mardi 12 avril 2022

Voisinage, trouble anormal et obligation de démolir

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 avril 2022




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 300 F-D

Pourvoi n° P 21-12.953




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 AVRIL 2022

M. [X] [M], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 21-12.953 contre l'arrêt rendu le 5 janvier 2021 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [I] [N], épouse [G],

2°/ à M. [P] [G],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [M], de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de M. et Mme [G], après débats en l'audience publique du 1er mars 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 5 janvier 2021), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 18 février 2016, pourvoi n° 15-12.440), M. et Mme [G], propriétaires d'une maison d'habitation, située dans le même lotissement que celle de M. [M], l'ont assigné, sur le fondement des troubles anormaux du voisinage, en démolition et indemnisation.

Examen des moyens

Sur les premier et troisième moyens, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner à la cassation.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

3. M. [M] fait grief à l'arrêt de le condamner à procéder à la destruction sous astreinte de la partie de la plate-forme d'accès débouchant directement sur l'abri à voiture en terrasse implantée à moins de quatre mètres de la limite nord-ouest de sa propriété, de dire que cette démolition implique l'enlèvement des claustras qui surmontent la partie de la plate-forme litigieuse dans le même délai et de le condamner à payer une certaine somme à M. et Mme [G] en réparation de leur trouble de jouissance, alors :

« 1°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que M. [M] soutenait qu'à supposer que cette « plate-forme » cause un trouble anormal de voisinage à M. et Mme [G], ce trouble était imputable à leur décision de ne pas se conformer aux plans dressés par la mairie, d'une part, et qu'ils avaient acquis leur terrain en connaissance de cause, d'autre part ; qu'en ne répondant pas à ce moyen de défense opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que M. [M] a fait valoir que de la plate-forme, seul le remblai constituait l'objet de la demande des époux [G], à l'exception du mur de soutènement, lequel avait été régulièrement érigé ; que la cour d'appel a considéré que la caractérisation d'un trouble anormal de voisinage ressortait de l'existence d'une vue droite, laquelle résultait du remblai, et de la sensation d'étouffement et de la privation d'ensoleillement causées par les claustras ; qu'à supposer qu'en ordonnant la destruction de la plate-forme, elle ait ordonné la destruction du mur de soutènement, elle a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel nul ne peut causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage. »

Réponse de la Cour

4. La cour d'appel a relevé qu'il ressortait des procès-verbaux de constats établis depuis la propriété [G], que, si le terrain présentait une déclivité naturelle, M. [M] avait réalisé, en limite de propriété, une plate-forme avec remblai et mur de soutènement d'une hauteur de trois mètres, rehaussée par des claustras sur lesquels s'enroulait une glycine, et que la plate-forme ainsi créée causait à M. et Mme [G] tout à la fois une vue droite sur leur fonds et une impression d'étouffement, accentuée par la présence des claustras et de la glycine augmentant la hauteur et l'effet de masse, ainsi que la privation d'un ensoleillement.

5. Ayant souverainement retenu que ces troubles, par leur ampleur et leur multiplicité, excédaient les inconvénients que l'on devait normalement supporter de ses voisins, et justifiaient que fût ordonnée la démolition de la partie de la plate-forme litigieuse, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et devant qui M. [M] n'avait pas soutenu que M. et Mme [G] avaient acquis leur terrain en connaissance de cause, a légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [M] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [M] et le condamne à payer à M. et Mme [G] la somme globale de 3 000 euros ;

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