Note Amrani-Mekki, Procédures 2021-3, p. 9
Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 19-20.721
- ECLI:FR:CCASS:2021:C200052
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation sans renvoi
Audience publique du jeudi 14 janvier 2021
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 12 février 2019Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 janvier 2021
Cassation sans renvoi
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 52 F-P+I
Pourvoi n° R 19-20.721
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 JANVIER 2021
1°/ M. R... C...,
2°/ Mme S... Q..., épouse C...,
domiciliés [...] ,
ont formé le pourvoi n° R 19-20.721 contre l'arrêt rendu le 12 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige les opposant à Mme L... P..., veuve N..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. et Mme C..., de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de Mme P..., veuve N..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 25 novembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 février 2019), M. et Mme C... ont relevé appel du jugement d'un tribunal de grande instance les ayant déboutés des demandes qu'ils formaient contre Mme N... et les ayant condamnés à payer à cette dernière la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.
2. Après que M. et Mme C... ont conclu, le 16 décembre 2013, puis Mme N..., le 17 février 2014, le conseiller de la mise en état a prononcé la radiation de l'affaire en application de l'article 526 du code de procédure civile.
3. Le 15 décembre 2015, M. et Mme C... ont sollicité la remise au rôle de l'affaire, exposant avoir réglé la condamnation prononcée par le premier juge à leur encontre sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. L'affaire a été réinscrite, puis M. et Mme C... ont à nouveau conclu au fond le 15 décembre 2017.
4. Le conseiller de la mise en état a dit l'instance d'appel périmée par une ordonnance du 29 mai 2018, que les appelants ont déféré à la cour d'appel.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. M. et Mme C... font grief à l'arrêt de dire l'instance d'appel périmée, alors « que, lorsqu'une affaire a été radiée en raison de l'inexécution de la décision de première instance, une exécution significative des condamnations mise à la charge de l'appelant, manifestant sans équivoque une volonté d'exécution, constitue une diligence interruptive de péremption ; qu'en considérant que les époux C... n'avaient accompli aucune diligence de nature à faire progresser l'affaire entre le 17 février 2014 et le 17 février 2016, après avoir pourtant relevé qu'ils avaient, en décembre 2015, demandé que l'affaire soit réinscrite en justifiant du règlement d'une somme de 3 500 euros et qu'une fois ce règlement effectué, seule restait due une somme de 83,95 euros au titre des dépens, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 386 et 526 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
6. Mme N... conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que ce moyen, en tant qu'il prétend, pour la première fois devant la Cour de cassation, que le paiement par M. et Mme C... de la somme de 3 500 euros en exécution des causes du jugement de première instance constituait une diligence interruptive du délai de préemption de l'instance d'appel, est irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit.
7. Cependant, le moyen n'est pas nouveau, M. et Mme C... faisant valoir, dans leur requête en déféré, que la lettre sollicitant la réinscription de l'affaire au rôle, en raison du règlement de la somme de 3 500 euros, afin qu'il soit statué sur leurs demandes, constituait bien une diligence de nature à faire progresser l'affaire au sens des dispositions de l'article 386 du code de procédure civile.
8. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 386 et 526 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 :
9. Aux termes du premier de ces textes, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
10. Lorsqu'en application du second de ces textes, l'appel fait l'objet d'une radiation du rôle faute pour l'appelant de justifier avoir exécuté la décision frappée d'appel, tout acte d'exécution significative de cette décision manifeste la volonté non équivoque de l'exécuter et constitue, par conséquent, une diligence interrompant le délai de péremption de l'instance d'appel.
11. Pour confirmer l'ordonnance ayant dit l'instance périmée, l'arrêt retient que, dans le cadre de l'article 526 du code de procédure civile, la seule demande de remise au rôle ne peut faire progresser l'affaire, elle doit être justifiée par l'exécution de la décision de première instance, et que si M. et Mme C... ont réglé en décembre 2015 la condamnation aux frais irrépétibles et sollicité en conséquence le rétablissement de l'affaire, ils n'ont pas réglé les dépens afférents au jugement, ce qu'il leur appartenait de faire d'eux-mêmes dès la signification du jugement, qui en mentionnait le coût.
12. En statuant ainsi, en conditionnant l'interruption du délai de péremption à une exécution intégrale du jugement attaqué, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
13. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
14. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
15. En réglant la somme de 3 500 euros, correspondant à la seule condamnation pécuniaire mise à leur charge, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, qui ne laissait inexécutée que leur condamnation aux dépens, M. et Mme C... ont procédé à une exécution significative des condamnations prononcées à leur encontre par le jugement frappé d'appel.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
INFIRME l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 29 mai 2018 ayant dit l'instance périmée et, statuant à nouveau, dit que le délai de péremption de l'instance d'appel n'était pas expiré à la date de cette ordonnance ;
DIT que l'affaire se poursuivra devant la cour d'appel de Paris ;
DIT que les dépens de l'incident devant le conseiller de la mise en état et du déféré suivront le sort de ceux de l'instance d'appel ;
DIT n'y avoir lieu à statuer sur les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile formées devant le conseiller de la mise en état et la cour d'appel ;
Condamne Mme P..., veuve N..., aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 janvier 2021
Cassation sans renvoi
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 52 F-P+I
Pourvoi n° R 19-20.721
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 JANVIER 2021
1°/ M. R... C...,
2°/ Mme S... Q..., épouse C...,
domiciliés [...] ,
ont formé le pourvoi n° R 19-20.721 contre l'arrêt rendu le 12 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige les opposant à Mme L... P..., veuve N..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. et Mme C..., de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de Mme P..., veuve N..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 25 novembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 février 2019), M. et Mme C... ont relevé appel du jugement d'un tribunal de grande instance les ayant déboutés des demandes qu'ils formaient contre Mme N... et les ayant condamnés à payer à cette dernière la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.
