Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 20-10.472
- ECLI:FR:CCASS:2021:C100497
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 30 juin 2021
Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, du 10 septembre 2019Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 30 juin 2021
Cassation partielle
Mme BATUT, président
Arrêt n° 497 F-D
Pourvoi n° W 20-10.472
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 30 JUIN 2021
La société Les Baobabs, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 20-10.472 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2019 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Cassou de Saint-Mathurin, Meynard, Drappeau-Passarini et Maitrehut, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Immaction, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Les Baobabs, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Cassou de Saint-Mathurin, Meynard, Drappeau-Passarini et Maitrehut, après débats en l'audience publique du 18 mai 2021 où étaient présents Mme Batut, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société civile immobilière Les Baobabs du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Immaction.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 10 septembre 2019), suivant acte notarié établi le 22 mai 2008 par M. [G], notaire associé de la société civile professionnelle Pascal Cassou de Saint-Mathurin, Michel Meynard, Corinne Drappeau-Passarini et Caroline Maitrehut, titulaire d'un office notarial à [Localité 1] (la société notariale), la société Immaction (le vendeur) a vendu à la société civile immobilière Les Baobabs (l'acquéreur) un bâtiment à remettre à neuf, s'intégrant dans un lotissement.
3. En l'absence d'exécution des travaux d'aménagement du lotissement et d'obtention par le vendeur d'une autorisation de procéder à la vente des lots avant cette exécution, l'acquéreur n'a pu obtenir de permis de construire à l'issue de la vente et a assigné le vendeur et la société notariale en responsabilité et indemnisation. Son action contre le vendeur a été déclarée irrecevable comme prescrite.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
5. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes dirigées contre la société notariale, alors « que la faute de la victime n'est susceptible d'entraîner une exonération totale de la responsabilité du notaire que si elle est la cause exclusive de son dommage ; qu'en retenant, pour débouter l'acquéreur de son action en responsabilité dirigée contre la société notariale que son inertie délibérée et prolongée à l'égard du vendeur est constitutive d'une faute qui rompt tout lien causal entre les préjudices allégués par l'acquéreur et les fautes imputées au notaire, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir que la faute reprochée à l'acquéreur constituait la cause exclusive de son dommage en violation de l'article 1382 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil :
6. Il résulte de ce texte que le notaire ne peut être exonéré de toute responsabilité pour faute à l'égard de l'acquéreur d'un bien immobilier que si celui-ci a lui même commis une faute qui est la cause exclusive de son dommage.
7. Pour rejeter la demande d'indemnisation de l'acquéreur dirigée contre la société notariale, après avoir constaté que celle-ci n'a ni vérifié que le vendeur était autorisé à vendre en l'absence de réalisation des travaux d'aménagement du lot ni informé l'acquéreur, dont elle connaissait le projet, de la nécessité d'achever ces travaux et des risques inhérents à la vente sans qu'il soit justifié de l'autorisation de vente et qu'elle a manqué à son devoir de conseil, l'arrêt retient que l'acquéreur a attendu le 16 octobre 2009 pour déposer un permis de construire et le 25 novembre 2013 pour assigner le vendeur aux fins de réalisation des travaux de viabilisation après avoir reçu un commandement de payer délivré par la banque, et que son inertie délibérée et prolongée à l'égard du vendeur est constitutive d'une faute qui rompt tout lien causal entre les préjudices allégués et les fautes imputées à la SCP notariale.
