mardi 5 juin 2018

La DDE chargée d'une mission "AMT" est un constructeur tenu de la responsabilité décennale

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 24 mai 2018
N° de pourvoi: 17-17.261
Non publié au bulletin Rejet

M. Chauvin (président), président
SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er février 2017), que le Syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) a décidé de réaliser une station d'épuration et a confié les études d'avant-projet sommaire (APS) à la direction départementale de l'équipement (la DDE) ; que, sur la base de l'APS, le SIVOM a eu recours à un appel d'offres remporté par la Compagnie des eaux et de l'ozone (la CEO), laquelle s'est vu confier le programme général de la réalisation de cette station avec octroi de l'exploitation de l'ouvrage pour une durée de trente ans ; que la CEO, devenue concessionnaire de la station, a sollicité la DDE pour une mission de maîtrise d'oeuvre correspondant à l'assistance aux marchés de travaux (AMT) ; que la société Ominum de traitement et de valorisation (la société OTV) a été chargée d'une mission de définition des ouvrages de la partie process et de la réalisation des équipements ; que la réception des travaux confiés à la société OTV a eu lieu, sans réserves, le 22 mai 1995, avec effet au 1er janvier 1995 ; que, des désordres consistant en d'importantes corrosions des éléments de la charpente métallique étant apparus, la CEO a assigné l'agent judiciaire de l'Etat en paiement de sommes ; que l'Etat a appelé en garantie la société OTV, qui avait réalisé les travaux concernant ces ouvrages métalliques ;

Attendu que l'agent judiciaire de l'Etat fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de la CEO ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la DDE, ayant été chargée d'une mission AMT, était investie de la qualité de constructeur au sens de l'article 1792 du code civil, que la possibilité pour la CEO d'accéder en amont de la station aux conduits d'acheminement des effluents pour apporter un traitement réduisant le phénomène de développement des sulfures généré par le passage des effluents en conduits anaérobie, n'était pas discutée, mais que cela relevait du traitement d'une conséquence de la très grande variabilité des effluents à l'origine du litige non suffisamment prise en compte dans le programme de l'opération, que le traitement des eaux n'était prévu dans le cahier des garanties d'OTV, constructeur choisi avec l'assistance de la DDE, que par deux réactifs, le chlorure ferrique et le polymère, que la CEO avait mis en oeuvre, et que la chaux n'apparaissait avec le polymère, dans ce cahier, que pour le traitement des boues, que si la DDE soutenait que trois réactifs auraient dû être utilisés, elle ne l'avait pas rappelé dans le cadre de sa mission d'AMT, à tout le moins au titre des éléments contenus dans l'APS qu'elle avait établi, alors qu'il s'agissait d'un point crucial, la cour d'appel qui, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, ni de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que les manquements commis par la DDE avaient privé l'exploitante d'une connaissance réelle des données relatives aux effluents et qu'elle n'avait pas alertée la CEO, comme elle aurait dû le faire, du risque d'exploitation encouru par suite de la connaissance insuffisante de la nature de ces effluents, dont la très grande variabilité avait été identifiée, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'Etat aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

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