2. Après que M. et Mme C... ont conclu, le 16 décembre 2013, puis Mme N..., le 17 février 2014, le conseiller de la mise en état a prononcé la radiation de l'affaire en application de l'article 526 du code de procédure civile.
3. Le 15 décembre 2015, M. et Mme C... ont sollicité la remise au rôle de l'affaire, exposant avoir réglé la condamnation prononcée par le premier juge à leur encontre sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. L'affaire a été réinscrite, puis M. et Mme C... ont à nouveau conclu au fond le 15 décembre 2017.
4. Le conseiller de la mise en état a dit l'instance d'appel périmée par une ordonnance du 29 mai 2018, que les appelants ont déféré à la cour d'appel.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. M. et Mme C... font grief à l'arrêt de dire l'instance d'appel périmée, alors « que, lorsqu'une affaire a été radiée en raison de l'inexécution de la décision de première instance, une exécution significative des condamnations mise à la charge de l'appelant, manifestant sans équivoque une volonté d'exécution, constitue une diligence interruptive de péremption ; qu'en considérant que les époux C... n'avaient accompli aucune diligence de nature à faire progresser l'affaire entre le 17 février 2014 et le 17 février 2016, après avoir pourtant relevé qu'ils avaient, en décembre 2015, demandé que l'affaire soit réinscrite en justifiant du règlement d'une somme de 3 500 euros et qu'une fois ce règlement effectué, seule restait due une somme de 83,95 euros au titre des dépens, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 386 et 526 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
6. Mme N... conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que ce moyen, en tant qu'il prétend, pour la première fois devant la Cour de cassation, que le paiement par M. et Mme C... de la somme de 3 500 euros en exécution des causes du jugement de première instance constituait une diligence interruptive du délai de préemption de l'instance d'appel, est irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit.
7. Cependant, le moyen n'est pas nouveau, M. et Mme C... faisant valoir, dans leur requête en déféré, que la lettre sollicitant la réinscription de l'affaire au rôle, en raison du règlement de la somme de 3 500 euros, afin qu'il soit statué sur leurs demandes, constituait bien une diligence de nature à faire progresser l'affaire au sens des dispositions de l'article 386 du code de procédure civile.
8. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 386 et 526 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 :
9. Aux termes du premier de ces textes, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
10. Lorsqu'en application du second de ces textes, l'appel fait l'objet d'une radiation du rôle faute pour l'appelant de justifier avoir exécuté la décision frappée d'appel, tout acte d'exécution significative de cette décision manifeste la volonté non équivoque de l'exécuter et constitue, par conséquent, une diligence interrompant le délai de péremption de l'instance d'appel.
11. Pour confirmer l'ordonnance ayant dit l'instance périmée, l'arrêt retient que, dans le cadre de l'article 526 du code de procédure civile, la seule demande de remise au rôle ne peut faire progresser l'affaire, elle doit être justifiée par l'exécution de la décision de première instance, et que si M. et Mme C... ont réglé en décembre 2015 la condamnation aux frais irrépétibles et sollicité en conséquence le rétablissement de l'affaire, ils n'ont pas réglé les dépens afférents au jugement, ce qu'il leur appartenait de faire d'eux-mêmes dès la signification du jugement, qui en mentionnait le coût.
12. En statuant ainsi, en conditionnant l'interruption du délai de péremption à une exécution intégrale du jugement attaqué, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
13. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
14. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
15. En réglant la somme de 3 500 euros, correspondant à la seule condamnation pécuniaire mise à leur charge, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, qui ne laissait inexécutée que leur condamnation aux dépens, M. et Mme C... ont procédé à une exécution significative des condamnations prononcées à leur encontre par le jugement frappé d'appel.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
INFIRME l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 29 mai 2018 ayant dit l'instance périmée et, statuant à nouveau, dit que le délai de péremption de l'instance d'appel n'était pas expiré à la date de cette ordonnance ;
DIT que l'affaire se poursuivra devant la cour d'appel de Paris ;
DIT que les dépens de l'incident devant le conseiller de la mise en état et du déféré suivront le sort de ceux de l'instance d'appel ;
DIT n'y avoir lieu à statuer sur les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile formées devant le conseiller de la mise en état et la cour d'appel ;
Condamne Mme P..., veuve N..., aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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