jeudi 4 avril 2019

Notaire - devoir de conseil

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 13 mars 2019
N° de pourvoi: 18-11.240
Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SARL Cabinet Briard, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat(s)





Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 7 novembre 2017), que, suivant acte reçu le 18 décembre 2006 par M. H... (le notaire), régularisant une promesse de vente du 10 juillet 2006, M. et Mme O... (les acquéreurs) ont acquis un terrain en vue d'y construire une maison d'habitation ; que leur demande de permis de construire a été refusée, à la suite de l'annulation du plan local d'urbanisme du 21 février 2006 modifiant le plan d'occupation des sols du 21 février 2001 ; que, reprochant au notaire d'avoir manqué à son obligation d'information et de conseil sur les risques de renoncer à une condition suspensive d'obtention du permis de construire, les acquéreurs ont assigné celui-ci et la société civile professionnelle de notaires H..., V... (la SCP) en responsabilité et indemnisation ;

Sur le premier moyen, qui est recevable :

Attendu que le notaire et la SCP font grief à l'arrêt de les déclarer responsables in solidum du préjudice subi par M. et Mme O... à raison des conséquences du refus de délivrance du permis de construire et d'ordonner la réouverture des débats sur l'indemnisation de la perte de chance subie par eux, alors, selon le moyen :

1°/ que le notaire n'est pas tenu d'attirer l'attention de son client sur des données qui sont déjà connues, de sorte qu'une partie ne peut demander réparation d'un préjudice résultant d'une évidence qu'elle ne pouvait ignorer à la date de l'acte prétendument dommageable ; qu'en imputant au notaire de ne pas avoir mis en garde les acquéreurs « sur les conséquences de (leur) renonciation (à la condition suspensive d'obtention d'un permis de construire purgé de tout recours) en cas de refus de délivrance du permis de construire », quand les acquéreurs, informés par une clause claire et précise de l'acte de la nécessité d'obtenir un permis de construire, ne pouvaient ignorer que, sans permis de construire, ils seraient dans l'impossibilité de réaliser la construction projetée et qu'en l'absence de condition suspensive, la vente demeurerait valable, la cour d'appel a reproché au notaire de ne pas les avoir mis en garde contre un risque qui relevait de l'évidence, dont ils avaient nécessairement conscience, violant, ce faisant, l'article 1382 dans sa rédaction applicable à la cause ;

2°/ qu'en toute hypothèse, le notaire ne peut être tenu d'adresser une mise en garde aux parties que dans les hypothèses où les intérêts d'une partie sont gravement menacés par un risque particulier ; qu'en reprochant au notaire de ne pas avoir mis en garde les acquéreurs, à qui un certificat d'urbanisme positif avant été adressé contre « les conséquences de (leur) renonciation (à la condition suspensive d'obtention d'un permis de construire purgé de tout recours) en cas de refus de délivrance du permis de construire », sans relever de circonstances qui, nonobstant la délivrance d'un certificat d'urbanisme positif, auraient accru le risque de non-obtention du permis de construire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

Mais attendu qu'ayant relevé que, la promesse de vente stipulant que les acquéreurs renonçaient expressément à toute condition suspensive d'obtention du permis de construire, il appartenait au notaire, eu égard à l'opération immobilière poursuivie par ses clients, de les mettre en garde sur les conséquences de cette renonciation en cas de refus de délivrance du permis de construire, la cour d'appel a pu retenir que le notaire avait commis une faute ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que le notaire et la SCP font grief à l'arrêt de statuer comme il a été dit ;

Attendu que le moyen critique une disposition qui, se bornant à ordonner la réouverture des débats, constitue une mesure d'administration judiciaire, insusceptible de recours ; qu'il est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. H... et la SCP H..., V... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. et Mme O... la somme globale de 3 000 euros ;

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