mardi 23 mai 2023

Deux actions ayant une cause distincte tendant à un même but : la seconde est virtuellement comprise dans la première

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 mai 2023




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 329 F-D

Pourvoi n° A 22-15.705





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2023

La société ACP construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 22-15.705 contre l'arrêt rendu le 9 mars 2022 par la cour d'appel de Nancy (5e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Enduiest, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société ACP construction, de la SARL Ortscheidt, avocat de la société Enduiest, après débats en l'audience publique du 21 mars 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 9 mars 2022), la société civile immobilière Espace Majorelle (la SCI) a confié la réalisation d'une opération de construction à la société ACP construction, qui a sous-traité l'exécution des travaux de façades à la société Enduiest.

2. Le 4 mai 2015, la société Enduiest a mis en demeure la société ACP construction de lui payer le solde des travaux selon le mémoire définitif du 10 décembre 2013.

3. A la demande de la SCI et de la société ACP construction, un expert judiciaire a été désigné par ordonnance de référé du 10 février 2016. La société Enduiest est intervenue à l'instance.

4. N'ayant pu obtenir le règlement du solde de ses travaux, la société Enduiest a assigné, par acte du 17 juillet 2019, la société ACP construction en paiement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La société ACP construction fait grief à l'arrêt de rejeter sa fin de non-recevoir tirée de la prescription et toutes ses demandes et de la condamner à payer à la société Enduiest une certaine somme à titre de solde de ses travaux sous-traités, avec intérêts au taux légal à compter du 17 avril 2019, alors « que l'interruption de la prescription résultant d'une demande en justice ne s'étend à une autre demande que lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la société Enduiest est intervenue volontairement à l'instance en référé diligentée notamment par la société ACP construction et son assureur de responsabilité aux fins de désignation d'un expert, afin que lui soit déclarée commune et opposable l'ordonnance à intervenir, et a retenu que cette intervention accessoire avait interrompu le délai de prescription de l'action en paiement des factures de travaux sous-traités ; qu'en statuant ainsi, sans dire en quoi cette intervention de la société Enduiest dans une procédure de référé destinée à la désignation d'un expert dans le cadre d'une opération de construction, poursuivait le même but que son action contractuelle en paiement de ses factures de travaux, de sorte que la seconde aurait été virtuellement comprise dans la première, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2241 du Code civil. »


Réponse de la Cour

6. La cour d'appel a rappelé que, si l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première.

7. La cour d'appel a ensuite relevé, par motifs propres et adoptés, que le sinistre de construction ayant conduit à la désignation d'un expert judiciaire était intervenu après la transmission par la société Enduiest de son mémoire définitif faisant apparaître un solde en sa faveur et que, par conclusions d'intervention volontaire du 2 février 2016 devant le juge des référés, celle-ci avait demandé à rendre commune et opposable l'ordonnance rendue à la demande principale de la SCI et de la société ACP construction visant à la désignation d'un expert.

8. Elle a pu en déduire que l'intervention volontaire de la société Enduiest, liée à l'action en référé, avait interrompu le délai de prescription de son action en paiement des factures de travaux, cette action étant virtuellement comprise dans l'action visant à l'obtention d'une mesure in futurum, de sorte que son action n'était pas prescrite au moment où elle avait délivré son assignation à la société ACP construction.

9. Procédant à la recherche prétendument omise, elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société ACP construction aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société ACP construction et la condamne à payer à la société Enduiest la somme de 3 000 euros ;

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