titre des pénalités de retard devait être accueillie.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

13.La société Atlantic design construction France fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Serv'auto une certaine somme au titre de la perte d'exploitation subie du 1er février au 1er avril 2020, alors « que le tiers à un contrat ne peut se prévaloir d'un manquement contractuel, sur le fondement de la responsabilité extra-contractuelle, qu'à la condition d'établir que ce manquement est la cause du dommage dont il sollicite la réparation ; qu'en l'espèce, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a estimé que la société Atlantic design construction France, maître d'oeuvre, avait commis une faute à l'égard du maître de l'ouvrage pour ne pas avoir mentionné sur les comptes rendus de chantier les retards pris, pour ne l'avoir pas averti des retards imputables aux différents intervenants sur le chantier et pour n'avoir pas établi « des documents probants de nature a expliciter les événements responsables des retards » ; que la société Atlantic design construction France faisait valoir dans ses conclusions d'appel que les fautes qui lui étaient reprochées était sans causalité avec la survenance du retard lui-même ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement que les manquements du maître d'oeuvre a l'égard du maître de l'ouvrage avaient causé un préjudice d'exploitation a la société Serv'auto, tiers au contrat, « en raison du retard de la réception des travaux et par suite de la mise a disposition de l'immeuble pour qu'elle puisse l'exploiter », sans caractériser en quoi les manquements imputés au maître d'oeuvre, consistant, non pas à être à l'origine du retard pris par le chantier mais uniquement à n'avoir pas alerté le maître d'ouvrage quant à ce retard et de n'avoir pas mentionné dans des documents à quelles entreprises ce retard pouvait être imputé, avait un lien causal avec le préjudice d'exploitation invoqué par la société Serv'auto, tiers au contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1382 du code civil, dans leur version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

14. Ayant retenu que les manquements du maître d'oeuvre dans le suivi du chantier justifiait sa condamnation à des pénalités de retard au bénéfice du maître de l'ouvrage, la cour d'appel en a déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que, ce manquement contractuel ayant causé à la société Serv'auto un préjudice résultant du retard de la réception et, par suite, de la mise à disposition de l'immeuble aux fins d'exploitation, celle-ci était fondée à rechercher la responsabilité quasi-délictuelle du maître d'oeuvre aux fins d'obtenir réparation de son préjudice d'exploitation.

15. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

Sur le troisième moyen du pourvoi incident, en ce qu'il porte sur le rejet des demandes de la société Atlantic design construction France contre la société Axa France IARD au titre des garanties facultatives

Enoncé du moyen

16. La société Atlantic design construction France fait grief à l'arrêt de rejeter toutes les demandes formulées à l'encontre de son assureur, alors :

« 1°/ que la responsabilité civile peut être sanctionnée, indépendamment de
l'allocation de dommages-intérêts, par une réparation en nature ; qu'en l'espèce, la société Atlantic design construction France invoquait dans ses conclusions d'appel la responsabilité de la société Axa France IARD qui, par
l'intermédiaire de son agent général, avait manqué à son obligation de conseil en ne lui conseillant pas de souscrire l'extension de garantie qui lui aurait permis d'obtenir une couverture adaptée à son activité, sollicitant à titre de réparation en nature que l'assureur soit tenu de lui délivrer la garantie qu'il aurait dû lui proposer ; qu'en écartant cette demande aux motifs erronés que « l'engagement de (la) responsabilité ne peut donner lieu qu'à l'allocation de dommages-intérêts », la cour d'appel a violé l'article 1384 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et l'article L. 511-1 du code des assurances ;

2°/ qu'une juridiction d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de prétentions nouvelles en cause d'appel ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile ; qu'en l'espèce, en se bornant à affirmer que la demande subsidiaire de la société ADC France de
condamnation de la société Axa France IARD à lui payer le montant des sommes auxquelles celle-ci serait condamnée constituait une demande nouvelle irrecevable comme étant évoquée pour la première fois en appel, sans rechercher, au besoin d'office, si la prétention litigieuse ne relevait pas des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdits articles 564, 565, 566 et 567 du code de procédure civile ;

3°/ que n'est pas nouvelle en cause d'appel la demande de l'assuré visant à obtenir, sur le fondement de la responsabilité civile, la condamnation de son assureur de responsabilité à lui verser le montant des sommes auxquelles il pourrait été tenu envers les tiers lésés, laquelle demande tend aux mêmes fins que celle visant à obtenir la mise en oeuvre de la garantie d'assurance ; qu'en l'espèce, après avoir demandé en première instance la mise en oeuvre de la garantie d'assurance auprès de son assureur, l'exposante avait sollicité en appel sa condamnation à lui verser des dommages-intérêts équivalents aux sommes auxquelles elle pourrait être condamnée envers les tiers lésés, en sorte que cette demande tendait aux mêmes fins que celles formulées en première instance, puisqu'elle visait à reporter sur l'assureur les conséquences financières de sa responsabilité ; qu'en jugeant toutefois que la demande de condamnation de la société AXA France IARD à payer à la société ADC France le montant des sommes auxquelles celle-ci serait condamnée constituait une demande nouvelle et irrecevable en cause d'appel, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

17. Le rejet des demandes de la société Atlantic design construction France contre la société Axa France IARD au titre des garanties facultatives du contrat est soutenu par des motifs distincts de ceux critiqués par le moyen.

