Lu dans la lettre de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation :
Le risque sanitaire encouru par les occupants d’un immeuble peut, par sa gravité, caractériser l'impropriété de l'ouvrage à sa destination
Dans l’affaire commentée, un syndicat de copropriétaires se plaignait, après réception de l’ouvrage, d’un défaut du système de puisage de l’eau chaude sanitaire, l’eau arrivant dans les logements en un temps anormalement long.
Il a assigné les vendeurs en l’état futur d’achèvement et les locateurs d’ouvrage, aux fins d’indemnisation, sur le fondement de la garantie décennale.
Les expertises judiciaires ont révélé un défaut de conformité aux normes sanitaires tenant à la longueur des tuyauteries d’eau chaude sanitaire entre les gaines palières et les points de puisage, qui augmentait la quantité d’eau contenue dans ces tuyauteries et favorisait le risque de développement de légionelles, entraînant un risque de légionellose pour les habitants de l’immeuble.
Pour autant, aucun cas de cette maladie ne s’était déclaré parmi les habitants de l’immeuble, durant le délai d’épreuve de la garantie décennale.
Ce risque sanitaire dû à un défaut de conformité aux normes sanitaires rend-il impropre l’ouvrage à sa destination, alors qu’il ne s’est pas réalisé dans le délai décennal ?
C’est la question à laquelle la Cour de cassation a répondu positivement dans son arrêt du 14 septembre 2023.
A l’instar de précédentes décisions relatives au défaut de conformité aux règles parasismiques (3e Civ., 7 oct. 2009, n° 08-17.620, Bull. N° 212 ; 3e Civ., 11 mai 2011, n° 10-11.713, Bull. III, n°70 ; 3e Civ., 19 sept. 2019, n° 18-16.986) ou aux règlements de sécurité exposant l’ouvrage à un risque d’incendie (3e Civ., 30 juin 1998, n° 96-20.789) et dans le prolongement de deux arrêts rendus en matière de risque sanitaire (3e Civ., 17 sept. 2020, n° 19-13.314 ; 3e Civ., 11 mai 2022, n° 21-15.608, publié), la Cour de cassation réaffirme que le risque sanitaire encouru par les occupants d'un ouvrage peut, par sa gravité, caractériser à lui seul l'impropriété de l'ouvrage à sa destination, même s'il ne s'est pas réalisé dans le délai d'épreuve.
Dès lors, la cour d’appel justifie sa décision en retenant que le risque de contamination à la légionellose auquel ont été exposés les résidents de l’ouvrage durant le délai d’épreuve, rend celui-ci impropre à sa destination, sans avoir à rechercher si ce risque s’est réalisé dans ce délai.
La Cour de cassation entend ainsi, comme en matière de normes parasismiques ou de sécurité incendie, assurer la sécurité de tout un chacun, cette fois sanitaire.
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