8. En se déterminant ainsi, alors qu'elle constatait qu'à la suite de son acquisition et de la faute commise par la société notariale, il s'était trouvé contraint d'agir contre le vendeur pour tenter d'obtenir la réalisation des travaux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société civile immobilière Les Baobabs à l'encontre de la société civile professionnelle Pascal Cassou de Saint Mathurin, Michel Meynard, Corinne Drappeau-Passarini et Caroline Maitrehut, l'arrêt rendu le 10 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société civile professionnelle Pascal Cassou de Saint-Mathurin, Michel Meynard, Corinne Drappeau-Passarini et Caroline Maitrehut aux dépens ;
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 30 juin 2021
Cassation partielle
Mme BATUT, président
Arrêt n° 497 F-D
Pourvoi n° W 20-10.472
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 30 JUIN 2021
La société Les Baobabs, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 20-10.472 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2019 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Cassou de Saint-Mathurin, Meynard, Drappeau-Passarini et Maitrehut, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Immaction, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Les Baobabs, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Cassou de Saint-Mathurin, Meynard, Drappeau-Passarini et Maitrehut, après débats en l'audience publique du 18 mai 2021 où étaient présents Mme Batut, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société civile immobilière Les Baobabs du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Immaction.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 10 septembre 2019), suivant acte notarié établi le 22 mai 2008 par M. [G], notaire associé de la société civile professionnelle Pascal Cassou de Saint-Mathurin, Michel Meynard, Corinne Drappeau-Passarini et Caroline Maitrehut, titulaire d'un office notarial à [Localité 1] (la société notariale), la société Immaction (le vendeur) a vendu à la société civile immobilière Les Baobabs (l'acquéreur) un bâtiment à remettre à neuf, s'intégrant dans un lotissement.
3. En l'absence d'exécution des travaux d'aménagement du lotissement et d'obtention par le vendeur d'une autorisation de procéder à la vente des lots avant cette exécution, l'acquéreur n'a pu obtenir de permis de construire à l'issue de la vente et a assigné le vendeur et la société notariale en responsabilité et indemnisation. Son action contre le vendeur a été déclarée irrecevable comme prescrite.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
5. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes dirigées contre la société notariale, alors « que la faute de la victime n'est susceptible d'entraîner une exonération totale de la responsabilité du notaire que si elle est la cause exclusive de son dommage ; qu'en retenant, pour débouter l'acquéreur de son action en responsabilité dirigée contre la société notariale que son inertie délibérée et prolongée à l'égard du vendeur est constitutive d'une faute qui rompt tout lien causal entre les préjudices allégués par l'acquéreur et les fautes imputées au notaire, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir que la faute reprochée à l'acquéreur constituait la cause exclusive de son dommage en violation de l'article 1382 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil :
6. Il résulte de ce texte que le notaire ne peut être exonéré de toute responsabilité pour faute à l'égard de l'acquéreur d'un bien immobilier que si celui-ci a lui même commis une faute qui est la cause exclusive de son dommage.
7. Pour rejeter la demande d'indemnisation de l'acquéreur dirigée contre la société notariale, après avoir constaté que celle-ci n'a ni vérifié que le vendeur était autorisé à vendre en l'absence de réalisation des travaux d'aménagement du lot ni informé l'acquéreur, dont elle connaissait le projet, de la nécessité d'achever ces travaux et des risques inhérents à la vente sans qu'il soit justifié de l'autorisation de vente et qu'elle a manqué à son devoir de conseil, l'arrêt retient que l'acquéreur a attendu le 16 octobre 2009 pour déposer un permis de construire et le 25 novembre 2013 pour assigner le vendeur aux fins de réalisation des travaux de viabilisation après avoir reçu un commandement de payer délivré par la banque, et que son inertie délibérée et prolongée à l'égard du vendeur est constitutive d'une faute qui rompt tout lien causal entre les préjudices allégués et les fautes imputées à la SCP notariale.
8. En se déterminant ainsi, alors qu'elle constatait qu'à la suite de son acquisition et de la faute commise par la société notariale, il s'était trouvé contraint d'agir contre le vendeur pour tenter d'obtenir la réalisation des travaux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société civile immobilière Les Baobabs à l'encontre de la société civile professionnelle Pascal Cassou de Saint Mathurin, Michel Meynard, Corinne Drappeau-Passarini et Caroline Maitrehut, l'arrêt rendu le 10 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société civile professionnelle Pascal Cassou de Saint-Mathurin, Michel Meynard, Corinne Drappeau-Passarini et Caroline Maitrehut aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société civile professionnelle Pascal Cassou de Saint-Mathurin, Michel Meynard, Corinne Drappeau-Passarini et Caroline Maitrehut et la condamne à payer à la société civile immobilière Les Baobabs la somme de 3 000 euros ;
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