18. Le moyen est donc inopérant.

Mais sur le troisième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, du pourvoi incident en ce qu'il porte sur le rejet des demandes de la société Atlantic design construction France contre la société Axa France IARD au titre des garanties obligatoires

Enoncé du moyen

19. La société Atlantic design construction France fait grief à l'arrêt de rejeter toutes les demandes formulées à l'encontre de son assureur, alors :

« 2°/ qu'une juridiction d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de prétentions nouvelles en cause d'appel ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile ; qu'en l'espèce, en se bornant a affirmer que la demande subsidiaire de la société Atlantic Design Construction France de condamnation de la société Axa France IARD à lui payer le montant des sommes auxquelles celle-ci serait condamnée constituait une demande nouvelle irrecevable comme étant évoquée pour la première fois en appel, sans rechercher, au besoin d'office, si la prétention litigieuse ne relevait pas des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdits articles 564, 565, 566 et 567 du code de procédure civile ;

3°/ que n'est pas nouvelle en cause d'appel la demande de l'assuré visant à obtenir, sur le fondement de la responsabilité civile, la condamnation de son assureur de responsabilité à lui verser le montant des sommes auxquelles il pourrait être tenu envers les tiers lésés, laquelle demande tend aux mêmes fins que celle visant a obtenir la mise en oeuvre de la garantie d'assurance ; qu'en l'espèce, après avoir demandé en première instance la mise en oeuvre de la garantie d'assurance auprès de son assureur, l'exposante avait sollicité en appel sa condamnation à lui verser des dommages-intérêts équivalents aux sommes auxquelles elle pourrait être condamnée envers les tiers lésés, en sorte que cette demande tendait aux mêmes fins que celles formulées en première instance, puisqu'elle visait à reporter sur l'assureur les conséquences financières de sa responsabilité ; qu'en jugeant toutefois que la demande de condamnation de la société Axa France IARD à payer à la société ADC France le montant des sommes auxquelles celle-ci serait condamnée constituait une demande nouvelle et irrecevable en cause d'appel, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 564, 565, 566 et 567 du code de procédure civile :

20. Il résulte de ces textes qu'une cour d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité, devant elle, de prétentions nouvelles ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard de toutes les exceptions qu'ils prévoient.

21. Pour rejeter la demande en paiement par l'assureur des dommages-intérêts équivalents aux sommes auxquelles la société Atlantic design construction France pourrait être condamnée envers le maître de l'ouvrage au titre de sa responsabilité décennale, l'arrêt retient que cette demande est présentée pour la première fois en cause d'appel.

22. En se déterminant ainsi, sans rechercher d'office si cette demande ne tendait pas aux mêmes fins que la demande présentée en première instance visant à obtenir la garantie de la société Axa France IARD, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société Atlantic design construction France à l'encontre de son assureur, la société Axa France IARD, au titre des condamnations prononcées à son encontre sur le fondement de la responsabilité décennale, l'arrêt rendu le 9 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-six juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par M. Boyer, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mme Teiller, président empêché, le conseiller rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2025:C300329

Servitude résultant de la présence d'un tirant voisin et empiètement

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 19 juin 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 302 F-D

Pourvoi n° Y 24-10.490




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 JUIN 2025

1°/ Mme [I] [H], domiciliée [Adresse 5], [Localité 1],

2°/ M. [F] [E], domicilié [Adresse 11], [Localité 4] (Russie),

ont formé le pourvoi n° Y 24-10.490 contre l'arrêt rendu le 7 décembre 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige les opposant :

1°/ au syndicat des copropriétaires [Adresse 13], dont le siège est [Adresse 8], [Localité 1], représenté par son syndic la société Cerutti gestion immobilière, ayant son siège [Adresse 10], [Localité 1],

2°/ à Mme [B] [S], épouse [N], domiciliée [Adresse 7], [Localité 3] (Suisse),

3°/ à la société [Adresse 13], société civile immobilière, dont [Adresse 12], [Localité 2],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grall, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [H] et de M. [E], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat du syndicat des copropriétaires [Adresse 13], de la SCP Nicolas Boullez, avocat de Mme [S], après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grall, conseiller rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 décembre 2023), propriétaire d'un bien immobilier cadastré section AS n° [Cadastre 6], qu'elle a acquis de Mme [S], par acte notarié du 6 décembre 2004, Mme [H] a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble dénommé [Adresse 13] (le syndicat des copropriétaires), implanté sur la parcelle voisine cadastrée section AS n° [Cadastre 9], aux fins de le voir condamner, sous astreinte, à supprimer les tirants implantés dans le tréfonds de sa propriété et à remettre les lieux en état.

