jeudi 22 septembre 2022

Péremption : la circonstance que le conseiller de la mise en état n'avait pas fixé les dates de clôture de l'instruction et de plaidoiries ne privait pas les parties de la possibilité de demander la fixation de l'affaire

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD




COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 septembre 2022




Cassation sans renvoi


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 843 F-D

Pourvoi n° H 21-12.970




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 SEPTEMBRE 2022

La société Distribution de menuiserie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 21-12.970 contre les arrêts rendus les 22 mai 2020 et 7 janvier 2021 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Euro Immobilia promotion, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Distribution de menuiserie, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la société Euro Immobilia promotion, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Montpellier, 22 mai 2020 et 7 janvier 2021), la société Euro immobilia promotion a relevé appel le 9 juin 2016 d'un jugement du tribunal de commerce qui l'a notamment condamnée au paiement de plusieurs sommes au profit de la société Distribution de menuiserie.

2. Un conseiller de la mise en état, par ordonnance du 10 décembre 2019, a rejeté l'incident de péremption de l'instance présenté par la société Distribution de menuiserie, laquelle l'a déférée à la cour d'appel.

3. Par arrêt du 22 mai 2020, la cour d'appel a confirmé l'ordonnance et par arrêt du 7 janvier 2021, la cour d'appel a statué au fond.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La société Distribution de menuiserie fait grief à l'arrêt du 22 mai 2020 de confirmer l'ordonnance qui lui était déférée en ce qu'elle avait rejeté sa demande tendant à voir constater la péremption de l'instance alors « qu' en l'absence de fixation de l'affaire par le conseiller de la mise en état, le défaut de diligence accomplie par les parties dans un délai de deux ans à compter de la communication de leurs dernières écritures entraîne la péremption de l'instance ; qu'en retenant, pour écarter la péremption de l'instance, qu'après la communication de leurs dernières écritures d'appel, le 7 novembre 2016, les parties n'avaient plus qu'à attendre la fixation de l'affaire par le conseiller de la mise en état, le délai de péremption de l'instance étant suspendu jusqu'à la date des plaidoiries, quand en l'absence de fixation des dates de clôture et de plaidoirie par le conseiller de la mise en état, il revenait aux parties d'accomplir des diligences de nature à faire progresser l'affaire et ainsi interrompre le délai de péremption de l‘instance, la cour d'appel a violé les articles 2 et 386 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 2, 386 et 912 du code de procédure civile :

5. Aux termes du premier de ces textes, les parties conduisent l'instance sous les charges qui leur incombent. Il leur appartient d'accomplir les actes de la procédure dans les formes et délais requis.

6. Selon le deuxième de ces textes, l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.

7. Selon le troisième, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, le conseiller de la mise en état examine l'affaire dans les quinze jours suivant l'expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces. Il fixe la date de la clôture et celle des plaidoiries. Toutefois, si l'affaire nécessite de nouveaux échanges de conclusions, il en fixe le calendrier, après avoir recueilli l'avis des avocats.

8. Pour confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état et rejeter l'incident de péremption, l'arrêt retient notamment qu'il résulte de l'article 912 que les parties n'ont plus à accomplir de diligences de nature à faire progresser l'instance après l'expiration des délais pour conclure et qu'en l'espèce, après la communication des dernières écritures de l'intimée le 7 novembre 2016 , le conseiller de la mise en état n'avait toujours pas fixé les dates de clôture et de plaidoirie ni fixé un calendrier de procédure aux parties alors que plus de deux ans s'étaient écoulés depuis l'expiration du délai de 15 jours.

9. Il en déduit que c'est à juste titre que le conseiller de la mise en état, motifs pris de l'application des dispositions de l'article 912 du code de procédure civile , a rejeté l'incident de péremption de l'instance et dit que le délai de péremption était suspendu depuis le 22 novembre 2016 à minuit ( 15 jours après la remise au greffe des conclusions d'intimé ) et le resterait, sauf radiation ou retrait du rôle, jusqu'à la date des plaidoiries.

10. En statuant ainsi, alors que la circonstance que le conseiller de la mise en état n'avait pas fixé les dates de clôture de l'instruction et de plaidoiries ne privait pas les parties de la possibilité de demander la fixation de l'affaire et qu'il leur appartenait de conduire la procédure et de veiller à ce que la péremption ne soit pas acquise, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt du 22 mai 2020 entraîne, par voie de conséquence, celle de l'arrêt du 7 janvier 2021 qui en est la suite.

12. Il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2 , du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile, invoqués par le demandeur au pourvoi.

13. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue sur le fond.

14. Aucune diligence de nature à faire progresser l'affaire n'ayant été accomplie par les parties après la communication de leurs dernières écritures d'appel, le 7 novembre 2016, il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 5, 6 et 9 qu'il y a lieu de constater la péremption de l'instance.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, les arrêts rendus les 22 mai 2020 et 7 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Constate la péremption de l'instance ;

Condamne la société Euro Immobilia promotion aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Montpellier ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Euro Immobilia promotion et la condamne à payer à la société Distribution de menuiserie la somme de 3 000 euros ;

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