mardi 13 septembre 2022

l'instance en référé prenant fin avec la désignation de l'expert et l'instance au fond n'étant pas la continuation de l'instance en référé, les diligences accomplies à l'occasion des opérations d'expertise ne sont pas susceptibles d'interrompre le délai de péremption

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

I-CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 septembre 2022




Cassation


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 599 F-D

Pourvoi n° R 21-19.004




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 SEPTEMBRE 2022

1°/ le syndicat des copropriétaires Les Résidences de France, dont le siège est, [Localité 5], représenté par son syndic la société Conseil Invest, dont le siège est [Adresse 7],

2°/ M. [C] [G], domicilié [Adresse 4],

3°/ M. [L] [I], domicilié [Adresse 6],

4°/ Mme [E] [F], domiciliée [Adresse 8],

5°/ la société Ceda, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° R 21-19.004 contre deux arrêts rendus les 30 juin 2016 et 4 mai 2021 par la cour d'appel de Montpellier (5e chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Distribution Casino France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à la société AEW immocommercial, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jariel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat du syndicat des copropriétaires Les Résidences de France, de MM. [G] et [I], de Mme [F] et de la société Ceda, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Distribution Casino France et de la société AEW immocommercial, après débats en l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jariel, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Montpellier, 30 juin 2016 et 4 mai 2021), Les Résidences de France, soumises au statut de la copropriété, regroupent quatre immeubles dont un comprend un local commercial exploité par la société Distribution Casino France (la société Casino).

2. Après qu'un bureau d'études a estimé que la dalle intérieure du local commercial risquait de s'effondrer, la société Casino a, le 10 décembre 2007, vendu son lot à la société AEW immocommercial (la société AEW) qui le lui a donné à bail.

3. Le 13 février 2009, la société AEW a assigné le syndicat des copropriétaires Les Résidences de France (le syndicat des copropriétaires) en annulation des résolutions adoptées par l'assemblée générale du 15 décembre 2008 décidant que cette société réaliserait, sous son entière responsabilité, les travaux de renforcement de la dalle.

4. Le 24 février 2009, les sociétés AEW et Casino ont assigné le syndicat des copropriétaires en expertise, laquelle a été ordonnée en référé le 27 février suivant.

5. Par une ordonnance du 18 juin 2009, rendue en référé, la société Casino a été autorisée à réaliser, pour le compte de qui il appartiendra, des travaux sur la structure porteuse de la dalle.

6. Dans l'instance au fond, la société AEW a sollicité la condamnation du syndicat des copropriétaires à l'indemniser du montant des travaux et des préjudices subis. Sont intervenus volontairement, d'une part, la société Casino, d'autre part, MM. [G] et [I], Mme [F] ainsi que la société civile immobilière CEDA, copropriétaires.

7. Le 18 juillet 2014, le syndicat des copropriétaires a sollicité que soit constatée la péremption de cette instance, au motif qu'aucune diligence procédurale n'avait été effectuée pendant plus de deux ans.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

8. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt du 30 juin 2016 de rejeter sa demande de constatation de la péremption de l'instance, alors « que l'instance en référé prenant fin avec la désignation de l'expert et l'instance au fond n'étant pas la continuation de l'instance en référé, les diligences accomplies à l'occasion des opérations d'expertise, dès lors qu'elles ne font pas partie de l'instance en référé qui a pris fin avant le début de ces opérations, ni de l'instance au fond, ne sont pas susceptibles d'interrompre un quelconque délai de péremption, spécialement pas celui de l'instance au fond ; qu'en décidant que les diligences accomplies à l'occasion des opérations de l'expertise, postérieurement à la fin de l'instance en référé à l'issue de quoi elles avaient été ordonnées, auraient interrompu le délai de péremption de l'instance au fond, la Cour a violé l'article 386 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 386 du code de procédure civile :

9. Il résulte de ce texte que l'instance en référé prenant fin avec la désignation de l'expert et l'instance au fond n'étant pas la continuation de l'instance en référé, les diligences accomplies à l'occasion des opérations d'expertise, dès lors qu'elles ne font pas partie de l'instance au fond, ne sont pas susceptibles d'interrompre le délai de péremption.

10. Pour rejeter la demande de constatation de la péremption d'instance, l'arrêt retient que l'instance en référé peut être susceptible d'interrompre le cours du délai de péremption de l'instance au fond s'il est établi un lien de dépendance direct et nécessaire entre les deux instances.

11. Il ajoute que les résolutions de l'assemblée générale contestées au fond tendent à mettre à la charge de la société AEW les travaux de renforcement de la structure porteuse de la dalle, ce que conteste cette société qui estime que la charge en revient au syndicat des copropriétaires, et que l'expertise ordonnée le 27 février 2009 a précisément pour objet de déterminer l'origine des dommages éventuellement constatés, en particulier si ces désordres ont pour origine des surcharges, ainsi que la norme applicable au moment de la construction d'origine, éléments influençant directement et nécessairement la question de la charge du coût des travaux posée devant le juge du fond à l'occasion de l'examen des résolutions en cause.

12. Il en déduit que doivent être considérés comme constituant autant d'actes interruptifs de péremption d'instance le règlement d'une consignation complémentaire intervenu le 30 juin 2010, marquant ainsi manifestement la volonté de la partie qui a procédé à cette consignation de poursuivre l'instance, ainsi que les nombreux dires adressés à l'expert au cours des années 2009, 2010, 2011 et 2012 marquant également autant de diligences interruptives.

13. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

14. Etant indivisible, la péremption éteint l'instance, lorsqu'elle est demandée par une des parties, au profit de toutes les autres.

15. Dès lors, la cassation de l'arrêt du 30 juin 2016 entraîne, par voie de conséquence, celle de l'arrêt du 4 mai 2021, qui en est la suite, à l'égard de toutes les parties.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, les arrêts rendus les 30 juin 2016 et 4 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne les sociétés Distribution Casino France et AEW immocommercial aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Distribution Casino France et AEW immocommercial et les condamne in solidum à payer au syndicat des copropriétaires Les Résidences de France ainsi qu'à MM. [G] et [I], Mme [F] et la société civile immobilière Ceda la somme globale de 3 000 euros ;

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