mardi 23 décembre 2025

Les éléments d'équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage relevant de la garantie décennale

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SA



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 11 décembre 2025




Rejet


Mme TEILLER, présidente



Arrêt n° 594 F-D

Pourvoi n° G 23-23.950




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 DÉCEMBRE 2025

1°/ Mme [E] [P], épouse [B],

2°/ M. [Z] [B],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° G 23-23.950 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2023 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société QBE Insurance International Limited, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société QBE Europe SA-NV, société de droit belge, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseillère, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. et Mme [B], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat des sociétés QBE Insuranc International Limited et QBE Europe SA-NV, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2025 où étaient présents Mme Teiller, présidente, Mme Foucher-Gros, conseillère rapporteure, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffière de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des présidente et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 22 juin 2023), M. et Mme [B] ont confié à la société Actéco énergies nouvelles (l'entrepreneur), désormais en liquidation judiciaire, assurée en responsabilité décennale auprès de la société QBE Insurance Europe Limited, l'installation d'une centrale d'énergie solaire dans leur maison d'habitation.

2. Se plaignant de dysfonctionnements de celle-ci, M. et Mme [B] ont, après expertise, assigné la société QBE Insurance Europe Limited, aux droits de laquelle viennent les sociétés QBE Insurance International Limited et QBE Europe SA-NV, en paiement de diverses sommes sur le fondement de la garantie décennale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. et Mme [B] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes en paiement à l'encontre de la société QBE Insurance Europe Limited, alors :

« 1°/ que les exposants avaient produit aux débats un rapport d'expertise privé établi par le cabinet AEB expertise, le 4 décembre 2014, en présence de M. [U], gérant de la société Actéco, qui avait constaté le « dysfonctionnement de l'installation de production électrique » ainsi que la proposition du gérant de cette société « de réaliser un devis de remise en conformité à une participation pécuniaire à celui-ci (?) ; qu'en énonçant qu'elle partageait « l'analyse du jugement déféré, dont elle adopte expressément les motifs, qui a constaté les lacunes du rapport d'expertise judiciaire et a retenu que les demandeurs ne rapportaient pas la preuve qui leur incombe de l'existence de dysfonctionnements précis de l'installation », sans procéder à aucune analyse même sommaire de ce rapport d'expertise privé, dont les constatations étaient pourtant corroborées par celles du rapport d'expertise judiciaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que les désordres affectant une installation d'énergie solaire, entraînant une augmentation de la consommation d'énergie et un surcoût financier, rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ; qu'en énonçant, par motifs expressément adoptés des premiers juges, que les exposants ne rapportent pas « la preuve que le groupe électrogène serait en voie de dysfonctionnement à court ou moyen terme, la simple surconsommation ne pouvant être considérée comme une impropriété à destination de l'ouvrage dans son ensemble » et, par motifs propres, qu'il n'est pas établi que « la production d'électricité par le groupe électrogène serait perturbée suite aux travaux réalisés », cependant que les dysfonctionnements de la centrale de production d'énergie solaire avaient pour conséquence le fonctionnement permanent du groupe électrogène pour pallier les demandes en électricité engendrant un surcoût financier, la cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil ;

3°/ qu'en énonçant que « les propriétaires de cette maison se sont toujours servis du groupe électrogène comme unique source d'énergie électrique pour jouir d'une maison que M. et Mme [B] ont achetée en sachant qu'elle n'était pas reliée au réseau électrique public et qu'elle leur imposerait nécessairement un usage parcimonieux de l'énergie électrique », la cour d'appel a méconnu l'économie du contrat conclu entre les exposants et la société Actéco énergies nouvelles, lequel avait pour objet l'installation de panneaux photovoltaïques en vue d'une réduction des coûts d'énergie ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

5. Il est jugé que, si les éléments d'équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun (3e Civ, 21 mars 2024, pourvoi n° 22-18.694, publié).

6. La cour d'appel ayant retenu que la centrale d'énergie solaire installée dans la maison de M. et Mme [B] constituait un élément d'équipement adjoint à l'ouvrage existant, les désordres dénoncés ne pouvaient relever de la garantie décennale.

7. Par ce moyen de pur droit, suggéré par la défense, et substitué aux motifs critiqués, dans les conditions prévues par l'article 620, alinéa 1er, du code de procédure civile, l'arrêt, qui rejette les demandes de M. et Mme [B], fondées sur les dispositions de l'article 1792 du code civil, se trouve légalement justifié.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le onze décembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300594

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