Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mardi 27 janvier 2015
N° de pourvoi: 13-23.948
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Terrier (président), président
Me Foussard, SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 14 mai 2013), que M. et Mme X... ont conclu un contrat de construction de maison individuelle avec la société CMAGIC, depuis en liquidation judiciaire, la garantie de livraison prévue par l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation ayant été fournie par la Caisse de garantie immobilière du bâtiment (la société CGI BAT) ; que se plaignant de malfaçons et après abandon du chantier et mise en liquidation des biens de l'entrepreneur, les maîtres de l'ouvrage ont, après expertise, assigné la société CMAGIC et la société CGI BAT en réparation de leur préjudice ; que la société CGI BAT a été condamnée à verser à M. et Mme X... une provision de 117 000 euros par ordonnance du juge de la mise en état du 21 mai 2010 ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident :
Attendu que la société CGI BAT fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. et Mme X... une somme correspondant à l'indexation de celle de 146 303,25 euros entre la date de cessation des travaux du 18 juillet 2008 et le 30 septembre 2011 et de la somme de 86 565,65 euros au titre des pénalités de retard calculée du 1er juillet 2007 au 30 novembre 2011, alors, selon le moyen :
1°/ que les époux X... ayant choisi de demander que la société CGI BAT acquitte entre leurs mains une provision de 117 000 euros (acquittée le 21 juin 2010) leur permettant, le solde disponible étant de 59 963,96 euros, d'acquitter les travaux évalués à 146 303,25 euros, et ce pour prendre eux-mêmes en main la réalisation des travaux de reprise et d'achèvement, la CGI BAT était bien fondée à demander que sa garantie, s'agissant des pénalités de regard, soit limitée au 1er octobre 2010 sans pouvoir être prorogée jusqu'au 30 novembre 2011 ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 231-6, L. 231-2 et R. 231-14 du code de la construction et de l'habitation ;
2°/ que, sachant que la société CGI BAT faisait valoir qu'elle n'était pas garante du maître d'oeuvre choisi par le maître d'ouvrage, sachant que le permis initialement obtenu n'avait suscité aucune observation de la part de l'architecte des bâtiments de France, les juges du fond ne pouvaient statuer comme ils l'ont fait sans s'expliquer sur les circonstances leur permettant de considérer que la provision demandée ayant été acquittée, la période comprise entre le 1er juillet 2008 et le 30 novembre 2011 entrait dans le champ de sa garantie au titre des pénalités de retard ; que de ce point de vue également, l'arrêt est entaché d'un défaut de base légale au regard des articles L. 231-6, L. 231-2 et R. 231-14 du code de la construction et de l'habitation ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les maîtres de l'ouvrage avaient décidé de procéder par eux-mêmes aux travaux d'achèvement en raison de la défaillance du garant qui avait proposé pour la reprise des malfaçons de la charpente une solution insuffisante rejetée par l'expert judiciaire et qui n'avait pris aucune initiative pour faire achever les travaux après le dépôt du rapport de ce dernier, et retenu que le retard à la suite de réserves émises par l'architecte des bâtiments de France ayant conduit à la reprise de l'ensemble des travaux comportant des structures de bois apparent n'était pas imputable aux maîtres de l'ouvrage, la cour d'appel a pu accueillir la demande en paiement des pénalités jusqu'au 30 novembre 2011, date de la livraison de l'ouvrage ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche, et le second moyen du pourvoi principal, réunis :
Vu l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 231-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu que pour condamner la société CGI BAT à payer à M. et Mme X... la somme de 19 669 euros au titre de l'augmentation du retard de livraison et fixer à celle de 71 371 euros le montant de la créance de dommages-intérêts de M. et Mme X... au passif de la société CMAGIC au titre du retard de livraison, l'arrêt retient que les indemnités de retard prévues au contrat ne peuvent être cumulées avec les dommages-intérêts dus par le constructeur ou par le garant au titre de sa responsabilité personnelle que pour autant que le préjudice subi réellement en dépasse le montant, et que ces indemnités doivent être déduites du préjudice réel ;
Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que le préjudice était constitué de frais de location, frais de déplacement, frais avancés en pure perte, frais bancaires, frais de garde-meubles, préjudice de jouissance et préjudice moral et perte de crédit d'impôts, sans préciser en quoi ces chefs de préjudice étaient réparés par les pénalités de retard, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. et Mme X... en paiement de la somme résultant de l'indexation des travaux de finition projetés à hauteur de 110 281,88 euros entre le mois de juillet 2007 et la date de livraison de l'ouvrage, l'arrêt retient que le préjudice de ce chef n'est pas imputable au garant ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que le retard de livraison imputable au garant était de dix-huit mois jusqu'au 21 juin 2010, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen du pourvoi incident :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation prononcée sur les moyens du pourvoi principal entraîne la cassation par voie de conséquence des dispositions qui sont critiquées par ce moyen ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite à 19 669 euros le montant de la condamnation de la société CGI BAT envers M. et Mme X... au titre de l'augmentation du retard de livraison, rejette la demande de M. et Mme X... en paiement d'une somme représentant l'indexation du coût des travaux de finition projetés à hauteur de 110 281,88 euros et fixe à la somme de 71 371 euros le montant de la créance de dommages-intérêts de M. et Mme X... au passif de la société CMAGIC au titre du retard de livraison, l'arrêt rendu le 14 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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mercredi 4 février 2015
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