2. Se prévalant d'un acte sous seing privé du 12 septembre 1995 par lequel Mme [S] avait consenti une servitude relative à l'implantation des tirants à la société civile immobilière [Adresse 13] (la SCI) qui a construit l'immeuble, le syndicat des copropriétaires a assigné Mme [S] et la SCI aux fins de les voir condamner in solidum à le relever et garantir de toutes condamnations et, le cas échéant, à l'indemniser du préjudice financier causé par l'enlèvement de tirants.

3. Les instances ont été jointes.

4. M. [E], qui a acquis le bien immobilier de Mme [H] en cours de procédure, est intervenu volontairement et s'est associé à sa demande.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Mme [H] et M. [E] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires à supprimer les tirants implantés dans le tréfonds de l'immeuble cadastré section AS n° [Cadastre 6] et à remettre les lieux en état, alors :

« 1°/ qu'une servitude n'est opposable à l'acquéreur du fonds censé en être grevé que si elle a été publiée ou si son acte d'acquisition en fait mention ou si encore il avait connaissance de l'existence même de la servitude au moment de l'acquisition ; qu'après avoir constaté que Mme [H] avait agi en 2017 en suppression de tous ouvrages implantés sur son fonds par la copropriété voisine et que celle-ci avait formé un appel en garantie pour le cas où elle serait condamnée à supprimer les tirants, l'arrêt attaqué a jugé opposable à M. [E] la servitude afférente à l'implantation des tirants parce qu'en signant son acte d'acquisition le 18 juillet 2019 Mme [H] l'avait informé de la procédure qu'elle avait précédemment engagée, parce que cet acte mentionnait que dans l'hypothèse où une décision de justice irrévocable consacrerait l'existence de la servitude relative aux tirants ou dans l'hypothèse où Mme [H] reconnaîtrait l'existence de la servitude M. [E] devrait régulariser avec la copropriété voisine une convention portant sur ladite servitude et le cas échéant en faire mention dans l'acte de vente de son bien tout en obligeant ses ayants cause à eux-mêmes en faire mention en cas de revente, parce que le prix de vente avait été fixé par Mme [H] et lui au vu de ces éléments, et parce qu'ainsi M. [E] connaissait l'existence des tirants que la copropriété voisine présentait comme une servitude consentie à son profit ; qu'en statuant par ces motifs, impropres à caractériser la prétendue existence de la servitude au jour de
l'acquisition du bien par M. [E], donc inaptes à caractériser la prétendue
connaissance de la servitude par ce dernier au moment de l'acquisition, M. [E] ayant été, par l'effet de la cession, subrogé dans les droits de Mme [H], venderesse, laquelle contestait l'existence d'une quelconque servitude relative aux tirants, la cour d'appel a violé l'article 691 du code civil ;

2°/ que les juges du fond ont relevé que l'acte du 18 juillet 2019 stipulait que « "l'acquéreur s'engage, dans l'hypothèse où une décision judiciaire passée en force de chose jugée ou le vendeur accepteraient [sic] que la copropriété voisine puisse bénéficier d'une servitude lui permettant de conserver les tirants existants, à consentir toutes servitudes à cet effet exclusif au profit de la copropriété ; ladite convention sera régularisée aux frais exclusifs de l'acquéreur" et également "à retranscrire dans tous les actes ultérieurs et y
obliger ses ayants-droits, la présente clause, plus particulièrement en ce qu'elle concerne la constitution d'une servitude et la réalisation des travaux de confortation" » ; qu'à supposer qu'elle ait estimé que cette stipulation mentionnait l'existence même de la servitude et rendait celle-ci opposable à M. [E], quand ladite stipulation ne faisait que poser l'hypothèse d'une servitude, dont l'existence et l'opposabilité étaient à titre principal contestées, la cour d'appel a violé l'article 691 du code civil. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel a relevé qu'il résultait des mentions de l'acte d'acquisition du bien de Mme [H] par M. [E] que celui-ci avait connaissance de la présence de tirants dans le tréfonds de la propriété achetée, qui étaient présentés par la copropriété voisine comme une servitude consentie à son profit par un précédent propriétaire, qu'il était informé de l'existence de la procédure engagée par Mme [H] pour obtenir l'enlèvement de ces tirants et qu'il s'engageait « dans l'hypothèse où une décision passée en force de chose jugée ou le vendeur accepteraient que la copropriété voisine puisse bénéficier d'une servitude lui permettant de conserver les tirants existants, à consentir toutes servitudes à cet effet exclusif au profit de la copropriété ».

7. Elle en a souverainement déduit que M. [E] avait connaissance, au jour de son acquisition, de la servitude constituée par acte du 12 septembre 1995, et a, à bon droit, retenu que cette servitude lui était opposable.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [H] et M. [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le dix-neuf juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Proust, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mme Teiller, président empêché, le conseiller rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300302